La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/01/1976 | MONACO | N°25778

Monaco | Tribunal de première instance, 15 janvier 1976, Dame S. c/ dame P.


Abstract

Procédure civile

Époux - Capacité juridique - Convention - Conjoint non concerné - Présence aux débats - Nécessité (non)

Vente

Prix - Supplément de prix - Versement - Preuve non rapportée - Dissimulation (non)

Résumé

Aux termes de l'article 183 du Code civil, les époux ont la pleine capacité juridique ; la présence aux débats des conjoints des parties, qui ne sont pas personnellement concernés par les conventions intervenues, ne se justifie pas et leur mise hors de cause doit être ordonnée d'office (1).

Il n'y a pas d

issimulation du prix de vente lorsque cette dissimulation ne pourrait résulter que du versement d'un supplém...

Abstract

Procédure civile

Époux - Capacité juridique - Convention - Conjoint non concerné - Présence aux débats - Nécessité (non)

Vente

Prix - Supplément de prix - Versement - Preuve non rapportée - Dissimulation (non)

Résumé

Aux termes de l'article 183 du Code civil, les époux ont la pleine capacité juridique ; la présence aux débats des conjoints des parties, qui ne sont pas personnellement concernés par les conventions intervenues, ne se justifie pas et leur mise hors de cause doit être ordonnée d'office (1).

Il n'y a pas dissimulation du prix de vente lorsque cette dissimulation ne pourrait résulter que du versement d'un supplément de prix et que la preuve d'un tel versement n'est pas rapportée (2).

Motifs

Le Tribunal

Attendu que, suivant l'exploit susvisé, la dame A. P., épouse S., et ce dernier agissant en tant que de besoin pour les dues assistance et autorisation maritales, ont assigné la dame A. D., et en tant que de besoin son époux le sieur P., pour s'entendre la défenderesse condamner au paiement de la somme de 70 542,68 francs, montant de la valeur de marchandises, avec intérêts de droit, et de celle de 1 000 francs à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et injustifiée ; Attendu que la dame P. expose qu'elle a vendu à la défenderesse, suivant acte passé par devant Maître Rey, notaire, le 28 février 1973, le fonds de commerce de couture, lingerie et bonneterie de luxe qu'elle exploitait sous la dénomination « C. » dans un local sis . ; que cette vente avait été précédée d'une promesse de vente consentie par acte sous seing privé du 7 février 1973 et comportant la clause ci-après :

« Marchandises »

« Les marchandises garnissant le fonds, reprises par l'acquéreur suivant état dressé contradictoirement entre elle et la cédante, seront acquittées au comptant, au prix de factures, lors de l'entrée en jouissance » ;

qu'en exécution de cette clause lesdites marchandises, se trouvant à l'état de neuf, ont été inventoriées, étiquetées et livrées à la villa de la défenderesse domiciliée à l'époque à Roquebrune-Cap-Martin, dès avant sa prise de possession du fonds, le 28 février 1973, et qu'il lui en a été remis inventaire détaillé s'élevant à 70 542,68 francs taxes comprises ; que contrairement aux engagements pris, et en dépit d'une sommation du 4 octobre 1974, la dame P. s'est refusée à en acquitter le prix ;

Attendu que la défenderesse, qui fait valoir que les droits et obligations des parties résultent du seul acte notarié du 28 février 1973, qui a emporté novation des engagements antérieurs et qui ne fait pas mention de la vente des marchandises dont elles avaient convenu qu'elles seraient conservées par la venderesse, par ailleurs propriétaire d'une boutique de mode à l'enseigne « N. C. » , ., lesdites marchandises, dont le prix ne lui avait pas été réclamé jusqu'à sa sommation du 21 décembre 1973, invitant la dame P. à procéder à leur enlèvement n'ayant d'ailleurs pas fait l'objet d'un inventaire établi contradictoirement, soutient que la thèse adverse constituerait, à concurrence de leur valeur, une dissimulation du prix de vente du fonds illicite et prohibée aux termes des articles 986, 988 du Code civil et de l'article 38 de l'ordonnance du 29 avril 1828 : qu'elle conclut, en conséquence, au débouté de la demanderesse et, soutenant pour sa part que l'acte du 7 février 1973 qui prévoyait un prix d'achat de 200 000 francs pour le fonds de commerce, alors que l'acte officiel du 28 février 1973 ne stipule qu'un prix de 120 000 francs, établit une dissimulation de 80 000 francs et est comme tel nul et de nul effet en vertu des dispositions légales précitées, elle sollicite reconventionnellement la condamnation de dame P. à lui rembourser cette somme de 80 000 francs ;

Attendu que la demanderesse qui rappelle que les marchandises litigieuses sont demeurées en la possession effective de la dame P. et expose encore que la pratique notariale exclut normalement les marchandises, soumises au régime fiscal particulier de la T.V.A., des actes de cession du fonds de commerce en sorte que l'absence de rubrique « Marchandises » dans l'acte authentique du 28 février 1973 ne saurait entraîner les conséquences que la défenderesse entend en déduire, alors que l'existence de la vente du stock est confirmée par les éléments fournis, conteste par ailleurs formellement avoir perçu une somme de 200 000 francs pour la vente du fonds et oppose que la dame P. ne peut, en tout état de cause, aux termes de l'article 24 de l'Ordonnance du 29 avril 1828, produire en justice au soutien de son argumentation le compromis du 7 février 1973 qui n'a pas été enregistré, l'article 38 du même texte ne pouvant au surplus recevoir application en l'espèce, cet acte étant antérieur à l'acte authentique ;

Attendu que dame P. soutient supplémentairement que la vente prétendue des marchandises est « inexistante » faute d'accord sur la chose et sur le prix et ne peut servir de fondement à l'action de la demanderesse ; qu'elle souligne le caractère contradictoire des conclusions de la dame P. qui a elle-même invoqué le compromis du 7 février et maintient en les développant ses moyens précédents à l'appui de sa demande reconventionnelle ;

Attendu qu'il convient de relever préliminairement qu'aux termes de l'article 183 du Code civil les époux ont la pleine capacité juridique ; qu'il suit que la présence aux débats des époux des parties, qui ne sont personnellement concernés par les conventions intervenues ne se justifie pas et qu'il y a lieu d'ordonner d'office leur mise hors de cause ;

Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article 24, alinéa 2, de l'Ordonnance du 29 avril 1828, expressément invoqué par la dame P. pour faire échec à l'argumentation de la défenderesse mais dont les prescriptions s'imposent à l'évidence, à l'une et l'autre des parties, aucune d'entre elles ne peut faire état en justice du compromis de vente du 7 février 1973, dont il est constant qu'il n'a pas été soumis à la formalité préalable de l'enregistrement, sauf à y faire procéder ce qu'elles n'ont pas estimé devoir faire à ce jour ;

Attendu que les positions adoptées par la défenderesse n'apparaissent pas moins contradictoires en ce qu'elle se prévaut de la novation, résultant à ses dires de l'acte notarié du 28 février 1973, des engagements antérieurs consignés au compromis du 7 février 1973, pour s'opposer à la demande, tout en concluant à la nullité de cet acte sous seing privé, par application des articles 986, 988 du Code civil et 38 de l'Ordonnance du 29 avril 1828, en soutenant que ce compromis consacrerait une dissimulation du prix de vente porté dans l'acte notarié et fonde sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 80 000 francs sur l'existence de cette dissimulation ;

Attendu cependant que la preuve de cette dissimulation, qu'elle entend déduire de la seule confrontation des deux actes susvisés, ne saurait résulter, en toute hypothèse, que de la justification du versement d'un supplément de prix de 80 000 francs, qui est formellement contesté, et qu'en l'absence d'une telle preuve qui n'est ni rapportée, ni offerte en l'espèce, elle pourrait d'autant moins être admise à invoquer la nullité de l'acte sous seing privé, notamment sur la base de l'article 38 de l'Ordonnance précitée, qu'elle reconnaît elle-même un caractère novatoire à l'acte notarié postérieur ;

Que la demande reconventionnelle de la dame P. doit, en conséquence, être déclarée sans fondement et qu'elle doit en être déboutée ;

Attendu, sur la demande principale, qu'il est constant que l'acte notarié du 28 février 1973 portant cession du fonds de commerce, non plus que l'acte de réitération du 8 mai 1973 reçu par le même notaire, n'ont emporté vente des marchandises garnissant ce fonds et qu'il ne peut donc être sérieusement soutenu que cette demande s'analyserait en fait en une dissimulation de partie du prix de vente stipulé dans ces actes ;

Qu'il suffit en effet de relever à cet égard, sans même qu'il soit besoin de faire référence aux usages pratiqués en la matière qui excluent traditionnellement les marchandises de l'acte de cession du fonds à raison de leur soumission au régime de la T.V.A., que la dame P. n'a jamais allégué que les marchandises avaient été comprises dans les éléments du fonds cédé et qu'elle soutient, au contraire, qu'elles devaient être conservées par la venderesse ;

Attendu qu'en l'espèce la preuve de la vente des marchandises litigieuses et de ses modalités peut être rapportée conformément aux dispositions de l'article 74 du Code de commerce ;

Attendu que dans sa lettre du 3 février 1973, la dame P. se déclarait prête à envisager la reprise d'une partie du stock ;

Attendu qu'il est acquis qu'elle est demeurée matériellement en possession de marchandises se trouvant dans les lieux postérieurement au 1e avril 1973, date de son entrée en jouissance, qu'elle les détient encore, et que ce n'est que par lettre du 21 décembre 1973 qu'elle a invité la dame P. à procéder à leur enlèvement, sans estimer devoir répondre aux lettres de protestation de cette dernière des 29 décembre 1973 et 11 janvier 1974 ainsi qu'à une sommation de payer la somme de 70 542,68 francs, notifiée par exploit du 4 octobre 1974 auquel était joint un inventaire détaillé ;

Attendu qu'en l'état de ces données confirmatives de la thèse de la demanderesse une mesure expertale s'impose, le Tribunal ne disposant pas présentement de tous les éléments d'appréciation qui lui sont nécessaires ;

Qu'il y a lieu de l'ordonner avant de statuer plus avant et de réserver les dépens en fin de cause ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Met hors de cause les sieurs S. et P. ;

Déclare mal fondée la demande reconventionnelle de la dame P. et l'en déboute ;

Et avant dire droit au fond sur la demande principale, toutes fins et moyens des parties demeurant réservés.

Composition

M. François pr., Mme Margossian, subst. gén., MMe Clerissi, Sanita, av. déf., Prat et Bosio (tous deux du barreau de Nice), av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25778
Date de la décision : 15/01/1976

Analyses

Contrat de vente ; Procédure civile


Parties
Demandeurs : Dame S.
Défendeurs : dame P.

Références :

article 24 de l'Ordonnance du 29 avril 1828
article 38 de l'ordonnance du 29 avril 1828
Ordonnance du 29 avril 1828
article 183 du Code civil
article 74 du Code de commerce
articles 986, 988 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1976-01-15;25778 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award