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12/02/1987 | MONACO | N°25283

Monaco | Tribunal de première instance, 12 février 1987, C. M. c/ Compagnie d'assurance Winterthur et S.A.M. Opus.


Abstract

Accident du travail

Présomption d'imputabilité - Lésions survenues dans un temps voisin de l'accident - Absence de lien de causalité entre l'accident et les troubles postérieurs

Résumé

La présomption d'imputabilité qui bénéficie à la victime d'un accident du travail ne couvre toutefois que les lésions qui se sont manifestées immédiatement après l'accident ou dans un temps très voisin, et ne saurait s'étendre à des manifestations cliniques survenues plusieurs mois plus tard, sans qu'aucun traitement n'ait été entrepris depuis le traumati

sme initial.

A défaut d'établir un lien de causalité entre les troubles anxio-dépressifs ap...

Abstract

Accident du travail

Présomption d'imputabilité - Lésions survenues dans un temps voisin de l'accident - Absence de lien de causalité entre l'accident et les troubles postérieurs

Résumé

La présomption d'imputabilité qui bénéficie à la victime d'un accident du travail ne couvre toutefois que les lésions qui se sont manifestées immédiatement après l'accident ou dans un temps très voisin, et ne saurait s'étendre à des manifestations cliniques survenues plusieurs mois plus tard, sans qu'aucun traitement n'ait été entrepris depuis le traumatisme initial.

A défaut d'établir un lien de causalité entre les troubles anxio-dépressifs apparus en mai 1984 et un choc psychologique prétendument éprouvé le 20 décembre 1983 sur le lieu de travail, la victime ne saurait se prévaloir de la loi sur les accidents du travail.

La survenance imprévue de deux gardes de sécurité et la brusquerie de leurs manières, n'apparaissent pas de nature à caractériser « l'action soudaine et violente d'une cause extérieure » qui soit à l'origine des troubles névrotiques soufferts par la victime.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu qu'M. C. - employé pour le compte de la S.A.M. Opus dont l'assureur-loi est la Compagnie Winterthur - a été victime le 20 décembre 1983 d'un choc psychologique n'ayant fait l'objet d'une déclaration régulière d'accident du travail par son employeur que le 26 octobre 1984 et que la Compagnie Winterthur a alors refusé de prendre en charge ;

Qu'une enquête était alors diligentée les 22 mai et 26 juin 1985 en présence des parties, au vu de laquelle l'assureur-loi persistait toutefois dans son refus de prise en charge aux motifs notamment de ce que le choc psychologique subi par C. ne provenait nullement « de l'action soudaine et violente d'une cause extérieure » et ne pouvait être qualifié d'accident du travail ;

Qu'en cet état le juge chargé des accidents du travail par ordonnance du 2 octobre 1985 renvoyait l'affaire devant le Tribunal de première instance ;

Attendu que suivant exploit en date du 14 août 1986, M. C. assignait la Compagnie Winterthur substituée à la S.A.M. Opus aux fins de s'entendre dire qu'il a bien été victime d'un accident du travail le 20 décembre 1983 alors qu'il était au service de la Société Opus, dont les conséquences pécuniaires devront être prises en charge par la Compagnie Winterthur, et s'entendre désigner tel médecin-expert qu'il appartiendra aux fins de l'examiner et décrire ses séquelles ;

Attendu que la défenderesse expose pour sa part que la victime ne rapporte en l'espèce nullement la preuve dont la charge lui incombe de ce que les conditions exigées tant par la loi que par la jurisprudence sur les accidents du travail se trouvent remplies ; qu'en effet, seule peut recevoir la qualification d'accident du travail une atteinte portée au corps humain provenant de l'action soudaine et violente d'une cause extérieure ; que par ailleurs, et dans la mesure où la matérialité de l'accident du travail serait établie, il appartenait à C. de rapporter la preuve que les troubles névrotiques dont il a prétendu souffrir plusieurs mois après les faits ont constitué une suite normale et directe de cet accident ;

Sur ce,

Attendu que l'affaire présentement soumise à l'examen du tribunal commande notamment de déterminer si les séquelles neurologiques alléguées par C. M. proviennent de l'action soudaine et violente d'une cause extérieure déclenchée au temps et au lieu du travail ou ont au contraire été la conséquence d'une série d'événements à évolution lente auxquels on ne saurait attribuer ni origine, ni date certaine ;

Attendu qu'il résulte à cet égard de l'enquête à laquelle il fut procédé par le juge chargé des accidents du travail, les 22 mai et 26 juin 1985, que C. M., alors en service dans les locaux du « Monte-Carlo Sun » où il procédait à des travaux de nettoyage, a fait l'objet le 20 décembre 1983 d'un double contrôle d'identité effectué d'une part par deux surveillants de l'immeuble, et, d'autre part, par deux fonctionnaires de police ;

Qu'à cet égard, si les circonstances ayant entouré la vérification opérée par les deux gardes de sécurité de l'immeuble ont pu troubler C. - étant observé que celui-ci travaillait à nettoyer des locaux à usage de bureaux quand ces deux personnes, auxquelles il avait préalablement refusé de décliner son identité en leur demandant d'attendre qu'il ait terminé son travail, se sont alors introduites avec leur chien dans ces bureaux pour le contraindre à les suivre - en revanche, le rapide contrôle effectué dans le hall du « Monte-Carlo Sun » par les deux agents de police n'a pu que rassurer pleinement C. M., lequel décrivait même lors de l'enquête l'irritation manifestée par ces deux fonctionnaires de police qui estimaient avoir été dérangés inutilement puisque C. était régulièrement habilité à travailler dans les bureaux où il se trouvait ;

Attendu en conséquence que la seule arrivée imprévue des deux gardes de sécurité et leurs manières un peu brusques, voire insultantes - l'enquête ayant à cet égard permis d'établir qu'aucune violence, même légère, n'avait été perpétrée - n'apparaît pas de nature à caractériser l'action soudaine d'une cause extérieure à l'origine des troubles névrotiques subis par la victime, dont il convient en outre d'observer qu'ils ne se sont pas manifestés aussitôt après l'accident ;

Qu'il est en effet constant que C. M. avait repris tout à fait normalement ses activités professionnelles et n'a ressenti les premiers symptômes anxio-dépressifs qu'au mois de mai 1984, date à laquelle il interrompit alors son travail ;

Attendu à cet égard que la présomption d'imputabilité qui bénéficie à la victime d'un accident du travail ne couvre toutefois que les lésions qui se sont manifestées immédiatement après l'accident, ou dans un temps très voisin, et ne saurait s'étendre à des manifestations cliniques survenues plusieurs mois plus tard, sans qu'aucun traitement intermédiaire n'ait même été entrepris depuis le traumatisme initial, ce qui s'avère être le cas, dès lors qu'aucune pièce médicale n'est produite pour la période comprise entre les mois de décembre 1983 et mai 1984 ;

Que C. M. - à qui incombait alors la charge de cette preuve - devait établir le lien de causalité existant entre les troubles anxio-dépressifs apparus en mai 1984 et le choc psychologique du 20 décembre 1983, lequel n'apparaît pas démontré en l'état des pièces produites, notamment une lettre adressée le 9 novembre 1984 par le Docteur C. au Docteur Z., de laquelle il ressort que C. imputait lui-même sa dépression et son angoisse à une toute autre cause que l'épisode du 20 décembre 1983, en l'occurrence la frayeur provoquée par une perte d'équilibre survenue au 7e étage d'un immeuble alors qu'il lavait des vitres ;

Attendu en conséquence que l'incident du 20 décembre 1983 - en dépit de la déclaration effectuée sous cette qualification par la Société Opus à la Compagnie Winterthur - ne peut être considéré comme étant un accident du travail ouvrant droit pour M. C. au bénéfice des prestations et indemnités prévues par la loi n. 636 du 11 janvier 1958 ;

Que les dépens suivent la succombance ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Déboute C. M. des fins de sa demande ;

Dit et juge que l'incident du 20 décembre 1983 ne peut être considéré comme un accident du travail ouvrant droit pour la victime au bénéfice des prestations et indemnités prévues par la loi n. 636 du 11 janvier 1958 ;

Composition

MM. Landwerlin, vice-prés. ; Truchi, prem. subst. ; MMe Lorenzi et Clérissi, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25283
Date de la décision : 12/02/1987

Analyses

Sécurité au travail ; Protection sociale ; Social - Général


Parties
Demandeurs : C. M.
Défendeurs : Compagnie d'assurance Winterthur et S.A.M. Opus.

Références :

ordonnance du 2 octobre 1985
loi n. 636 du 11 janvier 1958


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1987-02-12;25283 ?

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