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05/06/2014 | MONACO | N°12303

Monaco | Cour de révision, 5 juin 2014, r. TH. c/ le Ministère public et d. KH.


Motifs

Pourvoi N° 2014-24

Hors Session pénale

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 5 JUIN 2014

En la cause de :

- M. r. TH., né le 5 août 1961 à BREDA (Pays-Bas), de Petrus et de Katarina HO., de nationalité néerlandaise, administrateur de sociétés, demeurant X - LONDRES SW1 X8DW (Grande-Bretagne) ;

Prévenu de :

INFRACTION À LA LÉGISLATION SUR LES CHÈQUES (émission de chèque sans provision)

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco ;

DEMANDEUR EN RÉVIS

ION,

d'une part,

Contre :

1 -LE MINISTÈRE PUBLIC

2 - Mme d. KH., née le 12 novembre 1975 à MOSCOU (Russie), de nationalité rus...

Motifs

Pourvoi N° 2014-24

Hors Session pénale

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 5 JUIN 2014

En la cause de :

- M. r. TH., né le 5 août 1961 à BREDA (Pays-Bas), de Petrus et de Katarina HO., de nationalité néerlandaise, administrateur de sociétés, demeurant X - LONDRES SW1 X8DW (Grande-Bretagne) ;

Prévenu de :

INFRACTION À LA LÉGISLATION SUR LES CHÈQUES (émission de chèque sans provision)

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco ;

DEMANDEUR EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

1 -LE MINISTÈRE PUBLIC

2 - Mme d. KH., née le 12 novembre 1975 à MOSCOU (Russie), de nationalité russe, demeurant X - 125315 MOSCOU (Russie), constituée partie civile,

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco ;

DÉFENDEURS EN RÉVISION,

d'autre part,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

- l'arrêt rendu par la Cour d'appel, statuant en matière correctionnelle, le 2 décembre 2013 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 9 décembre 2013, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de M. r. TH. ;

- le récépissé délivré par la Caisse des Dépôts et Consignations sous le n°44013, en date du 11 décembre 2013, attestant de la remise par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de son client, de la somme de 300 euros au titre de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

- la requête déposée au Greffe Général, le 23 décembre 2013, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de M. r. TH., accompagnée de 21 pièces, signifiée le même jour ;

- la notification du dépôt de la requête faite à Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, conseil de Mme d. KH., partie-civile, par lettre recommandée avec avis de réception du Greffe Général en date du 3 janvier 2014, conformément aux dispositions de l'article 477 du Code de procédure pénale ;

- la contre-requête déposée au Greffe Général, le 16 janvier 2014, par Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, au nom de Mme d. KH., accompagnée de 1 pièce, signifiée le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 31 janvier 2014, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 6 février 2014 ;

- l'arrêt de la Cour de Révision du 10 avril 2014, renvoyant l'examen du pourvoi à la prochaine audience hors session de la Cour de révision ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 22 mai 2014, sur le rapport de M. Jean-François RENUCCI, conseiller,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme d. KH. a déposé une plainte avec constitution de partie civile du chef d'émission de chèque sans provision à l'encontre de M. r. TH. qui lui avait remis un chèque d'un montant d'un million d'euros destiné, selon Mme d. KH., à assurer sa sécurité et qu'elle pouvait encaisser ; que M TH. a soutenu que Mme d. KH. avait subordonné son accord à la demande en mariage qu'il lui avait faite à la remise préalable du chèque, qu'elle devait attendre le mariage pour procéder à son encaissement et que ce mariage n'a pas eu lieu, car à la suite d'informations sur le passé de Mme d. KH. il avait décidé de rompre ; que, par jugement du 9 juillet 2013, le Tribunal correctionnel a condamné M. TH. à payer, sur l'action publique, une amende de mille euros et, sur l'action civile, une somme d'un million d'euros à titre de dommages et intérêts ; que, par arrêt du 2 décembre 2013, la Cour d'appel a confirmé le jugement en ses dispositions afférentes à l'action publique, mais a débouté Mme d. KH. de sa demande de dommages et intérêts ;

Sur la recevabilité de la contre-requête contestée par M. TH. :

Attendu que par lettre du 20 janvier 2014, Maître MULLOT, avocat-défenseur de M. TH., a soutenu que la contre-requête en révision de Mme d. KH. était irrecevable comme tardive pour n'avoir pas été déposée dans le délai de 15 jours à compter du dépôt au greffe de la requête en révision, prescrit par l'article 479 du Code de procédure pénale ; que la requête en révision ayant été déposée le 23 décembre 2013, c'est le 7 janvier à minuit qu'expirait le délai prévu par l'article 479 du Code de procédure pénale ; que la requête en révision, notifiée le vendredi 3 janvier 2014 et retirée par l'avocat-défenseur le lundi 6 janvier au matin, porte le timbre du greffe général d'où il appert qu'elle a été déposée le 16 janvier ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 479 du Code de procédure pénale la contre-requête peut être déposée au greffe « dans les quinze jours après l'expiration du délai déterminé par les articles précédents » ; qu'au nombre de ceux-ci l'article 477 du même code dispose que si le pourvoi est formé par un condamné, avis du dépôt de la requête est donné par la voie du greffe à la partie civile ; que l'avis du dépôt de la requête au nom de M TH. ayant été notifié à Mme d. KH. le 6 janvier 2014, la contre-requête déposée le 16 janvier, soit dans le délai légal, est recevable ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de déclarer infondé le moyen de nullité du réquisitoire introductif, du procès-verbal de première comparution et de l'exploit de citation, présenté par M. TH. alors que, selon le pourvoi, ce dernier « a été inculpé et interrogé pour des faits soi-disant commis à Monaco alors même qu'il était renvoyé pour des faits commis à Saint-Tropez, ce qui a nécessairement modifié son information détaillée des faits objets de la poursuite » ; qu'en se déterminant ainsi qu'elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles 74, 82, 166, 207 et 369.6° du Code de procédure pénale, ainsi que les articles 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'ordonnance de renvoi qui saisit seule la juridiction de jugement, contenait un exposé explicite des faits du chef desquels M. TH. a été renvoyé, que cette prévention correspondait aux faits visés dans la plainte avec constitution de partie civile et que c'est sur le fondement de ces mêmes faits que le juge d'instruction a procédé à l'inculpation de M TH. sur la portée de laquelle ce dernier n'a pu se méprendre, la Cour d'appel a retenu à bon droit que le moyen de nullité ne pouvait prospérer ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen pris en ses deux branches et le troisième moyen pris en sa première branche :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de juger, d'une part, « que l'émission à l'étranger d'un chèque tiré à l'ordre d'un bénéficiaire étranger, sur un compte bancaire non provisionné ouvert dans les livres d'un établissement bancaire de la Principauté, relève de la compétence de la juridiction monégasque dès lors que le défaut de provision, élément constitutif du délit s'est réalisé en Principauté », et d'autre part, « que c'est à tort que M. TH. vient soutenir que le défaut de provision ne serait qu'une condition préalable de l'infraction, alors même que c'est à raison du fait matériel que constitue l'insuffisance ou le défaut de provision lors de la présentation du chèque au paiement sur le compte à partir duquel il a été tiré, que vient se constituer l'élément matériel du défaut de provision », alors que, selon le pourvoi, « le défaut de provision n'est pas en soi un élément matériel de l'infraction, mais une condition préalable qui détermine le domaine dans lequel l'infraction peut se commettre, ou encore la situation juridique mise sous la protection de la loi pénale » et que « l'article 21 du Code de procédure pénale impose que seule la commission d'un élément constitutif et non d'une condition préalable, sur le territoire de la Principauté est de nature à emporter la compétence des juridictions monégasques » ; que la Cour d'appel a violé l'article 21 susvisé et les articles 330 et 331 du Code pénal ;

Mais attendu que l'article 21, alinéa 2, du Code de procédure pénale vise non pas « les éléments constitutifs », mais « un acte caractérisant un des éléments constitutifs de l'infraction » ; qu'abstraction faite de l'assertion critiquée, la Cour d'appel a fait une exacte application de ce texte en retenant pour se déclarer compétente que c'est à raison du fait matériel que constitue l'insuffisance ou le défaut de provision lors de la présentation du chèque au paiement sur le compte ouvert à Monaco et à partir duquel il a été tiré, que vient se constituer l'élément matériel du défaut de provision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen pris en sa seconde branche :

Attendu qu'il est reproché à la Cour d'appel d'avoir contredit sa jurisprudence résultant d'un précédent arrêt et considéré que la preuve de l'élément intentionnel de l'infraction était rapportée ;

Mais attendu que l'éventuelle contradiction entre les solutions adoptées par la Cour d'appel dans deux espèces différentes ne saurait à elle seule constituer une violation de la loi ; que l'arrêt qui constate que M TH. n'a pas contesté qu'il savait parfaitement que le compte sur lequel le chèque litigieux avait été tiré n'était pas provisionné a ainsi caractérisé l'élément intentionnel ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que M TH. fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la constitution de partie civile de Mme d. KH. alors, selon le moyen, qu'une demande de dommages et intérêts ne peut être présentée que par celle qui se prévaut valablement du statut de victime et que Mme d. KH. ne justifie d'aucun préjudice direct et est seule à l'origine de l'infraction dont elle se prévaut ;

Mais attendu que la Cour d'appel qui a constaté qu'il ne résultait pas des circonstances de l'espèce que Mme d. KH. ait su dès la remise du chèque que celui-ci n'était pas approvisionné a retenu à bon droit que la constitution de partie civile était recevable par application de l'article 334 du Code pénal ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur la condamnation à l'amende :

Attendu que la condamnation systématique à une amende de la partie qui succombe dans son pourvoi sanctionnant de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision, ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu toutefois qu'eu égard aux circonstances de la cause ci-dessus énoncées, il y a lieu de prononcer une condamnation au paiement de l'amende ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi ;

Condamne M. TH. à une amende de 300 euros et aux dépens dont distraction au profit de Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Composition

Ainsi délibéré et jugé le cinq juin deux mille quatorze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, Monsieur Jean-Pierre GRIDEL et Monsieur Jean-François RENUCCI, rapporteur, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, conseillers.

Et Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Premier Président

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12303
Date de la décision : 05/06/2014

Analyses

Aux termes de l'article 479 du Code de procédure pénale la contre-requête peut être déposée au greffe « dans les quinze jours après l'expiration du délai déterminé par les articles précédents ».Au nombre de ceux-ci l'article 477 du même code dispose que si le pourvoi est formé par un condamné, avis du dépôt de la requête est donné par la voie du greffe à la partie civile.L'avis du dépôt de la requête ayant été notifié à l'intéressé et la contre-requête déposée le 16 janvier, soit dans le délai légal, le pourvoi est recevable.Ayant relevé que l'ordonnance de renvoi qui saisit seule la juridiction de jugement, contenait un exposé explicite des faits du chef desquels le prévenu a été renvoyé, que cette prévention correspondait aux faits visés dans la plainte avec constitution de partie civile et que c'est sur le fondement de ces mêmes faits que le juge d'instruction a procédé à l'inculpation sur la portée de laquelle celui-ci n'a pu se méprendre, la Cour d'appel a retenu à bon droit que le moyen de nullité du réquisitoire introductif ne pouvait prospérer.L'article 21, alinéa 2, du Code de procédure pénale vise non pas « les éléments constitutifs », mais « un acte caractérisant un des éléments constitutifs de l'infraction » d'où il suit que la Cour d'appel a fait une exacte application de ce texte en retenant pour se déclarer compétente que c'est à raison du fait matériel que constitue l'insuffisance ou le défaut de provision lors de la présentation du chèque au paiement sur le compte ouvert à Monaco et à partir duquel il a été tiré, que vient se constituer l'élément matériel du défaut de provision.L'éventuelle contradiction entre les solutions adoptées par la Cour d'appel dans deux espèces différentes ne saurait à elle seule constituer une violation de la loi.La Cour d'appel qui a constaté qu'il ne résultait pas des circonstances de l'espèce que le prévenu ait su dès la remise du chèque que celui-ci n'était pas approvisionné a retenu à bon droit que la constitution de partie civile était recevable par application de l'article 334 du Code pénal.

Procédure pénale - Général  - Procédure pénale - Enquête.

Procédure - Contre-requête - Dépôt - Délai.


Parties
Demandeurs : r. TH.
Défendeurs : le Ministère public et d. KH.

Références :

article 489 du Code de procédure pénale
article 334 du Code pénal
article 477 du Code de procédure pénale
Code de procédure pénale
article 479 du Code de procédure pénale
articles 330 et 331 du Code pénal
article 21, alinéa 2, du Code de procédure pénale


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2014-06-05;12303 ?

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