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27/11/1986 | MONACO | N°25248

Monaco | Tribunal de première instance, 27 novembre 1986, Sea Trading Monaco c/ Nemo S.P.A.


Abstract

Clause compromissoire

Communicabilité de la procédure au Ministère public - Application de la clause

Résumé

La disposition d'une convention conclue entre une société monégasque et une personne morale de droit italien instituant une procédure obligatoire d'arbitrage pour tout litige né entre elles à l'occasion de l'application de ladite convention constitue une clause compromissoire au sens de l'article 940 alinéa 2 du Code de procédure civile, à laquelle il doit être donné effet en vertu de l'article 11 de la Convention internationale pour l

a reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères faite à New-York le...

Abstract

Clause compromissoire

Communicabilité de la procédure au Ministère public - Application de la clause

Résumé

La disposition d'une convention conclue entre une société monégasque et une personne morale de droit italien instituant une procédure obligatoire d'arbitrage pour tout litige né entre elles à l'occasion de l'application de ladite convention constitue une clause compromissoire au sens de l'article 940 alinéa 2 du Code de procédure civile, à laquelle il doit être donné effet en vertu de l'article 11 de la Convention internationale pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères faite à New-York le 10 juin 1958 et rendue exécutoire à Monaco par l'Ordonnance souveraine n° 7485 du 14 septembre 1982, étant relevé que la communicabilité au Ministère public d'une exception d'incompétence fondée sur une clause d'arbitrage ne saurait faire échec à son application.

Aux termes de l'article 11 susvisé, cette incompétence de caractère ratione materiae peut être soulevée en tout état de cause par la partie qui s'en prévaut sans y avoir renoncé.

Cet arbitrage ne s'avère nullement inapplicable en l'espèce bien qu'il n'existe point de Chambre de commerce internationale à Monaco, dès lors que la détermination du lieu d'arbitrage et du droit applicable à celui-ci procède en l'espèce de la mise en œuvre des règlements usuels de la Chambre de commerce internationale expressément visés par l'article 10 de la Convention.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Considérant les faits suivants :

La société anonyme monégasque Sea Trading Monaco a conclu à la date du 27 juillet 1981 avec la société de droit italien Nemo S.P.A. une convention sous seings privés intitulée « Contrat d'agent distributeur/concessionnaire » (laquelle, versée en photocopie aux débats, devra être soumise, avec le présent jugement, aux formalités de l'enregistrement si son original ne l'a pas été antérieurement) ;

Cette convention prévoit, au bénéfice de la Société Sea Trading Monaco, la distribution exclusive à Monaco et en France des produits de la Société Nemo, celle-ci s'étant, concomitamment, interdit de procéder directement à la vente desdits produits dans ces deux pays ;

En raison d'une notable diminution des commandes par elle reçues pour ces mêmes produits, attribuée à des prix trop élevés pratiqués par la Société Nemo, la Société Sea Trading, postérieurement à l'entrée en vigueur de la convention dont s'agit - fixée au 1er septembre 1981 avec faculté ultérieure de résiliation semestrielle avec préavis, ou à tout moment, sans préavis, pour « juste motif » - ayant tenté divers pourparlers avec sa cocontractante dès la fin de l'année 1982, a estimé, un an plus tard, en en faisant alors part à la Société Nemo, par une lettre recommandée datée du 16 septembre 1983, qu'elle tenait le contrat pour rompu du fait de cette dernière société ;

Par l'exploit susvisé, elle a dès lors fait assigner la Société Nemo aux fins d'obtenir, avec exécution provisoire, outre le prononcé de la résiliation du contrat susvisé, aux torts de la Société Nemo et à la date du 16 décembre 1983, les indemnités suivantes : 101 033 francs par application d'une clause d'indemnisation, en cas de résiliation, figurant à l'article 9 dudit contrat ; 43 200 francs à titre de remboursement des frais de publicité exposés en 1983 ; 100 000 francs de dommages-intérêts pour rupture abusive de ce même contrat sans préavis, et 100 000 francs supplémentaires en réparation du dommage occasionné par la vente directe par la Société Nemo des produits objet de l'exclusivité concédée ;

Ainsi assignée, la Société Nemo a conclu, le 10 janvier 1985, à la nécessité pour son adversaire de communiquer ses pièces, se réservant de conclure au fond après cette communication, puis, le 5 décembre 1985, à l'incompétence du Tribunal sur la base de l'article 10 du contrat invoqué par la Société Sea Trading Monaco à l'appui de ses demandes ;

Cet article est ainsi rédigé :

« Tout différend pouvant survenir entre le fournisseur et l'agent distributeur/concessionnaire à propos de l'application du présent contrat sera soumis à l'arbitrage conformément aux règlements de conciliation et d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale. Le droit applicable sera le droit de l'État où l'agent distributeur/concessionnaire est établi. Le lieu du Tribunal arbitral est régi par le lieu où l'agent distributeur/concessionnaire est établi. - Les arbitres auront à statuer en équité ; la sentence arbitrale sera exécutoire et dispensée d'exequatur. »

La Société Sea Trading Monaco a soutenu que l'exception d'incompétence ainsi soulevée devait être rejetée aux motifs qu'elle ne procéderait pas à proprement parler d'une clause compromissoire mais plutôt d'une clause attributive de compétence s'avérant, en l'espèce, dépourvue de portée puisque, d'une part, le Tribunal arbitral contractuellement prévu devrait aux termes de l'article 10 précité, se trouver situé à Monaco, où il n'existe pas de Chambre de commerce internationale, que d'autre part, ledit article ne précise nullement le mode et désignation des arbitres dont le concours serait sollicité - en sorte que de ces deux chefs la clause dont s'agit serait inapplicable - et qu'enfin tout arbitrage serait présentement à exclure par application de l'article 911 du Code de procédure civile, dès lors que la contestation de l'espèce s'analyse en une exception d'incompétence, cause communicable au Ministère public en vertu de l'article 184-4° dudit code ;

Sur quoi,

Attendu qu'ainsi que l'a soutenu la Société Nemo dans ses dernières conclusions, l'article 10 de la convention datée du 27 juillet 1981, souscrite par les parties actuellement en présence, a contractuellement institué entre elles une procédure obligatoire d'arbitrage à l'occasion de tout litige né entre ces mêmes parties de l'application de ladite convention ;

Attendu que cette disposition constitue une clause compromissoire au sens de l'article 940, deuxième alinéa, du Code de procédure civile, conclue par une société monégasque avec une personne morale de droit italien, à laquelle il doit être présentement donné effet par application de l'article 11 de la Convention pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères faite à New-York le 10 juin 1958 et rendue exécutoire à Monaco par l'Ordonnance souveraine n° 7485 du 14 septembre 1982 (étant ici relevé, en tant que de besoin, que la communicabilité au Ministère public d'une exception d'incompétence fondée sur une clause d'arbitrage ne saurait à l'évidence faire échec à l'application d'une telle clause) ;

Attendu qu'en vertu dudit article 11 qui caractérise un cas d'incompétence ratione materiae pouvant être soulevée en tout état de cause par la partie qui s'en prévaut sans y avoir renoncé, les Sociétés Nemo et Sea Trading Monaco, qui se trouvent présentement séparées par la portée devant être conférée à la convention susvisée dans leurs relations commerciales, doivent être renvoyées à l'arbitrage dont elles ont convenu aux termes de l'article 10 précité, celui-ci ne s'avérant nullement inapplicable en l'occurrence, comme l'a cependant conclu la Société Sea Trading Monaco, dès lors que la détermination du lieu de l'arbitrage et du droit applicable à celui-ci procèderont en l'espèce de la mise en œuvre des règlements usuels de la Chambre de commerce internationale, expressément visés par l'article 10 dont s'agit ;

Et attendu que les dépens du présent jugement doivent être supportés par la Société Sea Trading Monaco qui y succombe ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement et faisant droit à l'exception d'incompétence soulevée sur la base de l'article 10 susvisé,

Renvoie les parties à l'application de la clause d'arbitrage prévue par ledit article ;

Composition

MM. Huertas, prés. ; Truchi, prem. subst. proc. gén. ; MMe Boéri, Lorenzi, av. déf. ; Léandri, av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25248
Date de la décision : 27/11/1986

Analyses

Contrat - Général ; Arbitrage - Général ; International - Général


Parties
Demandeurs : Sea Trading Monaco
Défendeurs : Nemo S.P.A.

Références :

Code de procédure civile
Ordonnance souveraine n° 7485 du 14 septembre 1982
article 911 du Code de procédure civile
article 940 alinéa 2 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1986-11-27;25248 ?

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