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15/10/1985 | MONACO | N°25136

Monaco | Tribunal de première instance, 15 octobre 1985, Ministère Public c/ R.


Abstract

Escroquerie

Tentative - Confiscation de faux billets

Résumé

La remise faite sciemment de fausses coupures de dollars U.S. en vue d'obtenir en échange d'un établissement de jeux, une somme d'argent, constitue une tentative d'escroquerie dès lors que le commencement d'exécution n'a manqué son effet que par suite des circonstances indépendantes de la volonté de l'auteur, du fait que le changeur ayant détecté la fausseté des billets, n'a rien échangé.

L'article 11 de la Convention de Genève du 20 avril 1929 rendue exécutoire à Monaco le

11 décembre 1931 permet la confiscation des faux billets.

Motifs

Le Tribunal,

Jugeant corre...

Abstract

Escroquerie

Tentative - Confiscation de faux billets

Résumé

La remise faite sciemment de fausses coupures de dollars U.S. en vue d'obtenir en échange d'un établissement de jeux, une somme d'argent, constitue une tentative d'escroquerie dès lors que le commencement d'exécution n'a manqué son effet que par suite des circonstances indépendantes de la volonté de l'auteur, du fait que le changeur ayant détecté la fausseté des billets, n'a rien échangé.

L'article 11 de la Convention de Genève du 20 avril 1929 rendue exécutoire à Monaco le 11 décembre 1931 permet la confiscation des faux billets.

Motifs

Le Tribunal,

Jugeant correctionnellement,

Attendu qu'à l'audience du 8 octobre 1985 C. R. a comparu en personne devant le Tribunal, en état de détention, sous l'effet d'un mandat d'arrêt décerné à son encontre le 5 août 1985, comme prévenu, aux termes d'une ordonnance de M. le Juge d'instruction, en date du 25 septembre 1985 :

«1° de s'être, les 3 et 4 août 1985, en tout cas depuis temps non prescrit, à Monaco, en employant des manœuvres frauduleuses, notamment en utilisant sept fausses coupures de 100 dollars U.S., fait remettre une somme de 5 670 francs et d'avoir ainsi escroqué partie de la fortune de la Société des Bains de Mer ;

2° d'avoir, dans les mêmes circonstances de temps et de lieu, tenté d'escroquer, à l'aide de manœuvres frauduleuses, en l'espèce l'utilisation de 5 fausses coupures de 100 dollars U.S., partie de la fortune de la Société des Bains de Mer, laquelle tentative manifestée par un commencement d'exécution, n'a été suspendue ou n'a manqué son effet que par des circonstances indépendantes de sa volonté » ;

Attendu que s'étant constituée partie civile à la même audience, la « Société des Bains de Mer » (S.B.M.) a réclamé la condamnation du prévenu à lui payer l'équivalent en francs français de la somme de 1 200 dollars U.S. correspondant au montant du préjudice qui serait né pour elle des faits reprochés au prévenu ;

Attendu, sur ce, quant à l'action publique, qu'il ressort de l'instruction et des débats qu'arrivé à Saint-Laurent-du-Var, dans l'après-midi du 3 octobre 1985, au volant d'une automobile de marque Mercedes 280, qu'il avait prise en location à son nom, la veille à Paris et à bord de laquelle avaient voyagé avec lui, outre une femme, les nommés A. C. et H. R. (ce dernier connu dès 1978 pour s'être livré en Allemagne à l'émission de fausse monnaie), C. R., qui a précisé en dernier lieu, ayant sur ce point varié dans ses déclarations, qu'il avait quitté le Liban le 2 août 1985 en avion, en compagnie de ces trois personnes, et qu'H., après avoir, en sa présence, régulièrement obtenu diverses coupures de 100 dollars U.S. d'un établissement bancaire du Liban (ce qui toutefois n'a pas été établi par l'instruction) lui avait, avant de partir, donné sept de ces coupures à titre d'avance sur les gages qu'il devait lui verser en contrepartie du travail de chauffeur qu'il lui demandait, a quitté le 3 août 1985 en fin d'après-midi avec A. C., à bord de la voiture Mercedes susvisée, l'hôtel de Saint-Laurent-du-Var où il était descendu avec ce même A. C., voisin d'un autre hôtel qu'occupait le couple les ayant accompagnés, et est arrivé vers minuit au Casino de Monte-Carlo, qu'il a déclaré bien connaître, porteur d'au moins cinq fausses coupures de 100 dollars U.S. provenant selon lui, de celles que lui avaient remises H. ;

Qu'il s'est alors présenté au grand Change du Casino et, selon les déclarations de l'employé de la S.B.M. qui s'y trouvait de service, a demandé à celui-ci, sans beaucoup lui parler, de lui convertir les cinq coupures : que ledit employé a immédiatement remarqué la fausseté des billets remis, en sorte que faisant patienter R. il a fait, sur le champ appeler le commissaire spécial, afin de lui signaler ce fait ; que toutefois, au bout de trois ou quatre minutes, il s'est aperçu, ainsi qu'il l'a déclaré, que R. avait disparu en lui abandonnant les cinq faux billets ;

Que lors de son interpellation opérée à l'extérieur du Casino peu après 0 heure 30, sur les indications de son signalement fourni par ce même employé, R. s'est borné à déclarer qu'il s'étonnait de l'usage de faux qu'on lui imputait relativement à ces cinq billets car il avait peu avant changé sans problème au Casino deux autres billets de 100 dollars U.S. de même provenance, ajoutant ensuite qu'il était venu à Monaco avec un ami (A. C.), à bord de l'automobile Mercedes garée selon lui à proximité, laquelle toutefois n'a pas alors été découverte ;

Qu'en fait, A. C. est, en définitive, rentré seul vers 4 heures du matin, ce même 3 août 1985 à son hôtel de Saint-Laurent-du-Var, qu'il a quitté précipitamment le jour même vers 11 heures en compagnie d'H., celui-ci et la femme qui l'accompagnait, ayant fait de même dans leur propre hôtel où ils s'étaient pourtant déjà acquittés de leur séjour pour le lendemain ;

Attendu que cet ensemble d'éléments matériels établissent à la conviction du Tribunal que R., qui a déclaré à l'audience que la monnaie américaine était actuellement d'usage courant au Liban, où lui-même demeure et travaille, connaissait la fausseté manifeste des cinq billets de 100 dollars U.S. qu'il remettait au change, tout comme H. duquel il a dit tenir ces billets litigieux ; que R. doit être dès lors déclaré coupable de la tentative d'escroquerie qui lui est reprochée, eu égard, quant à la mesure de la sanction, aux circonstances atténuantes existant en la cause ;

Attendu cependant, qu'il ne résulte pas, par ailleurs, du dossier ni des débats à l'audience, que R. ait, en outre, comme il lui est reproché, participé activement et en qualité de co-auteur aux éléments matériels constitutifs de l'escroquerie perpétrée dans la nuit du 3 au 4 août 1985 à la caisse de la salle de jeux américains du Casino de Monte-Carlo par un homme répondant au signalement de H., ayant remis sept fausses coupures de 100 dollars U.S. et aux côtés duquel il se serait trouvé présent comme le déclare un témoin, ce qu'il nie, dès lors qu'une telle présence, ainsi qu'il ressort des déclarations de cet unique témoin, s'est avérée purement passive lors de la remise alors effectuée des faux billets et qu'aucun autre élément de fait, voisin dans le temps de cette remise n'a été par ailleurs relevé par l'information à la charge de R., de nature à caractériser, de la part de ce dernier, la circonstance qu'il eût pu être co-auteur, ou même complice, de l'escroquerie réalisée ; que R. doit être, en conséquence renvoyé, à cet égard, des fins de la poursuite ;

Attendu, quant à l'action civile, que le préjudice invoqué par la S.B.M., fondé en son principe à raison du comportement délictueux de R., n'apparaît pouvoir être imputé à celui-ci au regard de la seule tentative d'escroquerie dont il est reconnu coupable, qu'à concurrence d'une somme que le Tribunal estime devoir fixer à 2 000 francs compte tenu des éléments suffisants d'appréciation dont il dispose à cet égard ;

Attendu enfin que les cinq billets de 100 dollars remis par le prévenu comme il a été ci-dessus rapporté, lesquels placés sous le scellé n° 1 (annexé au procès-verbal n° 7915/SJ/5774 du 5 août 1985), se sont avérés faux, doivent être confisqués par application de l'article 11 de la Convention de Genève du 20 avril 1929, rendue exécutoire à Monaco par l'ordonnance souveraine du 11 décembre 1931, tout comme doivent l'être également, en vertu du même texte, les douze autres billets de 100 dollars U.S. respectivement placés sous les scellés n° 2 et 3 annexés au procès-verbal précité, qui se sont, de même, avérés faux au cours de l'instruction préparatoire ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement ;

Relaxe C. R. du chef de l'escroquerie qui lui est reprochée ;

Le déclare en revanche coupable de la tentative d'escroquerie retenue par ailleurs à son encontre ;

Faisant application des articles 2, 3, 330 et 392 du Code pénal le condamne à la peine de huit mois d'emprisonnement ;

Le condamne à payer la somme de 2 000 francs à la S.B.M., partie civile, à titre de dommages-intérêts ;

Ordonne la confiscation des faux billets de 100 dollars placés sous les scellés n° 1, 2, et 3 ci-dessus spécifiés (scellé Greffe n° 57/85).

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, subst. proc. gén. ; MMe Sanita, av. déf. ; Pastor, av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25136
Date de la décision : 15/10/1985

Analyses

Infractions contre les personnes ; Jeux d'argent (casino)


Parties
Demandeurs : Ministère Public
Défendeurs : R.

Références :

articles 2, 3, 330 et 392 du Code pénal
ordonnance souveraine du 11 décembre 1931


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1985-10-15;25136 ?

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