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18/10/1984 | MONACO | N°25062

Monaco | Tribunal de première instance, 18 octobre 1984, Cie Union des Assurances de Paris c/ Sieur S, la Gothaer Versicherung Bank Vvag, le Bureau Central Français.


Abstract

Accident du travail- Recours de droit commun de l'assureur-loi (Loi n° 636 du 11 janvier 1958, art. 13).

Responsabilité partielle du Tiers. - Assureur-loi en droit d'obtenir de ce tiers la fraction de prestations et indemnités mise à sa disposition eu égard à sa part de responsabilité.

Résumé

En cas de responsabilité partielle du tiers, l'employeur n'est exonéré que de la fraction des indemnités légales correspondant à la part de responsabilité de ce tiers et reste tenu pour le surplus vis-à-vis de la victime.

Dans le cadre de l'acti

on directe dont il dispose contre ce tiers responsable (en vertu de l'article 13 alinéa 5 de l...

Abstract

Accident du travail- Recours de droit commun de l'assureur-loi (Loi n° 636 du 11 janvier 1958, art. 13).

Responsabilité partielle du Tiers. - Assureur-loi en droit d'obtenir de ce tiers la fraction de prestations et indemnités mise à sa disposition eu égard à sa part de responsabilité.

Résumé

En cas de responsabilité partielle du tiers, l'employeur n'est exonéré que de la fraction des indemnités légales correspondant à la part de responsabilité de ce tiers et reste tenu pour le surplus vis-à-vis de la victime.

Dans le cadre de l'action directe dont il dispose contre ce tiers responsable (en vertu de l'article 13 alinéa 5 de la loi n° 636) l'assureur-loi est alors en droit d'obtenir le remboursement partiel des fractions de rente et indemnités mises à la charge du tiers eu égard à sa part de responsabilités.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que le 6 juillet 1978 le sieur G. G. - employé pour le compte de l'I.E.C. Electronique dont l'assureur-loi et la Compagnie U.A.P. a été victime d'un accident de trajet survenu avenue d'Ostende dans les circonstances suivantes :

Le sieur G. se dirigeait au volant de son cyclomoteur vers la place du Casino et se trouvait incorporé dans une file de voitures lorsqu'un véhicule descendant la même avenue conduit par un nommé S. effectuait un demi-tour sur la chaussée et montait en partie sur le trottoir situé côté mer avec ses deux roues avant et arrière droites ; c'est alors que le véhicule conduit par un nommé F. qui précédait dans la file le cyclomoteur de G. G. fit un écart à gauche pour éviter le véhicule de S. obligeant G. à effectuer la même manœuvre de déportement sur la gauche, lequel, ce faisant, ne put éviter le choc avec un véhicule qui descendait l'avenue d'Ostende et au volant duquel se trouvait un nommé M. ;

G. G. subissait au cours de cet accident un traumatisme de la jambe droite avec fracture ouverte et déformation importante du tiers supérieur du tibia, fracture du péroné, érosion frontale droite et de la cuisse, ces blessures entraînant aux termes d'un rapport du Docteur M. du 4 mars 1981 qui l'a examiné dans le cadre de la procédure « accident du travail » une I.P.P. de 40 % taux devenu définitif par suite d'une ordonnance de conciliation du 3 juin 1981 qui a fixé à 7 308,57 francs la rente devant être allouée à la victime en réparation des conséquences de l'accident du travail à compter du 5 janvier 1981, date de reprise du travail ;

Attendu que par l'exploit susvisé, la Compagnie Union des Assurances de Paris, ci-après U.A.P., agissant en qualité d'assureur-loi de l'I.E.C. Electronique, a assigné le sieur S. S., la Compagnie d'Assurances Gothaer Versicherung Bank Vvag et le Bureau Central Français au contradictoire de G. G. aux fins d'entendre déclarer S. entièrement responsable de l'accident de la circulation au cours duquel G. a été blessé le 6 juillet 1978, et d'obtenir, en conséquence, sa condamnation in solidum avec sa compagnie d'assurances et le Bureau Central Français à lui payer la somme de 400 083,03 francs, montant des prestations assurées à G. au titre de l'accident du travail, du capital constitutif de la rente allouée, et des débours auxquels l'a exposé l'accident de trajet de la victime, avec intérêts de droit, ce sur le fondement de l'article 13 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 ;

Attendu que S. S., la Compagnie d'Assurances Gothaer Versicherung Vvag et le Bureau Central Français s'opposent à cette demande en soutenant que S. n'a commis aucune faute et concluent au débouté de l'U.A.P., dès lors que la seule responsabilité de l'accident incomberait au sieur G. lui-même qui n'avait pas respecté la distance de sécurité avec le véhicule qui le précédait, commettant ainsi un grave défaut de maîtrise à l'origine de l'accident ; que subsidiairement, dans le cas où le Tribunal instaurerait un partage de responsabilité, les co-défenseurs contestent les sommes réclamées et sollicitent la désignation d'un médecin-expert avec mission de fixer le montant exact des sommes dues au titre de l'accident du travail à l'U.A.P. ;

Attendu que par d'ultimes conclusions en date du 14 février 1984 l'Union des Assurances de Paris soutient s'agissant de la responsabilité de l'accident que seule la grave faute d'imprudence de S. a été à l'origine de l'accident ; qu'en effet, la relation de cause à effet doit être considérée comme directe et exclusive entre la descente du trottoir aval des quatre roues du véhicule de S. et la rencontre brutale entre le vélomoteur de G. et le véhicule conduit par le sieur M. qui descendait l'avenue d'Ostende ; qu'en outre, s'agissant de sa réclamation d'un remboursement de 400 083,03 francs, la compagnie demanderesse fournit diverses explications, desquelles il résulterait qu'elle a payé sur une même quittance à la fois l'indemnité temporaire et les frais médicaux, que les arrérages échus ont bien été réglés en trois quittances du jour de la reprise du travail au jour de la constitution du capital et, qu'enfin, les honoraires des experts judiciaires comme des médecins conseils lui sont dus conformément aux dispositions précisés de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 à cet égard ;

Sur quoi,

Sur la responsabilité de l'accident,

Attendu qu'il est constant et établi par les procès-verbaux de police versés aux débats que le 6 juillet 1978, vers 11 heures 50, le véhicule automobile conduit par S. S. faisait un demi-tour sur l'avenue d'Ostende et s'apprêtait à remonter cette avenue en direction de Menton, lorsque celui-ci voyant arriver derrière lui des véhicules, montait dans un premier temps sur le trottoir afin de ne pas gêner la circulation, puis en descendait en serrant le côté droit de la chaussée et continuait sa progression vers le Casino ; que cette manœuvre obligea, d'une part, le véhicule conduit par un nommé F. qui montait l'avenue à se déporter sur la gauche pour éviter S., et, d'autre part, le cyclomotoriste G. qui circulait derrière F. à effectuer la même manœuvre lequel, ce faisant, ne put éviter la voiture du nommé M. qui descendait l'avenue d'Ostende ;

Attendu qu'il est fait grief par les défendeurs au sieur G. de ne pas avoir conduit prudemment et de s'être déporté sur la gauche au lieu de freiner alors qu'il avait lui-même aperçu la manœuvre fautive de S. qui venait d'effectuer un demi-tour dans l'avenue d'Ostende ;

Attendu toutefois que la preuve d'un défaut de prudence de nature à entraîner l'entière responsabilité de G. n'est pas établie dès lors qu'il résulte des auditions des divers témoins que la première manœuvre dangereuse entreprise par le sieur S., à savoir le demi-tour, était terminée lorsque les véhicules de F. et G. arrivaient à sa hauteur ; qu'à cet instant, en effet, le véhicule de S. était monté sur le trottoir aval de l'avenue d'Ostende d'où il est brusquement descendu peu avant l'accident ;

Attendu en revanche que la manœuvre précitée de S. consistant à descendre du trottoir, où il semblait stationner a directement provoqué l'écart à gauche du véhicule de F., lequel a entraîné la manœuvre identique effectuée par G. G. et le choc consécutif du véhicule conduit par M. ;

Que cette manœuvre dont l'imprévisibilité et la nature dangereuse résultent des procès-verbaux de police, présente bien le caractère fautif requis par l'article 1229 du Code civil pour engager la responsabilité de S. ; qu'en outre - malgré l'absence de choc direct entre les véhicules du défendeur et de G. - la manœuvre fautive opérée par S. a bien été la cause directe et déterminante de l'accident, sans laquelle le dommage ne se serait à l'évidence pas produit ;

Attendu cependant que ladite cause ne présente pas le caractère exclusif requis pour que l'entière responsabilité du dommage soit supportée par le sieur S. ; qu'à cet égard, en effet, il ressort notamment des déclarations des sieurs M. et F. que G. G. n'ayant pu freiner à temps et ayant perdu le contrôle de son cyclomoteur a tenté d'accélérer tout en se déportant sur la gauche où il a heurté le véhicule de M. ; que ces circonstances établissent à tout le moins à la charge de G. un défaut de maîtrise dans la conduite de son cyclomoteur et attestent de ce que le fait de la victime, sans être aussi fautif que celui de S., a néanmoins concouru à la production du dommage ; qu'en conséquence, une part de responsabilité doit incomber au sieur G. ;

Attendu que le tribunal dispose des éléments suffisants d'appréciation pour dire que S. S. doit être déclaré responsable pour 2/3 des conséquences de l'accident de trajet dont a été victime G. G. et qu'un tiers de responsabilité doit être laissé à la charge de celui-ci ;

Sur l'action en remboursement de l'assureur-loi,

Attendu qu'aux termes de l'article 13, alinéa 5 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 sur les accidents du travail, l'employeur ou son assureur dispose d'une action directe contre le tiers responsable de l'accident ;

Qu'en vertu de l'alinéa 3 du même article, dans le cas où la responsabilité du tiers n'est que partielle, l'employeur n'est exonéré que de la fraction des indemnités légales correspondant à la part de responsabilité du tiers, soit en l'espèce 2/3 et pour le surplus il reste tenu vis-à-vis de la victime ;

Attendu, en outre que sur le fondement de ce texte d'ordre public, l'U.A.P. est en droit d'obtenir du sieur S. la fraction de rente légale mise à sa charge eu égard à sa part de responsabilité en cas d'incapacité permanente et le remboursement partiel dans les conditions précitées des autres indemnités prévues aux articles 4, 10 et 11 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 ;

Qu'il y a donc lieu de déclarer l'assureur-loi recevable en son action fondée sur l'article 13 de la loi du 11 janvier 1958 ;

Attendu cependant qu'en l'état de très nombreuses quittances versées aux débats par la Compagnie U.A.P. et eu égard tant à l'importance des sommes réclamées qu'aux contestations émises par les co-défendeurs à l'encontre des justifications produites et des modes de calcul retenus par la demanderesse pour obtenir la capitalisation de la rente et des frais de prothèse, le tribunal ne dispose pas des éléments suffisants d'appréciation lui permettant de statuer sur le bien fondé de la demande en remboursement de la Compagnie U.A.P. quant aux sommes réclamées ;

Qu'en conséquence, faisant droit à la demande des défendeurs, il y a lieu de désigner avant dire droit tel expert qu'il appartiendra avec mission de chiffrer le montant exact des sommes dues par le sieur S. à l'U.A.P. au titre de l'accident de trajet, et ce, eu égard à la fraction de responsabilité mise à la charge de ce dernier, soit 2/3 ;

Attendu qu'il y a lieu de faire masse des dépens et de dire qu'ils seront supportés pour les 2/3 par S. et pour 1/3 par la Compagnie U.A.P. ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement ;

Déclare S. S. responsable pour les 2/3 des conséquences dommageables de l'accident dont a été victime G. G. le 6 juillet 1978 et constate que la Compagnie Union des Assurances de Paris - substituée à l'I.E.C. Electronique - restera tenue vis-à-vis du sieur G. pour le surplus ;

Déclare l'Union des Assurances de Paris, agissant en qualité d'assureur-loi de l'I.E.C. Electronique recevable en son action fondée sur l'article 13 de la loi du 11 janvier 1958 ;

Statuant avant dire droit sur l'évaluation du montant des sommes dues ordonne une expertise confiée à Monsieur Roger Orecchia, demeurant à Monte-Carlo, Le Labor, boulevard Princesse Charlotte, lequel, assisté, le cas échéant, de tout sapiteur de son choix, serment préalablement prêté aux formes de droit, aura pour mission :

* de se faire communiquer le dossier médical de G. G. et tous justificatifs, quittances et autres documents que la Compagnie U.A.P. pourra produire,

* de chiffrer le montant des indemnités journalières, frais médicaux, pharmaceutiques et autres frais prévus par l'article 10 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 et le montant des arrérages échus que la Compagnie U.A.P. a pris en charge,

* de chiffrer le capital constitutif de rente tout en précisant la méthode de calcul employée et les textes appliqués (barème utilisé),

* de chiffrer le capital pour prothèse future dans les conditions précitées ;

Dit que l'expert disposera d'un délai de 3 mois à compter du début des opérations pour déposer son rapport ;

Désigne Madame M. François, Premier juge au siège, pour suivre lesdites opérations d'expertise ;

Dit qu'en cas d'empêchement du magistrat ainsi commis il sera procédé à son remplacement par simple ordonnance ;

Dit que l'expertise se fera aux frais avancés de la Compagnie Union des Assurances de Paris ;

Composition

MM. Huertas, prés. ; Truchi, prem. subst. proc. gén. ; MMe Marquet, Boeri, av. déf. ; Bensa, Capponi, av. (du barreau de Nice).

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25062
Date de la décision : 18/10/1984

Analyses

Sécurité au travail


Parties
Demandeurs : Cie Union des Assurances de Paris
Défendeurs : Sieur S, la Gothaer Versicherung Bank Vvag, le Bureau Central Français.

Références :

loi n° 636 du 11 janvier 1958
article 13 de la loi du 11 janvier 1958
article 13 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958
articles 4, 10 et 11 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958
article 1229 du Code civil
article 10 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1984-10-18;25062 ?

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