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04/10/1991 | MONACO | N°26100

Monaco | Cour de révision, 4 octobre 1991, V. c/ SAM Polymétal Richelmi et UAP. Caisse Primaire d'Assurance Maladie des AM.


Abstract

Responsabilité civile

Choses inanimées (C. civ., art. 1231, al. 1) - Obligation de réparer du gardien - Exclusion : force majeure - Piéton traversant la chaussée (non)

Résumé

L'obligation pour le gardien d'une chose inanimée de réparer le dommage dans la production duquel elle est intervenue, ne peut disparaître qu'en cas de force majeure.

Le fait pour un piéton de traverser la chaussée sur un passage protégé ne présente aucun des caractères de la force majeure.

Motifs

La Cour de révision,

Attendu que les conclus

ions additionnelles susvisées ont été déposées dans les délais et forme exigés par l'article 459-3 du Code de pr...

Abstract

Responsabilité civile

Choses inanimées (C. civ., art. 1231, al. 1) - Obligation de réparer du gardien - Exclusion : force majeure - Piéton traversant la chaussée (non)

Résumé

L'obligation pour le gardien d'une chose inanimée de réparer le dommage dans la production duquel elle est intervenue, ne peut disparaître qu'en cas de force majeure.

Le fait pour un piéton de traverser la chaussée sur un passage protégé ne présente aucun des caractères de la force majeure.

Motifs

La Cour de révision,

Attendu que les conclusions additionnelles susvisées ont été déposées dans les délais et forme exigés par l'article 459-3 du Code de procédure civile et sont donc recevables ;

Attendu que demoiselle V. soutient que sa survenance sur un passage protégé du quai Kennedy à Monaco où elle heurta une glissière posée sur le sol par la SAM Polymétal-Richelmi ne constituait pas un cas de force majeure de nature à exonérer le gardien de son obligation de réparer le préjudice qu'elle avait subi, qu'elle demande en conséquence qu'il soit condamné ainsi que son assureur Union des assurances de Paris, à le réparer après qu'un expert en eût déterminé et évalué les éléments et sollicite en attendant une provision de 20 000 F, qu'elle demande enfin qu'il soit déclaré que la procédure doit « se dérouler au contradictoire de la caisse primaire d'assurance maladie afin que celle-ci puisse réclamer le remboursement des prestations qu'elle lui a versées » ;

Attendu que la caisse primaire d'assurance maladie demande de son côté que la décision à intervenir soit commune à demoiselle V. et que lui soit remboursé sur l'indemnité qui sera allouée à celle-ci le montant des prestations qu'elle lui a versées et qui s'élève à 59 228,84 F ;

Attendu que par des conclusions additionnelles déposées le 4 juillet 1991, la SAM Polymétal et la Compagnie Union des assurances de Paris, soulèvent l'irrecevabilité de l'appel de la caisse primaire d'assurance maladie formé hors délai et par simples conclusions, que par conclusions additionnelles du 5 juillet 1991 les intimées, après avoir exposé que la force majeure ne constituait pas, aux termes d'une jurisprudence et d'une doctrine constante, la seule cause permettant au gardien d'une chose inanimée de s'exonérer de la présomption de responsabilité que l'article 1231, al. 1 du Code civil fait peser sur lui, soutiennent que le gardien peut être exonéré partiellement lorsque, sans constituer un événement imprévisible et insurmontable, le fait de la victime a concouru avec le fait de la chose à la réalisation du dommage ; que reprenant le déroulement des faits dont ils soulignent qu'ils ne sont connus que par les seules déclarations de demoiselle V., ces intimées relèvent que celle-ci handicapée et se déplaçant très difficilement traversait le 21 avril 1987, vers 6 heures 45 l'avenue Kennedy lorsque de son pied bot elle aurait heurté une glissière de sécurité posée à même la chaussée en attendant d'être mise en place ce qui provoqua sa chute et ses blessures ; qu'aucun témoin n'a assisté à ces faits et que demoiselle V. a attendu quatre mois pour en informer l'automobile club de Monaco, propriétaire des installations de sécurité pour le Grand Prix automobile ; qu'ils en déduisent que la preuve de l'intervention de la chose dans la production du dommage n'est pas apportée ; qu'à titre subsidiaire ils invoquent la faute commise par la victime qui, ayant toujours vécu en Principauté ne pouvait pas ignorer l'existence d'un chantier sur cette avenue qu'elle empruntait tous les jours pour se rendre à son travail et devait apporter un maximum d'attention à sa propre sécurité et ce d'autant plus que la glissière était un objet particulièrement visible et qu'au moment des faits le jour était levé depuis près de deux heures ; que contrairement à ce qu'affirme la victime la glissière n'était pas placée derrière une jardinière qui l'aurait cachée, que dans ce cas elle aurait d'ailleurs heurté non la glissière mais la jardinière ; qu'enfin à admettre la réalité du heurt de la glissière, il ne pouvait conduire qu'à un partage de responsabilité, qu'enfin les frais médicaux lui ayant été remboursés et l'assistance judiciaire lui ayant été accordée demoiselle V. ne peut obtenir qu'une provision limitée aux frais de l'expertise qui serait ordonnée et qui peuvent être évalués à 3 000 F ;

SUR CE,

Attendu que dans ses conclusions additionnelles demoiselle V. demande que la procédure se déroule au contradictoire de la caisse primaire d'assurance maladie ; qu'elle satisfait ainsi aux exigences de l'article L. 376-1 alinéa 4 du Code de sécurité sociale dont l'application à l'espèce n'est pas contestée et qui prescrit à la victime d'appeler la caisse en déclaration de jugement commun, que dès lors la demande en remboursement des prestations versées à la victime faite par la caisse primaire d'assurance maladie est recevable ;

Attendu que la matérialité des faits, qui n'est pas sérieusement discutée, est établie par les déclarations de la victime lors de son audition le 24 août 1987 au cours de l'enquête de police et par le témoignage du sieur D. qui l'a trouvée étendue sur la chaussée alors qu'à cet endroit une glissière de sécurité était posée à même le sol ;

Attendu que l'obligation pour le gardien d'une chose de réparer le dommage dans la production duquel elle est intervenue ne peut disparaître qu'en cas de force majeure ;

Attendu que la recherche d'une faute commise par la victime pour aboutir à un partage de responsabilité avec le gardien ou la prise en considération du comportement de la chose reviennent à admettre implicitement et par opposition l'existence d'une faute du gardien ;

Attendu que le comportement de demoiselle V. ne présente aucun des caractères de la force majeure ;

Attendu dès lors que la SAM Polymétal doit être déclarée entièrement responsable du dommage subi par demoiselle V., la Compagnie Union des assurances de Paris devant la garantie de ses obligations de réparation ;

Attendu que pour évaluer le montant de son préjudice il y a lieu d'en faire déterminer les éléments par un expert, qu'en attendant les résultats de cette mesure d'instruction il convient de lui allouer une provision de 10 000 F ;

Attendu que la partie qui succombe doit supporter les dépens ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Dit l'appel recevable et bien fondé ;

Déclare la SAM Polymétal en sa qualité de gardien et par application de l'article 1231 alinéa 1 du Code civil et la Compagnie Union des assurances de Paris tenues à réparer le préjudice subi par demoiselle V. le 21 avril 1987 et avant dire droit sur le montant du préjudice nomme le docteur Boiselle en qualité d'expert et qui pourra se faire assister de tout spécialiste de son choix avec mission :

1° d'examiner demoiselle V., de décrire, en précisant leur nature et leur importance, les incapacités de travail entraînées ou si elles étaient préexistantes, aggravées par sa chute sur la chaussée ;

2° d'évaluer le pretium doloris et s'il y a lieu le préjudice esthétique et d'agrément ;

3° de déterminer les frais médicaux et pharmaceutiques exposés ;

4° de vérifier si les prestations versées à demoiselle V. par la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes Maritimes qui en réclame le remboursement sont toutes imputables à l'accident susvisé ; dans la négative en faire le départ ;

Impartissons à l'expert ainsi commis un délai de huit jours pour l'acceptation ou le refus de sa mission, ledit délai courant à compter de la réception par lui de la copie de la présente décision qui lui sera adressée par le greffe général ;

Disons qu'en cas d'acceptation de sa mission ce même expert déposera au greffe général un rapport écrit de ses opérations dans les quatre mois du jour où il les aura débutées, à défaut d'avoir pu concilier les parties, ce qu'il lui appartiendra de tenter dans toute la mesure du possible ;

Disons que les frais seront recouvrés comme en matière d'assistance judiciaire ;

Chargeons Monsieur le premier président de la Cour d'appel du contrôle de l'expertise, qui obéira aux dispositions des articles 348 à 365 nouveaux du Code de procédure civile ;

Condamne la SAM Polymétal et l'Union des assurances de Paris à verser à demoiselle V. une provision de 10 000 F ;

Dit que le présent arrêt sera commun à la caisse primaire d'assurance maladie ;

Composition

MM. Bel, prem. prés. rapp. ; Pucheus, vice-prés. ; Charliac et Monégier du Sorbier, cons. ; Carrasco, proc. gén. ; MMes Sanita et Clerissi, av. déf.

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Synthèse
Numéro d'arrêt : 26100
Date de la décision : 04/10/1991

Analyses

Droit des obligations - Responsabilité civile délictuelle et quasi-délictuelle


Parties
Demandeurs : V.
Défendeurs : SAM Polymétal Richelmi et UAP. Caisse Primaire d'Assurance Maladie des AM.

Références :

Code de procédure civile
C. civ., art. 1231, al. 1
article 459-3 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.revision;arret;1991-10-04;26100 ?

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