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16/06/2021 | MONACO | N°19852

Monaco | Cour de révision, 16 juin 2021, Monsieur a. C. c/ la société DLA PIPER UK LLP et Madame le Procureur Général de la Principauté de Monaco


Motifs

(en session civile)

La Cour,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite de litiges ayant opposé, au Royaume-Uni, M. a. C. ressortissant italien résidant à Monaco, au cabinet Mishcons de Reya (Mishcons) et à la société Queens Park Rangers Holding (QPRH), le cabinet londonien d'avocats international DLA PIPER LLP (le cabinet DLA), qui l'avait représenté devant les juridictions britanniques, a introduit à son encontre une action en paiement de ses honoraires et frais ; que quatre décisions, con

damnant M. C. à s'acquitter de certaines sommes, ayant été rendues par la Haute Cour de Ju...

Motifs

(en session civile)

La Cour,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite de litiges ayant opposé, au Royaume-Uni, M. a. C. ressortissant italien résidant à Monaco, au cabinet Mishcons de Reya (Mishcons) et à la société Queens Park Rangers Holding (QPRH), le cabinet londonien d'avocats international DLA PIPER LLP (le cabinet DLA), qui l'avait représenté devant les juridictions britanniques, a introduit à son encontre une action en paiement de ses honoraires et frais ; que quatre décisions, condamnant M. C. à s'acquitter de certaines sommes, ayant été rendues par la Haute Cour de Justice de Liverpool - une le 4 novembre 2016, enregistrée le 9 novembre 2016, une autre le 26 juin 2017, enregistrée le 7 juillet 2017, et les deux dernières le 4 novembre 2017, enregistrés le 7 décembre 2017 - le cabinet DLA a sollicité leur exequatur pour exécution en Principauté ; que par jugement contradictoire rendu le 19 décembre 2019, le Tribunal de première instance, après avoir jugé sans fondement les objections présentées à l'application de la loi monégasque n° 1448 du 28 juin 2017, a accueilli la demande ; que, sur son appel, la Cour d'appel ayant rendu, le 24 novembre 2020, un arrêt confirmatif, M. C. s'est pourvu en révision ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches

Attendu que M. C. fait grief à l'arrêt d'avoir accordé l'exequatur des quatre jugements anglais dont s'agit, en violation de la loi précitée, alors, selon le moyen, d'une part, « qu'au titre de l'article 18.2 de ladite loi, le demandeur à l'exécution doit produire l'original de l'exploit de signification ou de tout autre acte en tenant lieu dans l'État où le jugement aura été rendu, qu'il est constant que DLA PIPER, autant dans le cadre de la procédure de reconnaissance pendante en première instance, autant dans le cadre de la procédure d'appel, n'a pas versé aux débats un quelconque acte qui puisse se rapprocher d'une notification ; qu'il est encore constant que signifier un acte, c'est le porter officiellement et incontestablement à la connaissance de la personne destinataire, cet acte étant exécuté soit par voie d'huissier, soit par voie de greffe, afin que ces derniers puissent certifier des conditions et date de remise de celui-ci ; qu'aucune communication officielle et incontestable n'est intervenue dans le cas d'espèce en faveur de M. C. ni par voie postale, ni par voie d'huissier, ni au titre des dispositions de la Convention de la Haye relative à la signification à l'étranger des actes judiciaires ou extrajudiciaires en matière civile ou commerciale du 15 novembre 1965 ; la Cour d'appel a constaté que cette communication intervenait par courrier express sans que la juridiction ne (sic) soit tenue d'en conserver la trace mais elle n'a pas constaté que cette communication était intervenue ; qu'une simple communication – qui plus est en langue anglaise – effectuée au conseil français, qui n'est pas à même de pouvoir élucider (sic) son client de voies et délais de recours applicables dans un pays étranger, dans lequel il n'est pas habilité à exercer, ne constitue pas une notification, et cela d'autant plus que le dit courrier ne fait mention aucune, ni de voies de recours, ni des délais ou des modalités de ceux-ci ; que qui plus est, lors de l'audience du 29 novembre 2017, qui s'est tenue devant le Sir Alistair Macduff, le requérant n'était représenté ni par un conseil français, ni par un conseil anglais, qu'autrement dit, il ne pouvait recevoir aucune notification ; que la Cour d'appel a cru également pouvoir déduire que le requérant s'étant volontairement abstenu de participer à l'audience du 29 novembre 2017, il avait de ce fait été informé du résultat de celle-ci ; que contrairement à ce que déduit la Cour d'appel de Monaco, il est de toute évidence que si le conseil anglais ne s'est pas présenté en audience c'est car (sic) il s'était dessaisi du dossier et qu'il ne pouvait avoir reçu aucune autre communication ; que la Cour d'appel a donc violé la loi, supposant que le but de la notification avait été atteint alors que DLA PIPER n'y a pas apporté la preuve ; que la Cour d'appel a également violé la loi, déduisant que cette information aurait pu être obtenue par le requérant en personne, ne respectant pas, ainsi, les dispositions contenues à l'article 18.2 de la loi n. 1448 du 28 juin 2017 ; que le respect de l'ordre public international n'est en effet pas assuré, donnant exécution à des Jugements qui condamnent lourdement le requérant, sans le mettre en mesure d'y avoir connaissance et d'exercer les voies de recours » ; alors, selon le moyen, d'autre part, « que l'article 18.3 de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017, demande à la partie sollicitant l'exequatur de prouver, par le dépôt d'un certificat venant de la juridiction étrangère ou du greffe, que le Jugement étranger est exécutoire ; que dans le dans le cas d'espèce cette preuve fait défaut ; qui plus est, la Cour d'appel a cru pouvoir déduire que cette absence ne pouvait être comblée car en procédure anglaise il n'existerait pas de certificat de non-appel ; que l'Angleterre a bien ratifié le Règlement européen n° 44/2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale et devait bien être en mesure, en conséquence, de produire un certificat ou tout acte équivalent pouvant prouver qu'un jugement était exécutoire ; que la Cour d'appel, se contentant d'un avis de droit produit par la partie adverse, n'a pas cherché de (sic) vérifier si l'avis était correct ; qu'encore une fois, la Cour d'appel a déduit que les voies de recours étaient épuisées, car l'avis de droit du 9 mars 2018 indiquerait que la High Court of Justice de Liverpool avait statué de manière définitive dans sa décision du 29 novembre 2017 sur l'appel interjeté le 14 juillet 2017 à l'encontre de la décision rendue le 26 juin 2017 ; que procédant par voie de déduction, la Cour d'appel n'a pas non plus été en mesure de constater par elle-même que les décisions rendues par la juridiction anglaise étaient bien exécutoires, ne respectant pas les dispositions de l'article 18.3 de la loi du Droit international privé » ;

Mais attendu que la Cour d'appel, par motifs propres et adoptés, après avoir constaté l'absence de traité entre Monaco et le Royaume-Uni quant à la reconnaissance et à l'exécution des décisions de justice, a affirmé à juste titre la nécessaire application des dispositions de la loi monégasque du 28 juin 2017, précisément en ses articles 13 à 18, et relevé la production incontestée, par le cabinet DLA, des expéditions authentiques des quatre décisions anglaises dont l'exequatur était sollicitée, assorties de leur traduction en langue française, et a retenu d'une part, sur la première branche, se référant à un affidavit versé aux débats, que, si la procédure anglaise rend la juridiction responsable de la signification des décisions par courrier express sans qu'elle soit tenue d'en conserver la trace, il n'y a rien là de contraire à l'ordre public international monégasque ni à la notion de procès équitable dès lors que les parties disposent d'une voie de recours dont elles connaissent l'existence et le point de départ ; que, s'il était constant que le cabinet DLA ne produisait aucune signification ou acte équivalent prescrit par l'article 18.2, M. C. ne pouvait valablement soutenir que l'exercice des droits de sa défense en aurait souffert, alors que, aux audiences des 4 novembre 2016 et 26 juin 2017 ayant donné lieu aux deux décisions du même jour, il était dûment représenté par des conseils français et anglais ; qu'il avait, pour la première décision, interjeté appel le 24 novembre 2016, et formé, pour la seconde, le 14 juillet 2017, un recours tendant à se voir autoriser à faire appel ; que l'examen des deux décisions rendues consécutivement le 29 novembre 2017 et enregistrées le 7 décembre 2017, enseigne que, si M. C. n'était pas présent à l'audience et si son conseil ne s'y était pas déplacé, nonobstant la demande de report formulée par courrier de son avocat français le 27 novembre précédent, il s'était volontairement abstenu de participer à l'audience qui s'est tenue le 29 novembre 2017 quoiqu'il en connût précisément la date ; que la cour a constaté que l'appelant avait été en mesure de prendre connaissance de l'ensemble de ces décisions et d'exercer les voies de recours qui lui étaient offertes, sans qu'il soit démontré que l'absence de production d'un acte de signification ou de tout autre acte en tenant lieu ait porté atteinte aux droits de sa défense ; que d'autre part, sur la seconde branche, relative à la non production de certificats de non-appel ou non-opposition, l'arrêt, interprétant souverainement, sans aucune dénaturation alléguée, les avis de droit anglais produits, expose qu'il n'existe pas en procédure anglaise d'équivalent du certificat de non appel ou d'opposition délivré par la juridiction étrangère ou son greffe, de sorte que le cabinet DLA ne pouvait produire aucune de ces pièces requises par l'article 18.3 de la loi du 28 juin 2017 ; qu'il ressort également des articles de lois britanniques cités dans l'affidavit rédigé le 9 mars 2018 que le délai pour interjeter appel est de 21 jours, courant à compter du prononcé de la décision ; qu'il résulte encore du même avis que la décision rendue le 4 novembre 2016 sur la compétence avait fait l'objet d'un appel rejeté par arrêt de la Haute Cour du 15 mai 2017, statuant sur ce point de manière définitive, et, qu'en ce qui concerne la décision rendue le 26 juin 2017, frappé d'appel le 14 juillet 2017, la cour avait statué de façon définitive par sa décision du 29 novembre 2017, aucun recours n'étant ouvert contre la décision d'un Tribunal civil qui accepte ou rejette une demande d'autorisation d'interjeter appel, après examen en audience, de sorte que, aucune voie de recours ne demeurant ouverte à l'égard de ladite décision, celle-ci est exécutoire et définitive ; que s'agissant enfin des deux décisions du 29 novembre 2017, il résulte également du dossier qu'aucune voie de recours n'est ouverte contre celle qui a ordonné le rejet de la demande d'autorisation d'appel, et que, s'agissant de la seconde, il n'est pas contesté qu'aucune n'a été introduite à son encontre dans le délai de 21 jours ; qu'il s'ensuit que l'arrêt déféré, appréciant souverainement les faits et preuves soumis, établit, malgré la double impossibilité faite à la société DLA de produire tant les significations des jugements et arrêts litigieux que des certificats de non appel ou de non opposition, que M. C. avait eu, en fait, connaissance, en temps utile, du contenu, de la date et du régime des voies de recours le concernant, que ces décisions étaient définitives et exécutoires par application du droit anglais, et qu'elles pouvaient en conséquence recevoir exequatur en Principauté ; que le premier moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches

Attendu que M. C. fait aussi grief à l'arrêt d'avoir accordé l'exequatur des quatre jugements anglais précités, en double violation de la loi du 28 juin 2017, alors, selon le moyen, d'une part, « que son article 15.2 ne reconnaît ni ne rend exécutoire dans la Principauté un jugement si les droits de la défense n'ont pas été respectés, notamment lorsque les parties n'ont pas été régulièrement citées et mises à même de se défendre ; que la Cour d'appel a estimé que le requérant a eu droit à un procès équitable, ayant pu être défendu par les conseils de son choix et ayant pu donner toutes ses explications lors des audiences qui se sont tenues devant la High Court of Justice de Liverpool ; que la Cour d'appel a considéré que Monsieur C. s'était volontairement abstenu de comparaître lors de l'audience du 29 novembre 2017 ; que lors de cette audience, le requérant ne s'est pas abstenu volontairement de comparaître mais a sollicité un report, appuyant sa demande sur un problème de santé, voulant pouvoir donner des explications ; la juridiction anglaise, constatant que ce citoyen n'était même pas représenté lors de cette audience par un conseil anglais, a cru bon de retenir l'affaire pour qu'elle soit jugée, l'empêchant de comparaître à une autre audience en étant accompagné de son conseil, de sorte qu'il n'avait pu profiter d'un procès équitable, situation ayant permis à LDA (sic) d'acquérir une position d'avantage conséquent, d'autant plus que la juridiction anglaise, avant même de pouvoir entendre les explications de M. C., a supposé que l'obtention d'une révision à la baisse constituait »un scenario intrinsèquement improbable«, les droits du requérant n'étant aucunement garantis par la considération qu'il aurait pu accéder au juge en payant une somme provisionnelle de 2 millions de livres sterling, dans un délai de moins d'un mois » ; alors d'autre part, selon le moyen, « que l'article 15.3 de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 exclut l'exequatur en Principauté lorsque la reconnaissance et l'exécution d'un Jugement étranger sont contraires à l'ordre public monégasque ; la Cour d'appel de Monaco a violé la loi, octroyant efficacité aux jugements anglais alors que ces derniers n'étaient pas motivés ; elle a estimé que la motivation était contenue dans la transcription des audiences, sans considérer que les juridictions de droit anglais tirent souvent des conclusions de la simple absence d'une partie dans le cadre d'une procédure ; la Cour de cassation française s'étant à plusieurs reprises prononcée, soulignant que la figure procédurale anglaise du Jugement par défaut dépourvu de motivation est problématique en droit international privé du point de vue de l'exequatur, puisqu'il est déduit de la défaillance du défendeur la victoire du demandeur ; que si la transcription de l'audience sert à enregistrer, d'un point de vue procédural, ce qui se passe dans la procédure, il n'en demeure pas moins que ce résumé ne constitue pas une motivation, et cela d'autant plus qu'il est impossible de savoir comment le montant provisionnel de 2 millions de Livres Sterling a été fixé et qu'il a été prévu qu'à défaut de paiement dudit montant, l'intégralité des demandes de LDA (sic) PIPER auraient été accueillies, ce qui démontre qu'une véritable incertitude quant à la fixation de ce montant est à déplorer, la violation de la loi étant évidente, la Cour d'appel ayant reconnu des Jugements étrangers qui ne sont dotés d'aucune certitude vis-à-vis du requérant, si ce n'est celle qu'il doit régler des sommes, la juridiction qui aurait dû fixer le quantum n'ayant jamais été saisie ; que la détermination du quantum n'a donc jamais fait l'objet d'un débat entre les parties, que donner force à un jugement qui a fixé le montant de condamnation en absence de contradictoire ne signifie pas, seulement, ne pas respecter le droit de la défense, mais également contrevenir à l'ordre public monégasque » ;

Mais attendu, sur la première branche, que la Cour d'appel a observé, s'agissant du droit à un procès équitable apprécié à la lumière de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'au regard du déroulement de la procédure, des décisions intermédiaires tenant lieu de mise en état et de la lecture des décisions rendues, M. C. avait été dûment convoqué à la procédure, qu'il avait régulièrement comparu assisté d'avocats de son choix, qu'il avait bénéficié de plusieurs reports de délais pour déposer ses conclusions et qu'il avait pu être entendu en ses explications à chaque audience, hormis celles tenues le 29 novembre 2017, dont il connaissait pourtant la date comme en témoigne la demande de report qu'il avait formulée, et à laquelle il s'était abstenu de comparaître en connaissance de cause ; qu'il est donc malvenu à soutenir que la procédure anglaise l'a privé de toute possibilité de présenter sa défense, alors que le déroulement du processus judiciaire démontre au contraire qu'il a eu librement accès au juge et a été mis en mesure de présenter sa cause dans le cadre d'un débat contradictoire ; que le paiement avant le 10 juillet 2017 de la somme provisionnelle de deux millions de livres sterling mise à sa charge au terme de la procédure de jugement en forme simplifiée ne l'empêchait pas d'accéder au juge, comme en témoignent notamment les délais qui lui ont été accordés et renouvelés pour faire valoir ses moyens de défense avant la décision finale du 29 novembre 2017, l'appel qu'il avait interjeté le 14 juillet 2017, et son abstention ultérieure tant pour fournir des instructions à ses avocats anglais qui se sont retirés de l'affaire, que pour se faire représenter, en particulier par CAB Associés, à l'audience du 29 novembre 2017, dont il connaissait parfaitement la date et les enjeux ; que la condamnation du requérant au paiement des sommes finalement mises à sa charge est justifiée par l'absence de moyen pertinent opposé en défense tout au long du processus judiciaire, de sorte qu'il ne pouvait donc raisonnablement prétendre avoir été injustement condamné, et que la décision rendue ne recélait donc pas d'atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge ; et, sur la seconde branche, que l'arrêt déféré juge à bon droit que le moyen tiré de l'absence de motivation est inopérant, dès lors que si les décisions de justice britanniques se bornent à énoncer leurs dispositifs et ne comportent pas en elles-mêmes leurs motivations, celles-ci figurent dans la transcription de l'audience, dans laquelle le magistrat fait un exposé du litige, comprenant le moyens des parties et justifie sa position en fait et en droit ; que s'agissant notamment du jugement du 26 juin 2017, l'arrêt ajoute encore que le juge anglais explique parfaitement les motifs pour lesquels il décide de condamner le défendeur à un paiement provisionnel de 2 millions de livres sterling, qu'il estime largement en deçà du montant de la condamnation finale, la lecture de ce que la Cour d'appel a qualifié de transcription de l'audience publique reproduisant une motivation précise et circonstanciée de la décision anglaise ; que M. C. ne pouvait donc se prévaloir de l'absence de motivation des décisions litigieuses pour soutenir la contrariété à l'ordre public monégasque ; qu'il en résulte que les griefs articulés de violation de l'article 15.2 et 3. de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 sont dépourvus de fondement ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi ;

Condamne M. a. C. aux entiers dépens, avec distraction au profit de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que les dépens distraits seront liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 19852
Date de la décision : 16/06/2021

Analyses

La Cour d'appel, par motifs propres et adoptés, après avoir constaté l'absence de traité entre Monaco et le Royaume-Uni quant à la reconnaissance et à l'exécution des décisions de justice, a affirmé à juste titre la nécessaire application des dispositions de la loi monégasque du 28 juin 2017, précisément en ses articles 13 à 18, et relevé la production incontestée, par le cabinet DLA, des expéditions authentiques des quatre décisions anglaises dont l'exequatur était sollicitée, assorties de leur traduction en langue française, et a retenu d'une part, sur la première branche, se référant à un affidavit versé aux débats, que, si la procédure anglaise rend la juridiction responsable de la signification des décisions par courrier express sans qu'elle soit tenue d'en conserver la trace, il n'y a rien là de contraire à l'ordre public international monégasque ni à la notion de procès équitable dès lors que les parties disposent d'une voie de recours dont elles connaissent l'existence et le point de départ ; que, s'il était constant que le cabinet DLA ne produisait aucune signification ou acte équivalent prescrit par l'article 18.2, M. C. ne pouvait valablement soutenir que l'exercice des droits de sa défense en aurait souffert, alors que, aux audiences des 4 novembre 2016 et 26 juin 2017 ayant donné lieu aux deux décisions du même jour, il était dûment représenté par des conseils français et anglais ; qu'il avait, pour la première décision, interjeté appel le 24 novembre 2016, et formé, pour la seconde, le 14 juillet 2017, un recours tendant à se voir autoriser à faire appel ; que l'examen des deux décisions rendues consécutivement le 29 novembre 2017 et enregistrées le 7 décembre 2017, enseigne que, si M. C. n'était pas présent à l'audience et si son conseil ne s'y était pas déplacé, nonobstant la demande de report formulée par courrier de son avocat français le 27 novembre précédent, il s'était volontairement abstenu de participer à l'audience qui s'est tenue le 29 novembre 2017 quoiqu'il en connût précisément la date ; que la cour a constaté que l'appelant avait été en mesure de prendre connaissance de l'ensemble de ces décisions et d'exercer les voies de recours qui lui étaient offertes, sans qu'il soit démontré que l'absence de production d'un acte de signification ou de tout autre acte en tenant lieu ait porté atteinte aux droits de sa défense ; que d'autre part, sur la seconde branche, relative à la non production de certificats de non appel ou non opposition, l'arrêt, interprétant souverainement, sans aucune dénaturation alléguée, les avis de droit anglais produits, expose qu'il n'existe pas en procédure anglaise d'équivalent du certificat de non appel ou d'opposition délivré par la juridiction étrangère ou son greffe, de sorte que le cabinet DLA ne pouvait produire aucune de ces pièces requises par l'article 18.3 de la loi du 28 juin 2017 ; qu'il ressort également des articles de lois britanniques cités dans l'affidavit rédigé le 9 mars 2018 que le délai pour interjeter appel est de 21 jours, courant à compter du prononcé de la décision ; qu'il résulte encore du même avis que la décision rendue le 4 novembre 2016 sur la compétence avait fait l'objet d'un appel rejeté par arrêt de la Haute Cour du 15 mai 2017, statuant sur ce point de manière définitive, et, qu'en ce qui concerne la décision rendue le 26 juin 2017, frappé d'appel le 14 juillet 2017, la cour avait statué de façon définitive par sa décision du 29 novembre 2017, aucun recours n'étant ouvert contre la décision d'un Tribunal civil qui accepte ou rejette une demande d'autorisation d'interjeter appel, après examen en audience, de sorte que, aucune voie de recours ne demeurant ouverte à l'égard de ladite décision, celle-ci est exécutoire et définitive ; que s'agissant enfin des deux décisions du 29 novembre 2017, il résulte également du dossier qu'aucune voie de recours n'est ouverte contre celle qui a ordonné le rejet de la demande d'autorisation d'appel, et que, s'agissant de la seconde, il n'est pas contesté qu'aucune n'a été introduite à son encontre dans le délai de 21 jours ; qu'il s'ensuit que l'arrêt déféré, appréciant souverainement les faits et preuves soumis, établit, malgré la double impossibilité faite à la société DLA de produire tant les significations des jugements et arrêts litigieux que des certificats de non-appel ou de non-opposition, que M. C. avait eu, en fait, connaissance, en temps utile, du contenu, de la date et du régime des voies de recours le concernant, que ces décisions étaient définitives et exécutoires par application du droit anglais, et qu'elles pouvaient en conséquence recevoir exequatur en Principauté ; que le premier moyen n'est pas fondé.La Cour d'appel a observé, s'agissant du droit à un procès équitable apprécié à la lumière de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'au regard du déroulement de la procédure, des décisions intermédiaires tenant lieu de mise en état et de la lecture des décisions rendues, M. C. avait été dûment convoqué à la procédure, qu'il avait régulièrement comparu assisté d'avocats de son choix, qu'il avait bénéficié de plusieurs reports de délais pour déposer ses conclusions et qu'il avait pu être entendu en ses explications à chaque audience, hormis celles tenues le 29 novembre 2017, dont il connaissait pourtant la date comme en témoigne la demande de report qu'il avait formulée, et à laquelle il s'était abstenu de comparaître en connaissance de cause ; qu'il est donc malvenu à soutenir que la procédure anglaise l'a privé de toute possibilité de présenter sa défense, alors que le déroulement du processus judiciaire démontre au contraire qu'il a eu librement accès au juge et a été mis en mesure de présenter sa cause dans le cadre d'un débat contradictoire ; que le paiement avant le 10 juillet 2017 de la somme provisionnelle de deux millions de livres sterling mise à sa charge au terme de la procédure de jugement en forme simplifiée ne l'empêchait pas d'accéder au juge, comme en témoignent notamment les délais qui lui ont été accordés et renouvelés pour faire valoir ses moyens de défense avant la décision finale du 29 novembre 2017, l'appel qu'il avait interjeté le 14 juillet 2017, et son abstention ultérieure tant pour fournir des instructions à ses avocats anglais qui se sont retirés de l'affaire, que pour se faire représenter, en particulier par CAB Associés, à l'audience du 29 novembre 2017, dont il connaissait parfaitement la date et les enjeux ; que la condamnation du requérant au paiement des sommes finalement mises à sa charge est justifiée par l'absence de moyen pertinent opposé en défense tout au long du processus judiciaire, de sorte qu'il ne pouvait donc raisonnablement prétendre avoir été injustement condamné, et que la décision rendue ne recélait donc pas d'atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge ; et, sur la seconde branche, que l'arrêt déféré juge à bon droit que le moyen tiré de l'absence de motivation est inopérant, dès lors que si les décisions de justice britanniques se bornent à énoncer leurs dispositifs et ne comportent pas en elles-mêmes leurs motivations, celles-ci figurent dans la transcription de l'audience, dans laquelle le magistrat fait un exposé du litige, comprenant le moyens des parties et justifie sa position en fait et en droit ; que s'agissant notamment du jugement du 26 juin 2017, l'arrêt ajoute encore que le juge anglais explique parfaitement les motifs pour lesquels il décide de condamner le défendeur à un paiement provisionnel de 2 millions de livres sterling, qu'il estime largement en deçà du montant de la condamnation finale, la lecture de ce que la Cour d'appel a qualifié de transcription de l'audience publique reproduisant une motivation précise et circonstanciée de la décision anglaise ; que M. C. ne pouvait donc se prévaloir de l'absence de motivation des décisions litigieuses pour soutenir la contrariété à l'ordre public monégasque ; qu'il en résulte que les griefs articulés de violation de l'article 15.2 et 3. de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 sont dépourvus de fondement.

Procédure - Droit anglais - Exequatur - Voies de recours - Décisions exécutoires et définitives - Motivation - Conformité à l'ordre public monégasque.


Parties
Demandeurs : Monsieur a. C.
Défendeurs : la société DLA PIPER UK LLP et Madame le Procureur Général de la Principauté de Monaco

Références :

loi n. 1448 du 28 juin 2017
loi du 28 juin 2017
loi n° 1.448 du 28 juin 2017


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2021-06-16;19852 ?

Source

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