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10/07/2014 | MONACO | N°12645

Monaco | Cour de révision, 10 juillet 2014, La Société Anonyme de droit monégasque dénommée « Société anonyme d'exploitations Hôtelières », en abrégé S.A.E.H. c/ SAM PLATINIUM GROUP et SARL SYNERGY GROUP


Motifs

Pourvoi N° 2014-21

Hors Session civile

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 10 JUILLET 2014

En la cause de :

- La Société Anonyme de droit monégasque dénommée « SOCIÉTÉ ANONYME D'EXPLOITATIONS HÔTELIÈRES », en abrégé S. A. E. H., immatriculée au RCI de Monaco sous le n° 73 S 01404, dont le siège social est sis 7 avenue de Grande Bretagne à Monaco, prise en la personne de son administrateur délégué en exercice, Madame c. MU. BR., demeurant en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Didier ESCA

UT, avocat-défenseur près la Cour d'appel et ayant comme avocat plaidant la SCP PIWNICA - MOLINIE, avocat au Conseil d'...

Motifs

Pourvoi N° 2014-21

Hors Session civile

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 10 JUILLET 2014

En la cause de :

- La Société Anonyme de droit monégasque dénommée « SOCIÉTÉ ANONYME D'EXPLOITATIONS HÔTELIÈRES », en abrégé S. A. E. H., immatriculée au RCI de Monaco sous le n° 73 S 01404, dont le siège social est sis 7 avenue de Grande Bretagne à Monaco, prise en la personne de son administrateur délégué en exercice, Madame c. MU. BR., demeurant en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur près la Cour d'appel et ayant comme avocat plaidant la SCP PIWNICA - MOLINIE, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation ;

DEMANDERESSE EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- La SAM PLATINIUM GROUP, immatriculée au RCI sous le n° 06 S 04539, dont le siège social est sis « La Felouque », 2, boulevard Rainier III à Monaco, prise en la personne de son président délégué en exercice, demeurant en cette qualité audit siège ;

- La SARL SYNERGY GROUP, immatriculée au RCI de Monaco sous le n° 06 S 4537, dont le siège social est sis « La Felouque », 2, boulevard Rainier III à Monaco, prise en la personne de son gérant en exercice, demeurant en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel ;

DÉFENDERESSES EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 31, alinéa 2, de la loi n° 490 du 24 novembre 1948 et des articles 458 et 459 du Code de procédure civile ;

VU :

- l'arrêt rendu par la Cour d'appel statuant en matière civile, le 20 septembre 2013 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 27 novembre 2013, par Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur, au nom de la Société Anonyme de droit monégasque dénommée « SOCIÉTÉ ANONYME D'EXPLOITATIONS HÔTELIÈRES » ;

- le récépissé délivré par la Caisse des Dépôts et Consignations sous le n° 43937, en date du 27 novembre 2013, attestant du dépôt par Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur, au nom de la demanderesse, de la somme destinée à assurer le paiement de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

- la requête déposée le 19 décembre 2013 au greffe général, par Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur, au nom de la SAM SAEH, signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée le 8 janvier 2014 au greffe général, par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de la SARL SYNERGIY et la SAM PLATINIUM GROUP, signifiée le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 21 janvier 2014, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 22 janvier 2014 ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 26 juin 2014, sur le rapport de M. Jean-Pierre GRIDEL, conseiller,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par contrat et avenant en date des 4 février 2003 et 25 janvier 2005, la société anonyme d'exploitations hôtelières, ci-après SAEH, a consenti à Mme e. DA., avec effet du 30 mars 2003 au 29 janvier 2006, l'occupation temporaire de locaux, sis à Monaco, pour l'usage de prestations d'agence de voyages, ainsi que d'organisation de congrès, salons, réception de groupes ; que dans un autre avenant, en date du 2 mai 2006, reportant au 29 janvier 2009 l'échéance du droit d'occupation de Mme DA., celle-ci a, en outre, renoncé au bénéfice de la loi n° 490 du 24 novembre 1948 « concernant les baux à usage commercial, industriel ou artisanal » ; que le 8 mai 2006, dans un nouvel avenant, la SAEH prenait note de ce que Mme DA. se substituait la société e. DA., elle-même ultérieurement dénommée société Synergy Group, immatriculée le 22 septembre 2006 au répertoire du commerce et de l'industrie, simultanément avec une société Platinium Group, toutes deux domiciliées dans les lieux concédés à Mme DA. et lui succédant dans ses activités, l'une au titre de l'agence de voyages, l'autre pour l'organisation de salons et réceptions ; qu'à partir de 2007, les factures et propositions d'avenants émanées de la SAEH furent adressées en même temps aux deux sociétés, avant que, le 13 novembre 2007, elle délivre congé à la société Synergy Group, avec possibilité ultérieurement donnée de proroger l'exploitation jusqu'au 30 mai 2008 ; qu'après leur expulsion ordonnée en référé, les sociétés Synergy Group et Platinium Group ont assigné au fond la SAEH, prétendant se faire reconnaître titulaires d'un bail commercial, soumis comme tel à la loi n°490 ;

Sur le premier moyen pris en ses deux branches :

Attendu que la SAEH reproche à la Cour d'appel d'avoir déclaré recevable l'action exercée par les sociétés Platinium Group et Synergy Group et d'avoir dit commercial et soumis à la loi n° 490 le bail qui la liait à celles-ci, alors, selon le moyen, de première part, « que la SAEH ayant fait valoir dans ses conclusions que le caractère d'ordre public de la loi n° 490 ne faisait pas obstacle à ce que le preneur renonçât au droit au renouvellement du bail et à la propriété commerciale, une fois celui-ci acquis par l'effet de la loi, il s'en évinçait qu'elle s'opposait à ce que cette renonciation soit déclarée nulle en raison du caractère composite de l'ordre public, de direction et de protection, que présenterait la loi n° 490 organisant le statut des baux commerciaux ; qu'en retenant néanmoins, pour dire recevable l'action exercée par les sociétés Platinium Group et Synergy Group aux fins de voir dire qu'elles bénéficiaient du droit au renouvellement du bail auquel Mme DA. avait renoncé, après l'avoir acquis, que le bailleur n'avait pas contesté le caractère composite de l'ordre public consacré par les premiers juges et le caractère impossible de la renonciation, la Cour d'appel a méconnu les écritures dont elle était saisie, violant ainsi l'article 427 du Code de procédure civile, ensemble l'article 989 du Code civil ; et alors, de seconde part, » que la renonciation à un droit acquis par l'effet d'une règle d'ordre public est valable, à la condition d'avoir été exprimée, par celui qui la détient, une fois le droit acquis, ce qui ne fait pas échec aux dispositions législatives d'ordre public mais révèle la force attachée à la volonté des parties, ayant la capacité de renoncer à l'existence et à l'exercice d'un droit acquis par elles ; qu'en déclarant nulle la renonciation clairement exprimée par Mme DA., une fois celui-ci acquis, au bénéfice du statut des baux commerciaux et au renouvellement du bail précaire qui lui avait été consenti, pour dire recevable l'action des sociétés Platinium Group et Synergy Group, venant aux droits de Mme DA., aux fins de bénéficier du statut des baux commerciaux, la Cour d'appel a violé par fausse application l'article 6 du Code civil ensemble les articles 963 et 989 du Code civil et l'article 28 de la loi n° 490 du 24 novembre 1948. « ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt confirmatif retient exactement, par motifs adoptés, et sans qu'une contestation de cette analyse figure dans les conclusions d'appel de la SAEH, que la loi n° 490 est porteuse d'un ordre public composite, de protection comme de direction, lequel, s'il défend le locataire et le bailleur, poursuit en outre une finalité de politique économique, l'exiguïté du territoire monégasque rendant nécessaire un strict encadrement des loyers, prohibitif de toute renonciation; d'autre part, que, du caractère composite qu'il énonce, l'arrêt déduit à bon droit qu'est nulle la clause par laquelle Mme DA. avait renoncé à invoquer son droit à la propriété commerciale, en ce qu'elle avait précisément et directement pour objet de faire échec aux dispositions de la loi invoquée ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la SAEH fait aussi grief à la Cour d'appel d'avoir dit que le bail la liant à la société Platinium Group et à la société Synergy Group est un bail commercial soumis à la loi n° 490, alors, selon le moyen, » que dans ses conclusions, la SAEH avait fait valoir que Mme DA., propriétaire exploitant en son nom personnel, à la date du 22 septembre 2006, s'était radiée du RCI mais que la société repreneur, la société e. DA., n'avait pas pu justifier de cette cession, à son profit, celle-ci devant être formalisée dans les statuts de la société par les formalités d'apport, et qu'à défaut d'apport du fonds de commerce, soit de la cession par une personne commerçant à titre personnel à une société, celle-ci n'est pas propriétaire du fonds, et ne peut pas en conséquence, bénéficier du droit au renouvellement ; que la Cour d'appel qui a décidé que la SAEH était liée par un bail commercial à la société Platinium Group et à la société Synergy Group mais qui n'a pas répondu à ce moyen déterminant quant à la solution du litige a, en statuant ainsi, violé l'article 199 du Code de procédure civile " ;

Mais attendu que, sous le couvert d'un défaut de réponse à conclusions, le moyen tente de revenir sur les constatations faites par les juges, et à partir desquelles ils ont déduit à bon droit que Mme DA. bénéficiait de la propriété commerciale sur les locaux litigieux depuis le 30 mars 2006, qu'elle n'avait cessé d'en être l'exploitante personnelle que concomitamment à l'immatriculation des deux sociétés Synergy Group et Platinium Group entre lesquelles elle avait subdivisé ses activités, lesdites sociétés étant venues à ses droits locatifs avec l'accord de la SAEH qui leur avait conféré un titre propre d'occupation, tant en acceptant, à travers ses correspondances, la substitution opérée au profit de la première, qu'en adressant à la seconde des factures de loyers et en procédant à leur encaissement ; que le moyen est inopérant ;

Sur la demande de la condamnation de la société Platinium Group et de la société Synergy Group d'avoir à payer à la SAEH la somme de 5.000 euros sur le fondement des articles 234 du Code de procédure civile et 1229 du Code civil ;

Attendu que la SAEH, dont le pourvoi est rejeté, doit être déboutée de cette demande ;

Sur la demande de condamnation de la SAEH d'avoir à payer une somme de 10.000 euros à chacune des sociétés Platinium Group et Synergy Group sur le fondement de l'article 459-4 du Code de procédure civile ;

Attendu qu'au vu des circonstances de la cause énoncées ci-dessus, il n'y a lieu de retenir le caractère abusif du pourvoi et de prononcer la condamnation demandée ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi.

Dit n'y avoir lieu de condamner la société Platinium Group et la société Synergy Group d'avoir à payer à la SAM SOCIÉTÉ ANONYME D'EXPLOITATIONS HÔTELIÈRES la somme de 5000 euros sur le fondement des articles 234 du Code de procédure civile et 1229 du Code civil, ni la SAM SOCIÉTÉ ANONYME D'EXPLOITATIONS HÔTELIÈRES d'avoir à payer une somme de 10.000 euros à chacune des sociétés Platinium Group et Synergy Group sur le fondement de l'article 459-4 du Code de procédure civile ;

Condamne la SAM SOCIÉTÉ ANONYME D'EXPLOITATIONS HÔTELIÈRES à l'amende et aux dépens, dont distraction au profit de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Composition

Ainsi délibéré et jugé le dix juillet deux mille quatorze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, Madame Cécile PETIT et Monsieur Jean-Pierre GRIDEL, rapporteur, Conseillers.

Et Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Premier Président

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12645
Date de la décision : 10/07/2014

Analyses

L'arrêt confirmatif retient exactement que la loi n° 490 est porteuse d'un ordre public composite, de protection comme de direction, lequel, s'il défend le locataire et le bailleur, poursuit en outre une finalité de politique économique, l'exiguïté du territoire monégasque rendant nécessaire un strict encadrement des loyers, prohibitif de toute renonciation.L'arrêt en déduit à bon droit qu'est nulle la clause par laquelle l'intéressée renonce à invoquer son droit à la propriété commerciale, en ce qu'elle avait précisément et directement pour objet de faire échec aux dispositions de la loi invoquée.

Contrat - Général  - Baux commerciaux.

Bail commercialLoi monégasque - Spécificité - Finalité.


Parties
Demandeurs : La Société Anonyme de droit monégasque dénommée « Société anonyme d'exploitations Hôtelières », en abrégé S.A.E.H.
Défendeurs : SAM PLATINIUM GROUP et SARL SYNERGY GROUP

Références :

article 28 de la loi n° 490 du 24 novembre 1948
article 31, alinéa 2, de la loi n° 490 du 24 novembre 1948
articles 963 et 989 du Code civil
loi n° 490 du 24 novembre 1948
article 427 du Code de procédure civile
article 459-4 du Code de procédure civile
Code civil
article 6 du Code civil
articles 234 du Code de procédure civile
articles 458 et 459 du Code de procédure civile
article 989 du Code civil
article 199 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2014-07-10;12645 ?

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