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11/01/2024 | MONACO | N°30455

Monaco | Cour de révision, 11 janvier 2024, LA SAM A. et autres c/ p. E. et autres


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LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

* • l'arrêt de la Cour d'appel, statuant en matière correctionnelle, en date du 3 juillet 2023 ;

* • la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 10 juillet 2023, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom des sociétés A. et B. et de u. C. et a. C. épouse D. ;

* • la requête en révision déposée le 25 juillet 2023 au Greffe général, par Maître Richar

d MULLOT, avocat-défenseur, au nom des sociétés A. et B. et de u. C. et a. C. épouse D., accompagnée de 13 piè...

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LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

* • l'arrêt de la Cour d'appel, statuant en matière correctionnelle, en date du 3 juillet 2023 ;

* • la déclaration de pourvoi souscrite au Greffe général, le 10 juillet 2023, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom des sociétés A. et B. et de u. C. et a. C. épouse D. ;

* • la requête en révision déposée le 25 juillet 2023 au Greffe général, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom des sociétés A. et B. et de u. C. et a. C. épouse D., accompagnée de 13 pièces, signifiée le même jour ;

* • le mémoire du Ministère public en date du 27 juillet 2023 ;

* • la contre-requête déposée le 23 août 2023 au Greffe général, par Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, au nom de p. E., signifiée le même jour ;

* • la contre-requête déposée le 25 août 2023 au Greffe général, par Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur, au nom de f. et f. F., signifiée le même jour ;

* • la réplique déposée le 29 août 2023 au Greffe général par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom des sociétés A. et B. et de u. C. et a. C. épouse D., signifiée le même jour ;

* • le certificat de clôture établi le 3 octobre 2023 par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 14 décembre 2023, sur le rapport de Monsieur Jacques RAYBAUD, Conseiller ;

Motifs

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt critiqué, que le 8 août 2007, M. p. E., M. u. C. et sa fille Mme a. C. ont créé la SAM A. dont la mission était d'une part de revendre les marchandises achetées par la société B., société spécialisée dans le commerce de coke de pétrole acheté auprès de compagnies pétrolières et, d'autre part, d'organiser leur transport ; qu'à ce titre, M. E. a conclu un certain nombre de contrats financiers à terme sur affrètements maritimes (Freight Forward Agreement - FFA), spéculant sur les évolutions des indices de fret et ayant recours pour partie d'entre eux à deux sociétés de droit panaméen, les sociétés G. et H. (H.) qui assumaient l'ensemble des risques liés au transport ; que le 22 mars 2010, le Procureur Général a requis l'ouverture d'une information contre X des chefs d'escroquerie, complicité d'escroquerie, recel d'escroquerie, d'abus de confiance, complicité et recel d'abus de confiance, de présentation de comptes inexacts pour la période de 2007 à 2009 à Monaco, en Italie et en Suisse ; que le 30 septembre 2021, la chambre du conseil de la Cour d'appel a infirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le magistrat instructeur et a renvoyé MM. E., f. et f. F. devant le Tribunal correctionnel pour y répondre des faits précités ; que par jugement contradictoire rendu le 12 juillet 2022, le Tribunal correctionnel a relaxé les prévenus des fins de la poursuite et a débouté les parties civiles de leurs demandes ; que par arrêt du 3 juillet 2023, la Cour d'appel a confirmé cette décision en toutes ses dispositions ; qu'un pourvoi en révision a été formé par les parties civiles ;

* Sur le premier moyen, pris en ses sept branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'encourir la censure en ce que, confirmant le jugement entrepris, il relaxe p. E., f. F. et f. F. des fins de la poursuite alors, selon le moyen, 1°) « que quiconque aura détourné, dissipé, au préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui auraient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou pour un travail salarié ou non, à charge de les rendre, les représenter ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé, se rend coupable d'abus de confiance ; que les circonstances postérieures à la constitution de l'infraction, fût-ce l'aval des associés de la société dont le prévenu était mandataire social, ne remettent pas en cause la qualification pénale déjà acquise des faits ; qu'en décidant le contraire (arrêt, p. 46 antépénultième alinéa), les juges du fond ont violé l'article 337 du Code pénal » ; 2°) « que quiconque aura détourné, dissipé, au préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui auraient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou pour un travail salarié ou non, à charge de les rendre, les représenter ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé, se rend coupable d'abus de confiance ; que l'usage ou l'emploi déterminé doit être défini antérieurement aux faits, sauf à consacrer l'assentiment de la victime en fait justificatif de l'infraction ; qu'en prenant en compte "l'aval" (contesté) de M. C. et de Mme C. (arrêt, p. 46 antépénultième alinéa et seq.) quand cet aval était indifférent et seul comptait l'usage ou l'emploi déterminé lors de la désignation de p. E. comme administrateur délégué, les juges du fond ont à nouveau violé l'article 337 du Code pénal » ; 3°) « que quiconque aura détourné, dissipé, au préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui auraient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou pour un travail salarié ou non, à charge de les rendre, les représenter ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé, se rend coupable d'abus de confiance ; qu'en écartant la qualification d'abus de confiance en raison de l'assentiment des associés, quand les intérêts de la société, mais également des tiers à la société intéressés dans sa solvabilité, sont distincts de ceux des associés, rendant ainsi insuffisant l'assentiment des associés, les juges du fond ont derechef violé l'article 337 du Code pénal » ; 4°) « que tout jugement ou arrêt doit comporter des motifs propres à justifier sa décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'en déduisant l'aval de M. C. et Mme C. aux actes, réalisés hors objet social, qui revêtaient la qualification pénale d'abus de confiance, de ce qu'ils avaient "renoncé à la distribution de dividendes et intégré ces contrats aux comptes de la société" (arrêt, p. 48 alinéa 2), c'est-à-dire simplement tiré les conséquences légales et comptables d'une situation déjà constituée et s'imposant à eux, les juges du fond se sont insuffisamment expliqués sur l'assentiment prétendument donné par les associés ; que ce faisant, ils ont violé l'article 455 du Code de procédure pénale » ; 5°) « que quiconque aura détourné, dissipé, au préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui auraient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou pour un travail salarié ou non, à charge de les rendre, les représenter ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé, se rend coupable d'abus de confiance ; que la dissimulation n'est pas un élément constitutif de l'infraction d'abus de confiance ; qu'en entrant en voie de relaxe, faute pour p. E. d'avoir "tenté en rien de dissimuler la réalité de la situation à ses associés" (arrêt, p. 48 alinéa 2), les juges du fond ont violé l'article 337 du Code pénal » ; 6°) « que quiconque aura détourné, dissipé, au préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui auraient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou pour un travail salarié ou non, à charge de les rendre, les représenter ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé, se rend coupable d'abus de confiance ; que le non-respect de l'affectation de la chose confiée au titre du contrat suffit à caractériser l'abus de confiance, sans que la recherche d'un intérêt personnel de l'agent ne soit exigée, ni même l'absence de conséquences négatives pour lui ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 337 du Code pénal » ; 7°) « que quiconque aura détourné, dissipé, au préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, qui ne lui auraient été remis qu'à titre de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou pour un travail salarié ou non, à charge de les rendre, les représenter ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé, se rend coupable d'abus de confiance ; que faute de mieux s'expliquer sur l'existence d'un intérêt personnel pour p. E., consistant à augmenter plus encore l'exposition au risque de la société B. afin de tenter de dissimuler les pertes déjà réalisées (arrêt, p. 48 antépénultième alinéa), les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 337 du Code pénal » ;

Mais attendu qu'après avoir analysé le rapport des experts ainsi que les échanges d'emails entre les parties, les juges du fond relèvent que, dès l'année 2007, les mouvements liés aux contrats FFA souscrits par p. E. apparaissaient sur les comptes bancaires de la société, que les contrats FFA étaient également présentés au compte de la SAM A., les résultats financiers étant votés lors des conseils d'administration de la société et inscrits au budget depuis 2007 ; qu'ils ajoutent que les parties civiles, qui expliquent avoir compris qu'il s'agissait de couverture de fret, sont des professionnels aguerris du commerce de produits pétroliers et du fret maritime, les consorts C. étant ce que l'on appelle des traders, tout comme p. E. ; qu'ils notent que l'expert judiciaire indique que s'il ne peut exclure que p. E. ait fait passer son intérêt personnel avant celui de la société dans la mesure où les spéculations ne correspondaient pas aux besoins opérationnels de A., force est de constater qu'il a lui-même, en sa qualité d'actionnaire de la société A., supporté indirectement les pertes générées par ses actes de gestion en ne pouvant se voir distribuer des bénéfices ; qu'ils en déduisent, par une appréciation souveraine des éléments de fait qui leur étaient soumis, que la réalité du détournement frauduleux tel qu'allégué par les parties civiles n'est pas établie ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à reprendre une argumentation que la Cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance et de contradiction, a écartée à bon droit, ne peut être accueilli ;

* Sur les deuxième et troisième moyens réunis :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'encourir la censure en ce que, confirmant le jugement entrepris, il relaxe p. E., f. F. et f. F. des fins de la poursuite alors, selon le moyen, 1°) « que le préjudice constitutif du délit d'escroquerie n'est pas nécessairement pécuniaire et est établi lorsque l'acte opérant obligation n'a pas été librement consenti par la victime mais a été obtenu par des moyens frauduleux ; qu'en relaxant les prévenus du chef d'escroquerie ou de complicité d'escroquerie, en raison de l'intérêt financier retiré par la société B. et les autres parties civiles, quand cette circonstance était indifférente en absence de consentement intègre, les juges du fond ont violé l'article 330 du Code pénal » ; 2°) « que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; qu'en concluant à l'utilité du recours aux sociétés interposées par p. E., sans rechercher, ainsi que cela était leur était pourtant demandé, si les deux sociétés n'avaient pas, à plusieurs reprises, facturé chacune la même opération (conclusions de la société B., p. 35 ultime alinéa), les juges du fond ont violé l'article 455 du Code de procédure pénale » ; 3°) « que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; qu'en écartant le moyen déduisant l'inutilité, en terme de gestion des risques du recours aux sociétés interposées de la garantie donnée par la société B. aux armateurs, en raison de l'indemnisation faite par la société H. d'un armateur au terme d'un arbitrage (arrêt, p. 56 alinéa 3) sans prendre eux-mêmes parti sur l'efficacité de la clause de garantie ni mieux s'expliquer sur les circonstances ayant conduit à ce que, à cette occasion, la garantie ne soit pas mobilisée, les juges du fond ont violé l'article 455 du Code de procédure pénale » ; 4°) « que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; qu'en écartant le moyen déduisant de la garantie donnée par la société B. aux armateurs l'inutilité, en terme de gestion des risques, du recours aux sociétés interposées, en raison de l'indemnisation faite par la société H. d'un armateur au terme d'un arbitrage (arrêt, p. 56 alinéa 3) sans préciser si, en cas de défaillance de la société H., la garantie de B. n'aurait pas pu être mobilisée, les juges du fond ont violé l'article 455 du Code de procédure pénale » ; 5°) « que quiconque, soit en faisant usage de faux nom ou de fausse qualité, soit en employant des manœuvres frauduleuses pour persuader l'existence de fausses entreprises, d'un pouvoir ou d'un crédit imaginaire, ou pour faire naître l'espérance ou la crainte d'un succès, d'un accident ou de tout autre événement chimérique, se fera remettre ou délivrer ou aura tenté de se faire remettre ou délivrer des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, et aura, par un de ces moyens, escroqué ou tenté d'escroquer la totalité ou partie de la fortune d'autrui, sera puni d'emprisonnement et d'amende ; qu'en opposant que les parties civiles avaient eu recours, jusqu'en juin 2007, aux sociétés interposées par p. E. et en avaient tiré bénéfice (arrêt, p. 53 alinéa 6) pour écarter toute manœuvre frauduleuse, cependant qu'ils constataient par ailleurs être saisis de faits postérieurs (arrêt, p. 53 alinéa 7), intervenus, en outre, après la décision de cesser de recourir à ces sociétés (arrêt, p. 51 ultime alinéa), les juges du fond se sont placés à une date erronée, violant ainsi l'article 330 du Code pénal » ; 6°) « que quiconque, soit en faisant usage de faux nom ou de fausse qualité, soit en employant des manœuvres frauduleuses pour persuader l'existence de fausses entreprises, d'un pouvoir ou d'un crédit imaginaire, ou pour faire naître l'espérance ou la crainte d'un succès, d'un accident ou de tout autre événement chimérique, se fera remettre ou délivrer ou aura tenté de se faire remettre ou délivrer des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, et aura, par un de ces moyens, escroqué ou tenté d'escroquer la totalité ou partie de la fortune d'autrui, sera puni d'emprisonnement et d'amende ; qu'en opposant que les parties civiles avaient eu recours, jusqu'en juin 2007, aux sociétés interposées par p. E. et en avaient tiré bénéfice (arrêt, p. 53 alinéa 6) pour écarter toute manœuvre frauduleuse au titre de la période postérieure, sans mieux s'expliquer sur les effets de la décision prise, en juin 2007, de ne plus recourir auxdites sociétés, les juges du fond ont affecté leur arrêt d'un manque de base légale au regard de l'article 330 du Code pénal » ; 7°) « que quiconque, soit en faisant usage de faux nom ou de fausse qualité, soit en employant des manœuvres frauduleuses pour persuader l'existence de fausses entreprises, d'un pouvoir ou d'un crédit imaginaire, ou pour faire naître l'espérance ou la crainte d'un succès, d'un accident ou de tout autre événement chimérique, se fera remettre ou délivrer ou aura tenté de se faire remettre ou délivrer des fonds, meubles, effets, deniers, marchandises, billets, promesses, quittances ou tous autres écrits contenant ou opérant obligation ou décharge, et aura, par un de ces moyens, escroqué ou tenté d'escroquer la totalité ou partie de la fortune d'autrui, sera puni d'emprisonnement et d'amende ; que le caractère courant d'une pratique ne permet pas d'effacer le caractère frauduleux de la manœuvre ; qu'en opposant le caractère courant des prises d'intérêt telles que celles prises par p. E. "dans le monde du transport maritime" (arrêt, p. 54 alinéa 1), quand cette circonstance était indifférente à la priver de sa qualification pénale, les juges du fond ont violé l'article 330 du Code pénal » ; et alors, enfin, « que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que faute d'avoir recherché, ainsi que cela leur était demandé, si l'interposition par p. E. d'une société destinée à surfacturer le fret à la société A. ne constituait pas le délit d'escroquerie (conclusions des parties civiles, p. 61), les juges du fond ont violé l'article 455 du Code de procédure pénale » ;

Mais attendu que les énonciations de l'arrêt mettent la Cour de révision en mesure de s'assurer que la Cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et que, sans violer les textes visés au moyen, elle a relevé d'une part, que les sociétés A. et B. qui vendaient H. (H.), c'est à dire tous frais compris, avaient l'obligation d'effectuer le transport envers le client auquel elles avaient vendu la marchandise, qu'elles pouvaient alors choisir de faire un contrat avec un armateur ou bien utiliser un opérateur qui garantissait la réalisation du transport, que la deuxième possibilité présentait des avantages, le premier étant de ne pas prendre le risque de la fluctuation du marché qui était celui d'avoir un coût de fret plus élevé que celui vendu au client, que B. avait pour autre avantage de partager les bénéfices à hauteur de 50% et ce jusqu'à la fin juin 2007, qu'ainsi, les parties civiles ne pouvaient prétendre avoir été victimes de manœuvres frauduleuses par l'interposition, à leur insu, de sociétés dont elles ignoraient l'existence, puisqu'elles avaient elles-mêmes utilisé les services de ces sociétés et retiré des bénéfices de leurs activités ;

Que d'autre part, la Cour relève que, s'agissant des contrats conclus par M. E. à partir de l'année 2007 et jusqu'en 2009, période visée à la prévention, celui-ci avait expliqué tout au long de l'instruction, mais également au cours des audiences pénales, que la société A., une fois la vente conclue avec un acheteur final, concluait un contrat d'affrètement avec l'opérateur H., à un taux inférieur à celui que l'acheteur de la marchandise avait accepté ; que la société H. affrétait elle-même un navire sur le marché, si possible à un taux encore inférieur ; que la société B. pouvait ainsi sécuriser ses marges spécialement sur le prix du transport et qu'ainsi, il n'était pas démontré que le paiement des factures ne correspondait pas à une contrepartie réelle tirée de la fourniture du navire permettant le transport de la marchandise, de la gestion opérationnelle de l'affrètement du navire et du transfert de risques liés à la fluctuation du taux de fret, et ce, pour un taux de fret toujours inférieur à celui encaissé de l'acheteur par la SAM A. qui dégageait donc un bénéfice sur le coût du transport ;

Qu'enfin, l'arrêt retient que les sommes qui auraient pu être perçues par la société H., utilisée comme opérateur de transport maritime pour l'organisation de la marchandise vendue à la société I., correspondaient à sa marge bénéficiaire et qu'au regard de ces éléments, les délits d'escroquerie et de complicité de ce délit reprochés à M. E., à MM. F. ne sont établis en aucun de leurs éléments constitutifs ;

Qu'en l'état de ces constatations, la Cour d'appel a, par un arrêt motivé, légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, n'est pas fondé ;

* Sur le quatrième moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'encourir la censure en ce qu'il, confirmant le jugement entrepris, relaxe M. E. et MM. F. des fins de la poursuite alors que « sont punis des peines prévues à l'article 403 du Code pénal, les administrateurs et les gérants qui, même en l'absence de toute distribution de dividende, ont sciemment publié ou présenté aux actionnaires des comptes inexacts en vue de dissimuler la vérité sur la situation de la société ou sur les résultats de son activité ; qu'en justifiant la relaxe de p. E., après avoir constaté qu'il avait présenté un projet de bilan incomplet, par la circonstance que les actionnaires connaissaient déjà la situation de la société, quand la connaissance de la situation réelle, distincte de celle présentée dans les comptes, était indifférente, les juges du fond ont violé l'article 31 de l'ordonnance souveraine du mars 1895 » ;

Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, la Cour d'appel a relevé qu'il n'était aucunement démontré par les éléments d'information issus de l'enquête, que M. E. ait volontairement dissimulé aux actionnaires, à savoir les consorts C., la vérité sur la situation de la société A. ou sur les résultats de son activité, de sorte que l'élément moral du délit de présentation de faux comptes aux associés faisait défaut ; qu'en prononçant ainsi par une appréciation souveraine des faits constatés par elle, la Cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Condamne la SAM A., la société A., u. C. et a. C. épouse D. aux frais ;

Composition

Ainsi jugé et rendu le onze janvier deux mille vingt-quatre, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Madame Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, Messieurs Serge PETIT, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles et Jacques RAYBAUD, Conseiller, rapporteur, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Et Madame Cécile CHATEL-PETIT, Premier Président, a signé avec Madame Virginie SANGIORGIO, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef le Premier Président.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 30455
Date de la décision : 11/01/2024

Analyses

Procédure pénale - Jugement ; Infractions économiques, fiscales et financières


Parties
Demandeurs : LA SAM A. et autres
Défendeurs : p. E. et autres

Références :

article 337 du Code pénal
article 489 du Code de procédure pénale
article 330 du Code pénal
article 455 du Code de procédure pénale
article 403 du Code pénal


Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2024
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2024-01-11;30455 ?

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