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18/03/2024 | MONACO | N°30468

Monaco | Cour de révision, 18 mars 2024, A. c/ L'État de Monaco


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LA COUR DE RÉVISION,

VU :

* l'arrêt rendu le 28 septembre 2023 par la Cour d'appel, statuant en matière civile, signifié le 19 octobre 2023 ;

* la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 21 novembre 2023, par Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur, substituant Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de s. A., désigné par ordonnance présidentielle en date du 17 novembre 2023, en remplacement de a. A., en qualité de syndic de la liquidation des biens de la SAM B. ;

* la requête déposée le 21 décembre 2023 au Greffe g

énéral, par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de s. A., accompagnée de 5 pièces, sig...

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LA COUR DE RÉVISION,

VU :

* l'arrêt rendu le 28 septembre 2023 par la Cour d'appel, statuant en matière civile, signifié le 19 octobre 2023 ;

* la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 21 novembre 2023, par Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur, substituant Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de s. A., désigné par ordonnance présidentielle en date du 17 novembre 2023, en remplacement de a. A., en qualité de syndic de la liquidation des biens de la SAM B. ;

* la requête déposée le 21 décembre 2023 au Greffe général, par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de s. A., accompagnée de 5 pièces, signifiée le même jour ;

* la contre-requête déposée le 22 janvier 2024 au Greffe général, par Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur, au nom de l'ÉTAT DE MONACO, accompagnée de 3 pièces, signifiée le même jour ;

* les conclusions du Ministère public en date du 29 janvier 2024 ;

* le certificat de clôture établi le 2 février 2024 par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 11 mars 2024 sur le rapport de M. Laurent LE MESLE, Vice-Président,

Après avoir entendu les conseils des parties ;

Ouï le Ministère public ;

Motifs

* Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt critiqué, que par acte du 5 février 2020 Monsieur A., ès qualités de syndic de la liquidation des biens de la SAM B. (la société), a fait assigner l'ÉTAT DE MONACO devant le Tribunal de première instance dans le cadre d'un litige relatif à la mise à disposition de la société par l'état de locaux dans lesquels cette société a exercé son activité ; qu'étaient demandés au tribunal, à titre principal, l'application du statut des baux commerciaux, la réparation de différents préjudices résultant du refus de l'État de reconnaître la commercialité du bail et celle de différents autres préjudices, et à titre subsidiaire que soient ordonnées des expertises ; que, par jugement du 4 novembre 2021, le tribunal a déclaré le syndic prescrit dans ses demandes relatives à l'application du statut des baux commerciaux ainsi que pour des évènements antérieurs au 5 février 2015 et l'a débouté pour le surplus ; que, par arrêt du 28 septembre 2023, la Cour d'appel a déclaré recevable les demandes relatives à l'application du statut des baux commerciaux mais en a débouté le syndic de même qu'elle l'a débouté de toutes les demandes qui en découlaient ; qu'elle a confirmé le jugement de première instance pour le surplus ; que le syndic a formé un pourvoi en révision contre cette décision ;

* Sur la première branche du moyen unique :

Attendu que Monsieur A., ès qualités de syndic de la liquidation des biens de la société, fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes principales et subsidiaires relatives à l'application du statut des baux commerciaux, au paiement d'une indemnité d'éviction et au paiement d'une somme de 500.000 euros au titre d'un refus de lui appliquer le statut des baux commerciaux, et de confirmer le jugement pour le surplus en ses dispositions le déboutant de l'ensemble de ses demandes, alors que « la perte de chance constitue un préjudice réparable ; qu'un bailleur fait perdre à un locataire une chance d'obtenir la conclusion d'un bail commercial en le maintenant, par une convention verbale, dans une situation de précarité tandis que l'exploitation d'une clientèle commerciale dans les lieux loués lui permet de revendiquer la propriété commerciale, nonobstant l'absence de bail commercial rédigé par écrit ; qu'en l'espèce, après le protocole d'accord du 4 octobre 2011, la société B. s'est vu conférer la jouissance de locaux dans lesquels elle exploitait sa clientèle commerciale en vertu d'une convention verbale ; qu'aucun bail commercial n'a été conclu par écrit, ce qui a conduit, lors d'une première procédure, le tribunal (jugement du 18 octobre 2018) puis la cour d'appel (arrêt du 26 septembre 2019) à constater l'existence d'une relation contractuelle synallagmatique de droit commun, que les juges ont résiliée, ordonnant l'expulsion de la locataire, privée de la propriété commerciale ; que le syndic de la liquidation des biens de la société B. faisait valoir que "le fait de ne pas avoir pu disposer d'un bail commercial avait entraîné l'impossibilité de toute solution de restructuration, ou d'obtenir une rentrée financière immédiate, et une baisse de loyer, les difficultés pour les concours bancaires plus importants et de manière moins coûteuse, l'impossibilité de trouver des investisseurs, et l'échec des négociations en 2017", la société ayant ainsi "été dans l'obligation de déposer son bilan", tandis qu'un bail commercial "aurait pu permettre non seulement de récupérer les investissements, mais aussi d'éviter un tel dépôt de bilan", étant précisé que "le coût des licenciements consécutifs à la cessation des paiements a été de 624.840 €" et que le jugement du 18 octobre 2018 assorti de l'exécution provisoire a donné lieu à l'expulsion de la société B., "rendant ainsi impossible la cession du fonds de commerce ou du droit au bail par le syndic" (concl., p.44), en conséquence de quoi une indemnisation de ce poste de préjudice évalué à la somme de 500.000 € était demandée (concl., p. 45 et 52) ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 199 du Code de procédure civile » ;

Mais attendu qu'ayant rappelé que le contrat avait été résilié aux torts de la société par décision définitive intervenue sur le fondement du droit commun, retenu en conséquence, par des motifs non critiqués par le moyen, que les prétentions du requérant fondées sur des dispositions relatives au renouvellement des baux commerciaux ne pouvaient prospérer et relevé qu'il n'était justifié d'aucun préjudice à raison de la non-application de ce statut, la Cour d'appel qui a, implicitement mais nécessairement, déduit de l'ensemble de ces éléments que rien ne permettait d'établir la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable résultant directement d'une faute de l'État, a pu écarter la demande qui lui était présentée à ce titre ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

* Sur la deuxième et dernière branche du moyen unique :

Attendu que Monsieur A., ès qualités de syndic de la liquidation des biens de la société, fait encore le même grief à l'arrêt alors que « le juge qui constate l'existence d'un préjudice en son principe ne peut refuser de l'évaluer et de l'indemniser ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société B. avait subi des dommages (arrêt, p.18 § 1 à 4) ; qu'elle a pourtant refusé d'indemniser ces dommages aux motifs inopérants que les pièces produites ne permettaient pas "de déterminer jusqu'à quel point elle avait reçu une indemnisation" du dégât des eaux, que les "dommages aux agencements" avaient "déjà fait l'objet d'un règlement", que "des opérations d'expertise" aveint été réalisées en 2018, que la société B. ne permettait pas à la cour d'appel "de déterminer si une indemnisation par l'assureur avait été réalisée ainsi que d'appréhender les troubles éventuels" et que "le temps écoulé" et "la réaffectation des locaux" depuis l'expulsion retiraient toute pertinence à une éventuelle expertise, laquelle ne pouvait "être ordonnée pour pallier la carence des parties dans l'administration de la preuve" ; qu'en statuant ainsi, par motifs impropres à exclure toute indemnisation, tandis qu'il lui appartenait d'évaluer le préjudice et de l'indemniser, la cour d'appel a violé les articles 1102 et 1104 (en réalité, 1002 et 1004) du Code civil » ;

Mais attendu qu'ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que les éléments produits à l'appui de la demande de réparation de différents dommages ne lui permettaient pas de s'assurer que la société n'avait pas déjà été indemnisée, ce dont il s'induisait que le requérant ne la mettait pas en mesure de constater la réalité du préjudice allégué, la Cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

* Sur la demande présentée par l'ÉTAT DE MONACO au titre de l'article 238-1 du Code de procédure civile :

Attendu que l'ÉTAT DE MONACO sollicite la condamnation du requérant à lui verser la somme de 10.000 euros en application de l'article 238-1 du Code de procédure civile :

Que l'équité commande de fixer à 5.000 euros le montant de la condamnation à ce titre ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Condamne Monsieur A. ès qualités de syndic de la liquidation des biens de la SAM B. à verser à l'ÉTAT DE MONACO la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 238-1 du Code de procédure civile,

Condamne Monsieur A. ès qualités de syndic de la liquidation des biens de la SAM B. aux entiers dépens, avec distraction au profit de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que les dépens distraits seront liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable ;

Composition

Ainsi jugé et prononcé le dix-huit mars deux mille vingt-quatre, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Messieurs Laurent LE MESLE, Président, rapporteur, François-Xavier LUCAS, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles et Jean-Pierre GRIDEL, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, en présence du Ministère public, assistés de Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, Le Président.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 30468
Date de la décision : 18/03/2024

Analyses

Baux commerciaux


Parties
Demandeurs : A.
Défendeurs : L'État de Monaco

Références :

articles 1102 et 1104 (en réalité, 1002 et 1004) du Code civil
article 139 du Code de procédure civile
article 238-1 du Code de procédure civile
article 199 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2024
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2024-03-18;30468 ?

Source

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