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26/01/1984 | MONACO | N°25966

Monaco | Tribunal de première instance, 26 janvier 1984, Société Toutelectric c/ Sr. M. D. et Sr. H. D.


Abstract

Dessins et modèles - Action en contrefaçon

Identité d'aspect technique des modèles déposés (oui) - Emprunt des éléments esthétiques originaux (non) - Contrefaçon des modèles déposés (non)

Résumé

L'existence d'une contrefaçon doit s'apprécier, non quant aux différences séparant l'objet argué de contrefaçon du modèle déposé, mais à partir des points de ressemblance unissant ces deux objets et pouvant révéler un emprunt aux éléments particuliers caractéristiques de l'originalité éventuelle du modèle déposé qui ne relèveraien

t pas d'impératifs fonctionnels ou techniques.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu qu'en exécution d'un précéden...

Abstract

Dessins et modèles - Action en contrefaçon

Identité d'aspect technique des modèles déposés (oui) - Emprunt des éléments esthétiques originaux (non) - Contrefaçon des modèles déposés (non)

Résumé

L'existence d'une contrefaçon doit s'apprécier, non quant aux différences séparant l'objet argué de contrefaçon du modèle déposé, mais à partir des points de ressemblance unissant ces deux objets et pouvant révéler un emprunt aux éléments particuliers caractéristiques de l'originalité éventuelle du modèle déposé qui ne relèveraient pas d'impératifs fonctionnels ou techniques.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu qu'en exécution d'un précédent jugement du Tribunal rendu le 29 avril 1982, auquel il est renvoyé pour l'exposé des faits de la cause et des prétentions initiales des parties, l'expert Robert Michel, désigné par ledit jugement, a procédé à une expertise ayant essentiellement pour objet d'apporter au Tribunal les éléments de comparaison des caractéristiques respectives, d'une part, de deux fers à souder dont le modèle, exploité par la Société Toutelectric avait, le 15 décembre 1978, été déposé au service de la propriété industrielle de Monaco sous les numéros 281 et 282, et, d'autre part, de divers fers à souder argués par cette même société de contrefaçon, dont le dépôt au Greffe Général après saisie avait été autorisé le 21 janvier 1981 à la requête de ladite société et qui portent les dénominations : Mini 1000 ou 100 Alfa 110 ou 1101, Mini 1006 et Alfa 1105 ou 1106 ;

Attendu que l'expert Michel ayant déposé le rapport de ses opérations, daté du 1er mars 1983, la cause a été poursuivie sur l'Ordonnance prévue par l'article 356 du Code de procédure civile, rendue en l'espèce le 25 mars 1983 ;

Attendu que la Société Toutelectric, a, sur ce, maintenu les termes de son assignation susvisée, en sollicitant l'homologation par le Tribunal du rapport de l'expert Michel, ainsi que la jonction à la présente instance d'une autre procédure par elle introduite, tendant, au premier chef, à la constatation d'une concurrence déloyale qui aurait été mise en œuvre à son détriment par les défendeurs à la présente instance, M. et H. D., et, partant, à la réparation du préjudice qu'une telle concurrence lui aurait occasionnée ;

Attendu que ces mêmes défendeurs s'opposent dans leurs dernières conclusions à la jonction sollicitée ;

Qu'H. D. demande sa mise hors de cause en soutenant, ainsi qu'il l'avait fait antérieurement, que l'action présentement introduite ne saurait le concerner puisqu'il n'est que préposé de son fils M. D., exerçant le commerce sous l'enseigne Interelec, auquel seul devait être reprochée la contrefaçon invoquée, à la supposer établie ;

Qu'à cet égard ce dernier conclut pour sa part au débouté de la Société Toutelectric de ses demandes - motif pris de ce que ne serait point établie précisément la preuve qu'il aurait commis une telle contrefaçon en commercialisant, ainsi qu'il l'admet, les modèles de fers saisis et déposés au Greffe général comme il vient d'être dit ;

Qu'en outre, il sollicite reconventionnellement la condamnation de cette même société Toutelectric à lui payer la somme de 20 000 francs à titre de dommages-intérêts pour abus de procédure ;

Sur quoi,

Quant à la jonction sollicitée

Attendu que la procédure dont il est demandé la jonction avec la présente instance, pour qu'il soit sur leur ensemble statué par un seul et même jugement, apparaît avoir été enrôlée le 5 mai 1983, soit plus de deux ans après l'assignation susvisée, et doit être appelée par le Tribunal à l'audience du 2 février 1984 pour dépôt de conclusions ;

Qu'en raison du fait qu'elle n'apparaît pas, ainsi, en état de recevoir présentement jugement, ladite procédure ne saurait au plan procédural, être jointe à la présente instance ;

Et sur ce,

Au fond,

Quant à la contrefaçon invoquée,

Attendu qu'au résultat de l'expertise à laquelle il a été procédé, la Société Toutelectric estime établie la contrefaçon qu'elle invoque, en soutenant que les fers fabriqués par l'Entreprise Interelec sont la copie quasi servile de ceux qu'elle commercialise elle-même, tant dans leur aspect que dans leurs caractéristiques générales et que, par ailleurs, ces derniers auraient été, en outre, partiellement copiés quant à la forme de leur tube, ceci en raison en particulier de ce que le sous-traitant auquel elle s'est adressée depuis de nombreuses années pour la fabrication des tubes de ses fers à souder aurait été sollicité par M. et H. D. d'assurer, pour leur compte, une semblable fabrication destinée aux fers Interelec ;

Attendu que M. D. en particulier réplique, en revanche, que les éléments distinctifs des fers à souder comparés par l'expert sont nombreux, tant pour l'emballage que pour les caractères des fers eux-mêmes s'agissant de leur longueur, couleur, forme de la poignée, couleur du cordon d'alimentation et forme de leur prise électrique ;

Qu'il estime, dès lors, incontestable que, même pour une clientèle ordinaire et non expérimentée, les fers Interelec qu'il vend ne sauraient être confondus avec les fers Toutelectric, bien qu'ils puissent ressembler à ceux-ci comme répondant à la forme traditionnelle et inévitable inhérente à tout fer à souder qui doit se composer d'un cordon, d'une poignée, d'un tube et d'une panne ;

Attendu toutefois que l'existence de la contrefaçon invoquée doit s'apprécier non quant aux différences séparant les fers litigieux des fers de modèle déposé, mais à partir des points de ressemblance unissant ces deux séries de fers et pouvant révéler un emprunt aux éléments particuliers caractéristiques de l'originalité éventuelle des modèles déposés, qui ne relèveraient pas d'impératifs fonctionnels ou techniques ;

Attendu qu'à cet égard, après avoir comparé, comme il en avait reçu mission, les fers Interelec (de référence Mini 1006, Alfa 1105 ou 1106, Alfa 110 ou 1101 et Mini 1000 ou 1001) aux fers Toutelectric de modèle déposé (n°s 281 et 282) l'expert Michel a estimé que ces derniers avaient « posé pour une gamme de trois fers » Toutelectric des lignes directrices devant être appréciées, dans l'ordre décroissant en importance de leurs caractéristiques essentielles, en premier lieu d'après leur proportion, forme, plastique et dimensions générales, en deuxième lieu d'après le dessin du tube, puis d'après le dessin de la poignée, de la panne et du cordon ;

Que dans ces conditions l'expert a émis l'avis qu'il existait en l'espèce une ressemblance générale entre les fers litigieux et les modèles Toutelectric, la seule différence incontestable entre eux étant la présence sur les uns d'une bague collerette ;

Qu'en définitive, il s'est estimé en mesure d'affirmer que les fers Interelec constituaient une copie quasi servile, dans leur aspect et caractéristique générales, de la gamme de trois fers Toutelectric mentionnée dans son rapport, alors cependant a-t-il souligné, que les nécessités techniques n'auraient nullement imposé, selon lui, la ressemblance révélée ;

Mais attendu qu'une telle affirmation ne saurait être entérinée par le Tribunal, compte tenu notamment de ce qui vient d'être dit quant à la manière dont il convenait d'apprécier la contrefaçon alléguée ;

Que les modèles déposés qu'exploite la Société Toutelectric n'apparaissent en effet comporter d'après les descriptions photographiques qui en ont été fournies par l'expert qu'un nombre réduit d'éléments esthétiques originaux pouvant être dissociés des nécessités techniques imposées par leur fonction, lesdits éléments s'analysant en effet exclusivement, pour ce qui est du corps des fers à souder devant seul être tenu pour essentiel - en un tube roulé comprenant à proximité de la poignée du fer des fentes d'aération transversales disposées en quinconce sur le pourtour du tube, en une bague-collerette séparant, sur le tube, lesdites fentes de la poignée, et en une forme de cette même poignée cylindrique sur sa plus grande partie puis tronc-conique et évasée sur son extrémité jouxtant le tube, celui-ci se trouvant engagé dans l'évasement ;

Qu'au regard de tels éléments pouvant seuls permettre la protection de la loi comme conférant aux modèles de fer déposés sous les numéros 281 et 282 une physionomie propre, il s'avère, à l'examen des fers litigieux Interelec, que ceux-ci, en tant qu'ils n'ont emprunté que la forme générale du tube roulé aux fers Toutelectric, n'apparaissent pas suffisamment ressemblants à ceux-ci, compte tenu de ce que l'imitation n'a pas en outre porté sur une forme principalement cylindrique, de leur manche ou la présence d'une bague collerette sur leur tube, en sorte que l'essentiel des éléments originaux des fers Toutelectric n'étant pas apparu dans la configuration des fers Interelec ceux-ci ne sauraient être considérés comme la contrefaçon des modèles déposés précités ;

Qu'il suit de là que la Société Toutelectric doit être déboutée de l'ensemble des demandes qu'elle a présentement formulées, la demande de H. D. d'être mis hors de cause s'avérant dès lors sans objet ;

Attendu, par ailleurs, que ce dernier et son fils M. D. ne sauraient être déclarés fondés en leurs demandes reconventionnelles de dommages-intérêts qui ne peuvent qu'être rejetées en l'état de ce qu'il n'apparaît pas ressortir des circonstances de la cause que la Société Toutelectric ait abusé de son droit d'ester en justice ;

Et attendu que ladite société qui succombe en son action doit supporter les dépens de la présente instance ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Déboute la Société Anonyme monégasque Toutelectric des demandes qu'elle a présentement formulées ;

Déboute M. et H. D. de leurs demandes reconventionnelles ;

Composition

MM. J.-Ph. Huertas, prés., J.F. Landwerlin, vice-prés. ; Mme A. Picco-Margossian, prem. subst. proc. gén. ; MMe Sbarrato av. déf. et Cohen (du barreau de Nice), av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25966
Date de la décision : 26/01/1984

Analyses

Dessins et modèles ; Droit des biens - Biens et patrimoine


Parties
Demandeurs : Société Toutelectric
Défendeurs : Sr. M. D. et Sr. H. D.

Références :

article 356 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1984-01-26;25966 ?

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