Abstract
Contrat de travail - Rappel de salaires - Heures de délégation (non) - Convention inapplicable - Prime de travaux (non) - Preuve de nuisances (non) - Coupures non rémunérées (non) - Prime de vacances (non) - Demande prescrite – Demande reconventionnelle de l'employeur - Restitution de l'indu (oui)
Résumé
Il ressort de l'article 1er de la loi n° 416 du 7 juin 1945 que le législateur entend distinguer clairement la notion de syndicat et la notion d'union syndicale. L'union syndicale, dont les adhérents sont des syndicats et non des salariés, dispose de ses propres statuts et organes de représentation. Si l'union syndicale, organe juridique indépendant, a signé la Convention Collective Nationale du Travail, pour autant le Syndicat des autobus de Monaco n'a pas signé cette convention, pas plus que la société employeur. Ainsi, l'intimé, secrétaire général du Syndicat des autobus de Monaco, n'est pas « membre d'un syndicat partie à la convention » au sens de l'article 10 de la loi n° 416 du 7 juin 1945, quand bien même le syndicat dont il est membre a adhéré à cette union. Dès lors, la disposition prévoyant des heures de délégation au bénéfice du secrétaire général d'un syndicat n'est pas applicable à la relation d'emploi entre les parties, ce dernier ne pouvait pas user de la possibilité de reporter les heures de délégation qui n'auraient pas été utilisées, pour participer aux réunions statutaires ou aux congrès de leur organisation. La demande de rappel de salaires au titre des heures de délégation non payées est rejetée.
La demande au titre de la prime de travaux est rejetée faute de démontrer que les travaux visés ont été source de nuisances pour les agents de la société de transports urbains.
La demande de rappel de salaire au titre des coupures non rémunérées est rejetée, le protocole d'accord dont l'application est demandée régissant le temps de travail et non la rémunération, seul élément du contrat auquel la société appelante est tenue de s'aligner sur les mesures prises pour les transporteurs urbains de la Ville de Nice.
Le simple courrier du Secrétaire en chef du Tribunal du travail renvoyant les parties devant le Bureau de Jugement ne caractérise pas une demande en ce qu'elle n'émane pas du salarié requérant et ne caractérise pas un acte juridique contenant ses prétentions en justice, quand bien même cette convocation rappelle l'objet de la demande initiale formée devant le Bureau de Conciliation. La demande est donc rejetée comme prescrite.
La demande en restitution des sommes indument perçues par le salarié au titre de la rémunération des congés de formation syndicale, est bien fondée. Aucune disposition légale n'interdit à un employeur de solliciter le remboursement d'une somme indûment versée à l'occasion d'une procédure initiée par le salarié.
COUR D'APPEL
ARRÊT DU 8 OCTOBRE 2024
En la cause de :
* La société anonyme monégasque C (C.), inscrite au Répertoire du Commerce et de l'Industrie sous le numéro xxx, dont le siège social est sis x1, à Monaco, prise en la personne de son président et/ou administrateur délégué en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité audit siège ;
Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Sophie-Charlotte MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;
APPELANTE,
d'une part,
contre :
* y H, né le jma, de nationalité française, demeurant x2 à Monaco ;
Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Aurélie SOUSTELLE, avocat au barreau de Nice ;
INTIMÉ,
d'autre part,
Visa
LA COUR,
Vu le jugement rendu par le Tribunal du travail, le 22 mai 2023 ;
Vu l'exploit d'appel parte in qua et d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 7 août 2023 (enrôlé sous le numéro 2024/000025) ;
Vu les conclusions déposées les 19 décembre 2023, 16 avril 2024 et 11 juin 2024 par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de y H ;
Vu les conclusions déposées les 13 février 2024 et 14 mai 2024 par Maître Sophie-Charlotte MARQUET, avocat-défenseur, au nom de la SAM C ;
Vu l'ordonnance de clôture du 18 juin 2024 ;
À l'audience du 25 juin 2024, ouï les conseils des parties en leurs plaidoiries ;
Motifs
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
La Cour statue sur l'appel parte in qua relevé par la SAM C à l'encontre d'un jugement du Tribunal du travail du 22 mai 2023.
Considérant les faits suivants :
y H est conducteur receveur au sein de la SAM C (ci-après SAM C) depuis le 21 mars 2001.
y H a saisi le Tribunal du travail par requête reçue le 30 décembre 2020 afin d'obtenir :
* 800 euros de non-paiement d'heures de délégation,
* 80 euros de congés payés sur heures de délégation,
* 500 euros de prime exceptionnelle de travaux,
* 50 euros de congés payés sur prime exceptionnelle de travaux,
* 400 euros de coupure non rémunérée,
* 40 euros de congés payés sur coupure non rémunérée,
* 850 euros de reliquat de prime de départ en vacances,
* 85 euros de congés payés sur reliquat de prime de départ en vacances,
* 10.000 euros de dommages et intérêts pour non-paiement du salaire,
* 10.000 euros de dommages et intérêts pour entrave syndicale,
le tout avec intérêts au taux légal et sous le bénéfice de l'exécution provisoire.
À l'audience de conciliation, la SAM C a formé les demandes reconventionnelles suivantes :
* 1.044,24 euros brut au titre des salaires indûment perçus,
* 104,42 euros au titre des congés payés y afférents,
* 5.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive.
À défaut de conciliation l'affaire a été renvoyée devant le Bureau de Jugement.
Par jugement en date du 22 mai 2023, le Tribunal du travail a :
* fixé à 232,23 euros brut la somme due par la SAM C à y H au titre du rappel de salaires pour heures de délégation, outre 23,22 euros brut de congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Bureau de Conciliation,
* condamné la SAM C à verser à y H la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-paiement des salaires, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,
* rejeté le surplus de la demande,
* fixé à 1.044,24 euros brut la somme due par y H à la SAM C au titre des salaires indûment perçus, outre 104,42 euros brut, avec intérêts au taux légal à compter de l'audience de conciliation,
* débouté y H de sa demande au titre de la prime exceptionnelle travaux,
* débouté y H de sa demande au titre des heures de coupure,
* débouté y H de sa demande au titre de la prime de départ en vacances,
* débouté y H de sa demande de dommages et intérêts pour entrave syndicale,
* débouté la SAM C de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
* dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens,
* débouté y H et la SAM C de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,
* ordonné la compensation entre les dettes de rémunération des parties,
* rejeté la demande pour le surplus,
* condamné en conséquence y H à payer à la SAM C la somme résiduelle de 893,21 euros brut avec intérêts au taux légal à compter de l'audience de conciliation et sous le bénéfice de l'exécution provisoire,
* ordonné l'exécution provisoire.
Pour statuer ainsi, le Tribunal du travail a considéré pour l'essentiel que :
Sur les heures de délégation
* l'D (D), dont y H est membre, a signé la Convention Collective Nationale du Travail et le salarié est en conséquence un nouveau membre entré dans le syndicat partie à la Convention postérieurement à sa publication au sens de l'article 10 de la loi n° 416 du 7 juin 1945,
* l'absence d'adhésion directe ou indirecte de la SAM C à la Convention Collective Nationale du Travail n'emporte pas inapplicabilité de ses dispositions aux salariés de l'entreprise membres d'un syndicat partie à la Convention Collective en l'absence de stipulation contraire particulière dans le contrat de travail,
* en participant au congrès annuel du syndicat, y H a exercé ses fonctions auprès du bureau syndical,
* les dispositions de l'avenant n° 19 de la Convention Collective de Travail sur le droit syndical étendu par arrêté ministériel du 3 novembre 1981 doivent également être appliquées et permettre le report des heures de délégation, accordées au titre de sa mission de secrétaire du syndicat, non utilisées au cours des deux mois précédents, pour participer aux réunions statutaires ou au congrès de l'D,
Sur la prime de travaux
* il n'est ni établi ni même soutenu que le réseau urbain monégasque ait été affecté par des travaux pour les années revendiquées et les conditions de circulation générales ne sont pas indemnisées dans le cadre de la prime travaux édictée par le transporteur urbain de la Ville de Nice,
Sur les heures de coupure
* l'accord entre la société A et les syndicats représentant le personnel du 5 avril 2000, dont y H sollicite application, régit le temps de travail et non la rémunération, seul élément du contrat de travail auquel la SAM C est tenue de s'aligner sur les mesures prises pour les transporteurs urbains de la Ville de Nice,
* cet accord s'inscrit dans le cadre de la loi française sur la réduction négociée du temps de travail qui ne trouve aucun corollaire dans la législation monégasque,
* en tout état de cause y H ne démontre pas avoir accompli des coupures d'une durée inférieure à 1 h 30,
Sur la prime vacances
* y H a formé sa demande devant le Bureau de Conciliation le 30 décembre 2020, soit avant l'expiration du délai de prescription de son action mais n'a pas formé sa demande devant le Bureau de Jugement dans le mois suivant l'audience de conciliation en sorte que la demande devant le Bureau de Conciliation n'a pas interrompu la prescription, et la convocation adressée par le Secrétaire du Tribunal du Travail ne peut être assimilée juridiquement à une demande formée par le demandeur,
Sur la demande de dommages et intérêts
* y H a été privé d'une somme totale de 255,45 euros et n'apporte aucun élément permettant de démontrer la réalité de son préjudice qu'il évalue à la somme de 10.000 euros,
* il convient de réparer son préjudice moral lié au fait d'avoir eu à solliciter son dû en justice,
* s'agissant de la demande de dommages et intérêts pour entrave au droit syndical, aucun élément ne permet de considérer que la SAM C a fait volontairement une mauvaise application du régime qui lui était applicable,
Sur les autres demandes
* les absences de y H pour deux stages de formation syndicale en 2018 et 2019 n'auraient pas dû être rémunérées en l'absence de disposition légale prévoyant une telle rémunération,
* aucune disposition légale n'interdit à l'employeur de solliciter le remboursement d'une somme indûment versée à l'occasion de la relation travail ni de le faire à l'occasion d'une procédure initiée par le salarié,
* la demande de y H étant partiellement fondée, la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive doit être rejetée,
* la compensation des dettes respectives des parties peut être ordonnée pour les créances salariales mais il n'est pas possible en revanche de compenser les sommes dues en brut avec les dommages-intérêts,
* les créances de nature salariale bénéficient de l'exécution provisoire de plein droit et pour le surplus il est nécessaire d'ordonner l'exécution provisoire compte tenu des circonstances de la cause, la relation de travail perdurant entre les parties.
Par déclaration au greffe de la Cour d'appel en date du 12 juillet 2023, suivie d'une assignation délivrée par huissier de justice à y H, le 7 août 2023, la SAM C, a interjeté appel parte in qua de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives du 14 mai 2024, la SAM C demande à la Cour d'appel de :
* déclarer l'appel recevable,
* confirmer le jugement entrepris, rendu par le Tribunal du travail le 22 mai 2023 en ce qu'il :
* a) a fixé à 1.044,24 euros brut la somme qui lui est due par y H au titre des salaires indûment perçus outre 104,42 euros brut avec intérêts au taux légal à compter de l'audience de conciliation,
* b) a débouté y H de sa demande au titre de la prime exceptionnelle de travaux,
* c) a débouté y H de sa demande au titre des heures de coupure,
* d) a débouté y H de sa demande au titre de la prime de départ en vacances,
* e) a débouté y H de sa demande de dommages-intérêts pour entrave syndicale,
* f) a débouté y H de sa demande au titre des frais irrépétibles,
* infirmer le jugement entrepris, rendu par le Tribunal du travail le 22 mai 2023 en ce qu'il :
* a) a considéré que l'article 2 de l'avenant n° 1 de la Convention Collective Nationale, avenant non-étendu, était applicable et opposable aux parties, ayant pour conséquence sa condamnation à la somme de 232,23 euros brut, outre 23,22 euros brut de congés payés y afférents avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Bureau de Conciliation, ainsi qu'à la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts,
* b) l'a condamnée au paiement de la somme de 232,23 euros brut au titre du rappel de salaire pour heures de délégation, outre 23,22 euros brut de congés payés y afférents avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Bureau de Conciliation,
* c) l'a condamnée au paiement de la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-paiement des salaires,
* d) l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
* e) a dit que les parties conserveront la charge de leurs propres dépens,
* f) l'a déboutée de sa demande au titre de frais irrépétibles,
* g) a ordonné la compensation entre les dettes de rémunération des parties,
Statuant à nouveau et y ajoutant :
* dire et juger que l'article 2 de l'avenant n° 1 de la Convention Collective Nationale, avenant non-étendu, lui est inapplicable et inopposable,
En conséquence,
* dire et juger que les demandes relatives au rappel des heures de délégation sont infondées,
* dire et juger que la demande de dommages et intérêts pour non-paiement des salaires est infondée,
* condamner y H à lui payer la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts en réparation de la procédure abusive diligentée,
* condamner y H à lui payer la somme de 15.000 euros au titre des frais exposés en première instance et en appel et non compris dans les dépens,
* condamner y H aux entiers dépens de première instance au bénéfice du Trésor et ce conformément à l'article 51 de la loi n° 446 du 16 mai 1946 portant création du Tribunal du travail,
* • En conséquence, débouter y H de toutes ses demandes, fins et conclusions,
* • En tout état de cause, condamner y H aux entiers dépens distraits au profit de Maître s.L, avocat-défenseur sous cette affirmation.
À l'appui de son appel parte in qua, la SAM C fait grief aux premiers juges d'avoir considéré que y H ayant la fonction de secrétaire général du Conseil Syndical du personnel de la SAM C, elle aurait dû traiter sa participation au congrès de l'D en 2019 et 2020 comme des heures de délégation, et non comme des congés sans solde, alors même qu'il n'existe aucun texte légal, d'application générale, ou de texte conventionnel, qui prévoirait l'allocation de telles heures de délégation au profit du secrétaire général d'un syndicat.
L'appelante précise que l'article 2 de l'avenant n° 1 de la Convention Collective Nationale de Travail du 5 novembre 1945, qui institue des heures de délégation au bénéfice du secrétaire général d'un syndicat ne peut trouver à s'appliquer, puisqu'elle n'a pas été étendue par arrêté ministériel et qu'elle ne lui est pas opposable puisqu'elle ne l'a pas signée.
Selon la SAM C, la juridiction du premier degré a relevé d'office que l'appartenance de y H à l'D, signataire de la Convention Collective Nationale, emportait application des dispositions conventionnelles non-étendues, conformément aux articles 9 et 10 de la loi n° 416 sur les conventions collectives, alors que cet élément factuel est erroné et qu'en tout état de cause, en ne mentionnant pas à l'article 10 de la loi n° 416 sur les conventions collectives, les unions, fédérations et groupement de syndicats, le législateur a entendu les exclure du champ d'application dudit article.
L'appelante précise que ce choix du législateur répond aux spécificités monégasques, puisqu'à Monaco, la convention collective nationale du travail ne vise pas un secteur d'activité spécifique et l'D regroupe des syndicats relevant de secteurs d'activité variés, couvrant les principaux secteurs d'activité de Monaco ce qui concerne environ 36.000 salariés soit 60 % au total des salariés.
La SAM C indique que le fait qu'une union de syndicats soit signataire d'une convention collective, hypothèse non visée par le texte, ne rend pas ladite convention opposable aux membres d'un syndicat non-signataire, ayant adhéré à l'union signataire, contrairement à l'appréciation des premiers juges, précisant que la Fédération Patronale et l'D, rédacteurs et signataires de la Convention Collective Nationale du Travail du 5 novembre 1945 et de ses avenants, n'ont jamais eu l'intention d'engager, de facto, les membres syndicats de leur union et ont au contraire expressément écarté cette possibilité au sein du préambule de la convention, en conformité avec l'article 10 de la loi n° 416.
Elle soutient que si la présomption légale instaurée à l'alinéa 2 de l'article 9 de la loi n° 416 est de nature à dispenser le salarié de la charge de la preuve, encore faut-il que les conditions posées par l'article soient réunies et que donc l'une des parties soit signataire de la convention collective, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, précisant qu'en tenant pour acquise cette présomption, le Tribunal de travail a fait une application erronée des dispositions légales et a ainsi porté atteinte à l'effet relatif des conventions.
La SAM C fait valoir en outre, que l'interprétation opérée par les premiers juges conduirait à une inégalité entre les salariés pour lesquels des règles différentes s'appliqueraient en fonction de leur appartenance ou non à un syndicat, et porterait atteinte au droit syndical puisqu'elle suppose que l'employeur connaisse l'appartenance syndicale de ses salariés afin de prévoir, le cas échéant, une stipulation contraire dans le contrat de travail.
Par conclusions d'intimé en date du 11 juin 2024, valant appel incident, y H demande à la Cour de :
* le recevoir en son appel incident formé à l'encontre du jugement du Tribunal du travail du 22 mai 2023 et le déclarer bien fondé,
Confirmer le jugement en ce qu'il :
* a fixé à 232,23 euros brut la somme due par la SAM C au titre du rappel de salaires pour heures de délégation, outre 23,22 euros brut de congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Bureau de Conciliation,
* a débouté la SAM C de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
* a débouté la SAM C de sa demande au titre des frais irrépétibles,
* a ordonné la compensation entre les dettes de rémunération des parties,
Réformer le jugement en ce qu'il :
* l'a débouté de sa demande au titre de la prime exceptionnelle travaux,
* l'a débouté de sa demande au titre des heures de coupure,
* l'a débouté de sa demande au titre de la prime de départ en vacances,
* l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour entrave syndicale,
* a condamné la SAM C à lui verser la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-paiement des salaires, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,
* a dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens,
* l'a débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles,
* a rejeté la demande pour le surplus,
* l'a condamné à payer à la SAM C la somme résiduelle de 893,21 euros brut, avec intérêts au taux légal à compter de l'audience de conciliation et sous le bénéfice de l'exécution provisoire,
Et statuant à nouveau :
* de condamner la SAM C au paiement de :
* a. prime exceptionnelle travaux : 500 euros,
* b. congés payés sur prime exceptionnelle de travaux : 50 euros,
* c. coupures non rémunérées : somme réservée,
* d. congés payés sur coupure non rémunérée : somme réservée,
* e. reliquat prime de départ en vacances : 729,72 euros,
* f. congés payés sur reliquat de départ en vacances : 72,97 euros,
* g. dommages et intérêts pour non-paiement du salaire dû : 10.000 euros,
* h. dommages et intérêts pour entrave syndicale : 10.000 euros,
* de débouter la SAM C de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
* d'ordonner la compensation avec les condamnations de la SAM C, si par extraordinaire une somme devait être mise à sa charge au titre des « salaires dus »,
* de dire que les sommes dues devront être réglées avec intérêts au taux légal à compter de la requête en justice pour celles dues à titre de rappel de salaire et à compter du jugement à intervenir pour les autres,
* de condamner la SAM C au paiement de la somme de 5.000 euros au titre des frais engagés,
* d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
* de condamner la SAM C à tous les dépens au profit de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.
S'agissant du non-paiement des heures de délégation, y H fait valoir que le Tribunal du travail a bien jugé en considérant que « la C. est liée par les clauses de la Convention Collective, pour les membres d'un syndicat partie à la Convention, sauf stipulation contraire particulière dans le contrat de travail », les développements de l'appelant sur l'activité de l'D, étant inopérants.
Selon l'intimé, si un syndicat fait partie d'une fédération ayant signé la Convention Collective Nationale, les dispositions s'appliquent automatiquement à lui par extension. Or, lui-même est secrétaire général du Syndicat des autobus de Monaco qui est affilié à l'D, comme il ressort de son bulletin d'adhésion.
y H précise qu'il n'est pas clairement exprimé aux termes des dispositions de l'article 10 de la loi n° 416 que le législateur a entendu exclure les fédérations syndicales, cette allégation étant purement fantaisiste et que bien au contraire, la Convention Collective du Travail prévoit que « Des modifications pourront être apportées, d'un commun accord, entre les employeurs et les employés d'une même corporation, en ce qui concerne certaines clauses générales ou modalités d'application, pour tenir compte à la fois des conditions d'exploitation propres à chaque commerce ou industrie, des conditions d'emploi de la main d'oeuvre et des us et coutumes. Cette réserve a été adoptée unanimement par les parties contractantes qui ont reconnu l'impossibilité de faire appliquer indistinctement à toutes les branches du monde du travail monégasque des conventions absolument uniformes ».
Selon l'intimé ce texte vient confirmer sa position et celle du Tribunal du travail et signifie bien qu'il s'applique à tous, et sera adapté en fonction des spécificités de chaque corporation, d'autant plus qu'à l'inverse, cela signifierait que le texte de la Convention Collective Nationale du Travail serait inopposable aux employeurs monégasques membres de la FEDEM puisque les signataire de ce texte sont l'D et la Fédération Patronale Monégasque, ce qui le priverait de tout intérêt.
y H soutient que toute l'argumentation de la SAM C est en lien avec le fait que la Convention Collective Nationale du Travail signée par l'D ne s'appliquerait pas aux syndicats adhérents à la Fédération et à ses membres, cette position étant erronée et illogique puisqu'elle reviendrait à conclure à l'impossibilité d'application aux salariés.
S'agissant de la prime exceptionnelle travaux, dont il sollicite le paiement, y H fait valoir qu'alors qu'il a perçu cette prime en 2016, elle ne lui a pas été versée pour les années 2017 et 2018, l'employeur tentant de se dédouaner en indiquant, d'une part, que la prime de 2016 n'aurait pas eu le même objet puisqu'il s'agissait d'une prime exceptionnelle résultant d'une fin de conflit, d'autre part, que la prime de travaux serait en lien avec le fait que l'E aurait décidé de travaux sur son propre réseau, ce qui exclurait d'en étendre le versement aux agents de la SAM C.
Or, selon l'appelant incident, les travaux niçois concernent le tramway et non le réseau ligne d'Azur, de sorte que l'argument selon lequel la SAM C n'a pas elle-même décidé de travaux sur son réseau serait inopérant d'autant plus que le trafic à Monaco est régulièrement perturbé par des travaux qui affectent le travail des agents et particulièrement, pendant la période considérée, ceux du Testimonio II ou ceux du Jardin Exotique qui ont nécessité une modification d'itinéraire.
y H rappelle que cette question a déjà fait débat lors d'une réunion des délégués du personnel du 6 novembre 2017 et que l'employeur a reconnu l'existence de travaux à Monaco tout en considérant qu'ils avaient toujours existé et n'étaient donc pas exceptionnels, le vif débat sur cette appréciation, au sein de la société, devant être tranché par la juridiction.
S'agissant des coupures non rémunérées, y H fait grief aux premiers juges d'avoir ajouté au texte de l'article VII de la Convention Collective de la SAM C en considérant que les salariés n'étant pas placés dans des conditions de travail identiques, ils ne peuvent valablement se prévaloir des modalités d'aménagement prévues pour leurs homologues niçois, et ce d'autant qu'il ne s'agit pas d'une demande relative au temps de travail, mais d'une demande en paiement de coupures non rémunérées.
S'agissant du reliquat de la prime de départ en vacances, y H fait grief à la décision querellée d'avoir considéré que le délai de prescription n'a pas été interrompu par la demande devant le Bureau de Conciliation, faute d'avoir été portée devant le Bureau de Jugement dans le mois de l'audience de conciliation, alors même que le greffe a adressé une convocation aux parties, qui reprend l'intégralité des demandes, le lendemain de l'audience de conciliation et que l'article 42 de la loi n° 446 du 16 mai 1946 suppose que l'affaire doit venir devant le Bureau de Jugement dans le délai d'un mois et non que les conclusions doivent être déposées dans ce délai.
Sur le fond, l'appelant incident fait valoir que pour l'année 2016, cette prime a été minorée de 729,72 euros au motif qu'il a comptabilisé 57 jours d'absence, alors même que la réduction prévue par le protocole de fin de conflit vise à réduire l'absentéisme et qu'en ce qui le concerne, son absence n'était pas volontaire mais consécutive à un accident de travail.
Sur la demande de dommages et intérêts, y H soutient qu'il n'a pas perçu sa juste rémunération, pour un montant non négligeable, le quantum de 500 euros fixé par le Tribunal du travail n'étant pas à la hauteur du préjudice subi de ce chef, qu'il évalue à la somme de 10.000 euros.
De même, en lui imposant un congé sans solde, afin de prendre les heures de délégation auxquelles il avait droit, la SAM C lui a infligé une sanction financière qui porte atteinte à son droit syndical.
Enfin, s'agissant des demandes reconventionnelles de la SAM C, y H indique que :
* la demande de restitution des sommes indument perçues par erreur concernant une formation syndicale ne lui a pas été adressée au préalable ce qui démontre la mauvaise foi certaine de l'employeur et qu'en tout état de cause, si une quelconque somme devait être mise à sa charge de ce chef, la compensation avec les condamnations à intervenir devra être ordonnée,
* la demande de dommages et intérêts de la SAM C pour procédure abusive est sans fondement et traduit une intention de nuire au demandeur,
* la demande au titre des frais irrépétibles est disproportionnée et irrespectueuse des droits d'un salarié à tenter de faire valoir ses droits, la pratique du pays voisin étant de rejeter très majoritairement ce type de demande.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.
SUR CE,
Attendu que l'appel principal parte in qua interjeté par déclaration au greffe de la Cour d'appel en date du 12 juillet 2023, suivie d'une assignation délivrée par huissier de justice à y H, le 7 août 2023, et l'appel incident interjeté par voie de conclusions en date du 11 juin 2024, dans les conditions de forme et de délais prévues par le Code de procédure civile doivent être déclarés recevables ;
* Sur le rappel de salaire au titre des heures de délégation
Attendu qu'aux termes de l'article 2 de la Convention Collective Nationale du Travail conclu entre la Fédération Patronale et l'D, (avenant n° 1) non étendue, « Dans les établissements comptant au moins 10 salariés, le secrétaire, le trésorier et l'archiviste des bureaux syndicaux auront également la possibilité de consacrer à l'exercice de leurs fonctions un maximum de 10 heures par mois, payées comme temps de travail. Il ne pourra y avoir cumul, dans la même entreprise, entre le temps consacré au mandat de délégué et celui consacré à l'exercice des fonctions syndicales » ;
Attendu qu'aux termes de l'article 10 de la loi n° 416 du 7 juin 1945, « Sont considérés comme tenus par la convention collective de travail :
1° Les employeurs et les syndicats signataires de la convention ;
2° Quiconque est, au moment de la signature de la Convention, membre d'un syndicat partie à la convention, à moins que, dans un délai de huit jours, il n'ait notifié sa démission au syndicat ;
3° Les membres d'un syndicat qui adhère ultérieurement à la convention, à moins qu'ils ne se retirent dans les conditions énoncées au paragraphe précédent ;
4° Les nouveaux membres entrés dans le syndicat partie à la convention postérieurement à la publication de la convention collective ;
5° Les employeurs n'appartenant pas à un syndicat contractant et qui adhèrent directement à la convention (…) » ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que la SAM C n'a pas adhéré à la Convention Collective Nationale du Travail ;
Que le syndicat du personnel de la SAM C a négocié et signé avec la SAM C employeur, sa propre convention collective le 30 novembre 1989, qui prévoit en son article XXVI que l'exercice du droit syndical est reconnu conformément aux lois n° 417 du 7 juin 1945 et 957 du 18 juillet 1974 ;
Qu'il est démontré par les documents communiqués, que y H est quant à lui adhérent du Syndicat des autobus de Monaco, depuis le 1er janvier 2009 et exerce les fonctions de secrétaire général au sein de ce syndicat depuis le 24 janvier 2019 ;
Que le Syndicat des autobus de Monaco est affilié à l'D, laquelle a signé la Convention Collective Nationale ;
Que y H a informé l'employeur qu'au titre de son mandat de secrétaire général du syndicat de la SAM C, il participerait au Comité Général de l'D qui se tiendrait les 11 et 12 mars 2019 dans ses locaux ;
Qu'il a sollicité l'application de l'avenant n° 19 de la Convention Collective Nationale sur le droit syndical étendu par arrêté ministériel du 3 novembre 1981 qui dispose que « (…) les heures de délégation accordées au titre de leur mission au délégué syndical ( article 6 de la loi n° 957) au secrétaire général, au trésorier ou à l'archiviste du syndicat ( article 2 de la convention collective générale) qui n'auraient pas été utilisées pendant le mois en cours ou durant les deux mois précédents, pourront être reportées à cet effet pour qu'une partie au moins de leur absence puisse être rémunérée », afin de s'absenter sans perte de salaire le 11 et le 12 mars 2019 pour participer aux travaux du Comité Général de l'D ;
Qu'il a également sollicité, aux mêmes conditions, une absence sans perte de salaire afin de participer au Comité Général Extraordinaire de l'D qui s'est tenue le 6 octobre 2020 ;
Que le directeur d'exploitation de la SAM C lui a fait savoir, par deux lettres du 28 février 2019 et du 21 septembre 2020, que la SAM C n'octroie aucune heure de délégation aux agents disposant de fonctions syndicales (secrétaire, trésorier et archiviste) dans la mesure où l'article 2 de la Convention Collective Nationale du Travail, non étendu, ne lui est pas opposable, l'invitant à prendre des jours de congés ;
Que y H conteste les retenues sur solde opérées par son employeur au titre des congés sans solde et considère que si un syndicat fait partie d'une fédération ayant signé la Convention Collective Nationale, ce qui est le cas du Syndicat des autobus de Monaco dont il est secrétaire général, les dispositions s'appliquent automatiquement à lui par extension et qu'il n'est pas clairement exprimé aux termes des dispositions de l'article 10 de la loi n° 416 du 7 juin 1945, que le législateur a entendu exclure les fédérations syndicales ;
Attendu qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 416 du 7 juin 1945 « La convention collective de travail est un accord conclu entre, d'une part, soit un employeur, un ou plusieurs syndicats, fédérations de syndicats ou groupements d'employeurs légalement constitués et, d'autre part, soit un ou plusieurs syndicats de salariés, soit une fédération de syndicats de salariés, légalement constitués, en vue de fixer les conditions de travail et les engagements mutuels des parties pour une ou plusieurs entreprises ou industries, pour toute une profession ou un ensemble de professions » ;
Attendu que l'ordonnance-loi n° 399 du 6 octobre 1944 traite dans son chapitre 1 de la formation des syndicats, précisant en son article 4 que le syndicat est dirigé et administré par un bureau élu, pour un an, à la majorité des voix, par les adhérents ; que ce bureau est composé d'un président, d'un secrétaire, d'un trésorier et d'un nombre de conseillers variable, suivant le nombre d'adhérents ;
Que cette ordonnance-loi traite dans son chapitre III, de l'union des syndicats, précisant que les syndicats régulièrement constitués d'après les prescriptions de la présente ordonnance peuvent librement se concerter pour l'étude et la défense de leurs intérêts professionnels ; que les statuts des fédérations ainsi formées doivent déterminer les règles selon lesquelles les syndicats adhérents seront représentés dans le conseil d'administration et dans les assemblées générales ; que chaque fédération de syndicats est dirigée et administrée par un bureau fédéral élu pour un an, à la majorité des voix, par les représentants des syndicats adhérents réunis en assemblée générale ; que ces bureaux fédéraux se composent d'un secrétaire général, d'un trésorier général qui devront être de nationalité monégasque et d'un nombre variable de conseillers qui pourront être de nationalité autre que la nationalité monégasque, à la condition que la majorité des conseillers soit de nationalité monégasque ;
Attendu qu'il ressort de ces dispositions que le législateur entend distinguer clairement la notion de syndicat et la notion d'union syndicale ;
Que l'union syndicale, dont les adhérents sont des syndicats et non des salariés, dispose de ses propres statuts et organes de représentation ;
Que si l'D, organe juridique indépendant, a signé la Convention Collective Nationale du Travail, pour autant le Syndicat des autobus de Monaco n'a pas signé cette convention, pas plus que la SAM C ;
Qu'ainsi y H, secrétaire général du Syndicat des autobus de Monaco, n'est pas « membre d'un syndicat partie à la convention » au sens de l'article 10 de la loi n° 416 du 7 juin 1945, quand bien même le syndicat dont il est membre a adhéré à cette union ;
Que dès lors que l'article 2 de l'avenant n° 1 de la Convention Collective Nationale du Travail du 5 novembre 1945, prévoyant des heures de délégation au bénéfice du secrétaire général d'un syndicat n'est pas applicable à la relation d'emploi entre la SAM C et y H, ce dernier ne pouvait pas user de la possibilité, prévue par l'avenant n° 19 étendu par arrêté ministériel n° 81-560 du 3 novembre 1981, de reporter les heures de délégation qui n'auraient pas été utilisées, pour participer aux réunions statutaires ou aux congrès de leurs organisation ;
Que de même, l'article 9 de la loi n° 416 du 7 juin 1945, selon lequel « Lorsqu'un contrat individuel intervient entre un salarié et un employeur qui doivent, aux termes de l'article 10 ci-après, être considérés comme soumis l'un et l'autre aux obligations résultant de la convention collective, les règles déterminées en cette convention s'imposent, nonobstant toute stipulation contraire, aux rapports nés de ce contrat de travail. Lorsqu'une seule des parties au contrat individuel doit être considérée comme liée par les clauses de la convention collective, ces clauses sont présumées s'appliquer aux rapports nés du contrat de travail, à défaut de stipulation contraire », ne trouve pas à s'appliquer au cas d'espèce, dès lors que y H n'est pas membre d'un syndicat partie à la convention comme analysé précédemment ;
Qu'il s'ensuit que y H doit être débouté de sa demande de rappel de salaire au titre des heures de délégation non payées, la décision querellée étant infirmée sur ce point ;
* Sur le rappel de salaire au titre de la prime travaux
Attendu que l'article VII de la Convention Collective de la SAM C dispose :
« a) la rémunération, les échelons d'ancienneté et classification seront ceux appliqués aux Agents de Transport Urbains de la Ville de Nice.
b) les primes seront attribuées dans les mêmes conditions énoncées au paragraphe « a » en tenant compte du caractère particulier de chaque réseau » ;
Attendu que par un protocole de fin de conflit conclu le 4 octobre 2016 entre la B et le Directeur Général de l'E, les signataires ont prévu le versement d'une « prime exceptionnelle » de 250 euros brut, versée à l'ensemble du personnel de l'établissement dont l'absentéisme est inférieur à 17 jours pour l'année 2016 ;
Que le Tribunal du travail a relevé à juste titre que cette prime allouée à l'ensemble du personnel de l'établissement n'était pas une prime travaux, mais une prime exceptionnelle dans le cadre d'un accord de fin de conflit, dont a également bénéficié le personnel de la SAM C en application des dispositions de l'article VII de la Convention Collective ;
Que par deux protocoles d'accord du 6 juin 2017 et du 2 juillet 2018, une prime dite « travaux », de 250 euros brut, a été attribuée par l'E à tous les conducteurs présents à l'effectif dont l'absentéisme calculé au sens des critères de l'intéressement est inférieur à 17 jours sur 12 mois coulants ;
Qu'interrogé par la SAM C, sur le fondement et le contexte de cette prime, le transporteur urbain de la Ville de Nice a précisé qu'elle avait pour fondement « l'ensemble des nuisances ressenties par nos CR et les agents d'exploitation ou techniques devant intervenir sur le réseau, pendant les phases de travaux sur la Promenade des Anglais et des travaux du tramway » ;
Que y H, qui soutient que le réseau urbain monégasque souffre de nombreux travaux au même titre que le réseau niçois, notamment en raison du chantier du Testimonio II et du Jardin Exotique, de sorte que cette prime travaux aurait dû lui être versée, ne produit aucun élément permettant de considérer que ces travaux ont été source de nuisances pour les agents de la SAM C ;
Qu'à défaut d'une telle démonstration et en considération du caractère particulier de chaque réseau, y H ne justifie pas avoir droit à cette prime pour les années 2017 et 2018 ;
Que la décision querellée sera confirmée en ce qu'elle l'a débouté de ce chef de demande ;
* Sur le rappel de salaire au titre des coupures non rémunérées
Attendu que y H produit un document intitulé « PROTOCOLE D'ACCORD », signé le 5 avril 2020 par la A (A) et les différents syndicats représentant les salariés, qui prévoit en son article 2.2 sur le temps non effectif indemnisé : « (…) Pour les personnels roulants une coupure est une période comprise dans l'amplitude de la journée de travail du salarié pendant laquelle le salarié n'est plus à la disposition de l'employeur et peut vaquer librement à des occupations personnelles. Les coupures d'une durée inférieure ou égale à 1h30 sont comptées dans la durée du travail » ;
Qu'au visa de l'article VII de la Convention Collective de la SAM C rappelé supra, y H sollicite le paiement des coupures inférieures ou égales à 1 h 30 pour les années 2017, 2018, 2019 et 2020 ;
Que c'est par de justes motifs, adoptés par la Cour, que les premiers juges ont considéré que le protocole d'accord, dont il est sollicité application, régit le temps de travail et non la rémunération, seul élément du contrat auquel la SAM C est tenue de s'aligner sur les mesures prises pour les transporteurs urbains de la Ville de Nice ;
Qu'au surplus, y H, qui indique avoir décompté 3 coupures inférieures ou égales à 1 h 30 en 2017, 9 coupures inférieures ou égales à 1h30 en 2018, 4 coupures inférieures ou égales à 1 h 30 en 2019 et 7 coupures inférieures ou égales à 1 h 30 en 2020, n'apporte aucun élément à l'appui de cette affirmation ;
Que par conséquent, la décision querellée, qui l'a débouté de ce chef de demande, sera confirmée sur ce point ;
* Sur le rappel de salaire au titre de la prime vacances
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 2044 du Code civil, que, sauf dispositions légales contraires, les actions réelles mobilières et les actions personnelles se prescrivent par 5 ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de les exercer ;
Que la procédure suivie devant la juridiction spécifique qu'est le Tribunal du travail comprend cependant une disposition dérogatoire inhérente à l'interruption de la prescription, puisque l'article 42 de la loi n° 446 du 16 mai 1946 portant création du Tribunal du travail dispose :
« La demande devant le bureau de conciliation interrompt la prescription si la demande devant le bureau de jugement est formée dans le mois de l'audience de conciliation » ;
Attendu qu'en l'espèce, y H sollicite le paiement de la prime vacances, attribuée aux agents de l'E, à laquelle il était selon lui éligible au 3 novembre 2016 ;
Qu'il a saisi le Bureau de Conciliation du Tribunal du travail par requête du 30 décembre 2020, l'audience de conciliation ayant été fixée au 18 janvier 2021 ;
Que si le 19 janvier 2021, le Secrétaire en chef du Tribunal du travail a convoqué les parties à la prochaine audience du Bureau de Jugement conformément aux prescriptions légales, y H n'a formé ses demandes devant le Bureau de Jugement qu'aux termes de ses conclusions du 11 novembre 2021, soit plus d'un mois après l'audience du Bureau de Conciliation, de sorte que la prescription, acquise le 3 novembre 2021, n'a pas été interrompue au sens des dispositions de l'article 42 précité ;
Qu'en effet, comme justement apprécié par les premiers juges, le simple courrier du Secrétaire en chef du Tribunal du travail renvoyant les parties devant le Bureau de Jugement ne caractérise pas une demande en ce qu'elle n'émane pas du salarié requérant et ne caractérise pas un acte juridique contenant ses prétentions en justice, quand bien même cette convocation rappelle l'objet de la demande initiale formée devant le Bureau de Conciliation ;
Que la décision querellée sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de y H au titre du paiement de la prime vacances comme étant prescrite ;
Sur la demande en restitution des sommes indument perçues par y H au titre de la rémunération des congés de formation syndicale
Attendu que la SAM C sollicite la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a fait droit à sa demande en paiement de la somme de 1.044,24 euros brut au titre de salaires indument perçus, outre 104,42 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
Attendu que conformément aux dispositions de l'article 1223 du Code de procédure civile « Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû, s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu » ;
Qu'il n'est pas contesté que y H a assisté à deux stages de formation syndicale, lesquels ont eu lieu du 8 au 12 octobre 2018 puis du 25 au 29 mars 2019 ;
Qu'il n'est pas contesté non plus que ces heures ont été rémunérées alors même que l'article 1er de la loi n° 898 du 15 décembre 1970 dispose en son première alinéa que « Indépendamment de leur congé annuel, les salariés et apprentis peuvent demander à bénéficier de congés non rémunérés, d'une durée totale n'excédant pas douze jours ouvrables par an, en vue de recevoir une éducation ouvrière ou une formation syndicale donnée par des institutions publiques ou privées agréées » ;
Que selon y H, la SAM C, qui ne lui a jamais réclamé cette somme avant l'introduction de la présente instance, n'agit qu'en représailles suite à ses propres demandes en paiement ce qui démontre sa mauvaise foi ;
Que la SAM C quant à elle indique qu'elle ne s'est jamais aperçue de cette erreur avant que y H ne saisisse le Bureau de Conciliation ce qui l'a contrainte à analyser l'ensemble du dossier ;
Attendu qu'en tout état de cause, le Tribunal du travail a justement rappelé qu'aucune disposition légale n'interdit à un employeur de solliciter le remboursement d'une somme indûment versée à l'occasion d'une procédure initiée par le salarié ;
Que la décision querellée sera ainsi confirmée en ce qu'elle a jugé que y H doit restituer la somme de 1.044,24 euros brut au titre de salaires indument perçus, outre 104,42 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
* Sur les demandes de dommages et intérêts
Attendu que y H sollicite la condamnation de la SAM C au versement de dommages et intérêts à hauteur de 10.000 euros, en réparation du préjudice subi pour non-paiement des salaires, considérant que la somme de 500 euros allouée par le Tribunal du travail est insuffisante en ce qu'il n'a pas perçu sa juste rémunération, l'employeur modifiant de façon aléatoire les primes ou ne les versant pas, la somme lui ayant fait défaut étant loin d'être négligeable ;
Qu'il sollicite également la condamnation de la SAM C au paiement de la somme de 10.000 euros pour entrave syndicale, considérant qu'en lui imposant un congé sans solde, la SAM C a porté atteinte à son droit syndical puisqu'en sa qualité de secrétaire général du Syndicat des autobus de Monaco, il se devait de se rendre au congrès de l'D, dont son syndicat dépend ;
Attendu que cependant, y H succombe en ses différentes demandes tant s'agissant du paiement de primes que s'agissant du paiement d'heures de délégation syndicale ;
Qu'il ne peut dès lors arguer d'un quelconque préjudice pour non-paiement de salaire ou pour entrave syndicale ;
Que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il lui a alloué une somme de 500 euros pour préjudice moral ;
Qu'il sera en revanche confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêt pour entrave syndicale ;
Attendu que la SAM C quant à elle, poursuit la condamnation de y H au paiement d'une somme de 5.000 euros pour procédure abusive, considérant qu'en s'appuyant sur des arguments fallacieux et en ne produisant aucun élément de nature à démontrer que les divers rappels de salaires et primes auraient dus lui être versés, le demandeur a manifestement diligenté une procédure abusive à son encontre, dans le seul but de lui nuire et de porter atteinte à sa réputation ;
Attendu cependant que l'exercice d'une action en justice représente l'exercice d'un droit fondamental ;
Que l'appréciation erronée qu'une partie fait de ses droits n'est pas, en elle-même, constitutive d'un abus, sauf démonstration, non rapportée au cas d'espèce, d'une intention de nuire, d'une malveillance ou d'une erreur équipollente au dol ;
Que la SAM C, qui ne démontre pas davantage en quoi la présente procédure a porté atteinte à son image, sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, la décision querellée étant confirmée sur ce point ;
Sur les demandes au titre des dépens et des frais irrépétibles
Attendu que y H, qui succombe en ses demandes, sera condamné au paiement des entiers dépens et débouté de sa demande formulée au titre des frais irrépétibles ;
Attendu qu'aux termes de l'article 238-1 du Code de procédure civile, le juge condamnera la partie tenue aux dépens ou qui perdra son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il déterminera, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Que dans tous les cas, le juge tiendra compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et pourra, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Que statuant dans le respect de ce principe d'équité, la Cour condamne y H, succombant en ses demandes, à payer à la SAM C, une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles que celle-ci a engagée pour assurer sa défense tant en première instance qu'en appel ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,
statuant publiquement et contradictoirement,
par mise à disposition au greffe,
Déclare l'appel principal parte in qua interjeté par la SAM C et l'appel incident interjeté par y H, contre le jugement rendu par le Tribunal du travail le 22 mai 2023, recevables,
Infirme le jugement rendu par le Tribunal du travail le 22 mai 2023 en ce qu'il a :
* fixé à 232,23 euros brut la somme due par la SAM C à y H au titre du rappel de salaires pour heures de délégation, outre 23,22 euros brut de congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Bureau de Conciliation,
* condamné la SAM C à verser à y H la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-paiement des salaires, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,
* dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens,
* débouté la SAM C de sa demande au titre des frais irrépétible,
* ordonné la compensation entre les dettes de rémunération des parties,
* condamné en conséquence y H à payer à la SAM C la somme résiduelle de 893,21 euros brut avec intérêts au taux légal à compter de l'audience de conciliation et sous le bénéfice de l'exécution provisoire,
Confirme le jugement rendu par le Tribunal du travail le 22 mai 2023 en toutes ses autres dispositions,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute y H de sa demande en paiement de la somme de 232,23 euros brut outre 23,22 euros brut au titre du rappel de salaires pour heures de délégation, de congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la saisie du Bureau de Conciliation,
Déboute y H de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice subi pour non-paiement des salaires,
Condamne y H à payer à la SAM C la somme de 1.044,24 euros brut outre la somme de 104,42 euros brut au titre de salaires indûment perçus, avec intérêts au taux légal à compter de l'audience de conciliation,
Condamne y H à payer à la SAM C, la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles tant de première instance que d'appel, en application des dispositions de l'article 238-1 du Code de procédure civile,
Condamne y H au paiement des entiers dépens de première instance au bénéfice du Trésor conformément à l'article 51 de la loi n° 446 du 16 mai 1946,
Condamne y H au paiement des entiers dépens d'appel, distraits au profit de Maître Sophie-Charlotte MARQUET, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,
Ordonne que les dépens distraits seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable,
Composition
Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,
Après débats en audience de la Cour d'appel de la Principauté de Monaco, et qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement,
Ainsi jugé et rendu au Palais de Justice, à Monaco, le 8 OCTOBRE 2024, par Madame Claire GILLOIS-GHERA, Conseiller, faisant fonction de Président, Monsieur Sébastien BIANCHERI, Conseiller, Madame Marie-Hélène PAVON-CABANNES, Conseiller, assistés de Monsieur Julien SPOSITO, Greffier en Chef adjoint, en présence de Monsieur Morgan RAYMOND, Procureur général adjoint.
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