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21/03/2023 | MONACO | N°21025

Monaco | Cour d'appel, 21 mars 2023, A. c/ Monsieur a. B.


COUR D'APPEL

ARRÊT DU 21 MARS 2023

En la cause de :

* La A., société anonyme monégasque immatriculée au Registre du Commerce et de l'Industrie sous le numéro xxxx dont le siège social est situé X1 (98000), agissant poursuites et diligences de son Administrateur Délégué en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité à ladite adresse ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant Maître Sophie-Charlotte MARQUET, avocat près la même Cour ;

APP

ELANTE,

d'une part,

contre :

* Monsieur a. B., né le ../../.. de nationalité française, demeurant ...

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 21 MARS 2023

En la cause de :

* La A., société anonyme monégasque immatriculée au Registre du Commerce et de l'Industrie sous le numéro xxxx dont le siège social est situé X1 (98000), agissant poursuites et diligences de son Administrateur Délégué en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité à ladite adresse ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant Maître Sophie-Charlotte MARQUET, avocat près la même Cour ;

APPELANTE,

d'une part,

contre :

* Monsieur a. B., né le ../../.. de nationalité française, demeurant et domicilié X2 Roquebrune Cap Martin (06190) ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant Maître Aurélie SOUSTELLE, avocat au barreau de Nice ;

INTIMÉ,

d'autre part,

Visa

LA COUR,

Vu le jugement rendu par le Tribunal du Travail, le 25 juin 2020 ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 19 octobre 2020 (enrôlé sous le numéro 2021/000048) ;

Vu l'arrêt avant dire droit en date du 13 juillet 2021 ;

Vu les conclusions déposées les 11 octobre 2021, 18 mai 2022 et 11 octobre 2022 par Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom de la A. ;

Vu les conclusions déposées le 12 juillet 2022 par Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur, au nom d'a. B. ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 29 novembre 2022 ;

À l'audience du 13 décembre 2022, ouï les conseils des parties en leurs plaidoiries ;

Motifs

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par la A. à l'encontre d'un jugement du Tribunal du Travail du 25 juin 2020.

Considérant les faits suivants :

a. B. est entré au service de la SAM A. (ci-après dénommée la A.) le 5 avril 2011, sous contrat à durée indéterminée, en qualité de Conducteur Receveur, coefficient 200.

Reprochant à son salarié une attitude déloyale et fautive, la SAM A. a convoqué a. B. à un entretien préalable le 12 septembre 2015, lequel a ensuite fait l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire dans l'attente de la réunion du Conseil de discipline.

Ce dernier s'étant réuni le 4 décembre 2015, a. B. a été licencié pour faute suivant courrier recommandé du 18 décembre 2015.

Aux termes d'une requête en date du 6 octobre 2016, reçue au greffe le 7 octobre 2016, a. B. a saisi le Tribunal du travail en conciliation des demandes suivantes :

* rappel de salaire (notamment prime de repas décalés) : 9.000 euros,

* congés payés sur rappel de salaire : 900 euros,

* indemnité de licenciement (avant déduction de l'indemnité de congédiement) : 6.900 euros,

* dommages et intérêts pour non-paiement du salaire dû et licenciement abusif : 35.000 euros, le tout avec intérêts au taux légal et sous le bénéfice de l'exécution provisoire.

À défaut de conciliation, l'affaire a été renvoyée devant le Bureau de jugement du Tribunal du travail. Dans le dernier état de ses écritures déposées le 16 octobre 2019, a. B. a demandé au Tribunal de :

* lui donner acte de ce qu'il se réserve d'établir et de présenter ultérieurement le compte exact du rappel de salaire concernant les primes de repas décalés et de congés payés y afférents, ensuite de la production par la A. des feuilles de route,

* constater le défaut de production de ces éléments,

* dire que la demande de rappel de salaire est fondée en son principe,

* tirer toutes conséquences de l'absence de production des feuilles de route pour les années 2014 à 2015,

* faire droit à sa demande de rappel de salaire et lui allouer la somme de 9.000 euros, ainsi que les congés payés y afférents, soit la somme de 900 euros,

* dire que le licenciement ne repose pas sur un motif valable,

* condamner la SAM A. au paiement de la somme de 6.854,81 euros au titre de l'indemnité de licenciement, soit la somme de 4.012,27 euros après déduction de l'indemnité de congédiement,

* condamner la SAM A. au paiement de la somme de 35.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-paiement du salaire dû et licenciement abusif,

* dire que les sommes dues devront être réglées avec intérêts au taux légal à compter de la requête en justice pour celles dues au titre de rappel de salaire et à compter du jugement à intervenir pour les autres,

* ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

* condamner la défenderesse aux dépens.

Aux termes de ses conclusions en réponse, la SAM A. s'est opposée aux prétentions émises à son encontre.

Suivant jugement en date du 25 juin 2020, le Tribunal du travail a :

* rejeté la demande de jonction présentée par la SAM A.

* condamné la SAM A. à payer à a. B. la somme de 371,74 euros à titre de rappel de prime de repas décalé, outre celle de 37,17 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2016, date de la convocation devant le Bureau de conciliation et exécution provisoire,

* dit que le licenciement d'a. B. par la SAM A. est fondé sur un motif valable mais revêt un caractère abusif,

* condamné la SAM A. à payer à a. B. la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

* débouté les parties du surplus de leurs demandes,

* condamné la SAM A. aux dépens du jugement.

Pour rejeter la demande de jonction, les premiers juges ont retenu que l'action engagée par la A. à l'encontre d'a. B. est fondée sur des sommes versées à ce dernier à titre d'allocation chômage postérieurement à la rupture du contrat de travail, ne relevant pas de la compétence du Tribunal du travail.

S'agissant de la demande de rappel de salaire, ils ont considéré que le salarié était en droit d'obtenir le paiement de l'allocation représentative de frais pour repas décalé pour la période non prescrite du 6 octobre 2011 au 18 décembre 2015, par application des dispositions de la Convention collective de la A. du 30 novembre 1989 et accord cadre du 22 décembre 1998, intervenues postérieurement à l'engagement du 1er septembre 1976 auxquelles elles se sont substituées et que celui-ci pouvait être calculé sur la base de l'ensemble des feuilles de route du demandeur produites par la A.pour la période considérée.

Pour retenir que la rupture repose sur un motif valable, les premiers juges ont relevé que le grief de services tronqués était fondé, dès lors qu'a. B. ne contestait pas ne pas avoir effectué l'intégralité des arrêts et ne pas être monté de la Place d'Armes jusqu'à Monaco-Ville et qu'en agissant de la sorte en contravention aux instructions de son employeur, ce dernier avait eu un comportement fautif justifiant une sanction disciplinaire.

Le second grief tiré des falsifications des feuilles de route n'a en revanche pas été retenu, compte tenu du doute subsistant sur la matérialité de la faute, à défaut de précision donnée par la A. sur le temps passé par le chauffeur postérieurement à la fermeture de la billettique.

S'agissant du caractère abusif de la rupture, les premiers juges ont retenu que si aucun abus dans la mise en oeuvre de la rupture ne pouvait être établi, la lettre de licenciement contenait par contre des propos particulièrement vexatoires concernant le grief sur les feuilles de route, qui n'a pas été retenu, à l'origine d'un préjudice moral.

Suivant exploit en date du 19 octobre 2020, la A. a interjeté appel à l'encontre du jugement précité.

Dans le dernier état de ses écrits judiciaires déposés le 9 mars 2021, elle demande à la Cour de :

* la recevoir en son appel, l'y déclarer recevable et bien fondée,

* surseoir à statuer dans l'attente de la décision sur la compétence du Tribunal du travail et de l'évocation de l'affaire au fond s'agissant de l'appel interjeté à l'encontre du jugement du 25 juin 2020 n°23-2017/2018 portant le n° de rôle 2021/000049,

* ordonner la jonction de la présente instance avec celle pendante ente les mêmes parties sur acte d'appel et assignation à l'encontre du jugement du 25 juin 2020 enrôlé sous le n°2021/000049,

En tout état de cause,

* renvoyer les parties à conclure sur le fond du litige, compte tenu de ce qu'elle a réservé la possibilité de conclure au fond sur ses demandes.

Par écritures en réponse déposées le 5 janvier 2021, a. B. demande à la Cour de :

* confirmer le jugement en ce qu'il a :

* rejeté la demande de jonction présentée par la A.

* condamné la SAM A. à payer à a. B. la somme de 371,74 euros à titre de rappel de prime de repas décalé, outre celle de 37,17 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2016, date de la convocation devant le Bureau de conciliation et exécution provisoire,

* dit que son licenciement présente un caractère abusif,

* condamné la A. aux dépens du jugement,

Le réformer en ce qu'il a :

* jugé que le licenciement repose sur un motif valable,

* condamné la SAM A. à lui régler la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,

Et statuant à nouveau,

* dire que le licenciement ne repose pas sur un motif valable,

* condamner la SAM A. à lui régler la somme de 35.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-paiement du salaire dû et licenciement abusif,

* dire que la décision à intervenir sera exécutoire en toutes ses dispositions et que les sommes auxquelles la SAM A. sera condamnée devront être payées avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice pour le rappel de salaire et à compter du jugement (sic) qui sera rendu pour les autres,

* condamner la SAM A. aux entiers dépens, distraits au profit de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Par arrêt rendu le 13 juillet 2021, la Cour d'appel a déclaré recevables les appels principal et incident formés par la SAM A. et a. B., débouté la SAM A. de ses demandes de sursis à statuer et de jonction et invité la SAM A. à conclure au fond pour l'audience de mise en état, tout en la condamnant aux dépens d'appel.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives en date du 11 octobre 2022, la SAM A. demande à la Cour de :

* la recevoir en son appel parte in qua et l'y déclarer recevable et bien fondée,

* confirmer le jugement du Tribunal du travail en ce qu'il a dit que le licenciement d'a. B. repose sur un motif valable et en ce qu'il a débouté celui-ci de ses demandes à cet égard,

* infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement d'a. B. revêt un caractère abusif et en ce qu'il l'a condamnée à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,

* infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à a. B. la somme de 371,74 euros à titre de rappel de prime de repas décalé, outre celle de 37,17 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2016, date de la convocation devant le Bureau de conciliation,

Et statuant à nouveau,

* dire et juger que les demandes de rappel de salaires et primes d'a. B. sont infondées en leur principe et injustifiées dans leur quantum,

* dire et juger qu'aucune somme n'est due à ce titre à a. B.

* dire et juger que le licenciement d'a. B. repose sur un motif valable,

* dire et juger que le licenciement d'a. B. ne présente aucun caractère abusif,

En conséquence,

* débouter a. B. de toutes ses demandes, fins et conclusions,

En tout état de cause,

* condamner a. B. à lui payer la somme de 15.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens,

* condamner a. B. aux entiers dépens, distraits au profit de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Au soutien de ses prétentions, elle expose à titre liminaire qu'à la suite de la réclamation téléphonique d'un usager le 8 octobre 2015, se plaignant de ce que son bus habituel n'avait pas desservi l'arrêt « Monaco-Ville », elle a diligenté une enquête qualité, aux termes de laquelle elle a constaté que :

* le service 106 n'avait pas été assuré, l'arrêt « Monaco-Ville » n'ayant pas été desservi en violation des instructions rappelées sur la fiche de service,

* le chauffeur concerné était a. B. lequel avait décidé d'écourter le trajet du service n°106, en se rendant, en plein service, directement au parking des Pêcheurs, afin de terminer plus tôt sa journée de travail,

* il n'avait pas hésité à mentionner sur sa feuille de route, un supplément de travail de 10 minutes, alors même qu'il avait délibérément tronqué son service.

Elle explique avoir alors procédé à l'examen des feuilles de route de son salarié, qui lui ont révélé que ce dernier avait pris pour habitude de mentionner quasi-systématiquement sur ses feuilles de route, entre 10 et 15 minutes supplémentaires de travail non effectué pour bénéficier du paiement indu d'heures de travail majorées.

Elle prétend qu'a. B. a reconnu les faits reprochés au cours de l'entretien préalable organisé le 12 novembre 2015, allant même jusqu'à préciser à la Direction, dans des termes irrespectueux, que les suppléments ajoutés sur ses feuilles de route visaient à compenser un prétendu préjudice de temps de travail.

Elle affirme avoir été contrainte de notifier à l'intéressé son licenciement eu égard aux nombreuses fautes recensées dans l'exercice de ses fonctions, se traduisant notamment par le non-respect des instructions professionnelles de manière successive et répétée et par la réalisation d'actes déloyaux.

Elle soutient que :

* il est de jurisprudence constante que la rupture du contrat est justifiée dès lors que le salarié refuse d'exécuter les directives de l'employeur,

* a. B. avait pour instruction professionnelle de se rendre à Monaco-Ville, même en l'absence de voyageurs dans le bus, afin de permettre aux éventuels usagers s'y trouvant, de descendre sur la Place d'armes, sans que cela ne soit nullement illogique, comme feint de le prétendre ce dernier,

* il connaissait l'instruction de la course par sa fiche horaire présente dans le bus, disposait du pupitre SAE et pouvait procéder à la modification du code girouette, si celui-ci avait, par impossible, affiché un message non conforme,

* des faits similaires s'étaient déjà produits le 18 septembre 2015,

* le salarié n'a pas justifié des raisons de cette faute professionnelle, largement débattue en conseil de discipline,

* tout manquement entraîne pour elle des risques de pénalités dans le cadre de la concession de service public qui lui a été consentie pour l'exploitation du réseau de transports en commun desservant la ville de Monaco.

Elle reproche par ailleurs aux premiers juges d'avoir écarté le grief tiré de la falsification des feuilles de route alors que :

* l'enquête qualité réalisée a révélé que sur 183 services effectués entre le 1er janvier et le 11 novembre 2015, a. B. a indiqué à 77 reprises avoir réalisé un supplément horaire de 10 à 15 minutes, en contradiction avec l'extrait du programme billettique,

* il connaissait parfaitement les règles applicables à la fin de service,

* son comportement tendant à instaurer ses propres règles de fonctionnement est constitutif d'une insubordination,

* son attitude déloyale est d'autant plus inacceptable qu'il avait déjà été mis en garde par le passé à plusieurs reprises par sa Direction du fait du non-respect des consignes et des procédures appliquées au sein de la A.

Si par extraordinaire, la Cour devait considérer que le licenciement d'a. B. ne reposait pas sur un motif valable, elle conteste la demande en paiement d'indemnité légale de licenciement du salarié dont le quantum est erroné.

Elle prétend que le licenciement intervenu ne revêt aucun caractère abusif en son principe, au regard de son caractère fondé, et alors que la prétendue absence de motif valable ne caractérise pas en tout état de cause, l'existence d'un faux motif ou d'un motif fallacieux.

Elle affirme également l'absence de caractère abusif du licenciement dans sa mise en oeuvre, ayant veillé au respect des droits du salarié tout au long de la procédure.

Elle ajoute qu'aucune prime de repas décalé n'est due à a. B. en vertu des usages et avantages internes de la A., en l'occurrence l'engagement du Syndicat du Personnel de la A. en date du 1er septembre 1976, antérieur à l'article 10 de l'accord-cadre français du 22 décembre 1998 et à l'article VII de la Convention collective du 30 novembre 1989, et demeuré en vigueur jusqu'à l'avenant à la Convention collective signé le 21 décembre 2018.

Par conclusions récapitulatives en réplique, a. B. demande à la Cour de :

Confirmer le jugement en ce qu'il a :

* rejeté la demande de jonction présentée par la SAM A.,

* condamné la SAM A. à lui payer la somme de 371,14 euros à titre de rappel de prime de repas décalé, outre celle de 37,17 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2016, date de la convocation devant le Bureau de conciliation et exécution provisoire,

* dit que son licenciement revêt un caractère abusif,

* condamné la SAM A. aux dépens du jugement,

Le réformer en ce qu'il a :

* jugé que le licenciement repose sur un motif valable,

* condamné la SAM A. à lui régler la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral,

Statuant à nouveau,

* dire que le licenciement ne repose pas sur un motif valable,

* condamner la SAM A. à lui régler la somme de 35.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-paiement du salaire dû et licenciement abusif,

* condamner la SAM A. aux entiers dépens, distraits au profit de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

* dire que la décision à intervenir sera exécutoire en toutes ses dispositions et que les sommes auxquelles la SAM A. sera condamnée devront être payées avec intérêt au taux légal à compter de la demande en justice pour le rappel de salaire et à compter du jugement qui sera rendu pour les autres.

Il conteste que son licenciement repose sur un motif valable du fait qu'il aurait eu un comportement justifiant une sanction disciplinaire, relevant par ailleurs que nonobstant les termes particulièrement virulents de la lettre de licenciement, il n'a pas été licencié pour faute grave.

En tout état de cause, il conteste ne pas avoir effectué son service en son intégralité le 8 mars 2015 soulignant que d'une part, il n'avait plus personne dans son bus et que l'arrêt suivant ne visait qu'à déposer les voyageurs et non à les faire monter et que d'autre part, il était à la fin de son service.

Il affirme qu'il n'avait pas pour consigne de prendre les voyageurs qui auraient pu se trouver à l'arrêt de « Monaco-Ville » pour les descendre jusqu'à l'arrêt de la Place d'Armes, alors que cet arrêt correspondait pour lui au terminus.

Il ajoute que si la A. persiste à prétendre que les instructions professionnelles lui auraient imposé de monter à l'arrêt Monaco-Ville, elle n'en justifie aucunement, pas plus que de la plainte qui aurait été déposée par un usager à ce titre.

Il soutient que les premiers juges ont retenu de manière illogique le caractère valable du licenciement, en écartant le grief lié à la falsification des feuilles de route, alors que le seul fait qu'il n'ait pas emmené son bus au terminus alors que le véhicule était vide, ne peut constituer un motif valable de licenciement.

Il réfute le comportement déloyal qui lui est imputé s'agissant de l'heure de ses fins de service, alors que la A. se fonde sur les horaires d'ouverture et de fermeture de la billettique, sans prendre en considération le temps que l'agent met à compter et remettre sa caisse, faire le tour de son bus pour vérifier son état et la présence d'objets oubliés.

Il soutient que le service de l'agent se termine une fois l'ensemble de ses tâches accomplies et non à la seconde à laquelle il arrête la billettique de son véhicule.

Il prétend que la note de service émise le 10 mars 2010, antérieure à son entrée au sein de la A. ne lui est pas opposable, tandis qu'il n'est pas signataire de celle du 8 mai 2012.

Il ajoute que les formations au demeurant assez sommaires qui lui ont été adressées à son entrée dans la société ne font pas état des règles relatives aux prises de service et de fin de service.

Il assure ne pas avoir effectué de fausses déclarations, ayant exactement mentionné l'heure à laquelle son service était terminé, au moment où il remet sa caisse au dépôt et qu'il s'en trouve déchargé, soulignant que la seule question juridique posée porte sur l'effectivité du temps de travail de l'agent à prendre en considération pour déterminer la fin de service.

Il soutient l'absence totale de lien entre les prétendus manquements antérieurs dont se prévaut l'employeur, qui consigne les moindres faits et gestes des agents, et le licenciement dont il a fait l'objet.

Il affirme que son licenciement reposait sur un motif fallacieux car non fondé et que si les propos vexatoires contenus dans sa lettre de licenciement ouvrent droit à des dommages et intérêts, il n'a pas été tenu compte de la brutalité avec laquelle il a été écarté de la société, ayant subi une mise à pied l'excluant de celle-ci du jour au lendemain.

Il dénie toute force probante à l'attestation délivrée par s. C., salariée de la A., en excipant de son lien de subordination avec cette dernière.

Il ajoute qu'il n'a pas reçu la rémunération qui lui était due, la SAM A. s'abstenant de lui régler l'indemnité dite de « repas décalé » et que son préjudice tant moral que matériel est important, alors qu'il se trouve sans emploi et non pris en charge par Pôle Emploi depuis octobre 2017.

Il objecte enfin que la demande adverse présentée sur le fondement des dispositions de l'article 238-1 du Code de procédure civile est nouvelle en cause d'appel pour ne pas avoir été soumise au Bureau de jugement ni au Bureau de conciliation.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 novembre 2022.

SUR CE,

Sur la recevabilité des appels

Attendu que l'arrêt avant-dire-droit rendu le 13 juillet 2021 ayant déclaré recevables les appels principal et incident formés par la SAM A .et a. B. la demande à nouveau présentée en ce sens par l'appelante dans ses écritures récapitulatives n°2 du 11 octobre 2022 est sans objet ;

Sur la demande de rappel de salaire (prime de repas décalé)

Attendu qu'aux termes de l'article 11 de la loi n°739 du 16 mars 1963, l'employeur est tenu de verser à ses employés les montants minima des salaires, primes, indemnités de toute nature et majorations autres que celles prévues par les dispositions législatives relatives à la durée du travail, qui ne peuvent être inférieurs à ceux pratiqués dans la région économique voisine, dans les mêmes professions, commerces ou industries en vertu de la réglementation ou de conventions collectives, pour les conditions de travail identiques ;

Que l'article VII de la Convention collective du Travail signée entre la A. et le Syndicat du personnel de la A. le 30 novembre 1989 prévoit que :

« a) la rémunération, les échelons d'ancienneté, et classification seront ceux appliqués aux agents des transports urbains de la ville de Nice,

b) les primes seront appliquées dans les mêmes conditions énoncées au paragraphe « a » en tenant compte du caractère particulier de chaque réseau » ;

Que l'article 10 intitulé « Coupures » , de l'Accord-cadre français du 22 décembre 1998 relatif à la branche sur l'emploi par l'organisation, l'aménagement, la réduction du temps de travail, pris en application de la Convention collective nationale française des réseaux de transports publics urbains de voyageurs, dispose :

« Le présent article s'applique aux seuls personnels roulants.

Une coupure est une période pendant laquelle le salarié n'est plus à la disposition de l'employeur et peut vaquer librement à des occupations personnelles.

Les coupures d'une durée égale ou inférieure à 30 minutes sont comptées dans la durée du travail.

Aucun service ne peut compter plus de deux coupures. Les deux temps de battement applicables sur les lignes régulières sont considérés comme du temps de travail effectif.

Le nombre journalier de services à deux coupures ne peut dépasser 10% du nombre total de services. Il peut être dérogé à cette limite par accord d'entreprise qui devra en définir les contreparties.

La coupure pour repas de midi est au minimum de 45 minutes. Tout agent en service entre 11h30 et 14 heures qui ne bénéficie pas, dans cet intervalle, d'une coupure pour repas au moins égale à 45 minutes reçoit une allocation représentative de frais pour repas décalé égale au salaire d'une demi-heure du salaire de base d'un conducteur-receveur de 10 ans d'ancienneté. Les accords d'entreprise peuvent prévoir des dispositions dérogeant à cet article. » ;

Que sans méconnaître les termes de son engagement conventionnel découlant de ces deux documents, aux termes desquels elle doit appliquer les modalités de versement des primes négociées et versées aux agents des transports urbains de la ville de Nice, l'appelante soutient qu'elle n'en demeure pas moins libre de définir ses propres avantages et usages internes ;

Qu'elle se prévaut à cet égard du courrier adressé le 1er septembre 1976 à la Direction par le Syndicat du Personnel de la A. faisant suite à la demande de ce dernier de mise en place d'un service continu, sans coupure, permettant aux agents de bénéficier de journées de travail plus courtes ;

Que ledit courrier est rédigé dans les termes suivants :

« Monsieur le Directeur,

Le 1er octobre 1976 sera mis en application un nouveau service à heures continues.

Celui-ci comporte 3 numéros avec repas décalés. Le personnel étant demandeur, a pris la décision en assemblée générale de ne pas réclamer la prime afférente à ces 3 numéros tant que ce service sera en application.

Ces mêmes dispositions seront valables pour les numéros du dimanche qui seront mis en service le même jour.

(...) ; »

Qu'il en ressort clairement que le personnel a renoncé au versement de la prime de repas décalé, en contrepartie de la mise en place par l'employeur d'un service continu, à sa demande ;

Que certes, à l'instar des premiers juges, la Cour considère que l'usage applicable dans l'entreprise en vertu de cet engagement unilatéral est par nature supplétif de la volonté des parties et peut être mis à néant par un accord collectif ;

Que toutefois, quelle que soit la qualification donnée au courrier du 1er septembre 1976 (engagement unilatéral, accord typique), il est constant et non contesté que ses dispositions ont continué à être appliquées dans l'entreprise, nonobstant la signature de la Convention collective en 1989 et de l'Accord-cadre français en 1998 ;

Que ce consensus au sein de la A. pour maintenir et laisser perdurer les termes de cet accord antérieur, se trouve confirmé par les courriers adressés à la Direction de la A. par les délégués du personnel les 29 décembre 2014 et 16 janvier 2015, demandant d'associer à la restructuration du réseau, le paiement de la prime de repas décalé, démontrant a contrario que les parties n'avaient pas souhaité jusqu'alors remettre en cause son absence de versement ;

Que le mail adressé le 4 juillet 2016 par le Syndicat du personnel de la A. à son Directeur vient confirmer que des négociations étaient toujours en cours à cette date, alors même que de nombreux salariés avaient fait part de leur souhait de continuer à travailler sur un principe d'horaires continu selon l'accord de 1976, comme en témoignent les formulaires de réponse donnés en ce sens entre les mois de juin et décembre 2016 (pièce 51 de l'appelante) ;

Que celles-ci ont finalement abouti à la signature le 21 décembre 2018 des documents suivants :

* un engagement unilatéral pris par la A. sur l'organisation du travail applicable aux horaires en service à la date de signature,

* un avenant n°1 à la convention collective de la A. entre celle-ci et le syndicat du personnel ;

Que cet avenant, qui prévoit en son article II les conditions de versement de la prime de repas décalé, rappelle le contexte antérieur en ces termes :

« Au cours des discussions entre les parties, il a été rappelé que pour satisfaire le personnel de conduite, depuis une demande du Syndicat du personnel de la A. (cf. courrier du 1er septembre 1976), les services de conduite des agents conducteurs ont majoritairement été établis sur la base d'horaires continus, sauf nécessités liées à l'organisation du travail ou au respect d'obligations contractuelles imposées à la A. créant ainsi un usage non contesté.

Il est donc établi que la mise en place de services de conduite avec le moins de coupures possibles, puisqu'ils constituent une contrainte pour le personnel de la A. est une particularité de l'organisation du réseau de la A. (...) » ;

Qu'il s'évince de ces dispositions que l'usage constant découlant de l'engagement souscrit en 1976 a pris fin le 21 décembre 2018, sans qu'il y ait lieu de suivre a.B.dans le surplus de son argumentaire, en l'absence de tout élément objectif permettant de définir une date certaine antérieure à laquelle la dénonciation officielle en aurait été faite à la Direction par le Syndicat des Personnels de la A. ;

Qu'il s'ensuit qu' a. B. dont le licenciement est intervenu antérieurement à la date précitée, ne peut valablement prétendre au paiement de l'allocation représentative de frais pour repas décalé et de congés payés afférents ;

Que la décision entreprise sera réformée de ce chef ;

Sur le motif de la rupture

Attendu qu'il appartient à l'employeur d'établir la réalité et la validité des motifs invoqués à l'appui de sa décision de licenciement ;

Qu'il est de droit constant que la lettre de licenciement ne fixe pas les limites du litige, l'employeur pouvant invoquer devant les juridictions d'autres griefs ayant sous-tendu sa décision de rupture et ne se trouvant pas lié par les motifs expressément notifiés ;

Qu'enfin, le contrat de travail induit un lien de subordination au titre duquel le salarié est tenu de respecter les directives et instructions de son employeur ;

Attendu qu'en l'espèce, après avoir été convoqué devant le conseil de discipline le 4 décembre 2015, a. B. a été licencié pour faute simple, suivant courrier recommandé avec accusé de réception en date du 5 novembre 2015, ainsi libellé :

« Monsieur,

Conformément à l'article XXII de notre convention collective concernant les sanctions disciplinaires du deuxième degré, nous avons été amenés à réunir un conseil de discipline, le 4 décembre 2015 pour délibérer sur votre situation contractuelle, suite aux falsifications de fins de service que vous avez opérées sur vos feuilles de route vous octroyant des suppléments abusifs. Ces faits se sont aggravés par des manquements au respect des consignes et des procédures mises en place.

Pour répondre à la réclamation d'un usager, un contrôle de la journée du 8 octobre 2015 a été réalisé. Nous avons constaté qu'assurant le service 106, au lieu de desservir Monaco-Ville conformément au programme établi par votre employeur, vous vous rendez directement au parking des pêcheurs pour stationner votre bus. Malgré un itinéraire raccourci vous avez porté sur votre feuille de route un supplément de 10 minutes inexpliqué nécessitant une analyse plus large.

Nous avons été contraints, dans ce cadre, de procéder à l'examen de vos feuilles de travail depuis le début de l'année 2015. Celui-ci a prouvé que vous avez suivi méthodiquement, sur toute la période considérée, un mode opératoire identique à celui utilisé le 8 octobre 2015, notant, à une fréquence soutenue, de fausses fins de service pour vous attribuer au moins 10 minutes supplémentaires à chaque fois.

Ces fausses déclarations écrites et signées sont constitutives d'une fraude intentionnelle organisée et récurrente. Votre reprise de travail, à la fin du mois d'octobre n'a pas été l'occasion de mettre un terme à vos pratiques et ignorant votre obligation de loyauté envers votre employeur, vous avez continué à abuser de sa confiance pour améliorer vos revenus.

Pour édifier sa position sur une base solide et vous garantir le bénéfice du doute, la Direction est intervenue dès que les faits ont été avérés et qu'ils se sont confirmés objectivement après de nombreux contrôles.

...

Nous déplorons par ailleurs que vos agissements fautifs s'aggravent sur le terrain, à 2 reprises en moins d'un mois, par une desserte incomplète. Ainsi, à l'instar du 8 octobre 2015, le 18 septembre 2015, méprisant l'instruction professionnelle, vous avez aussi tronqué votre service.

...

Malgré nos remarques et demandes d'améliorations, nous ne pouvons que constater que votre comportement professionnel est contraire à nos instructions. Face à de fausses déclarations constitutives de fraude, la A. concessionnaire du service public de voyageurs, employant des salariés qui gèrent de l'argent public ne peut transiger sur la loyauté et l'honnêteté.

Ces éléments démontrent objectivement que votre attitude nuit au bon fonctionnement de l'entreprise et le Conseil de discipline a été réuni pour avis sur la suite à donner.

Au terme des échanges au sein du Conseil de Discipline, la Direction a donc pris la décision de procéder à votre licenciement, dans les conditions prévues par la réglementation et par les dispositions conventionnelles qui sont applicables à votre contrat de travail.

...» ;

Que l'employeur fait ainsi grief à son agent d'avoir réalisé des services tronqués en assurant une desserte incomplète et d'avoir falsifié des feuilles de route ;

Que sans contester la matérialité des faits qui lui sont reprochés, a.B.objecte néanmoins qu'ils ne sauraient constituer un comportement fautif de sa part ;

Que pour justifier de la réalité du premier grief, la SAM A. verse aux débats :

* l'annexe 1 de la convention de concession du 8 octobre 2013, comportant le cahier des charges pour l'exploitation du service de transport public de voyageurs de la Principauté de Monaco (pièce 10 bis),

* la fiche horaire de la ligne 106 (pièce 25),

* la fiche de poste de conducteur receveur établie le 4 avril 2011 au nom d a.B.(pièce 2),

* les attestations de formation d a.B.établies les 8 avril 2011, 18 et 19 juillet 2011 et 19 et 20 septembre 2011(pièces 29, 30 et 31),

* deux documents intitulés « rapport spécial » de « vérification de passage aux arrêts » dressé le 9 octobre 2015 par s.D.(pièces 3 et 24) ;

Qu'il résulte de l'examen conjugué de ces pièces que la SAM A. doit, en sa qualité de concessionnaire, assurer la continuité du service dont elle a la charge, dans les conditions contractuelles strictement convenues, s'agissant en particulier de l'itinéraire des lignes et des points d'arrêts ;

Qu'en vertu du cahier des charges, le terminus de la ligne 1, circulant dans le sens Saint Roman/Monaco-Ville, est situé à l'arrêt « Monaco-Ville (le Rocher) » ;

Que la fiche horaire de la ligne 106, à usage des conducteurs, mentionne expressément « Après desserte de Monaco-Ville, prendre les voyageurs pour place d'Armes et rentre au Parking des Pêcheurs pour 20h24. FIN DE SERVICE. » ;

Qu'au nombre des capacités requises pour occuper le poste de conducteur receveur, sur lequel l'intimé a fait acte de candidature, figure expressément celle de « se conformer aux horaires de départ et d'arrivée des véhicules et aux parcours, suivre les instructions de la hiérarchie » ;

Qu' a. B. a suivi avec succès une formation destinée aux nouveaux agents sur les lignes 1, 2, 4 et 6 ;

Qu'il était donc parfaitement formé et informé du parcours qu'il devait assurer dans le cadre de la desserte de la ligne 1 ;

Que malgré ce, il est établi que le 18 septembre et le 8 octobre 2015, l'agent concerné, a rejoint directement le parking des Pêcheurs après avoir stationné à l'arrêt de la Place d'Armes, sans desservir le dernier arrêt du parcours, soit Monaco-Ville ;

Que l'intimé ne conteste pas ne pas avoir respecté l'intégralité des arrêts et notamment ne pas être monté de la Place d'Armes jusqu'à Monaco-Ville, mais soutient qu'il n'avait plus personne dans son bus, que l'arrêt suivant ne visait qu'à déposer des voyageurs et non à en faire monter, alors d'ailleurs que son véhicule affichait le code « ne prend plus de voyageurs » ;

Que cependant, nonobstant l'absence de voyageurs dans le bus à l'arrêt de la Place d'Armes, la fiche horaire susvisée spécifie clairement l'obligation pour le conducteur de monter à l'arrêt Monaco-Ville, qui constitue son terminus, pour prendre le cas échéant les voyageurs qui s'y trouveraient et les descendre jusqu'à l'arrêt de la Place d'Armes, avant de rejoindre le parking pour sa fin de service ;

Qu'il n'appartenait pas à l'agent de décider unilatéralement, en dehors de toute considération liée à des difficultés de circulation, de l'opportunité de ne pas assurer ce dernier arrêt ;

Qu'il ne peut davantage prétendre qu'il aurait été induit en erreur par le code girouette de son véhicule qui aurait affiché le message « ne prend plus de voyageurs » ;

Qu'en effet, outre le fait que ce dysfonctionnement n'est aucunement établi, les attestations de formation de l'intéressé témoignent de ce qu'il a été formé au changement et à la mise à jour de la girouette ainsi qu'à la manipulation et la mise à jour du SAE (système d'aide à l'exploitation qui constitue l'interface entre le conducteur et le PC), de sorte qu'il lui appartenait, en cas d'éventuel dysfonctionnement du code girouette, de modifier l'information erronée et d'afficher le bon code à destination des usagers, en fonction de l'itinéraire de la ligne desservie et des instructions professionnelles reçues ;

Qu'il s'évince de l'ensemble de ces éléments, qu' a. B. qui connaissait les obligations liées à l'itinéraire à suivre dans le cadre de son service sur la ligne 1, a, en toute connaissance de cause, écourté le circuit prescrit ;

Que les premiers juges en ont à bon droit déduit que les agissements d a.B.à cet égard, qui a écourté son itinéraire en contravention aux instructions de son employeur, caractérisent un comportement fautif, justifiant une sanction disciplinaire ;

Que la SAM A. reproche également à son agent d'avoir falsifié des feuilles de route, en comptabilisant des temps de travail supplémentaires ne correspondant pas à la réalité de son travail effectif ;

Qu'elle affirme que le service du chauffeur prend fin lors de la fermeture de la billettique, formalisée par la pression de la touche « transfert réseau » figurant sur le pupitre SAE ;

Qu'elle relève que sur les 183 services effectués entre le 1er janvier et le 11 novembre 2015, a.B.a mentionné à 77 reprises un supplément de 10 à 15 minutes ouvrant droit à une rémunération majorée ;

Qu'elle soutient que les minutes supplémentaires que le salarié s'est régulièrement octroyé ne s'expliquent aucunement par des tâches accessoires, alors de surcroît que de nombreuses feuilles concernent des services du matin et que les collègues de l'intéressé occupant le même poste n'ont mentionné que très rarement de tels dépassements ;

Qu' a. B. ne conteste pas les mentions portées sur ses feuilles de route, qui ne peuvent constituer à son sens une faute, réfutant toute falsification ;

Qu'il prétend avoir reporté la réalité de son temps de travail sur lesdites feuilles de route, les horaires produits par la SAM A. correspondant à l'ouverture et à la fermeture de la billettique, sans considération du temps que l'agent met à compter et remettre sa caisse, faire le tour de son bus pour vérifier son état et la présence d'objets oubliés ;

Qu'il soutient que le service de l'agent se termine une fois l'ensemble de ces tâches accomplies et non au moment de la fermeture de la billettique de son véhicule ;

Que les premiers juges ont à bon droit rappelé à cet égard qu'aux termes d'une Directive européenne, le temps de travail se définit comme « toute période durant laquelle le travailleur est au travail, à la disposition de l'employeur, et dans l'exercice de son activité ou de ses fonctions, conformément aux législations et/ou pratiques nationales » ;

Qu'à ce titre, tout le temps passé par le salarié dans les locaux de l'entreprise, dans le cadre de ses obligations professionnelles, doit être considéré comme du temps de travail effectif ;

Que doivent ainsi être pris en compte les temps que consacre le salarié à des tâches accessoires à son travail ;

Que ce faisant, au-delà de la fermeture de la billettique, qu'il opère par la simple pression de la touche « transfert réseau » figurant sur le pupitre de son véhicule, le temps consacré par a.B. notamment à faire le tour de son bus pour recueillir d'éventuels objets oubliés et à se rendre au bureau pour y prendre ou déposer la caisse, constitue encore du temps de travail, sans que l'appelante ne puisse utilement contester la nécessité de ces opérations ;

Que par ailleurs, contrairement à ses allégations, la SAM A. ne justifie d'aucune instruction claire et précise concernant la prise et la fin de service de ses agents ;

Que la pièce n°60 présentée comme étant le « memento d'accueil remis aux nouveaux arrivants » porte seulement la mention, au titre des documents dont il doit être destinataire, d'un « recueil de notes de service » ;

Qu'il n'est toutefois pas justifié de la teneur de celles qui ont été effectivement transmises à a.B. à son arrivée dans la société ;

Que par contre, les 2 notes de service du 10 mars 2010 et celle du 8 mai 2012 auxquelles l'appelante se réfère, ont respectivement pour objet :

* « Billettique - Cartes de courtoisie - Reçus de paiement - Lecture du contenu d'un titre sans contact - Rechargement cartes sans contact »,

* « Photocopies des papiers du véhicule dans le poste conducteur - Procédures des vérifications des accrochages - Exonération des heures supplémentaires », ce dernier point concernant exclusivement l'angle fiscal,

* « Rappel des consignes concernant les transferts statistiques depuis le TP 5700 »,

soit des informations et consignes relatives aux ventes à bord et aux accidents, sans que ne soient abordées de règles relatives aux prises et fins de services ;

Que l'appelante ne peut donc raisonnablement soutenir que « Monsieur B. est très malvenu de prétendre que son service ne prenait pas fin lors de la fermeture billettique, dans la mesure où cela a toujours été la règle au sein de la A. et ce, tel qu'il résulte des notes de services » ;

Qu'elle ne justifie d'aucune information claire et précise donnée à l'intéressé, sur ce point pourtant essentiel de ses conditions de travail ;

Que les pratiques imputées à d'autres conducteurs, qui n'auraient que très rarement fait état de dépassements horaires, ne sont pas justifiées par les seules feuilles de route établies par le binôme de l'intimé, tandis qu'une telle comparaison est dénuée de pertinence compte tenu des conditions de circulation nécessairement propres à chaque trajet ;

Que toutefois, par courrier adressé le 29 décembre 2014 à son Directeur, le Syndicat des personnels de la A. lui a expressément demandé un « ajustement du temps de prise de service au dépôt et lors des relèves en ligne, ainsi que du temps nécessaire à la fin de service » , laissant à penser que la pratique dont l'employeur se prévaut avait bien cours en son sein ;

Que le courrier du 7 juillet 2015 confirme une divergence d'appréciation quant au temps des prises et fins de service, en soumettant à la Direction une revendication rédigée en ces termes :

« Votre dernière proposition est d'ajouter 2 minutes de mise en place pour les prises de services du matin.

Le personnel soutient que la journée de travail commence dès l'instant où l'agent récupère sa caisse dans les locaux de la A. qu'il s'agisse des prises de service du matin ou des relèves en ligne.

À la fin du service, en ligne ou au dépôt, les conducteurs doivent également aller remiser leur caisse dans les locaux de la A.mais aussi être libérés de la responsabilité du véhicule (tour du bus avec l'agent de relève ou celui du dépôt).

Le temps nécessaire à l'ensemble de ces opérations est actuellement supporté par le personnel, nous demandons qu'il soit intégré à l'horaire de travail. » ;

Que dans un tel contexte, tenant les principes ci-dessus rappelés, il ne peut être imputé à faute à a.B.d'avoir reporté sur ses feuilles de route le temps de travail consacré à des tâches accessoires, postérieurement à la fermeture de la billettique ;

Que les juges ont donc écarté de manière pertinente le second grief invoqué à ce titre par l'employeur ;

Que pour le surplus, la SAM A. déplore les diverses mises en garde qu'elle a dû adresser à a.B.par le passé, du fait du non-respect des consignes et des procédures applicables ;

Qu'elle fait ainsi état des manquements suivants :

* rappel à l'ordre en suite d'un accident de la circulation survenu le 6 juillet 2012 (non déclaré),

* avertissement du 3 mai 2013 pour absence injustifiée,

* rappel à l'ordre en suite d'un accident corporel survenu le 24 novembre 2013 (non déclaré),

* non suivi de la procédure en cas de retard le 14 janvier 2015 (non déclaré),

* non suivi de la procédure relative aux temps de parcours le 6 septembre 2015 ;

Que s'agissant de la contestation émise par a.B.concernant la mention de l'avertissement figurant sur le rapport spécial dressé le 13 mai 2013, dont il allègue dans ses écritures qu'elle constituerait un abus de blanc-seing, force est de constater qu'il procède par voie d'affirmation sans en tirer les conséquences juridiques qui s'imposent (vérification d'écriture, procédure de faux), ni produire l'exemplaire de ce document, qui lui a été remis, comme en témoigne la mention figurant au-dessus de sa signature et dont l'analyse aurait permis, le cas échéant, d'accréditer ses dires ;

Que la Cour observe par ailleurs qu'en affirmant avoir infligé un avertissement à son salarié le 3 mai 2013, l'employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire de ce chef et ne peut par ailleurs se prévaloir de faits antérieurs à cette date pour fonder une mesure de licenciement ;

Que les incidents survenus les 3 mai 2013 et 6 juillet 2012 se trouvent par la même neutralisés dans leurs effets relativement à la présente procédure ;

Que pour le surplus, les explications fournies par l'intimé sur les autres incidents, dont la matérialité se trouve établie par les pièces versées aux débats mais dont il conteste pour l'essentiel la gravité, n'emportent pas la conviction de la Cour à son avantage ;

Que sa prétendue méconnaissance des procédures en vigueur, lui faisant obligation de déclarer les incidents survenus à sa hiérarchie, ne résiste pas à l'analyse, notamment au regard de ses attestations de formation et des feuilles de route établies ;

Que bien plus, il ne peut prétendre avoir ignoré les consignes applicables en matière d'accident, lesquelles n'ont pas manqué de lui être rappelées à la suite de son premier accrochage, comme en témoigne le compte rendu d'entretien établi le 14 août 2012 ;

Que par ailleurs, le fait que l'employeur n'ait pas cru devoir le sanctionner à l'époque des incidents sus-évoqués est sans emport, dans la mesure où celui-ci n'a pas épuisé son pouvoir disciplinaire pour les faits survenus après l'avertissement prononcé le 3 mai 2013 ;

Qu'il s'évince de l'ensemble de ces éléments que si le grief tiré de la falsification des feuilles de route n'est pas établi, celui inhérent à ses services écourtés est en revanche parfaitement justifié, dans un contexte avéré de manquements professionnels préalables ;

Que par voie de conséquence, la décision entreprise mérite confirmation en ce qu'elle a retenu d'une part, qu a.B.a eu un comportement fautif justifiant une sanction disciplinaire, d'autre part, que le licenciement est fondé sur un motif valable ;

Sur le caractère abusif du licenciement

Attendu qu'aux termes de l'article 13 de la loi n°729 du 16 mars 1963, toute rupture abusive du contrat de travail peut donner lieu à des dommages et intérêts ;

Qu'il appartient dans ce cas au salarié, auquel incombe la charge de la preuve, de démontrer, outre le préjudice subi, l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ou dans la précipitation, la brutalité ou la légèreté blâmable avec laquelle le congédiement a été donné ;

Qu'un motif fallacieux suppose que le motif avancé par l'employeur ne soit pas le motif réel, conjugué à une volonté de tromper ou de nuire au salarié concerné ;

Qu'au cas présent, a.B.prétend avoir été licencié pour un motif « fallacieux, car non fondé » ;

Que partant, l'intimé ne démontre ni même n'allègue avoir été licencié pour une autre cause que celle qui lui a été notifiée dans la lettre de licenciement ;

Que les premiers juges ont dès lors à bon droit considéré que la décision de rupture ne reposait pas sur un motif fallacieux et ne présentait pas en elle-même un caractère fautif, ouvrant droit à l'indemnisation d'un préjudice matériel et financier ;

Que quand bien même le licenciement est fondé, comme en l'espèce, sur un motif valable, il peut encore s'avérer abusif s'il est établi que l'employeur a méconnu les prescriptions légales dans la mise en œuvre de la rupture ou si les modalités de sa notification présentent un caractère fautif, révèlent une intention de nuire, la précipitation ou la légèreté blâmable de l'employeur ;

Qu'à cet égard, a.B. invoque le caractère vexatoire de son licenciement, prétendant avoir été écarté brutalement de la société en faisant l'objet d'une mise à pied et avoir été heurté par les termes de la lettre de licenciement qui lui a été adressée ;

Que s'agissant de la mise en oeuvre de la rupture, il ressort des pièces produites que :

* l'intimé a été convoqué à un entretien préalable le 12 novembre 2015, avant de faire l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire, dans l'attente de la réunion du Conseil de discipline,

* par courrier du 23 novembre 2015, il a été convoqué devant le Conseil de discipline qui devait se tenir le 4 décembre suivant,

* il a ensuite été licencié suivant courrier recommandé du 18 décembre 2015 ;

Qu a.B.ne peut soutenir que l'appelante n'avait que faire de ses explications, alors que suivant courrier qu'il a adressé au Directeur et à son épouse le 18 novembre 2015, il s'excuse pour les propos blessants qu'il a pu tenir lors de leur dernier entretien, affirmant avoir réagi sous le coup de l'émotion et qu'il entendait assumer toutes les conséquences de ses actes ;

Qu'il s'ensuit qu'il n'a pas été écarté brutalement de l'entreprise mais après avoir été entendu et avoir tenu des propos désobligeants et inappropriés ;

Que le prononcé d'une mise à pied conservatoire ne saurait constituer un abus de la part de l'employeur dans un tel contexte ;

Que pour le surplus, l'employeur a parfaitement respecté la procédure en matière de sanction disciplinaire ;

Que le salarié a également disposé du temps nécessaire pour préparer sa défense et faire entendre sa position ;

Qu'aucune précipitation n'apparait davantage pouvoir être reprochée à la SAM A. qui a donné à son salarié la possibilité de s'expliquer, dans le respect de ses obligations légales et conventionnelles, et a pris un temps de réflexion de deux semaines avant de lui notifier son licenciement ;

Qu'enfin, l'intimé ne démontre pas qu'on lui aurait refusé la faculté de se faire assister lors de ses entretiens, quand bien même la lettre de convocation qui lui a été adressée le 23 novembre 2015 ne mentionne pas une telle possibilité, d'autant que la SAM A. affirme dans le même temps avoir « tenu à prendre en compte tous les éléments et entendre le salarié et ses représentants, avant de prendre la décision qui s'imposait » ;

Qu'en définitive, la Cour considère, à l'instar des premiers juges, qu'aucun abus de l'employeur dans la mise en oeuvre de la rupture (précipitation, brutalité ou légèreté blâmable avec laquelle le congédiement a été donné) n'a lieu d'être retenu ;

Qu'enfin, la situation de l'intimé postérieurement au licenciement et le litige né entre les parties dans le cadre du règlement des indemnités chômage ne sont pas de nature à justifier du caractère abusif du licenciement ;

Que par contre, le Tribunal a pu à juste titre retenir le caractère vexatoire des propos contenus dans la lettre de licenciement adressée à a.B.;

Qu'en effet, concernant le grief fondé sur la prétendue falsification des feuilles de route, la SAM A. a employé les formules suivantes : « fraude intentionnelle organisée et récurrente (...) vous avez continué à abuser de sa confiance pour améliorer vos revenus » ;

Que le préjudice moral causé par de tels propos à l'occasion d'un grief non fondé, a été exactement indemnisé par l'allocation d'une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la décision ;

Que la décision entreprise sera confirmée de ce chef ;

Sur les dépens

Attendu que chacune des parties, succombant partiellement en ses prétentions, conservera la charge de ses propres dépens ;

Sur les frais irrépétibles

Attendu que la SAM A. sollicite l'allocation à son profit de la somme de 15.000 euros au titre des frais par elle exposés et non compris dans les dépens ;

Qu'aux termes de l'article 238-1 1° du Code de procédure civile, le juge condamnera la partie tenue aux dépens ou qui perdra son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il déterminera, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Que dans tous les cas, le juge tiendra compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et pourra, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations ;

Qu'en l'espèce, l'équité commande de débouter l'appelante de sa demande à ce titre ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement rendu le 25 juin 2020 par le Tribunal du travail en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné la SAM A. à payer à a. B. la somme de 371,74 euros à titre de rappel de prime de repas décalé, outre celle de 37,17 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2016, date de la convocation devant le Bureau de conciliation et exécution provisoire,

L'infirme de ce chef et statuant à nouveau,

Déboute a. B. de sa demande de paiement à titre de rappel de l'allocation représentative de frais pour repas décalé et de congés payés afférents,

Laisse à la charge de chacune des parties les dépens d'appel par elle engagés,

Déboute la SAM A. de sa demande fondée sur l'article 238-1 du Code de procédure civile,

Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, et qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement,

Composition

Ainsi jugé et rendu au Palais de Justice, à Monaco, le 21 MARS 2023, par Madame Claire GHERA, Conseiller, faisant fonction de Président, Madame s. LEFEBVRE, Conseiller, Monsieur s. BIANCHERI, Conseiller, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint, en présence de Monsieur Morgan RAYMOND, Procureur Général Adjoint.

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Synthèse
Numéro d'arrêt : 21025
Date de la décision : 21/03/2023

Analyses

L'usage applicable dans l'entreprise en vertu d'un engagement unilatéral est par nature supplétif de la volonté des parties et peut être mis à néant par un accord collectif. Toutefois, quelle que soit la qualification donnée au courrier du 1er septembre 1976 (engagement unilatéral, accord typique), il est constant que ses dispositions ont continué à être appliquées dans l'entreprise, nonobstant la signature de la Convention collective en 1989 et de l'Accord-cadre français en 1998. Ce consensus au sein de la société pour maintenir et laisser perdurer les termes de cet accord, est confirmé par les courriers adressés à la direction de la A. par les délégués du personnel les 29 décembre 2014 et 16 janvier 2015, demandant d'associer à la restructuration du réseau, le paiement de la prime de repas décalé, démontrant a contrario que les parties n'avaient pas souhaité jusqu'alors remettre en cause son absence de versement. L'usage constant découlant de l'engagement souscrit en 1976 a pris fin le 21 décembre 2018. Il s'ensuit que a. B. dont le licenciement est intervenu antérieurement à cette date, ne peut valablement prétendre au paiement de l'allocation représentative de frais pour repas décalé et de congés payés afférents.Il appartient à l'employeur d'établir la réalité et la validité des motifs invoqués à l'appui de sa décision de licenciement. Il est de droit constant que la lettre de licenciement ne fixe pas les limites du litige, l'employeur pouvant invoquer devant les juridictions d'autres griefs ayant sous-tendu sa décision de rupture et ne se trouvant pas lié par les motifs expressément notifiés. Enfin, le contrat de travail induit un lien de subordination au titre duquel le salarié est tenu de respecter les directives et instructions de son employeur. En l'espèce, les premiers juges en ont à bon droit déduit que les agissements de a.B. à cet égard, qui a écourté son itinéraire en contravention aux instructions de son employeur, caractérisent un comportement fautif, justifiant une sanction disciplinaire. Les premiers juges ont à bon droit rappelé à cet égard qu'aux termes d'une directive européenne, le temps de travail se définit comme « toute période durant laquelle le travailleur est au travail, à la disposition de l'employeur, et dans l'exercice de son activité ou de ses fonctions, conformément aux législations et/ou pratiques nationales ». À ce titre, tout le temps passé par le salarié dans les locaux de l'entreprise, dans le cadre de ses obligations professionnelles, doit être considéré comme du temps de travail effectif. Doivent ainsi être pris en compte les temps que consacre le salarié à des tâches accessoires à son travail. Il s'évince de l'ensemble des faits de l'espèce que si le grief tiré de la falsification des feuilles de route n'est pas établi, celui inhérent à ses services écourtés est en revanche parfaitement justifié, dans un contexte avéré de manquements professionnels préalables.Aux termes de l'article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, toute rupture abusive du contrat de travail peut donner lieu à des dommages et intérêts. Il appartient dans ce cas au salarié, auquel incombe la charge de la preuve, de démontrer, outre le préjudice subi, l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ou dans la précipitation, la brutalité ou la légèreté blâmable avec laquelle le congédiement a été donné. Un motif fallacieux suppose que le motif avancé par l'employeur ne soit pas le motif réel, conjugué à une volonté de tromper ou de nuire au salarié concerné. Les premiers juges ont dès lors à bon droit considéré que la décision de rupture ne reposait pas sur un motif fallacieux et ne présentait pas en elle-même un caractère fautif, ouvrant droit à l'indemnisation d'un préjudice matériel et financier. Quand bien même le licenciement est fondé, comme en l'espèce, sur un motif valable, il peut encore s'avérer abusif s'il est établi que l'employeur a méconnu les prescriptions légales dans la mise en œuvre de la rupture ou si les modalités de sa notification présentent un caractère fautif, révèlent une intention de nuire, la précipitation ou la légèreté blâmable de l'employeur. En définitive, la Cour considère, à l'instar des premiers juges, qu'aucun abus de l'employeur dans la mise en œuvre de la rupture (précipitation, brutalité ou légèreté blâmable avec laquelle le congédiement a été donné) n'a lieu d'être retenu. Enfin, la situation de l'intimé postérieurement au licenciement et le litige né entre les parties dans le cadre du règlement des indemnités chômage ne sont pas de nature à justifier du caractère abusif du licenciement. En revanche, le Tribunal a pu à juste titre retenir le caractère vexatoire des propos contenus dans la lettre de licenciement adressée au salarié. Le préjudice moral causé par ces propos à l'occasion d'un grief non fondé, a été exactement indemnisé par l'allocation d'une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la décision.

Contrats de travail  - Rupture du contrat de travail.

Contrat de travail - Rappel de salaire - Usage - Durée - Rupture - Motif valable (oui) - Licenciement - Caractère abusif (oui).


Parties
Demandeurs : A.
Défendeurs : Monsieur a. B.

Références :

article 238-1 1° du Code de procédure civile
article 238-1 du Code de procédure civile
article 11 de la loi n°739 du 16 mars 1963
articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013
article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2023-03-21;21025 ?

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