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15/10/2014 | MONACO | N°12690

Monaco | Cour de révision, 15 octobre 2014, La société GENERALI Assicurazioni Generali Spa c/ -M.


Motifs

Pourvoi N° 2014-40 en session

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2014

En la cause de :

- La société GENERALI Assicurazioni Generali Spa, société anonyme de droit italien, au capital social de 1.275.999.458 euros, inscrite au registre des sociétés de Trieste, sous le numéro 00079760328, dont le siège social est sis Piazza Duca degli Abruzzi 2, Trieste (Italie), prise en la personne de son Président du Conseil d'administration, en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur

près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

DEMANDERESSE EN RÉVISION,
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Motifs

Pourvoi N° 2014-40 en session

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2014

En la cause de :

- La société GENERALI Assicurazioni Generali Spa, société anonyme de droit italien, au capital social de 1.275.999.458 euros, inscrite au registre des sociétés de Trieste, sous le numéro 00079760328, dont le siège social est sis Piazza Duca degli Abruzzi 2, Trieste (Italie), prise en la personne de son Président du Conseil d'administration, en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

DEMANDERESSE EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- M. c. VE., né le 29 juin 1973 à Monaco, de nationalité monégasque, employé de jeux à la SBM, domicilié à Monaco, X ;

- M. p. VE., né le 21 juin 1950 à Monaco, de nationalité monégasque, domicilié à Monaco, X ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Georges BLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître c. NURIT, avocat au Barreau de Marseille ;

DÉFENDEURS EN RÉVISION,

En présence de :

- M. Christian BOISSON, expert-comptable, demeurant 13 avenue des Castelans, Stade Louis II, Entrée F à Monaco, pris en sa qualité de liquidateur du fonds de limitation à constituer par M. p. VE., demeurant 1A Bd Rainier III à Monaco ;

NON COMPARANT,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

VU :

- l'arrêt rendu le 4 février 2014 par la Cour d'appel, statuant en matière civile ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 2 avril 2014, par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de la Société GENERALI Assicurazioni Spa ;

- le récépissé délivré par la Caisse des Dépôts et Consignations sous le n° 44358, en date du 1er avril 2014, attestant du dépôt par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de la demanderesse, de la somme destinée à assurer le paiement de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

- la requête déposée le 30 avril 2014 au greffe général, par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de la Société GENERALI Assicurazioni Spa, accompagnée de 22 pièces, signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée le 21 mai 2014 au greffe général, par Maître Georges BLOT, avocat-défenseur, au nom de MM c. et p. VE., accompagnée de 4 pièces, signifiée le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 12 juin 2014, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 13 juin 2014 ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 13 octobre 2014 sur le rapport de M. Roger BEAUVOIS, Premier Président,

Après avoir entendu les conseils des parties ;

Ouï le Ministère Public ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un incendie survenu dans le port de Fontvielle sur le bateau « Chrislie Atoll », appartenant aux consorts VE., le feu s'est propagé au bateau voisin, « The Jackal », assuré auprès de la société Generali Assicurazioni SPA (société Generali), les deux navires battant pavillon monégasque ; que par ordonnances sur requête des 27 juin et 12 décembre 2011 le président du Tribunal de première instance a autorisé M. p. VE. à constituer un fonds de limitation de responsabilité et constaté la création de ce fonds ; que sur assignation de la société Generali, subrogée dans les droits de son assuré, le juge des référés a, par ordonnance du 8 mai 2013, dit que les dispositions relatives à la limitation de responsabilité des propriétaires de navires ne s'appliquaient pas à la navigation de plaisance, donc au navire « Chrislie Atoll », et a ordonné la rétractation des décisions présidentielles précédemment rendues sur requête ; que sur appel de cette ordonnance de référé par la compagnie d'assurance qui avait, le 9 janvier 2013, assigné au fond les consorts VE., la Cour d'appel, par arrêt du 4 février 2014, a déclaré « recevable et bien fondée l'exception tirée de l'incompétence du juge des référés » pour se prononcer sur l'applicabilité de la limitation de responsabilité aux navires de plaisance et a infirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance du 8 mai 2013 ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches

Sur la recevabilité du moyen, contestée par les consorts VE.

Attendu que les défendeurs au pourvoi soulèvent l'irrecevabilité du moyen comme nouveau et mélangé de fait et de droit ;

Mais attendu que les griefs formulés à l'appui du pourvoi étant nés de l'arrêt attaqué, le moyen est recevable ;

Au fond :

Attendu que la société Generali fait grief à l'arrêt de déclarer recevable et bien fondée l'exception tirée de « l'incompétence » du juge des référés et d'infirmer l'ordonnance du 8 mai 2013, alors, selon le moyen, 1°) que « si le Président du Tribunal de Première Instance n'a pas en principe à se prononcer sur le droit du requérant à limitation, après constitution du fonds la partie qui se voit opposer une ordonnance lui faisant grief doit pouvoir contester l'ordonnance rendue par ledit Président en l'absence de contradictoire en sollicitant du juge l'ayant délivrée » la rétractation « ; que c'est pour cette raison que l'article O. 312-3 du Code de la mer créé par l'ordonnance souveraine affirme le droit des créanciers d'attaquer l'ordonnance de constitution du fonds par voie de référé, et ce sans fixation d'aucun délai ; qu'ainsi, il ne fait aucun doute que le juge des référés a la compétence pour constater la réunion des conditions de constitution du fonds et pour se rétracter si une cause de déchéance du droit à limitation ou un autre motif excluant ce droit à limitations est établi ; que la Cour d'appel, en infirmant, telle qu'elle l'a fait, l'ordonnance du juge des requêtes siégeant en référé, aux motifs que » le juge des référés ne saurait avoir plus de pouvoir que ceux qui ont été dévolus au juge statuant sur les modalités et le contrôle de la constitution du fonds de limitation, et que l'action de GENERALI ne porte sur aucune des modalités énoncées par l'article O. 312-3 mais sur la légitimité même de ce fonds de limitation qui relève non pas des prérogatives du juge des référés mais de celle du juge du fond «, et ceci d'autant plus que la requête et les ordonnances sur pied sont demeurées non connues par GENERALI jusqu'au 25 octobre 2013, a violé les textes susvisés et notamment l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales qui confère à tout créancier le droit à une procédure contradictoire ainsi que l'article O. 312-3, dernier alinéa, susvisé créé par l'Ordonnance Souveraine n° 15.387 du 17 juin 2002 qui octroie à tout créancier le pouvoir de contester l'ordonnance rendue par le Président du Tribunal de Première Instance rendue sur simple requête » ; 2°) alors qu'« en affirmant telle qu'elle l'a fait que » en raison des conséquences déterminantes que la solution de la présente affaire portant devant elle sur tous les aspects du litige entre les parties, le juge statuant en référé ne saurait être davantage compétent pour ordonner des mesures qui auraient nécessairement des conséquences irréversibles et qui, en ce sens, préjudicierait au principal pendant devant le juge du fond «, la Cour d'appel fait une mauvaise appréciation de l'article O. 312-1 susvisé dans la mesure où, si elle reconnaît implicitement par là que le droit monégasque interdit au propriétaire de se prévaloir de son droit à limiter sa responsabilité devant le juge du fond saisi de l'affaire si un fonds n'a pas été constitué, elle ne peut, sans se contredire, statuer comme elle l'a fait que » l'action de GENERALI ne porte sur aucune des modalités énoncées par l'article O.312-3 mais sur la légitimité même de ce fonds de limitation qui relève non pas des prérogatives du juge des référés mais de celle du juge du fond « ; 3°) alors que l'argumentation de la Cour d'appel se fonde nécessairement sur la constatation que l'article O.312-1 du Code de la mer interdit au propriétaire de se prévaloir de son droit à limiter sa responsabilité devant le juge du fond si un fonds d'indemnisation n'a pas été constitué ; » que néanmoins, si, par extraordinaire, la juridiction de céans devait établir, contrairement aux griefs des branches susvisées et aux motifs implicites de la Cour d'appel, que le droit monégasque n'interdit pas au propriétaire de se prévaloir de son droit à limiter sa responsabilité devant le juge du fond saisi de l'affaire indépendamment de la constitution de tout fonds, et que donc, la Cour d'appel a, par les motifs susmentionnés, violé les textes susvisés, il en découle nécessairement que la Cour d'appel ne peut, sans se contredire, statuer comme elle l'a fait dès lors que le bénéfice de la limitation de responsabilité n'est pas subordonné à la constitution du fonds de limitation prévu par l'article O. 312-1 susvisé « ; 4°) alors qu'» il est constant que GENERALI a, à la première occasion utile, soulevé le moyen ab origine de la requête et des deux ordonnances sur pied du 27 juin 2011 et du 12 décembre 2011 ayant porté constitution du fonds en ce qu'elles ne permettent pas de déterminer le bénéficiaire de la constitution du fonds et a persisté à solliciter de voir dire et juger que les modalités de calcul du montant du fonds de garantie concernant les droits de tirages spéciaux (DTS) ne sauraient être retenues ; qu'en affirmant telle qu'elle l'a fait que « l'action de GENERALI ne porte sur aucune des modalités énoncées par l'article O. 312-3 mais sur la légitimité même de ce fonds de limitation qui relève non pas des prérogatives du juge des référés mais de celle du juge du fond », la Cour d'appel n'a pas répondu aux moyens soulevés par GENERALI dans ses conclusions et a privé sa décision de motifs « ;

Mais attendu, de première part, que la Cour d'appel ayant procédé aux débats et renvoyé l'appréciation de la légitimité d'un fonds de limitation de responsabilité aux juges du fond en présence de la société Generali, qui a ainsi pu faire valoir ses droits, le grief tiré d'une atteinte au principe de la contradiction est sans fondement ;

Attendu, de deuxième part, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du Code de la mer : » le tribunal de première instance est compétent pour apprécier le droit du propriétaire (de navire) à limiter sa responsabilité « ; que l'article O.312-3 dudit code confère au président du tribunal de première instance le pouvoir de se prononcer » sur les modalités de constitution du fonds " de limitation de responsabilité par ordonnance sur requête pouvant être attaquée par voie de référé ; qu'il résulte des textes précités que si les modalités de création du fonds sont fixées et contrôlées par ordonnance sur requête du président du tribunal de première instance, c'est à ce tribunal, statuant comme juge du fond, qu'il revient d'apprécier le droit du propriétaire de navire à limiter sa responsabilité ; que dès lors l'arrêt retient exactement, sans contradiction avec des motifs non énoncés dans la décision critiquée mais tirés de la seule interprétation donnée au raisonnement de la Cour d'appel par l'une des parties, que le juge des référés ne saurait avoir plus de pouvoirs que ceux qui ont été dévolus au juge statuant sur les modalités et le contrôle de la constitution du fonds de limitation de responsabilité ;

Attendu, enfin, qu'ayant ainsi retenu que l'appréciation du droit de constituer un fonds de limitation de responsabilité relevait de la compétence du tribunal de première instance, la Cour d'appel a rejeté à bon droit toutes autres demandes relatives à la mise en œuvre de ce droit ; qu'encore le motif critiqué serait-il inexact le grief est inopérant ;

Sur la demande de dommages et intérêts

Attendu que les consorts VE. sollicitent la condamnation de la société Generali à leur payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en application des articles 234 du Code de procédure civile et 1229 du Code civil ;

Mais attendu qu'eu égard à la contrariété entre les décisions de première instance et celles rendues en appel ainsi qu'à la complexité des questions en débat, la société Generali n'a pas abusé de son droit de se pourvoir en révision ; qu'il n'y a lieu au paiement de dommages et intérêts ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi ;

Rejette la demande de dommages et intérêts présentée par les consorts VE. ;

Condamne la société Generali Assicurazioni SPA à l'amende et aux dépens dont distraction au profit de Maître Georges BLOT sous sa due affirmation.

Composition

Ainsi jugé et prononcé le quinze octobre deux mille quatorze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, rapporteur, Madame Cécile PETIT et Monsieur Guy JOLY, conseillers, en présence du Ministère Public, assistés de Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, chevalier de l'ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Premier Président,

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12690
Date de la décision : 15/10/2014

Analyses

Les défendeurs au pourvoi soulèvent l'irrecevabilité du moyen comme nouveau et mélangé de fait et de droit ;Or, les griefs formulés à l'appui du pourvoi étant nés de l'arrêt attaqué, le moyen est recevable. La Cour d'appel ayant procédé aux débats et renvoyé l'appréciation de la légitimité d'un fonds de limitation de responsabilité aux juges du fond en présence de la société Generali, qui a ainsi pu faire valoir ses droits, le grief tiré d'une atteinte au principe de la contradiction est sans fondement ;Attendu, de deuxième part, qu'aux termes de l'article L 312-2 du Code de la mer : « le tribunal de première instance est compétent pour apprécier le droit du propriétaire (de navire) à limiter sa responsabilité » ; l'article O.312-3 dudit code confère au président du Tribunal de première instance le pouvoir de se prononcer ;« Sur les modalités de constitution du fonds » de limitation de responsabilité par ordonnance sur requête pouvant être attaquée par voie de référé, il résulte des textes précités que si les modalités de création du fonds sont fixées et contrôlées par ordonnance sur requête du président du tribunal de première instance, c'est à ce tribunal, statuant comme juge du fond, qu'il revient d'apprécier le droit du propriétaire de navire à limiter sa responsabilité. Dès lors l'arrêt retient exactement, sans contradiction avec des motifs non énoncés dans la décision critiquée mais tirés de la seule interprétation donnée au raisonnement de la Cour d'appel par l'une des parties, que le juge des référés ne saurait avoir plus de pouvoirs que ceux qui ont été dévolus au juge statuant sur les modalités et le contrôle de la constitution du fonds de limitation de responsabilité.Ayant ainsi retenu que l'appréciation du droit de constituer un fonds de limitation de responsabilité relevait de la compétence du tribunal de première instance, la Cour d'appel a rejeté à bon droit toutes autres demandes relatives à la mise en œuvre de ce droit ; le motif critiqué serait-il inexact, le grief est inopérant.Eu égard à la contrariété entre les décisions de première instance et celles rendues en appel ainsi qu'à la complexité des questions en débat, la société Generali n'a pas abusé de son droit de se pourvoir en révision. Il n'y a pas lieu au paiement de dommages et intérêts de ce chef.

Navire.

Pourvoi en révision - Moyen nouveau - Irrecevabilité - Conditions - Pouvoir du juge des référés - Pouvoir abusif (non) - dommages et intérêts (non).


Parties
Demandeurs : La société GENERALI Assicurazioni Generali Spa
Défendeurs : -M.

Références :

article L 312-2 du Code de la mer
ordonnance du 8 mai 2013
article L. 312-2 du Code de la mer
article O. 312-3 du Code de la mer
article O.312-1 du Code de la mer
articles 234 du Code de procédure civile
Code civil
Ordonnance Souveraine n° 15.387 du 17 juin 2002


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2014-10-15;12690 ?

Source

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