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05/03/2015 | MONACO | N°13007

Monaco | Cour de révision, 5 mars 2015, M. k. AB. et M. i. AB. c/ le Ministère public


Motifs

Pourvoi N° 2014-78 Hors Session

PG n° 37 TG 13 pénal

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 5 MARS 2015

En la cause de :

- M. k. AB., né le 30 avril 1969 à BEYROUTH (Liban), de nationalité française, demeurant Immeuble « X » à Dakar (Sénégal) ;

- M. i. AB., né le 13 avril 1966 à BEYROUTH (Liban), de nationalité française, demeurant Immeuble « X » à Dakar (Sénégal) ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et ayant comme avocat plaidant Maître Yann LAJ

OUX, avocat-défenseur près de la même cour et Maîtres Emmanuel PIWNICA, Jacques et François MOLINIE, avocats aux conseils ;

DEM...

Motifs

Pourvoi N° 2014-78 Hors Session

PG n° 37 TG 13 pénal

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 5 MARS 2015

En la cause de :

- M. k. AB., né le 30 avril 1969 à BEYROUTH (Liban), de nationalité française, demeurant Immeuble « X » à Dakar (Sénégal) ;

- M. i. AB., né le 13 avril 1966 à BEYROUTH (Liban), de nationalité française, demeurant Immeuble « X » à Dakar (Sénégal) ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et ayant comme avocat plaidant Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur près de la même cour et Maîtres Emmanuel PIWNICA, Jacques et François MOLINIE, avocats aux conseils ;

DEMANDEURS EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- MINISTÈRE PUBLIC,

DÉFENDEUR EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

- l'arrêt rendu par la Chambre du conseil de la Cour d'appel, statuant comme juridiction d'instruction, le 8 août 2014 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 8 août 2014, par Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur, au nom de M. i. AB. et de M. k. AB. ;

- le récépissé délivré par la Caisse des Dépôts et Consignations sous le n° 44836, en date du 14 août 2014, attestant du dépôt par Maître Frank LICHEL, au nom des demandeurs, de la somme destinée à assurer le paiement de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

- la requête déposée le 18 août 2014 au greffe général, par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de M. i. AB. et de M. k. AB., signifiée le même jour ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 3 décembre 2014 ;

- les conclusions en réponse aux conclusions du Ministère Public, déposées le 19 décembre 2014 au greffe général, par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de M. i. AB. et de M. k. AB., signifiée le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 5 janvier 2015, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 19 février 2015, sur le rapport de Monsieur François CACHELOT, conseiller,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. k. AB. et M. i. AB. sont titulaires ou bénéficiaires dans les livres d'une banque monégasque de plusieurs comptes bancaires qui ont fait l'objet d'une mesure de séquestre en exécution de commissions rogatoires internationales des 15 et 22 mai 2013 émanant des autorités judiciaires sénégalaises ; que par requête du 24 février 2014 aux fins de nullité des actes d'exécution de ces commissions rogatoires accomplis sur le territoire de la Principauté, les consorts AB. ont demandé la communication de ces actes ; que retenant que le refus du Ministère public avait porté atteinte aux droits de la défense, la Chambre du conseil de la Cour d'appel, statuant comme juridiction d'instruction, a, par arrêt du 23 juin 2014, ordonné la mainlevée du blocage des comptes et des avoirs dont les consorts AB. étaient titulaires ou bénéficiaires dans les livres de la banque ; que, par commission rogatoire internationale du 26 juin 2014, les autorités sénégalaises ont demandé au procureur général près la Cour d'appel de la Principauté de Monaco de procéder à la saisie, à titre conservatoire, des avoirs détenus sur ces comptes bancaires ; que cette mesure ayant été exécutée le 7 juillet 2014, les consorts AB. ont, le 16 juillet 2014, saisi la Chambre du conseil de la Cour d'appel d'une demande de mainlevée ;

Attendu que les consorts AB. font grief à l'arrêt de rejeter leur demande, en violation du principe « fraus omnia corrumpit », des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 203, 204 et 455 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale alors, selon le moyen, de première part que le refus de communication d'une commission rogatoire internationale et de l'ensemble de ses pièces d'exécution porte atteinte aux droits de la défense et aux règles du procès équitable et que, dès lors, la Cour d'appel ne pouvait considérer que la communication d'une décision de justice rendue au Sénégal éclairait suffisamment le litige et qu'il n'était pas nécessaire que l'ensemble des pièces accompagnant la commission rogatoire soit communiqué ; alors de deuxième part que la fraude corrompt tout ; qu'un acte qui a pour seul objet de faire échec à la force de chose jugée d'une décision de justice est frauduleux et ne peut avoir aucun effet ; que dès lors, la Cour d'appel ne pouvait rejeter la demande de mainlevée, ordonnée par une décision rendue le 23 juin 2014, qui n'avait pu être exécutée du fait de la réitération de la commission rogatoire internationale, sans rechercher si cette réitération n'avait pas pour unique objet de faire échec à une décision de justice passée en force de chose jugée ; alors de troisième part qu'un acte ne peut être qualifié de commission rogatoire que s'il a pour objet une mesure d'instruction ; que seules les commissions rogatoires internationales régulièrement délivrées doivent être exécutées par les autorités monégasques ; qu'il incombe donc à la juridiction monégasque de contrôler que l'acte dont l'exécution est sollicitée constitue bien une commission rogatoire, quelle que soit la dénomination que lui ont donné les autorités qui l'ont délivrée ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel ne pouvait donc refuser de vérifier que l'acte litigieux avait pour objet l'exécution d'un acte d'instruction et constituait une commission rogatoire, ce qui était contesté ;

Mais attendu de première part qu'ayant relevé qu'à la suite du blocage des comptes effectué sur commission rogatoire internationale le 7 juillet 2014, les conseils des requérants avaient, à leur demande, été rendus destinataires par le Ministère public de la copie des pièces relatives à l'exécution de cette mesure, selon bordereau de communication en date du 10 juillet 2014 incluant l'arrêt de la juridiction d'instruction sénégalaise du 16 avril 2014 renvoyant les consorts AB. devant la juridiction de jugement, décision qui éclairait à suffisance sur les faits et la procédure suivie au Sénégal, et exactement retenu que la mission de la juridiction de l'État monégasque n'était pas de contrôler la régularité de la procédure conduite sur le territoire de l'État sénégalais, mais seulement la régularité des actes effectués sur son propre territoire, dans le cadre de la commission rogatoire internationale dont la Direction des services judiciaires a considéré que l'exécution apparaissait opportune en Principauté, la Cour d'appel a pu en déduire que l'absence de communication de l'ensemble des pièces de la procédure sénégalaise n'était pas de nature à constituer une violation des dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu de deuxième part qu'ayant relevé que l'arrêt du 23 juin 2014 avait ordonné la mainlevée de la saisie des comptes après avoir retenu que le refus de communication opposé par le Ministère public avait porté atteinte aux droits de la défense, l'arrêt retient exactement, par des motifs excluant toute fraude, qu'aucun grief de violation de l'autorité de la chose jugée n'est encouru dès lors qu'à l'inverse de la précédente procédure, la communication des pièces par le Ministère public est effective ;

Attendu de troisième part que la Cour d'appel a retenu à bon droit qu'il appartenait à la seule Direction des services judiciaires d'apprécier si la mesure de blocage contestée était assimilable ou non à une commission rogatoire ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé dans aucune de ses branches ;

Sur l'amende prévue à l'article 502 du Code de procédure pénale

Attendu que la condamnation systématique à une amende de la partie qui succombe dans son pourvoi sanctionnant de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision, ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35§1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu toutefois qu'eu égard aux circonstances de la cause, il y a lieu de prononcer une condamnation au paiement d'une amende de 300 euros ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi

Condamne M. k. AB. et M i. AB. à l'amende et aux dépens.

Composition

Ainsi délibéré et jugé le cinq mars deux mille quinze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Madame Cécile PETIT, conseiller faisant fonction de Président, rapporteur, Jean-Pierre GRIDEL, Jean-François RENUCCI, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, et François CACHELOT, Conseillers.

Et Madame Cécile PETIT, Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Président

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 13007
Date de la décision : 05/03/2015

Analyses

Ayant relevé qu'à la suite du blocage des comptes effectué sur commission rogatoire internationale le 7 juillet 2014, les conseils des requérants avaient, à leur demande, été rendus destinataires par le Ministère public de la copie des pièces relatives à l'exécution de cette mesure, selon bordereau de communication en date du 10 juillet 2014 incluant l'arrêt de la juridiction d'instruction sénégalaise du 16 avril 2014 renvoyant les consorts AB. devant la juridiction de jugement, décision qui éclairait à suffisance sur les faits et la procédure suivie au Sénégal, et exactement retenu que la mission de la juridiction de l'État monégasque n'était pas de contrôler la régularité de la procédure conduite sur le territoire de l'État sénégalais, mais seulement la régularité des actes effectués sur son propre territoire, dans le cadre de la commission rogatoire internationale dont la Direction des services judiciaires a considéré que l'exécution apparaissait opportune en Principauté, la Cour d'appel a pu en déduire que l'absence de communication de l'ensemble des pièces de la procédure sénégalaise n'était pas de nature à constituer une violation des dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.Ayant relevé que l'arrêt du 23 juin 2014 avait ordonné la mainlevée de la saisie des comptes après avoir retenu que le refus de communication opposé par le Ministère public avait porté atteinte aux droits de la défense, l'arrêt retient exactement, par des motifs excluant toute fraude, qu'aucun grief de violation de l'autorité de la chose jugée n'est encouru dès lors qu'à l'inverse de la précédente procédure, la communication des pièces par le Ministère public est effective.La Cour d'appel a retenu à bon droit qu'il appartenait à la seule Direction des services judiciaires d'apprécier si la mesure de blocage contestée était assimilable ou non à une commission rogatoire.D'où il suit que le moyen n'est fondé dans aucune de ses branches.La condamnation systématique à l'amende prévue à l'article 502 du Code de procédure pénale de la partie qui succombe dans son pourvoi sanctionnant de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision, ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35 § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois eu égard aux circonstances de la cause, il y a lieu de prononcer une condamnation au paiement d'une amende.

Procédure pénale - Général  - Procédure pénale - Jugement.

Commission rogatoire internationale - Contrôle de la régularité Étendue Limite - Communication des pièces de la procédure étrangère (non) - Violation de l'article 6 de la convention européenne (non) - Direction des services judiciaires - Rôle - Amende - Circonstances de la cause.


Parties
Demandeurs : M. k. AB. et M. i. AB.
Défendeurs : le Ministère public

Références :

article 489 du Code de procédure pénale
Code de procédure pénale
article 502 du Code de procédure pénale


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2015-03-05;13007 ?

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