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05/06/2014 | MONACO | N°12302

Monaco | Cour de révision, 5 juin 2014, d. KH c/ r. TH


Motifs

Pourvoi N° 2014-23

Hors Session pénale

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 5 JUIN 2014

En la cause de :

- Mme d. KH., née le 12 novembre 1975 à MOSCOU (Russie), de nationalité russe, demeurant X - 125315 MOSCOU (Russie), constituée partie civile,

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco ;

DEMANDERESSE EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- M. r. TH., né le 5 août 1961 à BREDA (Pays-Bas), de Petrus et de Katarina HO., de nationalité néerlandai

se, administrateur de sociétés, demeurant X LONDRES SW1 X8DW (Grande-Bretagne) ;

Prévenu de :

INFRACTION À LA LÉGISLATION SUR LES C...

Motifs

Pourvoi N° 2014-23

Hors Session pénale

COUR DE RÉVISION

ARRÊT DU 5 JUIN 2014

En la cause de :

- Mme d. KH., née le 12 novembre 1975 à MOSCOU (Russie), de nationalité russe, demeurant X - 125315 MOSCOU (Russie), constituée partie civile,

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco ;

DEMANDERESSE EN RÉVISION,

d'une part,

Contre :

- M. r. TH., né le 5 août 1961 à BREDA (Pays-Bas), de Petrus et de Katarina HO., de nationalité néerlandaise, administrateur de sociétés, demeurant X LONDRES SW1 X8DW (Grande-Bretagne) ;

Prévenu de :

INFRACTION À LA LÉGISLATION SUR LES CHÈQUES (émission de chèque sans provision)

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco ;

DÉFENDEUR EN RÉVISION,

d'autre part,

En présence du :

- MINISTÈRE PUBLIC,

LA COUR DE RÉVISION,

Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;

VU :

- l'arrêt rendu par la Cour d'appel, statuant en matière correctionnelle, le 2 décembre 2013 ;

- la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 6 décembre 2013, par Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, au nom de Mme d. KH. ;

- le récépissé délivré par la Caisse des Dépôts et Consignations sous le n°44030, en date du 20 décembre 2013, attestant de la remise par Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, au nom de sa cliente, de la somme de 300 euros au titre de l'amende éventuelle prévue par la loi ;

- la requête déposée le 20 décembre 2013, par Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, au nom de Mme d. KH., accompagnée de 17 pièces, signifiée le même jour ;

- la contre-requête déposée au Greffe Général, le 6 janvier 2014, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de M. r. TH., accompagnée de 22 pièces, signifiée le même jour ;

- la réplique, déposée au Greffe Général le 15 janvier 2014, par Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur, au nom de Mme d. KH., accompagnée de 2 pièces, signifiée le même jour ;

- la duplique, déposée au Greffe Général le 22 janvier 2014, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de M. r. TH., signifiée le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 31 janvier 2014, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

- les conclusions du Ministère Public en date du 6 février 2014 ;

- l'arrêt de la Cour de Révision du 10 avril 2014, renvoyant l'examen du pourvoi à la prochaine audience hors session de la Cour de révision ;

Ensemble le dossier de la procédure,

À l'audience du 22 mai 2014, sur le rapport de M. Jean-François RENUCCI, conseiller,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme d. KH. a déposé une plainte avec constitution de partie civile du chef d'émission de chèque sans provision à l'encontre de M. r. TH. qui lui avait remis un chèque d'un montant d'un million d'euros destiné, selon Mme d. KH., à assurer sa sécurité et qu'elle pouvait encaisser ; que M. TH. a soutenu que Mme d. KH. avait subordonné son accord à la demande en mariage qu'il lui avait faite à la remise préalable du chèque, qu'elle devait attendre le mariage pour procéder à son encaissement et que ce mariage n'a pas eu lieu, car à la suite d'informations sur le passé de Mme d. KH. il avait décidé de rompre ; que, par jugement du 9 juillet 2013, le Tribunal correctionnel a condamné M. TH. à payer, sur l'action publique, une amende de mille euros et, sur l'action civile, une somme d'un million d'euros à titre de dommages et intérêts ; que, par arrêt du 2 décembre 2013, la Cour d'appel a confirmé le jugement en ses dispositions afférentes à l'action publique, mais a débouté Mme d. KH. de sa demande de dommages et intérêts ;

Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :

Attendu que M. TH. soutient que le pourvoi serait irrecevable aux motifs que, en violation des dispositions des articles 136 du Code de procédure civile, 476 et 478 du Code de procédure pénale, il n'est fait mention d'aucune profession de Mme d. KH., que le dispositif de la requête de celle-ci vise un arrêt du 3 décembre 2013 alors que l'arrêt opposant les parties a été rendu le 2 décembre, qu'il n'est pas démontré que ladite requête a été déposée au greffe postérieurement à la signification aux parties et que la « mention de la signification faite sur l'original déposé au greffe » n'est pas versée aux débats ;

Attendu, en premier lieu, que l'acte de signification de la requête en révision en ce qu'il mentionne les nom, prénoms, date de naissance et domicile de Mme d. KH. comporte une désignation précise de cette partie et répond ainsi aux exigences de l'article 136 du Code de procédure civile ; en deuxième lieu, que le défendeur n'apporte pas la preuve, dont la charge lui incombe, du dépôt de la requête avant la signification aux parties ; enfin, que l'erreur matérielle sur la date de l'arrêt attaqué est sans conséquence quant à la mention précise dans la requête en révision des causes de nullité et des moyens invoqués ;

Que le pourvoi est recevable ;

Sur la recevabilité de la réplique en révision contestée par M. TH. :

Attendu que M. TH. ayant soulevé, dans sa contre requête, l'irrecevabilité du pourvoi, la réplique tendant à réfuter cette fin de non-recevoir ne saurait être déclarée irrecevable en l'absence d'interdiction légale dès lors que la partie adverse a été elle-même en mesure d'y répondre ;

Sur le premier moyen pris en ses quatre branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de débouter Mme d. KH. de ses demandes, alors, selon le moyen, en premier lieu qu'« en retenant pour la même obligation, l'inexistence d'une créance et l'existence d'une créance conditionnelle, la Cour d'appel s'est contredite ; que la contradiction de motifs équivaut à l'absence de motifs ; d'où il suit que la Cour d'appel n'a pas donné de motifs à sa décision » ; alors, en deuxième lieu, qu'« en énonçant d'abord que Mme d. KH. n'était pas en mesure de justifier de l'intention libérale de M TH. à son égard puis qu'il résultait des déclarations constantes de ce dernier qu'il avait fait de la remise d'un million d'euros la contre partie du consentement à son mariage, donné par Mme d. KH., ce qui constitue une libéralité, la Cour d'appel s'est encore contredite et n'a pas donné de motifs à sa décision » ; alors, en troisième lieu, « que les écritures des parties sont concordantes pour considérer que le chèque constituait une libéralité, que celle-ci ne correspond à aucune créance préalable dont Mme d. KH. aurait été titulaire pour un million d'euros que la remise du chèque serait venue éteindre, la Cour d'appel a modifié l'objet du litige » ; alors, enfin, qu'« en usant de l'expression » …accrédite le contenu de ses déclarations « la Cour d'appel sous-entend que la véracité des déclarations de M TH. n'est pas établie, mais que certains éléments en augmentent la vraisemblance sans pour autant qu'on puisse les tenir pour établies » ; que la Cour d'appel s'est ainsi déterminée par un motif hypothétique ;

Mais attendu, d'une part, que la Cour d'appel, recherchant la cause de la remise du chèque litigieux, a constaté sans se contredire et sans modifier l'objet du litige, qu'à défaut pour Mme d. KH. de justifier de l'existence d'une intention libérale ou d'une créance devant être éteinte, cette remise, que l'arrêt ne qualifie pas de libéralité, était la contrepartie du consentement au mariage ;

Attendu, d'autre part, que c'est sans user d'un motif hypothétique que la Cour d'appel a souverainement retenu que l'absence d'indication du lieu de création du chèque et de sa date d'émission accréditait les déclarations constantes de M. TH. sur les causes de la remise du chèque ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen pris en ses trois branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de débouter Mme d. KH. de ses demandes de dommages et intérêts, alors selon le moyen, en premier lieu, « que la Cour d'appel a écarté une intention libérale de M. TH. en remettant un chèque à Mme d. KH. parce que ni le lieu de création ni la date du chèque n'avaient été portés par lui, mais par la suite par Mme d. KH. ; que de telles mentions n'ayant aucune incidence sur la nature juridique du rapport fondamental sous-jacent au chèque, la Cour d'appel a dénaturé ce document, dont le sens était clair et non ambigu et qui ne nécessitait aucune interprétation, partant elle a violé les articles 989 du Code civil et 199 du Code de procédure civile » ; en deuxième lieu, « que Mme d. KH. versait aux débats un chèque dont l'arrêt reconnaît la régularité formelle, tiré à son ordre par M. TH. dans les circonstances et pour les motifs qu'elle exposait, qu'elle n'avait pas dès lors à établir l'existence d'une créance préalable à la remise du chèque ou d'autres preuves à fournir pour obtenir le paiement d'une somme équivalente au montant du chèque ; que c'était à M. TH., demandeur à l'exception qu'il soulevait, de prouver que l'encaissement du chèque aurait été assorti d'une condition qui n'était pas réalisée ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1162 du Code civil » ; en troisième lieu, qu'en déboutant Mme d. KH. de ses demandes, « au mépris de la force probante résultant du chèque qu'elle produisait, ainsi que celle de l'écrit qui l'accompagnait, la Cour d'appel a violé l'article 1188 du Code civil » ;

Mais attendu, d'une part, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur probante des documents qui lui étaient soumis que la Cour d'appel, recherchant la cause de la remise du chèque litigieux, a constaté hors de toute dénaturation et sans inverser la charge de la preuve, que l'absence de mention du lieu de création et de la date d'émission de ce chèque venait renforcer les explications de M TH. ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant à apprécier souverainement l'indemnité propre à réparer le préjudice causé par l'infraction, la Cour d'appel a jugé à bon droit que si le chèque est un instrument de paiement qui rend exigible à la date de son émission la somme qui y figure, il appartient au juge pénal, avant de condamner le tireur au versement, au profit du bénéficiaire, d'une somme égale au montant du chèque, de s'assurer que l'objet et la cause de l'obligation pour l'extinction de laquelle le chèque a été délivré justifient le montant de la condamnation sollicitée par la partie civile ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur l'amende prévue à l'article 502 du Code de procédure pénale :

Attendu que la condamnation systématique à une amende de la partie qui succombe dans son pourvoi sanctionnant de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision, ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu qu'eu égard aux circonstances de la cause ci-dessus énoncées, il n'y a pas lieu de prononcer une condamnation au paiement d'une amende ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi ;

Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une amende et ordonne la restitution de la somme consignée de ce chef ;

Condamne Mme d. KH. aux dépens, dont distraction au profit de Maître MULLOT, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Composition

Ainsi délibéré et jugé le cinq juin deux mille quatorze, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, Monsieur Jean-Pierre GRIDEL et Monsieur Jean-François RENUCCI, rapporteur, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, conseillers.

Et Monsieur Roger BEAUVOIS, Premier-Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Premier Président

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12302
Date de la décision : 05/06/2014

Analyses

L'acte de signification de la requête en révision en ce qu'il mentionne les nom, prénoms, date de naissance et domicile de l'intéressé comporte une désignation précise de cette partie et répond ainsi aux exigences de l'article 136 du Code de procédure civile.L'erreur matérielle sur la date de l'arrêt attaqué est sans conséquence quant à la mention précise dans la requête en révision des causes de nullité et des moyens invoqués.La condamnation systématique à l'amende, prévue par l'article 502 du Code de procédure pénale, de la partie qui succombe dans son pourvoi sanctionnant de fait, même indirectement, l'exercice du pourvoi en révision, ne s'accorde pas avec les exigences de l'article 35 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.Eu égard aux circonstances de la cause ci-dessus énoncées, il n'y a pas lieu de prononcer une condamnation au paiement d'une amende.

Procédure pénale - Général  - Procédure pénale - Jugement.

Signification de la requête en révision - Acte - Mentions - Nullité (Non).


Parties
Demandeurs : d. KH
Défendeurs : r. TH

Références :

Code de procédure civile
Code de procédure pénale
article 1162 du Code civil
articles 989 du Code civil
article 136 du Code de procédure civile
article 1188 du Code civil
article 489 du Code de procédure pénale
article 502 du Code de procédure pénale


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2014-06-05;12302 ?

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