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15/03/2013 | MONACO | N°10853

Monaco | Cour de révision, 15 mars 2013, M. m. Mc NA c/ la SCP « FITOR »


Motifs

Pourvoi N° 2012-39 en session

Apres cassation

civil

COUR DE REVISION

ARRET DU 15 MARS 2013

En la cause de :

- Monsieur m. Mc NA., demeurant et domicilié X à MONACO ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

Appelant,

d'une part,

Contre :

- La SCP «FITOR», dont le siège social est sis, «L'ESTORIL» 31, avenue Princesse Grace à Monaco, prise en la personne de son gérant en exercice, demeurant audit siè

ge ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Charles GARDETTO, avocat-défenseur près la Cour et plaidant par ledit avocat-défenseu...

Motifs

Pourvoi N° 2012-39 en session

Apres cassation

civil

COUR DE REVISION

ARRET DU 15 MARS 2013

En la cause de :

- Monsieur m. Mc NA., demeurant et domicilié X à MONACO ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

Appelant,

d'une part,

Contre :

- La SCP «FITOR», dont le siège social est sis, «L'ESTORIL» 31, avenue Princesse Grace à Monaco, prise en la personne de son gérant en exercice, demeurant audit siège ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Charles GARDETTO, avocat-défenseur près la Cour et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

Intimée,

d'autre part,

LA COUR DE REVISION,

VU :

- le jugement rendu le 2 avril 2009 par le tribunal de première instance,

- l'arrêt rendu le 13 mars 2012 par la Cour d'appel, statuant en matière civile, signifié le 21 mars 2012 ;

- l'arrêt de la Cour de Révision du 9 octobre 2012, cassant et annulant en toutes ses dispositions l'arrêt précité de la Cour d'appel, et renvoyant l'affaire à la prochaine session de la Cour de Révision ;

- les conclusions additionnelles déposées au Greffe Général le 10 décembre 2012, par Maître Jean-Charles S. GARDETTO, avocat-défenseur, au nom de SCP FITOR, signifiées le même jour ;

- les conclusions après renvoi déposées le 3 janvier 2013, par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de M. m. Mc NA., accompagnées de trois pièces, signifiées le même jour ;

- le certificat de clôture établi le 14 février 2013, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;

- les conclusions après cassation de Monsieur le Procureur Général en date du 18 février 2013 ;

Ensemble le dossier de la procédure,

A l'audience du 11 mars 2013, sur le rapport de Monsieur Jean-Pierre DUMAS, conseiller,

Après avoir entendu les conseils des parties ;

Ouï le Procureur Général ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu que, le 30 juillet 2003, la SCP FITOR et M. m. Mc NA. ont conclu un contrat décrivant l'activité d'un centre d'imagerie médicale dénommé “Monte Carlo Life Check Center« (MLCC) créé sur autorisation obtenue par M. m. Mc NA. et comportant les dispositions suivantes :

“FITOR est disposé à accorder un prêt à MM en vue des paiements nécessaires au démarrage de cette activité. FITOR et MM conviennent également de céder les futures activités de MLCC à une nouvelle Société Anonyme qui sera constituée à Monaco. Les intérêts économiques de FITOR et MM seront de 50/50 dans la nouvelle SAM.

Ceci exposé, les parties conviennent ce qui suit:

1 Fitor accordera un prêt à MM pour la somme initiale de 500.000 euros ( cinq cent mille euros )

Le prêt sera accordé sans intérêt.

La somme prêtée doit être versée sur le nouveau compte bancaire suivant:

Titulaire du nouveau compte : BNP Paribas Banque Privée Monaco, Compte Numéro 6267418

2. MM aura le droit d'utiliser cette somme pour les activités correspondant au plan de développement annexé. Fitor ou un expert-comptable (commissaire aux comptes/expert-comptable ) sera nommé par Fitor et aura le droit d'examiner la comptabilité et tous documents de MLCC quand ils le jugeront nécessaire.

3. En compensation de l'octroi du prêt sans intérêt, les parties conviennent:

- pour des raisons fiscales, les intérêts économiques des activités de MLCC seront attribués à MM et Fitor en proportion égale, même si le prêt est intégralement remboursé.

- Le prêt doit être remboursé uniquement par le futur excédent de trésorerie généré par les activités commerciales de MLCC. Les paiements entrants et sortants seront comparés une fois tous les 6 mois par un commissaire aux comptes résidant à Monaco, notamment Monsieur Jean-Pierre Samba, de Monaco. Il enverra une copie aux deux parties au contrat. Tout excédent figurant dans ce compte sera utilisé pour rembourser le prêt.

- ....

4. Durée de l'accord

Initialement, le présent accord est valide pour une période déterminée jusqu'au 31.12.2008. Il sera renouvelable par période d'un an à chaque fois, si aucune des parties ne notifie de préavis 6 mois avant la fin de chaque année civile.

MM créera une SAM constituée en vertu des lois de Monaco aussi rapidement que possible avec le capital minimum légal.

L'obligation de fournir le capital devra être effectuée -dans la limite légale- par l'apport des actifs de MLCC à la SAM...

MM s'engagera à céder 50% des actions à la nouvelle SAM à constituer à Fitor sans délai, après cette constitution.»

Attendu qu'un désaccord étant intervenu entre les parties sur l'exécution de ce contrat, deux procédures ont été diligentées par la SCP FITOR : d'une part une assignation de M. m. Mc NA. du 19 juillet 2007 tendant à la condamnation de celui-ci au paiement de la somme de 586.277 euros à valoir sur le remboursement du prêt de 640.000 euros (procédure n° 2007/000016) et d'autre part une procédure en validation de la saisie-arrêt autorisée par une ordonnance présidentielle du 29 avril 2009 et pratiquée entre les mains de trois banques :

Attendu que, par jugement du 2 avril 2009, le tribunal de première instance a :

- ordonné la jonction de la procédure numéro 2008/000535 à la procédure numéro 2007/000016,

- rejeté la demande tendant à ce que la pièce n°16 produite par la SCP FITOR soit écartée des débats,

- rejeté les demandes de nullité et de résiliation du contrat en date du 30 juillet 2003,

- condamné M. m. Mc NA. à payer à la SCP FITOR la somme de 586.277 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 2007, à valoir sur le remboursement du prêt sans intérêt qu'elle lui a consenti d'un montant de 640.000 euros,

- condamné M. m. Mc NA. à créer une société anonyme monégasque constituée suivant la législation monégasque, dotée d'un capital équivalent au minimum légal au moyen d'un apport des actifs du Centre Médical dit « Monte Carlo Life Check », puis à céder 50% des actions de cette société à la SCP FITOR,

- prononcé une astreinte à l'encontre de M. m. Mc NA. d'un montant journalier de 1.500 euros pendant deux mois commençant à courir à l'issue d'un délai de trois mois à compter de la signification du présent jugement,

- condamné M. m. Mc NA. à payer à la SCP FITOR la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- validé la saisie-arrêt autorisée par ordonnance présidentielle en date du 29 avril 2008 au bénéfice de la SCP FITOR, à concurrence de la somme de 660.000 euros, pour toutes sommes détenues pour M. m. Mc NA. auprès de :

- BNP PRIVATE BANK MONACO, code banque 11498, code guichet 0001, numéro de compte 6260542002, clé RIB 95, IBAN Mc 58114980000162660542000295, ouvert au nom de m. Mc NA.,

- BNP PARIBAS BANK compte n° 6267418 ouvert sous la dénomination “MONACO LIFE CHECK CENTER«,

- BNP PARIBAS BANK PRIVE MONACO, compte n° 11498000016267418000107 ouvert au nom de m. Mc NA.,

en définitive, suivant la déclaration de la société anonyme monégasque dénommée BNP PARIBAS PRIVATE BANK MONACO, à due concurrence des sommes détenues sur un compte de titres et sur un compte courant au nom de m. Mc NA., d'une valeur au 7 mai 2008 respectivement de 43.353 euros et 18.204 euros ;

- rejeté toute demande plus ample ou contraire ;

- condamné M. m. Mc NA. aux entiers dépens, distraits au profit de Maître Sophie LAVAGNA-BOUHNIK, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;

- ordonné que lesdits dépens seraient provisoirement liquidés sur état par le greffier, au vu du tarif applicable ;

Attendu que, sur pourvoi de la SCP FITOR, la Cour de révision a, par arrêt du 9 octobre 2012, cassé en toutes ses dispositions l'arrêt de la Cour d'appel du 13 mars 2012 et renvoyé la cause et les parties à la prochaine session utile de la Cour de révision autrement composée ;

Attendu qu'à la suite de cette cassation, qui est totale, la Cour de révision, statuant comme juridiction de renvoi, se trouve en l'état du jugement du 2 avril 2009, des conclusions initiales des parties et de leurs conclusions additionnelles ;

Attendu que, dans ses conclusions initiales, M. m. Mc NA. demande à la Cour d'appel de :

- réformer le jugement dans toutes ses dispositions,

- rejeter des débats la pièce n° 16 (télécopie AUDIT SUD CONSULTANTS),

- constater que l'objet du contrat en date du 30 juillet 2003, en ce qu'il constitue une promesse de société commerciale, est illicite et, de plus, incompatible avec le prêt,

- constater que le contrat du 30 juillet 2003, en ce qu'il constitue une promesse de société commerciale est dépourvu de cause,

- annuler le contrat en date du 30 juillet 2003 en ses articles 2 à 5,

- dire et juger que ce contrat est un contrat de prêt sans intérêt à durée indéterminée,

- constater que ce prêt est résilié de par la manifestation de volonté de la SCP FITOR exprimée dans l'assignation du 19 juillet 2007,

- donner acte à m. Mc NA. de ce qu'il est disposé à restituer à la SCP FITOR la somme de 640.000 euros sans intérêts,

- débouter la SCP FITOR de ses autres demandes,

- ordonner la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée le 7 mai 2007 et ce, avec toutes les conséquences de droit,

- condamner la SCP FITOR à payer à m. Mc NA. la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Attendu que, par conclusions enregistrées le 2 décembre 2009, M. m. Mc NA. demande également à la cour de rejeter des débats la pièce n° 25 de la SCP FITOR ;

Attendu qu'il est fait grief au jugement d'avoir fait sienne la position de la SCP FITOR, selon laquelle la contrepartie du prêt, destiné à lui permettre de mettre en place le centre médical dénommé »Monte Carlo Life Check« (en abrégé MLCC), était de le voir céder ensuite les activités de ce centre à une société anonyme, dont le capital aurait été détenu par moitié par chacune des parties, d'avoir considéré que l'objet social de la SCP FITOR lui permettait de gérer des participations financières dans une société commerciale, d'avoir omis le caractère réglementé des activités médicales du MLCC et prononcé son débouté pour une demande de résiliation du prêt qu'il n'a pas formulée ;

Attendu qu'au soutien de ces prétentions, M. m. Mc NA. fait valoir que le contrat ne peut avoir le double objectif de constituer un prêt et une société puisque, si la somme est prêtée, elle doit être rendue, alors que, si elle est apportée, elle constitue un apport en numéraire qui ne peut être restitué ;

Attendu qu'il conclut à la nullité partielle de ce contrat, en soutenant qu'il ne peut y avoir obligation de constituer une société anonyme et de donner la moitié des actions à la SCP FITOR, que les obligations résultant du prêt sont valides, alors que celles qui résultent de la promesse de société sont nulles, que l'activité commerciale envisagée à travers la société à créer est incompatible avec l'objet de la SCP FITOR qui ne peut être que civil, que les activités du MLCC sont réglementées et que c'est seulement en considération de sa qualité de médecin que M. m. Mc NA. a eu l'autorisation d'ouvrir ce centre, qu'à défaut d'autorisation administrative, la condamnation prononcée par le tribunal serait inexécutable, que ce contrat est contraire à l'ordre public puisqu'un médecin ne peut être associé à un non médecin dans une société dont les statuts interdisent de surcroît tout placement ou investissement dans une activité réglementée ;

Attendu qu'il explique avoir seulement demandé au tribunal de constater que le prêt est résilié de par la manifestation de la volonté de la SCP FITOR, concrétisée par l'assignation du 19 juillet 2007 par laquelle elle en demande le remboursement, prend acte de la volonté de la SCP FITOR de le résilier désormais et se déclare disposé à lui restituer la somme de 640.000 euros, sans intérêt comme stipulé au contrat ;

Attendu que, dans ses conclusions additionnelles après cassation, déposées le 3 janvier 2013, M. m. Mc NA. demande à la cour de débouter la SCP FITOR de son appel incident et de toutes ses demandes, de le recevoir en son appel principal et de l'y déclarer bien fondé, puis reprend les prétentions qu'il a exposées dans ses conclusions initiales.

Attendu qu'il fait valoir en outre :

- que la constitution de la société et la cession à la SCP FITOR de la moitié du capital de cette société ne pouvant être la contrepartie de la remise des fonds - contrepartie qui est le remboursement avec ou sans intérêts - cette obligation se trouve dénuée de contrepartie et donc de cause,

- qu'il n'a jamais prétendu que les obligations étaient alternatives, mais soutenu que celles qui résultent du prêt sont valides et que celles qui résultent »de la promesse de société « sont nulles,

- qu'il est particulièrement évident que l'activité commerciale envisagée à travers la SAM à créer excède et est incompatible avec l'objet social de la SCP FITOR, objet qui est et ne peut être que civil,

- qu'en effet l'article 2 des statuts de cette société prévoit que »la société a pour activité, conformément aux dispositions de l'article 1679 du Code civil, la gestion des fonds de la société, effectuer tout placement ou investissement jugé utile à l'exception de toute activité réglementée ou pouvant présenter un aspect commercial, et généralement, toutes opérations pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet social, pourvu qu'elles ne modifient pas le caractère civil de la société«, que la SCP FITOR ne peut donc être associée à une société commerciale, qu'il résulte de l'article précité que sont interdits, d'une part tout placement ou investissement dans toute activité réglementée ou pouvant présenter un aspect commercial et d'autre part les opérations qui modifient le caractère civil de la société, que, d'évidence l'acquisition de la moitié du capital d'une société commerciale, fût-elle de capitaux, constitue un placement pouvant présenter un aspect commercial, l'associé à 50% devant nécessairement au moins ratifier la gestion de la société, soit une gestion ayant un objet commercial, que l'objet de la société à créer serait illicite, entraînant la nullité de la convention, que c'est à tort que le tribunal a considéré que M. m. Mc NA., tiers vis-à-vis de la société FITOR, n'a pas qualité pour solliciter des sanctions en relation avec ses statuts, qu'en effet M. m. Mc NA. n'est pas un tiers vis-à-vis de la SCP FITOR mais son cocontractant, que le tribunal semble confondre la demande d'annulation partielle du contrat du 30 juillet 2003 avec une demande d'annulation des statuts de la SCP FITOR ;

Attendu que M. m. Mc NA. fait enfin valoir que les activités du MONTE CARLO LIFE CHECK sont des activités médicales et par là même réglementées, qu'il est clair en effet que c'est eu égard à sa qualité de médecin que M. m. Mc NA. a eu l'autorisation d'ouvrir ce centre, que donc, non seulement il s agit d'une activité réglementée - exclue aussi par l'article 2 susvisé des statuts de la SCP FITOR - mais aussi, on peut raisonnablement penser que le Gouvernement n'autoriserait M. m. Mc NA. à s'associer qu'avec d'autres médecins, que le contrat liant les parties, en ce qu'il constitue une » promesse de société « commerciale ayant au surplus pour objet une activité réglementée, est nul comme ayant un objet illicite et devra donc être annulé en ses articles 2 à 5, en application de l'article 983 du Code civil, à défaut de l'annulation de ces parties pour absence de cause, qu'ainsi la condamnation de M. m. Mc NA. à constituer la SAM et à en céder 50% du capital à la SCP FITOR est un non-sens, que c'est d'autant plus un non-sens que, cette partie du contrat ne fût-elle pas nulle, toute constitution d'une société anonyme en Principauté est soumise à une autorisation administrative, ce qui signifie que M. m. Mc NA. voudrait-il constituer cette société que cette constitution serait indépendante de sa volonté et que, par conséquent, en cas de refus de l'administration, cette condamnation serait inexécutable ;

Attendu que M. m. Mc NA. expose encore que, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, le problème n'est pas celui de l'éventuel transfert de la »clientèle médicale « mais celui de la nature de l'activité qui est médicale, une personne qui n'est pas médecin ne pouvant être associée dans une société qui a pour objet une activité médicale, soit une activité réglementée pour laquelle elle n'est pas et ne peut être habilitée, que le problème est celui de la contrariété à l'ordre public, l'association prévue étant directement contraire à l'ordre public, qu'ainsi, interrogé par M. m. Mc NA., sur cette question, le conseiller du Gouvernement pour les Affaires sociales et la Santé lui a répondu ceci : »Comme suite à notre entretien en date du 21 septembre 2009, j'ai l'honneur de vous confirmer qu'aucun médecin n'est autorisé à exercer son art en cabinet de ville sous la forme d'une société anonyme monégasque« ;

Attendu que M. m. Mc NA. soutient encore qu'il n'a pas demandé au tribunal de prononcer la résiliation du contrat, que ce contrat est un prêt et seulement un prêt sans intérêt, qu'il prend acte de la volonté de la SCP FITOR de le résilier et se déclare disposé à restituer la somme de 640.000 euros, sans intérêts, comme stipulé ;

Attendu que, pour justifier sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 100.000 euros, il prétend que la SCP FITOR a profité de ses besoins de financement pour essayer de le contraindre à une association commerciale au surplus illicite et qu'ainsi l'action de cette société apparaît manifestement abusive ;

Attendu enfin, s'agissant de la pièce adverse n°16, censée émanée de la »S. A. R. L. AUDIT CONSULTANTS« qu'il justifie sa demande de l'exclure des débats, par le fait qu'elle n'est pas signée et ne présente donc aucun caractère d'authenticité et que si un an après sa production la SCP FITOR l'a produite en pièce 25 avec cette fois la signature, une telle » régularisation « est plus que sujette à caution ;

Attendu que, dans ses conclusions initiales, enregistrées le 14 décembre 2010, la SCP FITOR demande à la cour de confirmer le jugement, de condamner m. Mc NA. à lui payer la somme de 586.277 euros avec intérêts au taux légal, de le condamner, conformément à ses engagements contractuels, à constituer une société commerciale monégasque, dans le délai de un mois à compter de la signification de la décision, sous une astreinte, passé ce délai, de 7.500 euros par jour de retard, de le condamner, une fois cette société constituée, et dans le délai de un mois à compter de cette constitution, sous la même astreinte que précédemment, à effectuer toutes formalités et actes nécessaires à la cession de 50% des parts de la société au profit de la SCP FITOR ou toutes autres entités pouvant la substituer, dire et juger que l'ensemble des formalités et des frais inhérents resteront à la charge de m. Mc NA., valider la saisie-arrêt ordonnée par ordonnance présidentielle du 29 avril 2007, condamner m. Mc NA. à régler à la SCP FITOR la somme de 1.500.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi au regard de son comportement déloyal et dolosif, subsidiairement, sur la demande de dommages et intérêts, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné m. Mc NA. à lui payer la somme de 50.000 euros ;

Attendu qu'elle fait valoir les conditions particulièrement avantageuses du prêt consenti à m. Mc NA., aux termes desquelles celui-ci a accepté en contrepartie de créer une SAM dont le capital serait détenu par moitié entre eux et de l'informer régulièrement sur son activité ;

Attendu qu'elle expose que, devant la carence de son cocontractant à communiquer les documents comptables, elle lui a adressé une mise en demeure, à laquelle il a répondu vouloir rembourser le prêt par anticipation et ne plus être désireux de créer une société, que les quelques documents qu'il a transmis n'ont pas permis initialement aux experts comptables de se prononcer formellement, mais laissent apparaître un résultat d'un montant total de 586.277 euros pour les années 2005, 2006 et 2007, que les saisies-arrêts autorisées sur ses comptes n'ont pas permis d'obtenir le blocage de sommes suffisantes pour permettre le remboursement du prêt, que m. Mc NA. a tenté d'obtenir un sursis à statuer au regard de la plainte qu'il a déposée du chef de faux, usage de faux et tentative d'escroquerie au jugement mais que sa demande a été rejetée par arrêt du 10 mai 2011, que l'obligation de constituer une société constitue pour m. Mc NA. une obligation de faire, qu'en accordant le prêt à celui-ci, la SCP FITOR a pris un risque dans la mesure où elle n'était pas certaine que son activité allait prospérer, que la volonté des parties était bien de créer une structure commune dans laquelle les intérêts économiques seraient partagés par moitié, le fait que le MLCC soit intégré dans une société n'ayant rien de répréhensible en droit monégasque puisque la SCP FITOR peut s'adjoindre un médecin salarié pour accomplir des actes médicaux ;

Attendu que, dans ses conclusions additionnelles sur renvoi après cassation, la SCP FITOR demande à la cour :

- de lui allouer le bénéfice de ses précédentes écritures, de la recevoir en ses conclusions et la déclarer bien fondée,

- de débouter M. m. Mc NA. de sa demande de sursis à statuer, et à défaut, si la cour entendait y faire droit, dire que le sursis à statuer ne touchera que la demande visant à la constitution d'une entité commune aux deux parties et non la demande de remboursement du prêt,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. m. Mc NA. de ses demandes de nullité, de fin de non recevoir et de résiliation du contrat conclu le 30 juillet 2003,

- de condamner M. m. Mc NA. à verser la somme en principal de 586.277 euros à la SCP FITOR en exécution du contrat de prêt augmentée des intérêts légaux de la manière suivante :

1) sur la somme de 358.293 euros, à compter du 1er avril 2005 jusqu'à complet paiement

2) sur la somme de 121.678 euros à compter du 1er avril 2006 jusqu'à complet paiement

3) sur la somme de 106.306 euros à compter du 1er février 2007 jusqu'à complet paiement,

- de condamner M. m. Mc NA. à constituer une société anonyme monégasque dans un délai de un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte, passé ce délai, de 7.500 euros par jour de retard constaté,

- de condamner M. m. Mc NA., une fois la société anonyme constituée, et dans un délai d'un mois à compter de cette constitution, sous cette même astreinte, à effectuer toutes formalités et actes nécessaires à la cession de 50% des parts de la SAM au profit de la SCP FITOR ou de toute autre société qu'elle pourrait se substituer,

- à défaut, y ajoutant, si la cour devait juger que la condamnation de M. Mc NA. à l'exécution forcée de l'obligation de constituer une société et d'en céder 50% des parts n'était pas possible, condamner M. m. Mc NA. au versement de la somme de 1.000.000 euros à titre de dommages et intérêts au profit de la SCP FITOR, à titre d'exécution en équivalent,

- de dire et juger que l'ensemble de ces formalités et des frais inhérents resteront à la charge de M. m. Mc NA.,

- de valider la saisie-arrêt autorisée par ordonnance présidentielle en date du 29 avril 2008 au bénéfice de la SCP FITOR,

- de condamner M. m. Mc NA. à régler à la SCP FITOR la somme de 1.500.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par cette dernière du fait du comportement déloyal et dolosif du Docteur m. Mc NA.,

- à titre subsidiaire, sur la demande de dommages et intérêts,

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné M. m. Mc NA. à régler la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts, en tout état de cause, condamner M. m. Mc NA. aux entiers dépens, en ce compris tous frais et accessoires, tels que frais d'huissier, procès-verbaux de constat, sommations, frais d'expertise et de traduction éventuels, dont distraction au profit de Maître Jean-Charles GARDETTO, Avocat-Défenseur, sous son affirmation de droit ;

Attendu que la SCP FITOR fait valoir, en sus de ses précédentes explications, que si les obligations de faire se résolvent en principe en dommages et intérêts, certaines obligations forcées peuvent être ordonnées dès lors qu'elles n'impliquent aucune contrainte sur le débiteur en termes d'atteinte à sa liberté individuelle ; qu'à cet égard, elle invoque un arrêt de la troisième chambre de la cour de cassation française (19 février 1970, Bull. n° 123), duquel il résulte, selon elle, qu'il est possible de contraindre une personne qui s'est engagée à céder les parts d'une société civile à un tiers à s'exécuter et à l'agréer en qualité de nouvel associé ;

Attendu qu'elle ajoute que la cause de l'obligation de constituer une société et d'en céder 50% des parts est l'absence d'intérêts stipulée au contrat de prêt ;

Attendu, sur la somme de 1.000.000 euros qu'elle réclame à titre de dommages et intérêts pour le cas où la cour jugerait que l'exécution en nature de l'obligation de faire ne serait pas possible en l'espèce, qu' elle soutient qu'elle est justifiée au regard de la valeur que représentent 50% des parts de la société à laquelle auraient été apportés les actifs du Monaco Life Check Center ; qu'en effet, lorsqu'ils étaient exploités par M. m. Mc NA. en son nom, ces biens lui permettaient de réaliser un bénéfice de l'ordre de 350.000 euros en 2005, alors même qu'il s'accordait une rémunération de 20.000 euros par mois (350.000 / 2 X 6 = 1.050.000 ), que la somme ainsi allouée ne représenterait donc que ce que ses actions auraient pu lui apporter au titre du seul versement de dividendes sur seulement six exercices ;

Attendu, sur la somme de 1.500.000 euros qu'elle demande en supplément de dommages et intérêts devant réparer le préjudice qui lui aurait été causé par le comportement » déloyal et abusif « du docteur m. Mc NA., elle invoque le refus de celui-ci d'exécuter ses obligations contractuelles, de lui rembourser le prêt qui lui avait été consenti, d'exécuter son obligation d'information, ainsi que le fait qu'elle ait été contrainte de saisir la justice pour » faire valoir ses droits les plus légitimes « ;

Sur ce la Cour;

Attendu que le contrat synallagmatique susvisé du 30 juillet 2003 a fait naître deux séries d'obligations, l'une à la charge de la SCP FITOR, consistant en une promesse de prêt sans intérêt à M. m. Mc NA. pour le financement, par celui-ci, de matériel destiné à la MLCC et les autres, à la charge de M. m. Mc NA., consistant en une promesse de créer une société anonyme monégasque à laquelle serait apporté le matériel médical acquis avec l'argent du prêt, puis de céder 50% du capital de cette société à la SCP FITOR, les bénéfices de celle-ci devant être partagés entre la SCP FITOR et M. m. Mc NA. et les excédents de trésorerie générés par l'activité du centre d'imagerie médicale devant servir à rembourser le prêt;

Attendu que, pour être valable, un contrat doit avoir un objet possible à réaliser ;

Attendu que si M. m. Mc NA., tiers par rapport à la SCP FITOR, est sans qualité pour demander la modification des statuts de cette société, il peut se prévaloir de leur existence ;

Attendu que l'article 2 de ces statuts exclut » toute activité réglementée ou pouvant présenter un aspect commercial «, et autorise »toutes opérations pouvant se rattacher directement à l'objet social, pourvu qu'elles ne modifient pas le caractère civil de la société" ;

Attendu qu'il en résulte que la SCP FITOR ne peut donc participer à une société commerciale telle que celle dont la création est envisagée par les articles 4 et 5 du contrat ; qu'il s'ensuit que l'opération projetée étant impossible à réaliser, ce contrat doit être annulé en ses articles 2 à 5 ; que la demande d'exclusion des débats des pièces 16 et 35 produites par la SCP FITOR est sans objet ;

Attendu que M. m. Mc NA. demande qu'il lui soit donné acte de ce qu'il s'engage à rembourser le prêt de 640.000 euros; qu'il convient d'accueillir cette demande et de le condamner, en tant que de besoin, à effectuer ce remboursement avec les intérêts au taux légal à compter de l'offre de restitution formalisée par conclusions devant le tribunal de première instance ;

Attendu, en conséquence, qu'il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a validé la saisie-arrêt autorisée par ordonnance du 29 avril 2008, mais à concurrence de la somme de 640.000 euros ;

Attendu que toutes les autres demandes de la SCP FITOR procèdent des articles 2 à 5 du contrat du 30 juillet 2003 ; que ces stipulations étant annulées, ces demandes se trouvent dépourvues de fondement ;

Attendu que M. m. Mc NA. demande la condamnation de la SCP FITOR à lui payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ; qu'eu égard aux circonstances ci-dessus exposées, la SCP FITOR n' a pas abusé de son droit d'agir en justice ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

- Confirme le jugement déféré en ce qu'il ordonne la jonction de la procédure n° 2008/000535 à la procédure n° 2007/00007, rejette la demande d'exclusion des débats des pièces n° 16 et 25 et valide la saisie-arrêt, mais seulement à concurrence de 640.000 euros :

- Réforme le jugement pour le surplus et statuant à nouveau :

- annule les stipulations des articles 2 à 5 du contrat du 30 juillet 2003,

- donne acte à M. m. Mc NA. de son engagement à rembourser la somme de 640.000 euros et, en tant que de besoin, le condamne à ce paiement,

- le déboute de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- Condamne la SCP FITOR aux entiers dépens, distraits au profit de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat défenseur, sous sa due affirmation ;

Composition

Ainsi délibéré et jugé le quinze mars deux mille treize, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Monsieur Roger BEAUVOIS, Président, Messieurs Jean-Pierre DUMAS, Chevalier de l'ordre de Saint-Charles, rapporteur et Charles BADI, Chevalier de l'ordre de Saint-Charles, Conseillers, en présence du Ministère Public, assistés de Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'ordre de Saint-Charles.-

Le Greffier en Chef, le Président,

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Synthèse
Numéro d'arrêt : 10853
Date de la décision : 15/03/2013

Analyses

Le contrat synallagmatique litigieux a fait naître deux séries d'obligations, l'une à la charge de la SCP FITOR, consistant en une promesse de prêt sans intérêt à M. m. Mc NA. pour le financement, par celui-ci, de matériel destiné à la MLCC et les autres, à la charge de M. m. Mc NA., consistant en une promesse de créer une société anonyme monégasque à laquelle serait apporté le matériel médical acquis avec l'argent du prêt ;Pour être valable, un contrat doit avoir un objet possible à réaliser ;Si M. m. Mc NA., tiers par rapport à la SCP FITOR, est sans qualité pour demander la modification des statuts de cette société, il peut se prévaloir de leur existence ;L'article 2 de ces statuts exclut « toute activité réglementée ou pouvant présenter un aspect commercial », et autorise «toutes opérations pouvant se rattacher directement à l'objet social, pourvu qu'elles ne modifient pas le caractère civil de la société» ;Il en résulte que la SCP FITOR ne peut donc participer à une société commerciale telle que celle dont la création est envisagée par les articles 4 et 5 du contrat ;Il s'ensuit que l'opération projetée étant impossible à réaliser, ce contrat doit être annulé en ses articles 2 à 5.

Contrat - Formation  - Contrat - Effets.

Contrat synallagmatiqueObjet réalisable - Non-validité - Non-annulation.


Parties
Demandeurs : M. m. Mc NA
Défendeurs : la SCP « FITOR »

Références :

article 1679 du Code civil
ordonnance du 29 avril 2008
article 983 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2013-03-15;10853 ?

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