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15/01/2015 | MONACO | N°12956

Monaco | Cour de révision, 15 janvier 2015, La Société Anonyme Monégasque J. SA. SARASIN Gestion c/ M. v. GR.


Motifs

Pourvoi N° 2014-71 Hors Session

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 15 JANVIER 2015

En la cause de :

- La Société Anonyme Monégasque J. SA. SARASIN Gestion (Monaco), anciennement dénommée Société Anonyme Monégasque J. SA. Gestion (Monaco), dont le siège social est sis 15 bis - 17, avenue d'Ostende à Monaco, agissant poursuites et diligences de son président administrateur délégué en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;

- La Société Anonyme Monégasque Banque J. SA. SARASIN (Monaco) anciennement dénommée Banque J. SA.

(Monaco), dont le siège social est sis 15 bis/17, avenue d'Ostende à Monaco, agissant poursuites et diligenc...

Motifs

Pourvoi N° 2014-71 Hors Session

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 15 JANVIER 2015

En la cause de :

- La Société Anonyme Monégasque J. SA. SARASIN Gestion (Monaco), anciennement dénommée Société Anonyme Monégasque J. SA. Gestion (Monaco), dont le siège social est sis 15 bis - 17, avenue d'Ostende à Monaco, agissant poursuites et diligences de son président administrateur délégué en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;

- La Société Anonyme Monégasque Banque J. SA. SARASIN (Monaco) anciennement dénommée Banque J. SA. (Monaco), dont le siège social est sis 15 bis/17, avenue d'Ostende à Monaco, agissant poursuites et diligences de son administrateur délégué en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel ;

DEMANDERESSES EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- M. v. GR., né le 26 mars 1963 à Borgofranco (Italie), de nationalité italienne, demeurant X à Monaco (98000) ;

Bénéficiaire de l'assistance judiciaire n° 157 BAJ 08, par décision du bureau du 17 décembre 2008

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel ;

DÉFENDEUR EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions des articles 439 à 459-7 du Code de procédure civile et de l'article 14 de la loi n° 1.375 du 16 décembre 2010 modifiant la loi n° 446 du 16 mai 1946, portant création d'un Tribunal du travail ;

VU :

- l'arrêt rendu par la Cour d'appel, statuant en matière civile, le 17 juin 2014 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 29 juillet 2014, par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de la SAM J SA. SARASIN GESTION (Monaco) et la SAM Banque J SA. SARASIN (Monaco) ;

- le récépissé délivré par la Caisse des Dépôts et Consignations sous le n° 44755, en date du 29 juillet 2014 attestant de la remise par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom des demanderesses de la somme de 300 euros au titre de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

- la requête déposée le 31 juillet 2014 au greffe général, par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de la SAM J SA. SARASIN GESTION (Monaco) et la SAM Banque J SA. SARASIN (Monaco), accompagnée de 25 pièces, signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée le 29 août 2014 au greffe général, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de M. v. GR., signifiée le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 8 octobre 2014, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 13 octobre 2014 ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 18 décembre 2014, sur le rapport de Madame Cécile PETIT, conseiller,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. v. GR., recruté le 3 décembre 2001 en qualité de Senior portfolio manager OPCVM par la SAM Banque du Gothard devenue Banque J SA. Monaco, a été mis à disposition le 21 juillet 2006 de la SAM J SA. Sarasin Gestion Monaco puis embauché au sein de cette société par contrat à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2007 ; que le 27 septembre 2007, son employeur lui ayant notifié son licenciement pour faute, il a saisi le bureau de conciliation pour voir condamner les banques J SA. Monaco et J SA. Gestion Monaco à lui payer la somme de 525.000 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle ; qu'en l'absence de conciliation, M. v. GR. a saisi le Tribunal du travail qui, avant dire droit au fond, a ordonné une mesure d'expertise; que sur appel des deux sociétés, par arrêt du 29 janvier 2013, la Cour d'appel a constaté la nullité du jugement en application de l'article 199 alinéa 4 du Code de procédure civile et, évoquant, a enjoint les parties de conclure au fond ; que par arrêt du 25 juin 2013, la Cour d'appel a mis hors de cause la SAM Banque J SA., dit que le licenciement n'était pas fondé sur un motif valable et revêtait en outre un caractère abusif et a condamné la SAM J SA. Gestion Monaco à payer à M. v. GR. la somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ; que les banques susvisées ayant saisi la Cour d'appel aux fins de rétractation de cet arrêt sur le fondement de l'article 438 du Code de procédure civile, la Cour d'appel par arrêt du 17 juin 2014, les a déboutées de leur demande, les condamnant solidairement à verser à M. v. GR. la somme de 10.000 euros au titre de l'indemnité prévue par l'article 438-6 du Code de procédure civile ; que ces dernières se sont pourvues en révision ;

Sur le premier moyen pris en ses deux branches

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué, « statuant sur la requête en rétractation, de considérer qu'ayant été saisie dans le cadre de l'appel d'une demande de dommages-intérêts en considération d'un licenciement argué d'abusif, en y faisant droit, la Cour d'appel n'aurait pas statué sur des choses non demandées ou accordé plus qu'il n'a été demandé », alors, de première part, qu'en précisant que « la demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif formée tant devant le bureau de jugement que devant la Cour d'appel n'apparaît pas avoir été expressément soumise au préliminaire de conciliation » pour ensuite décider que « cette réparation faisait au contraire l'objet d'une demande expresse », la cour, du fait de la contradiction de ces motifs, a violé l'article 199-4° du Code de procédure civile « ; alors, de deuxième part, » qu'au travers de la motivation qu'elle a adoptée, la Cour d'appel a nécessairement admis qu'aux termes de sa citation en conciliation, M. v. GR. n'avait élevé une contestation que sur le caractère valable du motif invoqué à l'appui de son licenciement dans la mesure où elle a relevé que « v. GR. réclamait alors la condamnation des banques SA. au paiement de la somme de 525.000 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle » tout en convenant que la notion de licenciement sans cause réelle était « au demeurant étrangère au droit du for », la cour a nécessairement reconnu qu'eu égard à la demande présentée, le bureau de jugement du Tribunal du travail ne s'était pas trouvé saisi d'une demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif; qu'en décidant que l'arrêt soumis à rétractation ne s'était pas prononcé sur des choses non demandées, la Cour d'appel a violé l'article 438 du Code de procédure civile « ;

Mais attendu qu'ayant relevé » qu'après avoir, suivant arrêt du 23 janvier 2013, évoqué l'affaire et requis la communication de conclusions au fond des parties, cette juridiction était destinataire d'écrits judiciaires de M. v. GR. invoquant explicitement le caractère abusif de la rupture intervenue selon lui de manière brutale et vexatoire et sollicitant la réparation du préjudice subséquent, les deux appelantes ayant de leur coté elle-même soutenu que le licenciement ne présentait pas ce caractère abusif «, » que le fait pour le salarié d'avoir formé une demande globale d'indemnisation, toutes causes de préjudice confondues, ne démontrait nullement que la Cour d'appel, en allouant des dommages-intérêts pour licenciement abusif, aurait prononcé sur des choses non demandées au sens des dispositions de l'article 438 du Code de procédure civile, dès lors que cette réparation faisait au contraire l'objet d'une demande expresse « et qu'enfin, » si la demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif n'apparaissait pas avoir été expressément soumise au préliminaire de conciliation, la sanction éventuelle d'une telle irrégularité, jamais invoquée auparavant, ne relevait pas de la compétence du juge de la rétractation mais de la Cour de révision «, c'est sans contradiction et sans violer l'article 438 précité que la Cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen pris en ses deux branches

Attendu que les sociétés J SA. Sarasin Gestion et Banque J SA. Sarasin font encore grief à l'arrêt de constater qu'il a été alloué en appel » une somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi «, alors, selon le moyen, de première part, que la cour n'avait aucune autre solution que celle de constater que M v. GR. » n'avait demandé qu'une somme de 525.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle « et sollicité cette somme » toutes causes de préjudices confondues " sans aucune précision ; qu'en allouant une somme de 100.000 euros qui ne lui avait pas été demandée, la Cour d'appel a dénaturé les conclusions et alors, de deuxième part, que la Cour d'appel, saisie de la demande en rétractation, n'a nullement caractérisé en quoi la somme de 100.000 euros serait, à tout le moins comprise dans une autre demande, pour se contenter de le déduire des circonstances de la cause qu'elle n'a nullement exposées, violant ainsi l'article 438-2° du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la motivation de l'arrêt du 25 juin 2013 était à cet égard dénuée d'équivoque, les dommages-intérêts alloués procédant des conséquences d'une rupture qualifiée d'abusive et ne correspondant pas à la contrepartie d'un licenciement non fondé sur un motif valable, c'est-à-dire l'indemnité légale de licenciement, qu'il ne saurait dès lors être reproché à la cour d'avoir consenti au salarié licencié une indemnisation supérieure à cette indemnité dans la mesure où la détermination des

dommages-intérêts alloués au titre de la rupture abusive reposait sur la seule appréciation souveraine des juges du fond et non sur un mode de calcul pré-déterminé par la loi, c'est sans dénaturer les conclusions des parties que la Cour d'appel a fait une exacte application des dispositions de l'article 438-2° susvisé ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen

Attendu que les sociétés demanderesses au pourvoi font encore grief à l'arrêt de les condamner solidairement au paiement d'une indemnité de 10.000 euros au profit de M. v. GR. alors, selon le moyen, qu'en accordant une indemnité de ce chef en la considérant comme étant automatique et sans la soumettre à une quelconque limitation, la Cour d'appel a violé l'article 438-6 du Code de procédure civile et ignoré la mise hors de cause de SAM Banque J SA. ;

Mais attendu que la Cour d'appel a retenu à bon droit que par application des dispositions de l'article 438-6 du Code de procédure civile, si la demande de rétractation est rejetée, le demandeur est condamné à une indemnité au profit de chacune des parties ayant un intérêt distinct et a souverainement déterminé le montant de cette indemnité après avoir relevé que la demande en rétractation formées tant par la SAM J SA. Sarasin Gestion que par la SAM Banque J SA. avait eu pour effet de retarder le paiement des dommages-intérêts dus à

M. v. GR. ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur la demande de dommages-intérêts de M. v. GR.

Attendu que M. v. GR. demande la condamnation des sociétés J SA. Sarasin Gestion et Banque J SA. Sarasin au paiement de la somme de 30.000 euros à titre de dommages-intérêts en raison du caractère abusif du présent recours ;

Attendu qu'au regard des éléments ci-dessus énoncés M. v. GR. s'est vu contraint de multiplier les procédures pour faire valoir ses droits et qu'il apparaît que les sociétés demanderesses ont abusé de leur droit de se pourvoir en révision; qu'il y a lieu d'accueillir la demande de M. v. GR. à hauteur de 5.000 euros ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Condamne solidairement les sociétés Banque J SA. Sarasin (Monaco) et J SA. Sarasin Gestion (Monaco) au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Les condamne solidairement à l'amende et aux dépens, ceux-ci distraits au profit de l'Administration qui en poursuivra le recouvrement comme en matière d'enregistrement.

Composition

Ainsi délibéré et jugé le quinze janvier deux mille quinze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Cécile PETIT, rapporteur, Monsieur François-Xavier LUCAS et Monsieur Jean-Pierre GRIDEL, Conseillers.

Et Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Premier Président

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12956
Date de la décision : 15/01/2015

Analyses

Ayant relevé « qu'après avoir, suivant arrêt du 23 janvier 2013, évoqué l'affaire et requis la communication de conclusions au fond des parties, cette juridiction était destinataire d'écrits judiciaires de M.v. GR. invoquant explicitement le caractère abusif de la rupture intervenue selon lui de manière brutale et vexatoire et sollicitant la réparation du préjudice subséquent, les deux appelantes ayant de leur côté elle-même soutenu que le licenciement ne présentait pas ce caractère abusif », « que le fait pour le salarié d'avoir formé une demande globale d'indemnisation, toutes causes de préjudice confondues, ne démontrait nullement que la Cour d'appel, en allouant des dommages-intérêts pour licenciement abusif, aurait prononcé sur des choses non demandées au sens des dispositions de l'article 438 du Code de procédure civile, dès lors que cette réparation faisait au contraire l'objet d'une demande expresse » et qu'enfin, « si la demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif n'apparaissait pas avoir été expressément soumise au préliminaire de conciliation, la sanction éventuelle d'une telle irrégularité, jamais invoquée auparavant, ne relevait pas de la compétence du juge de la rétractation mais de la Cour de révision », c'est sans contradiction et sans violer l'article 438 précité que la Cour d'appel a légalement justifié sa décision ;Le moyen n'est pas fondé.Ayant constaté que la motivation de l'arrêt du 25 juin 2013 était à cet égard dénuée d'équivoque, les dommages-intérêts alloués procédant des conséquences d'une rupture qualifiée d'abusive et ne correspondant pas à la contrepartie d'un licenciement non fondé sur un motif valable, c'est-à-dire l'indemnité légale de licenciement, il ne saurait dès lors être reproché à la Cour d'avoir consenti au salarié licencié une indemnisation supérieure à cette indemnité dans la mesure où la détermination des dommages-intérêts alloués au titre de la rupture abusive reposait sur la seule appréciation souveraine des juges du fond et non sur un mode de calcul prédéterminé par la loi.C'est sans dénaturer les conclusions des parties que la Cour d'appel a fait une exacte application des dispositions de l'article 438-2° susvisé.Le moyen n'est pas fondé.La Cour d'appel a retenu à bon droit que par application des dispositions de l'article 438-6 du Code de procédure civile, si la demande de rétractation est rejetée, le demandeur est condamné à une indemnité au profit de chacune des parties ayant un intérêt distinct et a souverainement déterminé le montant de cette indemnité après avoir relevé que la demande en rétractation formées tant par la SAM J SA. Sarasin Gestion que par la SAM Banque J SA. avait eu pour effet de retarder le paiement des dommages-intérêts dus à M. v. GR.Le moyen n'est pas fondé.Au regard des éléments ci-dessus énoncés M. v. GR. s'est vu contraint de multiplier les procédures pour faire valoir ses droits et il apparaît que les sociétés demanderesses ont abusé de leur droit de se pourvoir en révision ; Il y a lieu d'accueillir la demande de M. v. GR. à hauteur de 5.000 euros.

Social - Général  - Contrats de travail  - Rupture du contrat de travail.

Rétractation - Conditions - Licenciement - Indemnité - Appréciation des juges du fond.


Parties
Demandeurs : La Société Anonyme Monégasque J. SA. SARASIN Gestion
Défendeurs : M. v. GR.

Références :

article 199-4° du Code de procédure civile
article 438-2° du Code de procédure civile
loi n° 446 du 16 mai 1946
article 14 de la loi n° 1.375 du 16 décembre 2010
articles 439 à 459-7 du Code de procédure civile
article 438 du Code de procédure civile
article 438-6 du Code de procédure civile
article 199 alinéa 4 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2015-01-15;12956 ?

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