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15/10/2014 | MONACO | N°12689

Monaco | Cour de révision, 15 octobre 2014, La Société dénommée « OLIVIER JACQUES SARL » c/ M. a. AL-AM.


Motifs

Pourvoi N° 2013-64 en session

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2014

En la cause de :

- La Société dénommée « OLIVIER JACQUES SARL », société à responsabilité limitée immatriculée au Registre du Commerce et de l'Industrie sous le n° 93 S 02961, dont le siège social est sis 17 avenue des Spélugues, Galerie Commerciale du Métropole, local n° 218 à Monaco, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice Monsieur s. MO. domicilié ès-qualités audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Christine

PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur près la Cour d'appel et ayant comme avocat plaidant Maître Claire WAQUET, avoca...

Motifs

Pourvoi N° 2013-64 en session

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2014

En la cause de :

- La Société dénommée « OLIVIER JACQUES SARL », société à responsabilité limitée immatriculée au Registre du Commerce et de l'Industrie sous le n° 93 S 02961, dont le siège social est sis 17 avenue des Spélugues, Galerie Commerciale du Métropole, local n° 218 à Monaco, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice Monsieur s. MO. domicilié ès-qualités audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur près la Cour d'appel et ayant comme avocat plaidant Maître Claire WAQUET, avocat aux conseils ;

APPELANTE,

d'une part,

Contre :

- M. a. AL-AM., de nationalité saoudienne, demeurant X à JEDDAH (Arabie Saoudite) ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel et ayant comme avocat plaidant Maître Thomas LYON-CAEN, avocat aux conseils ;

INTIMÉ,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

VU :

- l'arrêt de la Cour d'appel, statuant en matière civile, rendu le 18 juin 2013, signifié le 26 juin 2013 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 23 juillet 2013, par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de M. a. AL-AM. ;

- l'arrêt de la Cour de révision du 28 novembre 2013, cassant et annulant en toutes ses dispositions l'arrêt précité de la Cour d'appel, et renvoyant l'affaire à la prochaine session de la Cour de révision autrement composée ;

- les conclusions additionnelles déposées le 22 janvier 2014 au greffe général, par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de M. a. AL-AM., signifiée le même jour ;

- les conclusions additionnelles déposées le 27 février 2014 au greffe général, par Maître PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur, au nom de la SARL OLIVIER JACQUES, signifiée le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 14 mars 2014, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

- les conclusions après cassation du Ministère Public en date du 17 mars 2014 ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 13 octobre 2014, sur le rapport de M. Jean-François RENUCCI, conseiller,

Après avoir entendu les conseils des parties ;

Ouï le Ministère Public ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu que M. a. AL-AM., bailleur de locaux à usage commercial à la société « OLIVIER JACQUES SARL », a notifié à celle-ci un congé pour la date d'expiration du bail, sans offre de renouvellement et avec proposition de verser une indemnité d'éviction ; qu'en l'absence d'accord entre les parties, la Commission arbitrale des loyers commerciaux a été saisie à la requête du preneur par assignation du 21 avril 2011, d'une demande, notamment, en nullité de congé ; que selon le jugement attaqué l'original de l'assignation, présentée à l'audience du 15 juin 2011, ne comportait pas de visa de l'huissier sur les mentions apposées par son clerc relativement à la notification de l'acte ; que le même jour, M. a. AL-AM. a déposé des conclusions tendant à la nullité de l'assignation pour non-respect de l'alinéa 2 de l'article 147-1 de la loi n° 783 du 15 juillet 1965 modifiée ; que le 23 juin 2011, le conseil de la société « OLIVIER JACQUES SARL » a adressé l'original de l'assignation à l'huissier aux fins de régularisation ; que le 27 juin 2011, l'huissier a retourné l'original en ayant accompli la formalité litigieuse ;

Attendu que la Commission arbitrale des loyers commerciaux a prononcé la nullité de cette assignation par jugement du 8 février 2012, accueillant de ce chef la prétention du bailleur ; que pour réformer cette décision, l'arrêt de la Cour d'appel en date du 18 juin 2013 a retenu qu'il s'évince des circonstances de l'espèce que déclarer nulle l'assignation et par voie de conséquence l'intégralité de la procédure subséquente, tandis que l'huissier a bien confirmé l'exactitude des mentions de signification de l'acte litigieux par son clerc, procèderait d'une interprétation d'un texte exorbitant du droit commun, totalement disproportionnée quant à ses objectifs et violerait ainsi le droit dont dispose tout plaideur, en l'occurrence la société « OLIVIER JACQUES SARL », d'être entendu sur le fond de l'affaire et de pouvoir discuter du quantum de son indemnité d'éviction ; que M. a. AL-AM. ayant formé un pourvoi contre cet arrêt, la Cour de révision a, par arrêt du 28 novembre 2013, cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt attaqué jugeant qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que l'original de l'assignation présenté à l'audience du 15 juin 2011 ne comportait pas de visa de l'huissier sur les mentions apposées par son clerc relativement à la notification de l'acte, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations relatives à l'assignation introductive d'instance, a violé le texte susvisé ;

Attendu que par conclusions additionnelles en date du 22 janvier 2014, M. a. AL-AM. a saisi la Cour de révision prise en tant que Cour de renvoi ; qu'il fait observer qu'en cassant et annulant l'arrêt de la Cour d'appel, la Cour de révision a confirmé l'analyse de la Commission arbitrale des loyers commerciaux conduisant à prononcer la nullité de l'exploit contenant assignation qui ne respectait pas les prescriptions de l'article 147-1 de la loi n° 783 ; qu'en conséquence de la nullité de l'assignation, ladite Commission n'a pas été valablement saisie ensuite du procès-verbal de non-conciliation ; qu'il conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la nullité de l'assignation et en ce qu'il dit n'y avoir lieu à examiner les autres demandes de la société « OLIVIER JACQUES SARL » ; qu'il demande la condamnation de la société au paiement d'une indemnité de 10.000 euros et aux entiers dépens ;

Attendu que la société « OLIVIER JACQUES SARL » fait observer que la Cour de révision a remis la procédure en l'état du jugement de la Commission arbitrale des loyers commerciaux ; que ce n'est qu'au moment auquel elle a statué sur la nullité, voire au moment où le demandeur s'est dessaisi de l'original de l'assignation pour la lui remettre à l'issue de l'audience de plaidoiries, que ladite Commission pouvait valablement apprécier la régularité formelle de l'assignation litigieuse, laquelle était bien pourvue à cette date du visa litigieux, de sorte que la Commission ne pouvait dès lors en prononcer la nullité sur le fondement de l'article 147-1 de la loi n° 783 ; qu'en prononçant la nullité de l'assignation au seul motif que le visa n'a pas été apposé « dans un délai bref de la délivrance de l'acte », la Commission n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ajouté à la loi une circonstance qu'elle ne prévoit pas ; que l'article 147-1 de la loi n° 783 ne prévoit aucun délai pour l'apposition du visa de l'huissier en face des mentions portées par son clerc sur l'assignation et que cela peut être fait tant que le visa litigieux demeure entre les mains de la requérante ; que la nullité retenue revêt un caractère disproportionné au regard de l'objectif poursuivi par l'article 147-1 de la loi n° 783 et du droit d'accès à un tribunal ; qu'en conséquence, la société « OLIVIER JACQUES SARL » demande d'infirmer le jugement rendu le 8 février 2012 par la Commission arbitrale des loyers commerciaux, de dire et juger régulière, bonne et valable l'assignation signifiée le 21 avril 2011, de renvoyer la cause et les parties devant la Commission arbitrale des loyers commerciaux afin d'y être entendues et jugées sur le fond de l'affaire, de débouter M. a. AL-AM. de toutes exceptions, fins, moyens et conclusions et de condamner ce dernier aux entiers dépens ;

SUR CE

Attendu qu'en application de l'article 147-1 de la loi n° 783 du 15 juillet 1965 modifiée, en vigueur au moment des faits, l'huissier peut, avec l'autorisation du procureur général, se faire suppléer par un clerc assermenté pour la signification des actes judiciaires, mais doit viser les mentions portées par ce dernier sur l'original sous peine de nullité ; que cette formalité n'ayant pas été accomplie en temps utile, l'assignation du 21 avril 2011 a été régularisée le 27 juin 2011, soit plus de deux mois après la signification ;

Mais attendu qu'une interprétation trop stricte de l'article 147-1 de la loi n° 783 du 15 juillet 1965 traduirait un formalisme excessif contraire au droit d'accès au juge consacré par l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tel qu'interprété par la Cour européenne des droits de l'homme ; que la société « OLIVIER JACQUES SARL » ne peut être tenue pour responsable du défaut d'accomplissement de la formalité prévue par l'article 147-1 de la loi n° 783 ; que la législation nationale confie la signification des actes judiciaires et extrajudiciaires aux huissiers de justice et que le respect des modalités de telles significations relève principalement de leur responsabilité ; que les huissiers de justice, dans l'exercice de leurs fonctions, agissent en tant qu'organes publics de l'État ;

Et attendu que l'article 459-4 du Code de procédure civile n'est pas applicable lorsque la Cour de révision statue en tant que juridiction de renvoi ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement rendu le 8 février 2012 par la Commission arbitrale des loyers commerciaux ;

Renvoie en continuation à la prochaine session utile de la Cour de révision pour permettre aux parties de conclure sur le fond du litige ;

Déboute M. a. AL-AM. de toutes ses demandes ;

Ordonne la restitution de la somme consignée le 4 juillet 2013 ;

Réserve les dépens.

Composition

Ainsi délibéré et jugé le quinze octobre deux mille quatorze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Messieurs Jean-Pierre DUMAS, Président, Jean-François RENUCCI, chevalier de l'ordre de Saint-Charles, rapporteur et Serge PETIT, Conseillers, en présence du Ministère Public, assistés de Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, chevalier de l'ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Président,

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12689
Date de la décision : 15/10/2014

Analyses

En application de l'article 147-1 de la loi n° 783 du 15 juillet 1965 modifiée, en vigueur au moment des faits, l'huissier peut, avec l'autorisation du procureur général, se faire suppléer par un clerc assermenté pour la signification des actes judiciaires, mais doit viser les mentions portées par ce dernier sur l'original sous peine de nullité ; que cette formalité n'ayant pas été accomplie en temps utile, l'assignation du 21 avril 2011 a été régularisée le 27 juin 2011, soit plus de deux mois après la signification ;Une interprétation trop stricte de l'article 147-1 de la loi n° 783 du 15 juillet 1965 traduirait un formalisme excessif contraire au droit d'accès au juge consacré par l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tel qu'interprété par la Cour européenne des droits de l'homme ; que la société « OLIVIER JACQUES SARL » ne peut être tenue pour responsable du défaut d'accomplissement de la formalité prévue par l'article 147-1 de la loi n° 783 ; que la législation nationale confie la signification des actes judiciaires et extrajudiciaires aux huissiers de justice et que le respect des modalités de telles significations relève principalement de leur responsabilité ; que les huissiers de justice, dans l'exercice de leurs fonctions, agissent en tant qu'organes publics de l'État ;L'article 459-4 du Code de procédure civile n'est pas applicable lorsque la Cour de révision statue en tant que juridiction de renvoi.

Procédure civile.

Procédure - Actes d'huissier - Formalisme - Assignation - Mentions - Portée article 6 CEDH - Violation (non) - Article du Code de procédure civile - Application - Conditions.


Parties
Demandeurs : La Société dénommée « OLIVIER JACQUES SARL »
Défendeurs : M. a. AL-AM.

Références :

Article 459-4 du Code de procédure civile
article 147-1 de la loi n° 783 du 15 juillet 1965


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2014-10-15;12689 ?

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