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05/12/1985 | MONACO | N°25163

Monaco | Tribunal de première instance, 5 décembre 1985, M. c/ C.


Abstract

Exequatur

Décision française - Exception « Le criminel tient le civil en état » inapplicable - Compensation judiciaire non admise.

Résumé

Une instance correctionnelle pendante en France, ne saurait faire obstacle à une demande d'exequatur d'un arrêt prononcé par une Cour d'appel française fixant la contribution aux charges du mariage, aux motifs que « le criminel tient le civil en l'état », cette règle posée par l'article 3, alinéa 2 du Code de procédure pénale visant l'action publique introduite à Monaco, et l'action civile définie

par l'article 2 dudit code.

L'exclusion de toute révision dans l'examen d'une décision françai...

Abstract

Exequatur

Décision française - Exception « Le criminel tient le civil en état » inapplicable - Compensation judiciaire non admise.

Résumé

Une instance correctionnelle pendante en France, ne saurait faire obstacle à une demande d'exequatur d'un arrêt prononcé par une Cour d'appel française fixant la contribution aux charges du mariage, aux motifs que « le criminel tient le civil en l'état », cette règle posée par l'article 3, alinéa 2 du Code de procédure pénale visant l'action publique introduite à Monaco, et l'action civile définie par l'article 2 dudit code.

L'exclusion de toute révision dans l'examen d'une décision française soumise à exequatur en vertu de la convention franco-monégasque sur l'aide mutuelle judiciaire s'oppose à toute demande de compensation judiciaire.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Considérant les faits suivants :

Le 1er juin 1984 G. M., né le 14 novembre 1924 à Plaisance-du-Touch (Haute-Garonne) a épousé, sous contrat de séparation de biens, M. C. née à Dax (Landes), le 30 avril 1935, actuellement domiciliée à Monaco après avoir demeuré à Menton ;

Au motif qu'elle avait depuis le mois de juillet 1981 cessé de subvenir aux besoins du ménage, bien que disposant de revenus personnels importants, G. M. a fait citer son épouse devant le Tribunal d'instance de Menton en contribution aux charges du mariage sur la base de l'article 214 du Code civil français ;

Avant que ledit Tribunal ne statue, M. C. a, pour sa part, présenté une requête en divorce contre son mari à la date du 22 septembre 1981, sur laquelle une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 22 octobre suivant par le juge aux affaires matrimoniales du Tribunal de grande instance de Nice ;

Cette décision a condamné G. M. à verser une pension alimentaire de 1 500 francs par mois pour l'un des deux enfants du couple dont la garde a été confiée à la mère, et à payer, à celle-ci pour elle-même, une autre pension alimentaire mensuelle de 200 francs ;

Entre temps le Tribunal d'instance de Menton avait rendu le 13 octobre 1981 un jugement exécutoire par provision déboutant M. de sa demande de contribution aux charges du mariage formée contre son épouse, condamnant ce demandeur, outre aux dépens, à payer à celle-ci 3 000 francs de dommages-intérêts pour action vexatoire, et 2 000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code français de procédure civile, et ordonnant avant dire droit sur une demande reconventionnelle présentée par M. C., une expertise sur ressources confiée à Charles Pinci ;

A la date du 5 novembre 1981, G. M. a formé appel de cette décision, tandis que M. C. le faisait assigner en divorce, l'instance de ce chef étant toujours pendante ;

Par un arrêt contradictoire rendu le 20 septembre 1983, la 11e chambre civile de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, infirmant le jugement susvisé du Tribunal d'instance de Menton qui lui était déféré, et statuant à nouveau, a condamné M. C. à payer à G. M. une somme de 7 500 francs à titre de contribution aux charges du mariage durant les mois d'août à octobre 1981 inclusivement, l'a déboutée de sa demande reconventionnelle et l'a condamnée aux dépens de première instance et d'appel ;

Cet arrêt, dûment enregistré à Monaco, le 16 novembre 1984, tout comme le certificat de non pourvoi qui l'accompagne, délivré le 23 mai 1984 par le greffe de la Cour de cassation française, a été, le 17 octobre 1983, signifié à la personne même de M. C. après l'avoir été le 7 octobre précédent à l'avoué de celle-ci ;

Par l'exploit d'assignation susvisé G. M. a fait attraire M. C. devant le Tribunal aux fins d'obtenir l'exequatur dudit arrêt qu'il estime répondre aux conditions prescrites par la convention franco-monégasque d'aide mutuelle judiciaire rendue exécutoire à Monaco par l'ordonnance souveraine n° 106 du 2 décembre 1949.

M. C. s'oppose à cette demande en la considérant sans objet motif pris de ce que, si son mari s'était bien acquitté jusqu'en juin 1984 des pensions mises à sa charge par l'ordonnance de non-conciliation précitée, il avait, en revanche, réduit depuis lors ses versements en les ramenant mensuellement, de sa seule initiative, à la somme totale de 1 040 francs, pour les deux pensions réunies, en sorte qu'elle s'estime en droit de lui réclamer présentement la somme de 24 719,29 francs ;

Elle précise, à cet égard, qu'elle a, le 4 septembre 1985, déposé une plainte au Parquet de Nice pour abandon de famille contre son mari et que le 25 novembre 1985 elle a directement fait citer celui-ci à comparaître par-devant le Tribunal correctionnel de Nice pour l'audience du 3 mars 1986, afin d'obtenir sur la base de l'article 357-2 du Code pénal français, qu'il soit condamné, pour abandon de famille, à lui payer 300 000 francs de dommages-intérêts et 5 000 francs de frais irrépétibles ;

S'appuyant sur les circonstances de droit et de fait ainsi rappelées, M. C. demande en définitive qu'il plaise au Tribunal :

* surseoir à statuer dans l'attente de l'aboutissement de l'instance correctionnelle qu'elle a introduite à Nice à l'encontre de M. laquelle, devrait précise-t-elle « tenir en état » celle civile, présentement engagée,

* constater que M. lui est redevable d'une somme de 24 729,29 francs au titre d'arriérés de pension alimentaire,

* ordonner la compensation des créances réciproques des parties,

* et débouter M. des fins de son assignation susvisée ;

Sur quoi,

Attendu qu'au vu des éléments de procédure ci-dessus rapportés l'arrêt soumis à exequatur, dont la copie versée aux débats présente tous caractères requis d'authenticité, s'avère sans conteste, au regard des lois françaises passé en force de chose jugée, émaner d'une juridiction compétente et procéder d'une instance régulièrement conduite ;

Attendu qu'il satisfait ainsi à l'ensemble des conditions prescrites par l'article 18 de la Convention franco-monégasque précitée, alors par ailleurs que ses dispositions ne contiennent rien de contraire à l'ordre public ;

Qu'il peut, en conséquence, recevoir l'exequatur sollicité ;

Attendu que la règle « le criminel tient le civil en état » posée par l'article 3, alinéa 2 du Code de procédure pénale vise seulement l'action publique introduite à Monaco et l'action civile définie par l'article 2 dudit code ; que l'instance correctionnelle française invoquée est en conséquence sans effet de droit sur la présente instance en exequatur ; qu'il ne peut être dès lors sursis à statuer sur le fondement procédural invoqué ;

Attendu par ailleurs que l'exclusion de toute révision dans l'examen d'une décision judiciaire française soumise à exequatur en vertu de la convention franco-monégasque précitée s'oppose présentement à l'admission de la demande de compensation judiciaire formulée ;

Qu'il doit en définitive être fait droit à la demande d'exequatur ;

Et attendu que M. C. qui succombe dans la présente instance doit en supporter les dépens, lesquels comprendront les frais d'enregistrement des documents judiciaires français versés aux débats ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Reçoit G. M. en sa demande d'exequatur de l'arrêt susvisé rendu le 23 septembre 1983 par la 11e chambre civile de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

L'y disant fondé déclare ledit arrêt exécutoire à Monaco dans toutes ses dispositions ;

Déboute M. C. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Composition

MM. Huertas, prés. ; Truchi, prem. subst. proc. gén. ; MMe Sbarrato, Boeri, Marquilly, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25163
Date de la décision : 05/12/1985

Analyses

Exequatur ; International - Général


Parties
Demandeurs : M.
Défendeurs : C.

Références :

ordonnance souveraine n° 106 du 2 décembre 1949
article 3, alinéa 2 du Code de procédure pénale


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1985-12-05;25163 ?

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