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03/05/1984 | MONACO | N°25976

Monaco | Tribunal de première instance, 3 mai 1984, Dame L. c/ Dlle V. et Cie d'Assurances Yorkshire.


Abstract

Accident du travail - Renonciation à prescription

Moyen d'irrecevabilité tiré de la prescription - Prescription annale courant à compter de l'Ordonnance de non-conciliation - Application même en cas de saisine préalable de la Commission spéciale - Conditions de fond - Article 2039 du Code civil - Prescription acquise - Absence de conditions de forme

Résumé

La prescription de l'action en indemnité prévue par l'article 24 (3°) de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 sur la déclaration, la réparation et l'assurance des accidents du travail est acqui

se dès lors qu'il s'est écoulé un an au moins entre la date de l'ordonnance de non-con...

Abstract

Accident du travail - Renonciation à prescription

Moyen d'irrecevabilité tiré de la prescription - Prescription annale courant à compter de l'Ordonnance de non-conciliation - Application même en cas de saisine préalable de la Commission spéciale - Conditions de fond - Article 2039 du Code civil - Prescription acquise - Absence de conditions de forme

Résumé

La prescription de l'action en indemnité prévue par l'article 24 (3°) de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 sur la déclaration, la réparation et l'assurance des accidents du travail est acquise dès lors qu'il s'est écoulé un an au moins entre la date de l'ordonnance de non-conciliation et celle de l'assignation, que la Commission spéciale ait été ou non saisie.

Il résulte des dispositions de l'article 2039 du Code Civil, qu'on ne peut renoncer valablement qu'à une prescription acquise.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu que G. L. a été victime en date du 15 juillet 1975 d'une lombalgie constituant pour elle un accident du travail, alors qu'elle était employée en qualité de concierge au service de l'Agence Bremond, dont l'assureur loi est la Compagnie « Le Yorkshire » ;

Que le docteur Orecchia désigné en qualité d'expert par le Juge chargé des accidents du travail a conclu à une consolidation au 18 avril 1976, un taux d'I.P.P. de 12 % et a préconisé l'appréciation de la capacité résiduelle de gains par la Commission prévue par la loi ;

Qu'à la date du 25 janvier 1977, la Commission instituée par l'article 23 bis de la loi n° 790 du 18 août 1965 complétant et modifiant la loi n° 636 du 11 janvier 1958 en son article 23 examinait le cas de madame L. ;

Que ladite Commission ayant évalué à 63 % la capacité résiduelle de gains de la dame L., l'assureur-loi déclarait ne pas vouloir se concilier sur le taux d'I.P.P. de 37 % qui en résultait et une ordonnance de non-conciliation était rendue le 28 juillet 1978 ;

Attendu que, suivant l'exploit susvisé, la dame L. assignait la Compagnie « Le Yorkshire » - substituée à son assurée H. V., propriétaire exploitante de l'Agence Bremond, employeur - aux fins de voir homologuer le rapport du Docteur Orecchia, retenir le taux d'I.P.P. de 37 % résultant de la délibération de la Commission Spéciale et s'entendre condamner la Compagnie « Le Yorkshire » à verser à la défenderesse une rente annuelle et viagère de 4 373,00 francs calculée sur la base du taux d'I.P.P. retenu par la Commission spéciale ;

Attendu qu'en réponse, la Compagnie « Le Yorkshire » s'oppose à cette demande ;

Qu'elle soulève l'irrecevabilité de la demande au motif de la prescription de l'action engagée sur assignation du 2 mars 1983, et, subsidiairement au fond, entend voir dire et juger qu'il n'y a pas lieu d'homologuer le rapport d'expertise du Docteur Orecchia, ni la décision de la Commission Spéciale, dès lors d'une part, que l'expert n'a pas précisé la date de consolidation des blessures et, d'autre part, qu'elle avait exercé un emploi alors qu'elle était en arrêt de travail ;

Que les défenderesses sollicitent dès lors qu'il soit tout d'abord ordonné une enquête préalable à l'effet de rechercher les employeurs et les activités de la demanderesse du jour de l'accident jusqu'à la décision de la Commission Spéciale, et, qu'il soit ensuite procédé à une nouvelle expertise médicale ;

Attendu que la dame L. soutient en réponse que le moyen de prescription soulevé ne s'applique pas au cas d'espèce et que les omissions de l'expert n'ont pu avoir aucune incidence sur la valeur de son rapport dès lors qu'il ne tendait qu'à l'examen de la victime par la Commission spéciale ;

Attendu toutefois que par d'ultimes conclusions en date du 5 avril 1984, les défenderesses renoncent au moyen d'irrecevabilité tiré de la prescription, maintenant au fond leur demande d'enquête sur les activités successives de la dame L. durant la période allant du jour de l'accident au jour de la décision de la Commission spéciale ;

Sur quoi :

I. - Sur le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande ;

Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 24 (3°) de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 que la prescription est acquise dès lors qu'il s'est écoulé un an au moins entre la date de l'ordonnance de non-conciliation et celle de l'assignation ;

Que toutefois, et ce, contrairement aux allégations des défenderesses, la prescription annale prévue par la loi doit s'appliquer que la Commission Spéciale ait été ou non saisie ;

Qu'en effet, l'article 21 quinquiès prévoit en ses alinéas 3 et 4 qu'après le dépôt du rapport expertal et de la délibération de la Commission Spéciale, et dans le cas où les parties seraient en désaccord sur le taux proposé, il est alors procédé comme il est dit au dernier alinéa de l'article 21 quater ;

Que ce sont bien les ordonnances rendues en application de cet article 21 quater qui sont visées par les dispositions de l'article 24 (3°) précité relatif à la prescription ;

Qu'en conséquence, dès lors qu'il s'est écoulé plus d'un an entre l'ordonnance de non-conciliation en date du 28 juillet 1978 et l'assignation du 2 mars 1983, il y a lieu de dire que la prescription est acquise ;

Attendu néanmoins que les défenderesses déclarent renoncer au moyen d'irrecevabilité tiré de la prescription ;

Attendu sur ce point qu'il résulte des dispositions de l'article 2039 du Code civil qu'on ne peut renoncer valablement qu'à une prescription acquise ;

Que l'analyse précitée permet de conclure que tel est bien le cas de la prescription visée ;

Qu'il y a enfin lieu de noter que la renonciation expresse n'est soumise à aucune condition de forme ;

Qu'en conséquence, il y a lieu de donner acte aux défenderesses de leur renonciation au moyen d'irrecevabilité de la demande tiré de la prescription, étant au surplus observé qu'elle est acceptée par la demanderesse ;

II. - Au fond ;

Attendu qu'il est constant que le 15 juillet 1975 la dame L. - alors qu'elle soulevait le paillasson de l'immeuble dont elle était concierge - fit un faux mouvement et ressentit une vive douleur au bas du dos ;

Attendu que l'expert - pour conclure au taux d'I.P.P. retenu de 12 % - relevait l'existence de cette douleur au niveau de la région lombo-sacrée droite avec irradiations le long du membre inférieur droit ainsi que la persistance d'une sciatalgie et de névralgies du nerf obturateur droit irradiant jusqu'aux orteils ;

Que les allégations des défenderesses sont mal fondées s'agissant du défaut de précisions concernant la date de consolidation ;

Qu'un effet, l'original du rapport d'expertise signé de la main du Docteur Orecchia porte mention manuscrite de la date de consolidation qu'il a fixée au 18 avril 1976 ;

Attendu en outre - l'expert l'ayant préconisé - que le juge chargé des accidents du travail saisissait la Commission Spéciale, laquelle, pour évaluer à 63 % la capacité résiduelle de gains de la victime se fondait sur la réduction de moitié de ses heures de travail par rapport à la période antérieure à l'accident ;

Qu'il résulte en effet du procès-verbal dressé par les membres de cette Commission le 25 janvier 1977 que la dame L. avait plusieurs employeurs, dont l'Agence Bremond, les entreprises Dico et Omnium monégasque de Commerce Général ;

Qu'ainsi, contrairement aux allégations des défenderesses, la Commission spéciale a bien été mise en possession de tous les éléments de la cause et a apprécié avec justesse les conséquences professionnelles des blessures subies par la victime au regard de ses divers emplois en estimant que la réduction de fréquence de ses heures de travail entraînait une diminution de gains certaine et permanente ;

Que dès lors, les séquelles médicalement constatées par l'expert et l'incidence professionnelle de l'accident subi par la dame L. justifient le taux d'I.P.P. de 37 % retenu par la Commission spéciale ;

Attendu en conséquence qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée par la Compagnie - le Tribunal disposant des éléments suffisants pour homologuer le rapport du Docteur Orecchia du 14 octobre 1976 et retenir le taux d'I.P.P. résultant de la délibération de la Commission Spéciale qui évalue à 63 % la capacité résiduelle de gains de la dame L. ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement ;

* Constate que la demoiselle V. et la Compagnie « Le Yorkshire » renoncent à invoquer le moyen d'irrecevabilité de la demande tiré de la prescription ;

* Déclaré recevable la demande ;

Entérine les conclusions du rapport du Docteur Orecchia en date du 14 octobre 1976 ainsi que l'avis exprimé par la Commission Spéciale, retient le taux d'I.P.P. de 37 % résultant de sa délibération et condamne la Compagnie « Le Yorkshire » - substituée à la Dlle V., propriétaire exploitante de l'Agence Bremond - à verser à la dame L. une rente annuelle calculée sur un taux d'I.P.P. de 37 %, et ce, à compter du 18 avril 1976, date de la consolidation et en fonction d'un salaire annuel de 23641,02 francs (minimum légal) ;

* Déboute la Compagnie « Le Yorkshire » et la demoiselle V. de leurs demandes, fins et conclusions ;

Composition

MMe. Blot, Sanita et Sbarrato, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25976
Date de la décision : 03/05/1984

Analyses

Social - Général ; Sécurité au travail ; Procédure civile


Parties
Demandeurs : Dame L.
Défendeurs : Dlle V. et Cie d'Assurances Yorkshire.

Références :

loi n° 636 du 11 janvier 1958
article 24 (3°) de la loi n° 636 du 11 janvier 1958
Article 2039 du Code civil
article 23 bis de la loi n° 790 du 18 août 1965


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1984-05-03;25976 ?

Source

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