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13/10/2017 | MONACO | N°16404

Monaco | Cour de révision, 13 octobre 2017, La SOCIÉTÉ DES BAINS DE MER ET DU CERCLE DES ÉTRANGERS (SBM) c/ Monsieur g. PL.


Motifs

Pourvoi N° 2017-71 Hors Session

COUR DE RÉVISION

ARRET DU 13 OCTOBRE 2017

En la cause de :

- La SOCIÉTÉ DES BAINS DE MER ET DU CERCLE DES ETRANGERS (SBM), dont le siège social se trouve Place du Casino à Monaco (98000), prise en la personne de son Président Délégué en exercice, demeurant en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur près la Cour d'Appel, ayant comme avocat plaidant Maître Hubert FLICHY, avocat au Barreau de Paris ;

DEMANDERESSE EN REVISION,

d'une part,

Contre :

- Monsieur g. PL., né le 28 juin 1964 en AVIGNON (84), de nationalité monégasque, demeuran...

Motifs

Pourvoi N° 2017-71 Hors Session

COUR DE RÉVISION

ARRET DU 13 OCTOBRE 2017

En la cause de :

- La SOCIÉTÉ DES BAINS DE MER ET DU CERCLE DES ETRANGERS (SBM), dont le siège social se trouve Place du Casino à Monaco (98000), prise en la personne de son Président Délégué en exercice, demeurant en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur près la Cour d'Appel, ayant comme avocat plaidant Maître Hubert FLICHY, avocat au Barreau de Paris ;

DEMANDERESSE EN REVISION,

d'une part,

Contre :

- Monsieur g. PL., né le 28 juin 1964 en AVIGNON (84), de nationalité monégasque, demeurant X1 à Monaco;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'Appel ;

DEFENDEUR EN REVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions des articles 439 à 459-7 du code de procédure civile et l'article 14 de la loi n°1.375 du 16 décembre 2010 modifiant la loi n°446 du 16 mai 1946, portant création d'un tribunal du travail ;

VU :

* l'arrêt rendu par la Cour d'appel, statuant en matière civile sur appel du tribunal du travail, en date du 21 mars 2017, signifié le 3 avril 2017 ;

* la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 2 mai 2017, par Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur, au nom de la SOCIÉTÉ DES BAINS DE MER ET DU CERCLE DES ETRANGERS (SBM) ;

* la requête déposée le 29 mai 2017 au greffe général, par Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur, au nom de la SOCIÉTÉ DES BAINS DE MER ET DU CERCLE DES ETRANGERS (SBM), signifiée le même jour ;

* la contre-requête déposée le 28 juin 2017 au greffe général, par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de M. g. PL., signifiée le même jour ;

* les conclusions du Ministère Public en date du 30 juin 2017 ;

* Vu la réplique déposée le 5 juillet 2017 au greffe général par Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur, au nom de la SOCIÉTÉ DES BAINS DE MER ET DU CERCLE DES ETRANGERS (SBM), signifiée le même jour ;

* la duplique déposée le 13 juillet 2017 au greffe général, par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de M. g. PL., signifiée le même jour ;

* le certificat de clôture établi le 25 juillet 2017, par le Greffier en Chef, attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

A l'audience du 7 septembre 2017, sur le rapport de Monsieur Jean-François RENUCCI, Vice-Président,

La Cour,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt critiqué et les pièces de la procédure, que M. g. PL., salarié du SUN CASINO, a saisi le tribunal du travail aux fins d'obtenir le paiement d'un rappel de salaires correspondant au différentiel entre sa rémunération et celle perçue par un salarié occupant un poste équivalent au CASINO/CAFÉ DE PARIS ; que, par arrêt du 21 mars 2017, la cour d'appel, réformant partiellement le jugement du tribunal du travail, a dit, d'une part, que l'inégalité de traitement subie par M. PL. par rapport à un employé exerçant des fonctions de valeur égale aux siennes au sein de la salle de jeux du CAFÉ DE PARIS n'était pas justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute volonté de discrimination et revêtait donc un caractère illicite, d'autre part, que sa demande de rappel de salaires pour la période de cinq ans arrêtée à la date de la non-conciliation, soit le 10 mai 2010, était fondée en son principe, ordonnant une mesure d'expertise ; que la S.A.M. SOCIÉTÉ DES BAINS DE MER ET DU CERCLE DES ÉTRANGERS (la SBM), qui exploite ces deux casinos, s'est pourvue en révision à l'encontre de cet arrêt ;

Sur le moyen unique pris en ses trois branches

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt critiqué de statuer ainsi, alors, selon le moyen, premièrement, que l'application du principe « à travail égal, salaire égal » aux accords collectifs a pour effet d'interdire à un accord collectif d'instituer des différences de traitement injustifiées entre salariés entrant dans leur champ d'application ; que le principe « à travail égal, salaire égal » ne saurait en revanche modifier le champ d'application d'un accord collectif tel qu'il a été défini par les parties qui l'ont conclu ; qu'en conséquence, les différences de traitement entre salariés qui résultent d'accords collectifs ayant des champs d'application différents ne sont pas contraires au principe « à travail égal, salaire égal » qui vise à condamner les discriminations salariales reposant sur des a priori ou des critères illicites ; qu'en l'espèce, il est constant que la rémunération des cadres des jeux américains du SUN CASINO et celle de leurs homologues du CASINO/CAFÉ DE PARIS résultent d'accords collectifs distincts, négociés et conclus au niveau de chaque casino, et applicables aux seuls personnels de chaque casino ; qu'en affirmant cependant que l'existence de statuts collectifs différenciés au sein de chacun des casinos, dont résultent les systèmes de rémunération différents pour les cadres des jeux américains de chaque casino, n'apparaît pas de nature à légitimer une quelconque disparité de rémunération existant entre deux catégories d'employés, en cas d'identité de fonction, la cour d'appel a violé le principe « à travail égal, salaire égal » ; alors, deuxièmement, que ni le principe d'égalité de traitement ni la règle « à travail égal, salaire égal » n'interdisent de rémunérer les salariés, en tout ou partie, en fonction des résultats collectifs de l'établissement, du site ou de l'équipe au sein desquels ils travaillent ; que les salariés d'un établissement, d'un site ou d'une équipe ne peuvent prétendre, en invoquant le principe « à travail égal, salaire égal », au paiement d'une rémunération calculée sur les résultats d'un autre établissement, d'un autre site ou d'une autre équipe, et non sur ceux de l'établissement, du site ou de l'équipe dans lesquels ils travaillent ; qu'en l'espèce, la SBM soutenait que M. PL. qui travaille au sein du SUN CASINO ne pouvait réclamer, sur le fondement du principe « à travail égal, salaire égal », le paiement d'une rémunération égale à celle versée aux salariés du CASINO/CAFÉ DE PARIS, dans la mesure où ces derniers perçoivent une rémunération calculée sur les résultats du casino au sein duquel ils travaillent ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la fixation de la rémunération des salariés CASINO/CAFÉ DE PARIS en fonction des résultats de ce casino n'interdisait pas aux salariés du SUN CASINO de prétendre à une rémunération identique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la règle « à travail égal, salaire égal » ; alors, troisièmement, que s'abstenant de répondre au moyen déterminant des conclusions de la SBM, selon lequel rien ne justifie que les salariés du SUN CASINO bénéficient d'une rémunération déterminée en fonction des résultats d'un autre casino, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 199 du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant exactement énoncé que le principe d'égalité de traitement signifie que tous les salariés doivent recevoir une rémunération égale en contrepartie d'un travail égal ou de valeur égale, s'agissant du salaire mais également des divers avantages et accessoires y afférents, que la règle « à travail égal, salaire égal » s'applique à tous les employeurs dont les salariés sont placés dans des conditions identiques et qui accomplissent des tâches semblables ou de même valeur au sein d'une même entreprise, et retenu qu'aucune disparité salariale entre les employés du SUN CASINO et ceux du CASINO/CAFÉ DE PARIS ne saurait être simplement justifiée par la localisation de leur activité professionnelle, les différentes salles de jeux concernées constituant simplement – à défaut de toute réelle autonomie de direction et d'exploitation – des sites géographiques distincts dans lesquels la SBM, employeur unique, exploite une seule et même activité, que l'existence de statuts collectifs différenciés au sein de ces structures ne peut légitimer une quelconque disparité de rémunération existant entre deux catégories d'employés en cas d'identité de fonction, que les salariés concernés exercent les mêmes tâches et attributions et occupent des fonctions similaires dans l'une ou l'autre de ces salles de jeux, que leur transfert d'un site à l'autre n'est pas considéré par l'employeur comme une mutation, un changement d'emploi ou une promotion, que la rémunération est calculée selon des modalités différentes pour les cadres du SUN CASINO et du CAFÉ DE PARIS et qu'il résulte des pièces produites que les salariés du CASINO/CAFÉ DE PARIS occupant un poste hiérarchiquement équivalent bénéficient de rémunérations plus importantes que celles perçues par leurs homologues du SUN CASINO, et enfin qu'aucune raison objective n'apparaît établie ni même expliquée par l'employeur pour justifier le caractère non uniforme de la rémunération au sein de cette même catégorie professionnelle, la cour d'appel qui répondant aux conclusions a fait ressortir que les salariés exerçaient leur activité au sein d'un seul et même établissement et qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a justement déduit que la disparité de traitement correspondante revêt un caractère illicite ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur la demande de condamnation à l'amende et aux dommages et intérêts

Attendu que M. PL. sollicite la condamnation de la SBM à l'amende et au paiement de la somme de 100.000 euros au titre de dommages et intérêts pour pourvoi abusif et injustifié ;

Mais attendu qu'au regard des circonstances de la cause, dont il ne résulte pas que la SBM ait abusé de son droit de se pourvoir en révision, il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi ;

Déboute Monsieur g. PL. de sa demande de condamnation de la S. A. M. SOCIETE DES BAINS DE MER ET DU CERCLE DES ETRANGERS à l'amende et aux dommages et intérêts ;

Condamne la S. A. M. SOCIETE DES BAINS DE MER ET DU CERCLE DES ETRANGERS aux dépens, dont distraction au profit de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;

Composition

Ainsi délibéré et jugé le treize octobre deux mille dix-sept, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Jean-François RENUCCI, Président, rapporteur, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Messieurs François CACHELOT et Serge PETIT, Conseillers.

Et Monsieur Jean-François RENUCCI, Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Président

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 16404
Date de la décision : 13/10/2017

Analyses

Ayant exactement énoncé que le principe d'égalité de traitement signifie que tous les salariés doivent recevoir une rémunération égale en contrepartie d'un travail égal ou de valeur égale, s'agissant du salaire mais également des divers avantages et accessoires y afférents, que la règle « à travail égal, salaire égal » s'applique à tous les employeurs dont les salariés sont placés dans des conditions identiques et qui accomplissent des tâches semblables ou de même valeur au sein d'une même entreprise, et retenu qu'aucune disparité salariale entre les employés du SUN CASINO et ceux du CASINO/CAFÉ DE PARIS ne saurait être simplement justifiée par la localisation de leur activité professionnelle, les différentes salles de jeux concernées constituant simplement à défaut de toute réelle autonomie de direction et d'exploitation de sites géographiques distincts dans lesquels la SBM, employeur unique, exploite une seule et même activité, que l'existence de statuts collectifs différenciés au sein de ces structures ne peut légitimer une quelconque disparité de rémunération existant entre deux catégories d'employés en cas d'identité de fonction, que les salariés concernés exercent les mêmes tâches et attributions et occupent des fonctions similaires dans l'une ou l'autre de ces salles de jeux, que leur transfert d'un site à l'autre n'est pas considéré par l'employeur comme une mutation, un changement d'emploi ou une promotion, que la rémunération est calculée selon des modalités différentes pour les cadres du SUN CASINO et du CAFÉ DE PARIS et qu'il résulte des pièces produites que les salariés du CASINO/CAFÉ DE PARIS occupant un poste hiérarchiquement équivalent bénéficient de rémunérations plus importantes que celles perçues par leurs homologues du SUN CASINO, et enfin qu'aucune raison objective n'apparaît établie ni même expliquée par l'employeur pour justifier le caractère non uniforme de la rémunération au sein de cette même catégorie professionnelle, la cour d'appel qui répondant aux conclusions a fait ressortir que les salariés exerçaient leur activité au sein d'un seul et même établissement et qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a justement déduit que la disparité de traitement correspondante revêt un caractère illicite.

Social - Général  - Conditions de travail.

Contrat de travail - Égalité de traitement - Conditions - Entreprise unique - Identité de fonctions - Sites différents - Raison objective (non).


Parties
Demandeurs : La SOCIÉTÉ DES BAINS DE MER ET DU CERCLE DES ÉTRANGERS (SBM)
Défendeurs : Monsieur g. PL.

Références :

loi n°446 du 16 mai 1946
article 199 du Code de procédure civile
articles 439 à 459-7 du code de procédure civile
article 14 de la loi n°1.375 du 16 décembre 2010


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2017-10-13;16404 ?

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