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12/11/2024 | MONACO | N°30751

Monaco | Cour de révision, 12 novembre 2024, v.G c/ j.E et la société M


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LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

* l'arrêt rendu le 6 mai 2024 par la Cour d'appel, statuant en matière correctionnelle ;

* la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 10 mai 2024, par Maître Arnaud CHEYNUT, avocat-défenseur, substituant Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur, au nom de v.G ;

* la requête déposée le 24 mai 2024 au Greffe général, par Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur,

au nom de v.G, accompagnée de 5 pièces, signifiée le même jour ;

* la contre-requête déposée le 24 jui...

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LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

* l'arrêt rendu le 6 mai 2024 par la Cour d'appel, statuant en matière correctionnelle ;

* la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 10 mai 2024, par Maître Arnaud CHEYNUT, avocat-défenseur, substituant Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur, au nom de v.G ;

* la requête déposée le 24 mai 2024 au Greffe général, par Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur, au nom de v.G, accompagnée de 5 pièces, signifiée le même jour ;

* la contre-requête déposée le 24 juin 2024 au Greffe général, par Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom de j.E et de la société M, accompagnée de 2 pièces, signifié le même jour ;

* les conclusions du Ministère Public en date du 2 juillet 2024 ;

* les observations en réplique, déposées au Greffe général le 24 juillet 2024, par Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur, au nom de v.G, signifiées le même jour ;

* la duplique, déposée au Greffe général le 12 août 2024, par Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom de j.E et de la société M, accompagnée de 1 pièce, signifiée le même jour ;

* le certificat de clôture établi le 19 août 2024, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 8 octobre 2024, sur le rapport de Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président,

Motifs

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de la procédure que v.G, résident monégasque de nationalité belge, a fait citer à comparaître devant le Tribunal correctionnel de Monaco j.E et la société M pour s'être rendus coupables du délit de diffamation publique pour avoir, à Monaco, entre août 2022 et octobre 2022, par écrits diffusés sur le site internet de ladite société, porté des allégations ou imputations en publiant sur son site internet différents articles, rédigés en langue finnoise et en anglais, relatifs à un chantier naval situé à Helsinki en Finlande et mettant en cause une société chypriote lui appartenant en lui attribuant des liens avec la Fédération de Russie et son président ; qu'il estimait que dans le contexte du conflit russo-ukrainien de telles affirmations avaient eu des répercussions conséquentes sur sa vie personnelle et professionnelle ; que par jugement du 13 juin 2023, le Tribunal correctionnel, s'est déclaré incompétent et que, sur appel de v.G, la Cour d'appel, par arrêt du 6 mai 2024, a confirmé en toutes ses dispositions le jugement entrepris ; que v.G s'est pourvu en révision ;

* Sur le moyen unique en ses cinq branches :

Attendu, selon le moyen, que v.G fait grief à l'arrêt de violer les articles 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, 21 du Code de procédure pénale, 15 et 24 de la loi n° 1.299 du 15 juillet 2005, en ce que la Cour d'appel correctionnelle a confirmé le jugement rendu par le Tribunal correctionnel le 13 juin 2023 en toute ses dispositions, lequel s'est déclaré incompétent, 1°) alors que « les juridictions pénales monégasques sont compétentes pour connaître des faits de diffamation commis sur internet, ces faits étant réputés avoir été commis en tout lieu où les propos litigieux sont accessibles ; qu'en retenant, pour confirmer le jugement d'incompétence, que le critère d'accessibilité du contenu litigieux publié sur internet ne suffit pas à fonder la compétence des juridictions monégasques, au motif que ce seul critère d'accessibilité au contenu poursuivi comme diffamatoire pour rendre la loi pénale monégasque applicable conduirait à des pratiques de forum shopping offrant à ceux qui s'estiment diffamés la possibilité de choisir la législation leur permettant d'exercer des poursuites, indépendamment de tout lien susceptible de rattacher les propos incriminés au pays dans lequel la législation qui leur est favorable est applicable, la Cour d'appel correctionnelle, qui a ainsi refusé de faire application des principes issus de l'article 21 du Code de procédure pénale, ainsi que des articles 15 et 24 de la loi n° 1.299 du 15 juillet 2005, a violé ces textes » ; 2°) alors que « les juridictions pénales monégasques sont compétentes pour connaître des faits de diffamation commis sur internet, ces faits étant réputés avoir été commis en tout lieu où les propos litigieux sont accessibles ; qu'en retenant, pour confirmer le jugement d'incompétence, que le critère d'accessibilité du contenu litigieux publié sur internet ne suffit pas à justifier la compétence des juridictions monégasques, au motif que ce critère d'accessibilité aux publications par la voie de l'internet ne répondrait pas aux exigences de légalité et de prévisibilité de l'application de la loi pénale, les faits de publication pouvant ne pas être punissables dans le pays où ils ont été mis en ligne, la Cour d'appel correctionnelle, qui a ainsi statué par des motifs impropres à écarter l'application des principes issus de l'article 21 du Code de procédure pénale, ainsi que des articles 15 et 24 de la loi n° 1.299 du 15 juillet 2005, a violé ces textes » ; 3°) alors, subsidiairement, que « les juridictions pénales monégasques sont compétentes pour connaître des faits de diffamation commis sur internet lorsque ces faits ont été commis au préjudice d'un monégasque ou d'une personne résidant habituellement sur le territoire de la Principauté ; qu'en retenant, pour confirmer le jugement d'incompétence, que la circonstance que, du fait de leur diffusion sur le réseau internet finlandais, des propos susceptibles de caractériser le délit de diffamation aient été accessibles depuis la Principauté de Monaco ne caractérise pas, à elle seule, un acte de publication sur ce territoire donnant compétence aux juridictions pénales monégasques, en l'absence de tout critère rattachant les propos incriminés au territoire de la Principauté de Monaco, cependant que la qualité de résident habituel monégasque de Monsieur v.G constituait un tel critère de rattachement, la Cour d'appel correctionnelle a violé l'article 21 du Code de procédure pénale, ainsi que les articles 15 et 24 de la loi n° 1.299 du 15 juillet 2005 » ; 4°) alors « qu'en se prononçant ainsi, en se fondant sur la notion indéfinie et particulièrement floue de destination à la "population monégasque", dans un État où la population compte 77,5% de non monégasques, la Cour d'appel correctionnelle a porté une atteinte injustifiée et disproportionnée au droit d'accès au juge de Monsieur v.G, résident monégasque disposant de solides attaches professionnelles à Monaco dans le domaine du yachting, soit celui même où les propos litigieux ont été tenus, en violation manifeste des articles 6§1, 13 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme » ; 5°) alors, à titre très subsidiaire, que « quand bien même les juridictions pénales monégasques seraient compétentes pour connaître des faits de diffamation commis sur internet, si les propos litigieux sont destinés à la population monégasque, en retenant, pour juger que les propos litigieux n'étaient pas destinés à la population monégasque, que les articles en cause ont été rédigés en langue finnoise et en langue anglaise quand la langue française est la langue officielle de la Principauté, que la qualité d'associé gérant de la société monégasque SARL l de Monsieur v.G n'était pas établie, que l'activité effective de ses sociétés en Principauté n'était pas davantage établie et que la qualité de résident monégasque de Monsieur v.G est insuffisant à établir que les articles en cause aient été destinés aux internautes se trouvant à Monaco, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les articles en cause n'étaient pas destinés à la population monégasque, dès lors que ces articles, dont certains étaient rédigés en anglais, portaient sur le domaine du shipping, fortement représenté dans la Principauté de Monaco où de nombreuses sociétés spécialisées dans ce secteur d'activité sont enregistrées et dont les employés et dirigeants sont anglophones, la Cour d'appel correctionnelle n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 21 du Code de procédure pénale et des articles 15 et 24 de la loi n° 1.299 du 15 juillet 2005 » ;

Mais attendu qu'après avoir exactement rappelé qu'en l'absence de tout critère rattachant à la Principauté les propos incriminés, la circonstance que ceux-ci, du fait de leur diffusion sur le réseau internet, aient été accessibles depuis ledit territoire ne caractérisait pas, à elle seule, un acte de publication sur ce territoire rendant la juridiction pénale monégasque compétente pour en connaître, la Cour d'appel a recherché si les propos poursuivis par v.G pouvaient être rattachés au territoire de la Principauté ; qu'elle a estimé que les articles, rédigés en finnois et en anglais, avaient été publiés par un service de média public finlandais pour informer les finlandais sur la situation financière et la propriété du chantier naval d'Helsinki, qu'ils n'étaient pas destiné à la population monégasque, les sociétés en cause ayant manifestement une activité économique en Belgique, à Chypre, en Allemagne, à Hong Kong, en Australie et aux États-Unis, que v.G ne versait aux débats aucun élément justifiant d'une activité effective de ces sociétés en Principauté et qu'enfin, la qualité de résident monégasque de ce dernier était insuffisante à établir que les articles en cause aient été destinés aux internautes se trouvant à Monaco ;

Qu'en se déterminant ainsi, la Cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Condamne v.G aux frais ;

Composition

Ainsi jugé et rendu le 12 NOVEMBRE 2024, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président, rapporteur, Serge PETIT, Conseiller et Jacques RAYBAUD, Conseiller.-

Et Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président, a signé avec Nadine VALLAURI, Greffier en Chef.

Le Greffier en Chef, Le Premier Président.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 30751
Date de la décision : 12/11/2024

Analyses

Infractions contre les personnes


Parties
Demandeurs : v.G
Défendeurs : j.E et la société M

Références :

articles 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme
loi n° 1.299 du 15 juillet 2005
article 21 du Code de procédure pénale
articles 15 et 24 de la loi n° 1.299 du 15 juillet 2005
article 489 du Code de procédure pénale
Code de procédure pénale


Origine de la décision
Date de l'import : 23/01/2025
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2024-11-12;30751 ?

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