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11/10/2006 | MONACO | N°27223

Monaco | Cour de révision, 11 octobre 2006, SAM Crédit Suisse c/ SA Carrefour France


Abstract

Chèque

Détournement - Opposition tardive : ne constituant pas un retard fautif, le tireur n'ayant été avisé dudit détournement qu'après que son compte ait été débité, l'article L. 131-35 du Code monétaire et financier français n'exigeant pas la même obligation de diligence immédiate pour l'opposition initiale

Résumé

Selon l'arrêt attaqué le 12 avril 2001, la société Carrefour France, a émis un chèque barré, tiré sur un compte ouvert à la société BNP Paribas, à l'ordre de la société de prévoyance interprofessionnelle des salar

ié (APGIS), et lui a adressé avec une lettre d'accompagnement ; la lettre est parvenue à sa destinatair...

Abstract

Chèque

Détournement - Opposition tardive : ne constituant pas un retard fautif, le tireur n'ayant été avisé dudit détournement qu'après que son compte ait été débité, l'article L. 131-35 du Code monétaire et financier français n'exigeant pas la même obligation de diligence immédiate pour l'opposition initiale

Résumé

Selon l'arrêt attaqué le 12 avril 2001, la société Carrefour France, a émis un chèque barré, tiré sur un compte ouvert à la société BNP Paribas, à l'ordre de la société de prévoyance interprofessionnelle des salarié (APGIS), et lui a adressé avec une lettre d'accompagnement ; la lettre est parvenue à sa destinataire sans le chèque ; le 27 avril 2001 la société anonyme monégasque Crédit Suisse (banque Crédit Suisse) a reçu d'un de ses clients le chèque litigieux, portant deux endos de particuliers, et l'a envoyé à la BNP Paribas qui l'a compensé le 30 avril ; la société Carrefour France ayant été avisée de l'absence de réception du chèque par l'APGIS en a émis un autre et a demandé à celle-ci une attestation de désistement de paiement du premier chèque avant de faire opposition ; cette attestation, arrivée le 25 avril à la société Carrefour France dans un service non concerné, n'est parvenue au service compétent que le 7 mai alors que le compte de la société émettrice avait été débité le 3 mai, en l'absence d'opposition ;

Le 22 octobre 2001 la société Carrefour France a fait assigner la banque Crédit suisse en paiement, à titre de dommages-intérêts, d'une somme égale au montant du chèque détourné ; par jugement du 4 mars 2004 le Tribunal de première instance a condamné la banque Crédit Suisse à payer à la société Carrefour France la somme de 1 167 943,32 euros outre 3 000 euros pour résistance abusive, retenant à la charge de la société Carrefour France une faute ayant concouru pour 10 % à la réalisation de son dommage ; sur appel principal de la banque Crédit Suisse et incident de la société Carrefour France, la Cour d'appel, infirmant le jugement, a déclaré la banque entièrement responsable du préjudice et l'a condamné à payer 1 297 714,80 euros, outre 3 000 euros pour résistance abusive et 5 000 euros pour appel abusif ;

Sur les premier et deuxième moyens réunis :

La banque Crédit Suisse fait grief à l'arrêt de retenir son entière responsabilité, alors, selon le moyen, d'une part, que l'article L. 131-5 du Code monétaire et financier français, applicable en l'espèce, impose que l'opposition au paiement d'un chèque soit faite immédiatement ; en jugeant que le délai de neuf jours écoulé entre le 25 avril, date à laquelle la société Carrefour France avait été informée du vol du chèque et le 3 mai, date du débit du chèque détourné, n'était pas constitutif d'un retard fautif imputable à cette société, la Cour d'appel a violé le texte susvisé, et alors, d'autre part, qu'elle a également violé l'article 199 du Code de procédure civile en ne répondant pas aux conditions soutenant que si la société Carrefour France n'avait pas commis la faute de ne pas faire opposition dans les délais légaux, le dommage ne se serait pas produit ;

Mais si l'article L. 131-35 exige du tireur d'un chèque perdu ou volé qu'il confirme immédiatement son opposition par écrit, cet article n'impose pas la même obligation de diligence immédiate pour l'opposition initiale ; ayant constaté que l'attestation de désistement du bénéficiaire du chèque était arrivée à la société Carrefour France le 25 avril 2001 et que tout opposition était inefficace après le 3 mai 2001, la Cour d'appel, répondant aux conclusions, a pu retenir que, compte tenu des circonstances, ce délai de neuf jours n'était pas constitutif d'un retard fautif de cette société, en relation avec le préjudice qui lui a été causé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé.

Motifs

La Cour de révision,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 12 avril 2001, la société Carrefour France, a émis un chèque barré, tiré sur un compte ouvert à la société BNP Paribas, à l'ordre de la société de prévoyance interprofessionnelle des salariés (APGIS), et le lui a adressé avec une lettre d'accompagnement ; que la lettre est parvenue à sa destinataire sans le chèque ; que le 27 avril 2001 la société anonyme monégasque Crédit Suisse (banque Crédit Suisse) a reçu d'un de ses clients le chèque litigieux, portant deux endos de particuliers, et l'a envoyé à la BNP Paribas qui l'a compensé le 30 avril ; que la société Carrefour France ayant été avisée de l'absence de réception du chèque par l'APGIS en a émis un autre et a demandé à celle-ci une attestation de désistement de paiement du premier chèque avant de faire opposition ; que cette attestation, arrivée le 25 avril à la société Carrefour France dans un service non concerné, n'est parvenue au service compétent que le 7 mai alors que le compte de la société émettrice avait été débité le 3 mai, en l'absence d'opposition ;

Attendu que le 22 octobre 2001 la société Carrefour France a fait assigner la banque Crédit Suisse en paiement, à titre de dommages-intérêts d'une somme égale au montant du chèque détourné ; que par jugement du 4 mars 2004 le Tribunal de première instance a condamné la banque Crédit Suisse à payer à la société Carrefour France la somme de 1 167 943,32 euros outre 2 000 euros pour résistance abusive, retenant à la charge de la société Carrefour France une faute ayant concouru pour 10 % à la réalisation de son dommage que sur appel principal de la banque Crédit Suisse et incident de la société Carrefour France, la Cour d'appel, infirmant le jugement, a déclaré la banque entièrement responsable du préjudice et l'a condamnée à payer 1 297 714,80 euros, outre 3 000 euros pour résistance abusive et 5 000 euros pour appel abusif ;

Sur les premier et deuxième moyens réunis :

Attendu que la banque Crédit Suisse fait grief à l'arrêt de retenir son entière responsabilité, alors, selon le moyen, d'une part, que l'article L. 131-5 du Code monétaire et financier français, applicable en l'espèce, impose que l'opposition au paiement d'un chèque soit faite immédiatement ; qu'en jugeant que le délai de neuf jours écoulé entre le 25 avril, date à laquelle la société Carrefour France avait été informée du vol du chèque et le 3 mai, date du débit du chèque détourné, n'était pas constitutif d'un retard fautif imputable à cette société, la Cour d'appel a violé le texte susvisé, et alors, d'autre part, qu'elle a également violé l'article 199 du Code de procédure civile en ne répondant pas aux conclusions soutenant que si la société Carrefour France n'avait pas commis la faute de ne pas faire opposition dans les délais légaux, le dommage ne se serait pas produit ;

Mais attendu que si l'article L. 131-35 exige du tireur d'un chèque perdu ou volé qu'il confirme immédiatement son opposition par écrit, cet article n'impose pas la même obligation de diligence immédiate pour l'opposition initiale ; qu'ayant constaté que l'attestation de désistement du bénéficiaire du chèque était arrivée à la société Carrefour France le 25 avril 2001 et que toute opposition était inefficace après le 3 mai 2001, la Cour d'appel, répondant aux conclusions, a pu retenir que, compte tenu des circonstances, ce délai de neuf jours n'était pas constitutif d'un retard fautif de cette société, en relation avec le préjudice qui lui a été causé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur les troisième et quatrième moyens réunis :

Attendu que la banque Crédit Suisse fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour appel abusif, alors selon le moyen, d'une part, qu'il y a une contradiction de motifs et violation de l'article 1229 du Code civil, dès lors que la Cour d'appel ayant reconnu que devant elle la banque ne sollicitait qu'un partage plus favorable de responsabilité l'appelante ne peut avoir commis un usage abusif de la voie de recours, et alors, d'autre part, que l'article 422 du Code de procédure civile ne pose aucune restriction particulière au droit d'appel et qu'en sanctionnant la banque Crédit Suisse sans caractériser en quoi l'exercice de la voie de recours ordinaire constituait un abus, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Mais attendu qu'ayant retenu l'absence de faute de la société Carrefour France et relevé que les conditions d'encaissement du chèque par la banque Crédit Suisse, qu'elle a décrites, étaient constitutives de fautes, la Cour d'appel a pu en déduire, sans se contredire, qu'en raison de ces fautes la banque avait fait un usage abusif de la voie de l'appel ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi,

Condamne la banque Crédit Suisse à l'amende et aux dépens.

Composition

M.M. Appolis, prem. juge ; Beauvois, v.-prés. ; Dumas, cons. rap. ; Chevreau, cons. ; Mmes Gonelle, prem. subst. proc. gén. ; Bardy, gréf. en chef.

Note

Cet arrêt rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 24 janvier 2006 par la Cour d'appel statuant en matière civile, signifié le 10 février 2006.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 27223
Date de la décision : 11/10/2006

Analyses

Responsabilité (Banque, finance) ; Instruments de paiement et de crédit


Parties
Demandeurs : SAM Crédit Suisse
Défendeurs : SA Carrefour France

Références :

article 422 du Code de procédure civile
24 janvier 2006
article 1229 du Code civil
article 199 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;2006-10-11;27223 ?

Source

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