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10/07/2014 | MONACO | N°12422

Monaco | Cour de révision, 10 juillet 2014, m. TO. épouse MO. c/ Ministère public


Motifs

Pourvoi N° 2014-42

Hors Session pénal

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 10 JUILLET 2014

En la cause de :

- Mme m. TO. épouse MO., née le 16 janvier 1969 à AJACCIO (2A), de Michel et d'Angèle LU., de nationalité française, présidente du conseil d'administration du PMUG, demeurant « X», «à AJACCIO (20000) ;

Prévenue de :

DÉTENTION DE CAPITAUX D'ORIGINE ILLICITE ET CONCOURS À UNE OPÉRATION DE TRANSFERT, PLACEMENT, DISSIMULATION OU CONVERSION DE CAPITAUX D'ORIGINE ILLICITE

Ayant élu domicile en l'étude de Maître

Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et ayant comme avocat plaidant Maître Lionel MORONI, avocat a...

Motifs

Pourvoi N° 2014-42

Hors Session pénal

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 10 JUILLET 2014

En la cause de :

- Mme m. TO. épouse MO., née le 16 janvier 1969 à AJACCIO (2A), de Michel et d'Angèle LU., de nationalité française, présidente du conseil d'administration du PMUG, demeurant « X», «à AJACCIO (20000) ;

Prévenue de :

DÉTENTION DE CAPITAUX D'ORIGINE ILLICITE ET CONCOURS À UNE OPÉRATION DE TRANSFERT, PLACEMENT, DISSIMULATION OU CONVERSION DE CAPITAUX D'ORIGINE ILLICITE

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et ayant comme avocat plaidant Maître Lionel MORONI, avocat au Barreau de Toulon ;

DEMANDERESSE EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- MINISTÈRE PUBLIC,

DÉFENDEUR EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

- l'arrêt rendu par la Cour d'appel, statuant en matière correctionnelle, le 31 mars 2014 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 7 avril 2014, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de Mme m. TO. épouse MO. ;

- le récépissé délivré par la Caisse des Dépôts et Consignations sous le n° 44380, en date du 4 avril 2014, attestant du dépôt par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de la demanderesse, de la somme destinée à assurer le paiement de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

- la requête déposée le 18 avril 2014 au greffe général, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de Mme m. TO. épouse MO., signifiée le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 7 mai 2014, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 16 mai 2014;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 26 juin 2014, sur le rapport de M. Jean-Pierre DUMAS, vice-président,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt critiqué, que Mme m. TO. épouse MO., a été condamnée par le Tribunal correctionnel de Monaco, après avoir rejeté les exceptions de nullité soulevées, l'a condamnée à la peine de 12 mois d'emprisonnement avec sursis et 100.000 euros d'amende pour avoir, à Monaco, courant 1998, 1999 et 2000 sciemment détenu des capitaux d'origine illicite et sciemment apporté son concours à toute opération de transfert, de placement, de dissimulation ou de conversion de capitaux d'origine illicite pour provenir du délit de corruption active de fonctionnaire commis par M. m. TO., en l'espèce en recevant notamment sur un compte ouvert au Crédit Foncier de Monaco, le 21 octobre 1998, une somme de 17,5 millions de francs, soit 2.667.857 euros, provenant du délit de corruption active commis par M. m. TO. et en reversant celle de 7,5 millions de francs (1.143.368 euros) à l'association de financement de c. PA. pour les élections européennes (A.F.C.P.E.E.) par deux chèques émis aux mois de mars et juin 1999, délit prévu et réprimé par les articles 218, 218-1, 218-2, 218-3 et 219 anciens du Code pénal, issus des lois n° 1.161 et n° 1.162 du 7 juillet 1993 ; que, par arrêt du 31 mars 2014, la Cour d'appel a confirmé ce jugement ; que, 7 avril 2014, Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, agissant au nom de Mme m. TO. épouse MO., a déclaré se pourvoir en révision contre cet arrêt ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches ;

Attendu que Mme m. TO. fait grief à l'arrêt, en statuant comme il fait, de violer les articles 36, 83, 207 du Code de procédure pénale, ainsi que l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et les articles 14 du Pacte de Varsovie complété par 14-3 et 26 du Pacte de New-York, de violer la loi et des formalités substantielles, et encore de ne pas répondre à un moyen, alors selon le moyen de première part que, dans le réquisitoire introductif d'instance est visé un rapport de police qui se fonde sur plusieurs autres rapports qui ne sont pas joints ni versés au dossier, ce document étant donc incomplet alors même qu'aux termes de l'article 36 du Code de procédure pénale le procureur général a l'obligation d'adresser au juge d'instruction, donc de soumettre » au contradictoire « des parties en la cause tous les éléments, sans exception, que la Cour d'appel ne pouvait donc être admise à procéder à une dissection ou une exception à ce principe fondamental voulu par le législateur ; que de même dès lors qu'une personne identifiée est visée par une accusation, qui plus est aussi grave que le blanchiment du produit d'une infraction liée aux stupéfiants (en l'espèce la loi n° 890 était spécifiquement visée dans ledit réquisitoire), l'ouverture de l'information judiciaire ne peut valablement se faire contre » X «, ce qui implique qu'une enquête sera menée contre elle, à son insu, sans » contradictoire « ou défense pour ce qui la concerne, pareille pratique étant encore » sanctionnable « et l'arrêt critiqué encourant la cassation de ces chefs ; et alors de seconde part que le réquisitoire querellé vise non seulement les faits de blanchiment mais aussi plus spécifiquement les stupéfiants, en sorte que c'est bien de blanchiment du produit d'une infraction liée aux stupéfiants qu'il s'agissait et que les mis en cause devaient défendre ; que dès lors, la cour qui évoque le visa de textes » plus larges « se contredit nécessairement, puisqu'elle ne répond pas sur le visa du texte sur les stupéfiants (loi n° 890), qui est plus strict et non plus large comme elle le spécifie, à tort ; que de même la cour ne saurait être admise à considérer que le simple visa du blanchiment est suffisant dès lors, d'une part que l'infraction d'origine n'est pas spécifiée (il s'agissait en l'espèce du financement d'un campagne électorale et de corruption active), alors même que de façon délibérée, et d'autre part, que l'accusation vise les stupéfiants, ce qui est sans rapport, et extrêmement malvenu car trompeur, avec les faits de l'espèce, et qu'il est troublant de remarquer que personne n'évoque une simple erreur textuelle ou matérielle, tout en laissant perdurer pendant les auditions de témoins ou la première comparution de m. TO. cette mention aux stupéfiants pour laquelle aucune justification, ni appréciation n'est donnée dans la décision entreprise ;

Mais attendu que, pour refuser d'annuler le réquisitoire du procureur général l'arrêt retient qu'il ne peut être reproché à celui-ci de ne pas avoir joint les deux documents litigieux au rapport de police qu'il a transmis au juge d'instruction dès lors qu'il ne s'est pas fondé sur eux dans son réquisitoire et qu'en outre, le réquisitoire en question saisissait le juge d'instruction et non le tribunal, lequel n'était saisi que par l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction; que l'arrêt retient encore que le rapport de police, sans viser m. TO., conclut à la nécessité d'identifier avec précision le nommé m. TO. et de caractériser les faits, de sorte que le réquisitoire qui en est issu et qui ne fait usage d'aucune autre pièce ne porte aucune atteinte au principe du » contradictoire «, qu'aucun grief ne peut être tiré du fait que les deux prévenus n'ont pas été nommément visés dans le réquisitoire, l'un étant alors inconnu, l'autre n'étant pas suffisamment identifié à la date de sa rédaction, aucun des deux ne pouvant se prévaloir ainsi du statut de personne accusée d'une infraction pénale au sens des textes visés au moyen, que l'obligation pour le Ministère public d'articuler les griefs relatifs aux faits de blanchiment ne ressort d'aucune obligation légale, que le réquisitoire spécifie les faits, savoir le blanchiment du produit d'une infraction, ainsi que les articles de loi applicables, à savoir les articles 218 et suivants du Code pénal, que le simple visa de textes plus larges que ceux visant cette seule infraction n'est pas de nature en lui-même à faire grief au requérant ;

Attendu qu'en cet état le moyen, qui revient à remettre en cause l'analyse souveraine par la Cour d'appel des pièces annexées au réquisitoire introductif d'où elle a conclu à la saisine régulière du juge d'instruction, n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen pris en ses deux branches ;

Attendu que Mme m. TO. reproche encore à l'arrêt, en statuant comme il fait, de violer les articles 166,171 et 207 du Code de procédure pénale, ainsi que les articles 5-2 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et les articles 14 du Pacte de Varsovie complété par 14-3 et 26 du Pacte de New-York, de violer la loi et les formalités substantielles, ainsi qu'une » non réponse à moyen «, alors selon le moyen de première part, que la Cour d'appel retient que le droit français est applicable au cas d'espèce, mais omet de souligner que les spécificités du droit monégasque, en l'occurrence la garde à vue en présence d'un avocat n'existaient pas à cette époque à Monaco, étaient bien différentes puisque toute personne accusée devait être inculpée pour bénéficier des droits de la défense que la loi et les usages garantissent, que la garde à vue n'était donc pas codifiée à Monaco, en sorte que l'inculpation était envisagée par le juge dans sa CRI, que la cour ne relève pas plus qu'il appartenait aux autorités de l'État requis d'exécuter fidèlement ladite CRI qui prévoyait pourtant, faute de pouvoir recueillir les déclarations de m. TO. comme témoin, d'envisager son inculpation aux formes de droit monégasque, la lecture de ses droits et conditions selon les articles 166 et suivants du Code de procédure pénale, alors, de seconde part, que la Cour d'appel retient péremptoirement que le régime français de la garde à vue pouvait être doublé du statut de témoin déposant sous serment, mais privé de liberté et sans avocat, sans fragiliser les déclarations ainsi recueillis, ni faire courir le risque d'un témoin qui s'incriminerait ;

Mais attendu d'une part qu'en retenant que le droit applicable aux actes d'exécution d'une commission rogatoire internationale est le droit de l'État requis, soit le droit français en l'espèce, qu'il n'entre pas dans la compétence des juridictions monégasques d'apprécier la validité des actes de procédure diligentés à l'étranger, seules les autorités de ce pays ayant compétence pour apprécier la validité formelle des actes accomplis à l'étranger, et que par ailleurs les deux prévenus ont formé des demande de nullité quant à ces actes devant la chambre de l'instruction de la Cour d'appel de Paris qui les a rejetées, notamment quant à l'inexistence d'indices rendant vraisemblable la commission de l'infraction, l' arrêt n'encourt pas le grief contenu dans la première branche du moyen ;

Attendu, d'autre part, que l'arrêt ne retient, ni » péremptoirement « ni autrement, que » le régime français de la garde à vue pouvait être doublé du statut de témoin déposant sous serment, mais privé de liberté et sans avocat, sans fragiliser les déclarations ainsi recueillies, ni faire courir le risque d'un témoin qui s'incriminerait " ;

D'où il suit que le moyen, non fondé en sa première branche et manquant en fait en sa seconde branche, ne peut être accueilli ;

Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches ;

Attendu que Mme m. TO. fait enfin grief à la Cour d'appel d'avoir, en statuant comme elle a fait, violé les articles 87, 88, 89, 90, 166 et suivants et 207 du Code de procédure pénale, ainsi que les articles 5§2 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et les articles 14 du Pacte de Varsovie complété par 14-3 et 26 du Pacte de New-York, outre une violation de la loi et des formalités substantielles, ainsi qu'une non réponse à moyen, alors selon le moyen de première part, que la Cour d'appel retient que l'infraction de blanchiment pouvait valablement viser la loi n° 890 sur les stupéfiants, sans encourir de première part, que la Cour d'appel retient que l'infraction de blanchiment pouvait valablement viser la loi sur les stupéfiants, sans encourir la réforme, et alors de seconde part qu'il appartenait au Juge de rechercher l'infraction d'origine, puis de donner aux faits la qualification appropriée, ce qu'il a pu faire sans être critiqué ou causer de griefs à la défense ;

Mais attendu que le rejet du premier moyen rend inopérant le présent moyen ;

Sur l'amende prévue par l'article 502 du Code procédure pénale ;

Attendu que la condamnation systématique de la partie qui succombe dans son pourvoi sanctionnant de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision, ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu toutefois qu'eu égard aux circonstances de la cause ci-dessus énoncées il y a lieu de prononcer une condamnation au paiement d'une amende ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi ;

Condamne Mme m. TO., épouse MO. à l'amende.

Composition

Ainsi délibéré et jugé le dix juillet deux mille quatorze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Messieurs Jean-Pierre DUMAS, rapporteur, Vice-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Charles BADI, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles et Guy JOLY, Conseillers.

Et Monsieur Jean-Pierre DUMAS, Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Président

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12422
Date de la décision : 10/07/2014

Analyses

N'encourt pas le grief contenu dans le moyen, l'arrêt qui retient que le droit applicable aux actes d'exécution d'une commission rogatoire internationale est le droit de l'État requis, soit le droit français en l'espèce et qu'il n'entre pas dans la compétence des juridictions monégasques d'apprécier la validité des actes de procédure diligentés à l'étranger, seules les autorités de ce pays ayant compétence pour apprécier la validité formelle des actes accomplis à l'étranger.Si la condamnation systématique de la partie qui succombe dans son pourvoi à l'amende prévue par l'article 502 du Code procédure pénale ; sanctionne de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision et ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il y a lieu, eu égard aux circonstances de la cause, de prononcer une condamnation au paiement de cette amende.

Procédure pénale - Général  - Procédure pénale - Jugement  - International - Général.

Commission rogatoire internationaleDroit applicable.


Parties
Demandeurs : m. TO. épouse MO.
Défendeurs : Ministère public

Références :

Code de procédure pénale
article 489 du Code de procédure pénale
articles 36, 83, 207 du Code de procédure pénale
article 36 du Code de procédure pénale
articles 166,171 et 207 du Code de procédure pénale
Code pénal


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2014-07-10;12422 ?

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