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22/02/2022 | MONACO | N°20359

Monaco | Cour d'appel, 22 février 2022, BNP Paribas c/ Madame e. V. veuve C.


Motifs

LA COUR,

En la cause de :

- La Société dénommée « BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED », société à responsabilité limitée de droit de Jersey, immatriculée au Registre des Sociétés de Jersey sous le numéro 17296, dont le siège est situé à IFC1, The Esplanade, St Helier, Jersey JE1 5BP, agissant poursuites et diligences de ses administrateurs, domiciliés en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Géraldine GAZO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défens

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APPELANTE, d'une part,

contre :

- Madame e. V. veuve C., née le 23 octobre 1940 à Trieste (I...

Motifs

LA COUR,

En la cause de :

- La Société dénommée « BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED », société à responsabilité limitée de droit de Jersey, immatriculée au Registre des Sociétés de Jersey sous le numéro 17296, dont le siège est situé à IFC1, The Esplanade, St Helier, Jersey JE1 5BP, agissant poursuites et diligences de ses administrateurs, domiciliés en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Géraldine GAZO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANTE, d'une part,

contre :

- Madame e. V. veuve C., née le 23 octobre 1940 à Trieste (Italie), de nationalité monégasque, demeurant à 98000 Monaco ;

Ayant primitivement élu domicile en l'Étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, puis en celle de Maître Christophe BALLERIO, avocat-défenseur en cette même Cour, et plaidant par Maître Nathalie MAKOWSKI, avocat au Barreau de Paris ;

INTIMÉE,

EN PRÉSENCE DE :

- Madame le Procureur Général près la Cour d'appel de la Principauté de Monaco, en son Parquet, 5 rue Colonel Bellando de Castro à Monaco-Ville ;

COMPARAISSANT EN PERSONNE, d'autre part,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 17 octobre 2019 (R. 311) ;

Vu l'exploit d'appel parte in qua et d'assignation du ministère de Maître Frédéric LEFEVRE, huissier, en date du 17 janvier 2020 (enrôlé sous le numéro 2020/000083) ;

Vu les conclusions déposées le 14 juillet 2020 par Maître Thomas GIACCARDI, alors avocat-défenseur, au nom de Madame e. V. veuve C. puis celles déposées les 1er mars 2021, 25 mai 2021, 4 juin 2021 et 30 septembre 2021 par Maître Christophe BALLERIO, avocat-défenseur au nom de cette même partie ;

Vu les conclusions déposées le 2 octobre 2020 par le ministère public ;

Vu les conclusions déposées les 17 novembre 2020, 19 avril 2021, 2 juin 2021 et 28 juillet 2021 par Maître Géraldine GAZO, avocat-défenseur, au nom de la société dénommée « BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED » ;

À l'audience du 23 novembre 2021,

ouï les conseils des parties en leurs plaidoiries ;

Ouï le Ministère public ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel parte in qua relevé par la société dénommée « BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED » à l'encontre d'un jugement du Tribunal de première instance du 17 octobre 2019.

Considérant les faits suivants :

Courant 1987, e. V. veuve C. a constitué un trust dénommé GRAND TRUST, soumis à la loi des Bahamas, ayant pour bénéficiaires la société FONDATION C.C. constituée pour la circonstance et ses deux filles mineures c. et c. ainsi que leurs descendances.

e. C. a été désignée co-trustee aux côtés de Monsieur C. et la société BANKAMERICA TRUST AND BANKING CORPORATION.

En 1999, p. F. et la BANQUE PARIBAS INTERNATIONAL TRUSTEE soumise aux lois de Guernesey, ont été nommés co-trustees au côté d'e. C.

En 2007, la BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION Ltd (ci-après dénommée BNP JERSEY) a été désignée en qualité de trustee aux lieu et place de la BNP Guernesey, le droit applicable devenant alors celui de Jersey.

En 2010, la totalité des fonds du GRAND TRUST, à l'exception d'un billet à ordre émis par la société de droit néerlandais CROCI INTERNATIONAL BV, appartenant à CROCI INTERNATIONAL NV constituée aux Antilles néerlandaises dont le bénéficiaire était e. C. a été transféré par les trois trustees, e. C. p. F. et la BNP JERSEY, à e. C. et la BNP JERSEY, trustees du FORTUNATE TRUST, créé par e. C. afin d'accueillir des œuvres d'art, dont elle était seule bénéficiaire des revenus et du capital de son vivant, avec le pouvoir de révoquer le trust et d'en retirer l'intégralité du capital.

En 2011, les relations entre c. C. d'une part et sa mère et sa sœur c. d'autre part, ont été rompues.

La même année, e. C. a révoqué le FORTUNATE TRUST et retiré tous ses actifs, comprenant notamment ceux du GRAND TRUST transférés en 2010.

En 2012, e. C. p. F. et la BNP JERSEY ont démissionné de leurs fonctions de trustees du GRAND TRUST et nommé APPLEBY TRUST MAURITIUS LTD, en modifiant le droit applicable en faveur du droit mauricien et en cédant le billet à ordre appartenant à CROCI INTERNATIONAL BV.

La même année, e. C. p. F. la BNP JERSEY et APPLEBY TRUST MAURITIUS LTD ont conclu un acte de transfert dit « transfert Agate », par lequel ils attribuaient à APPLEBY MAURITIUS et p. F. en tant que trustees de l'Agate Trust, le droit des trustees du GRAND TRUST de récupérer les actifs aliénés par le transfert de 2010, si ce transfert était déclaré nul.

En 2016, APPLEBY MAURITIUS a démissionné de sa fonction de trustee du GRAND TRUST en nommant à sa place GFIN CORPORATE SERVICES LTD, une autre société de services financiers basée à L'Ile Maurice, à qui elle a cédé le billet à ordre, et dont les conditions de remboursement ont été modifiées.

En 2013, c. C. épouse D. et ses deux filles mineures d. et l. ont engagé une procédure devant la Cour royale de Jersey à l'encontre d'e. C. p. F. la BNP JERSEY et APPLEBY MAURITIUS.

c. C. épouse DE B. DES DEUX SICILES, la FONDATION C.C.IBC BAHAMAS LTD, BNP PARIBAS JERSEY NOMINEE COMPANY et GFIN CORPORATE SERVICES LTD ont été attraits en qualité de défendeurs à la procédure.

Par jugement et ordonnance rendus le 11 septembre 2017, la Cour royale de Jersey, accueillant les demandes de c. C. et de ses deux filles, a notamment ordonné :

- que BNP JERSEY et e. V. veuve C. soient tenues solidairement responsables de verser une indemnisation à c. relative au transfert d'actions de Crica vers le FORTUNATE TRUST,

- des expertises afin de déterminer la valeur des actifs détenus auparavant par le GRAND TRUST afin qu'e. V. veuve C. et BNP JERSEY versent tout complément d'indemnisation sur la base des évaluations réalisées,

- que BNP JERSEY et e. V. veuve C. paient solidairement au nouveau trustee du GRAND TRUST (OCORIAN TRUSTEES (Jersey) LIMITED) :

* dans un délai de 28 jours, la somme de 100 347 046 USD, correspondant à la valeur du compte n° 1401551 de BNP Genève du GRAND TRUST à la date à laquelle il a été transféré au FORTUNATE TRUST,

* dans le même délai tout montant dû après réalisation des enquêtes au titre de la revalorisation des actifs du GRAND TRUST,

- que BNP JERSEY, et e. V. veuve C. et APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED paient conjointement et solidairement à c. C. et ses deux filles un acompte fixé à 50 % de leur frais dans la procédure, représentant une somme de 2 884 437,83 £, dans un délai de 28 jours à partir de la date de la décision,

- que e. V. veuve C. indemnise BNP JERSEY au titre de l'ensemble des sommes versées par cette dernière conformément à la décision et pour les frais de justice, d'experts et de professionnels engagés lors de la procédure.

La société BNP JERSEY, c. C. et la société APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED ont interjeté appel à l'encontre de certaines dispositions des décisions précitées.

Suivant exploit délivré le 31 janvier 2018, la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED, filiale du groupe BNP PARIBAS installée sur l'Ile de Jersey, a assigné e. V. veuve C. aux fins d'obtenir l'exequatur des points 21a, 27 et 33 de l'ordonnance rendue le 11 septembre 2017 par la Cour royale de Jersey.

Par jugement contradictoire rendu le 17 octobre 2019, le Tribunal de première instance a :

- rejeté l'exception de sursis à statuer formée par e. V. veuve C.

- déclaré irrecevable la demande d'exequatur formée par la BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED et par conséquent l'a rejetée,

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la décision,

- condamné la BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED aux dépens, distraits au profit de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont retenu en substance que :

- e. V. veuve C. qui a déposé une plainte avec constitution de partie civile le 2 novembre 2018, n'a présenté sa demande de sursis à statuer que dans ses conclusions du 15 avril 2019 et non dans celles précédemment déposées le 9 février 219 alors que pareille exception devait être formulée avant toute défense au fond,

- dès lors que la BNP JERSEY n'a d'intérêt à solliciter que l'exequatur des dispositions qui vont servir de fondement à des mesures d'exécution forcée, elle peut valablement cantonner sa demande d'exequatur à l'ordonnance du 11 septembre 2017 rendue par la Cour royale de Jersey qui contient seule les condamnations,

- si une demande d'exequatur partiel d'une décision étrangère est recevable dès lors qu'elle porte sur des chefs de décision dissociables et divisibles, l'exequatur partiel réductif est par contre interdit en raison de la prohibition de la révision au fond de la décision en cause,

- la formulation de la demande d'exequatur de la BNP JERSEY conduit à une révision de l'ordonnance du 11 septembre 2017 en vue de tirer les conséquences des arrêts des 25 juillet 2018 et 7 août 2018 rendus par la Cour d'appel de Jersey, en ce qu'ils ont limité l'obligation à la dette de la BNP JERSEY et par suite l'obligation d'indemnisation d'e. V. veuve C. à son égard,

- cette préoccupation ne saurait rendre valable la demande d'exequatur partiel de la BNP JERSEY, les juridictions monégasques ne pouvant modifier de quelque manière que ce soit des éléments du dispositif de l'ordonnance du 11 septembre 2017 rendue par la Cour royale de Jersey,

- la demande d'exécution provisoire est sans objet au regard de la teneur de la décision.

Par exploit délivré le 17 janvier 2020, la société à responsabilité limitée de droit de Jersey dénommée BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED, ci-après BNP JERSEY, a interjeté appel parte in qua à l'encontre du jugement rendu le 17 octobre 2019 par le Tribunal de première instance.

Aux termes de son assignation et de conclusions en date des 17 novembre 2020, 19 avril 2021 et 28 juillet 2021, la société BNP JERSEY demande à la Cour de :

- l'accueillir en son appel parte in qu'a, l'y déclarer recevable et bien fondée,

- réformer le jugement rendu en ce qu'il a :

* déclaré irrecevable sa demande d'exequatur et l'a rejetée,

* condamné BNP JERSEY aux dépens, distraits au profit de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

* ordonné que les dépens seront provisoirement liquidés par le greffier en chef au vu du tarif applicable,

Et statuant à nouveau,

À titre principal,

- la déclarer recevable et bien fondée en sa demande tendant à voir déclarer exécutoires à Monaco les condamnations issues des points 21(a), 27 et 33 de l'ordonnance du 11 septembre 2017 de la Cour royale de Jersey, reproduits ci-après :

- 21. « Ordonne que les Premier e. V. veuve C. et Troisième défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) paient, conjointement et solidairement, au Nouvel Administrateur :

Dans un délai de 28 jours, la somme de 100 347 046 USD, étant la valeur du compte n° 1401551 de BNP Genève, à la date à laquelle il a été transféré au Fortunate Trust »,

- 27. « Ordonne que le Premier Défendeur e. V. veuve C. indemnise le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) pour toutes sommes payées par lui pour respecter les paragraphes 21, 26, 32 et 33 de la présente Ordonnance à l'égard des dépenses juridiques, professionnelles et d'expert engagées par le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) pour se défendre dans la présente ordonnance et afin d'avoir le droit d'être indemnisé »,

- 33. « Sur acceptation des Troisième (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) et Quatrième Défendeurs de payer les frais du Plaignant sur une base standard et sur décision du Commissaire d'accorder le paiement des frais du Plaignant par le Premier Défendeur e. V. veuve C. sur au moins cette base, ordonne que le Premier e. V. veuve C., Troisième et Quatrième Défendeurs paient au Plaignant, conjointement et solidairement, un acompte représentant 50 % des frais du Plaignant dans la présente procédure calculé sur une base standard, à savoir un paiement aux Plaignants d'un montant de 2 884 437,83 £, et ce dans un délai de 28 jours à partir de la date de la présente décision. Les Troisième (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) et Quatrième Défendeurs ont accepté (tout en réservant leurs droits de chercher la contribution des Premier e. V. veuve C., Cinquième, Sixième et Huitième Défendeurs) de répartir cet acompte entre eux dans un ratio de soixante-quinze pour cent (75 %) et vingt-cinq pour cent (25 %), le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) payant la somme de 2 163 328,37 £ et le Quatrième Défendeur payant la somme de 721 109,46 £ dans un délai de vingt-huit jours à partir de la date ci-dessous »,

avec toutes conséquences de droit à savoir :

- la condamnation conjointe et solidaire de la société « BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED » et e. V. veuve C. en qualité de trustees du GRAND TRUST, à reconstituer les avoirs du GRAND TRUST revenant à c. C. à hauteur de 50 173 523 USD, issue du point 21(a) de l'ordonnance en date du 11 septembre 2017 et ne faisant pas l'objet des appels par BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED, c. C. ou encore APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED,

- la condamnation conjointe et solidaire de la société « BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED », e. V. veuve C. et APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED à payer à c. C. un acompte de 50 % des frais engagés par elle dans le cadre de la procédure judiciaire à Jersey, soit la somme de 2 884 437,83 £, la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED et APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED ayant accepté par ailleurs de répartir cet acompte entre eux comme suit : 75 % à la charge de la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED (2 163 328,37 £) et 25 % à la charge de APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED (721 109,46 £), issue du point 33 de l'ordonnance en date du 11 septembre 2017 et ne faisant pas l'objet des appels par BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED, c. C. ou encore APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED,

- la condamnation d'e. V. veuve C. à rembourser à la société « BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED » toutes sommes qui seraient versées par elle au titre des décisions susvisées ainsi qu'à l'égard des dépenses juridiques, professionnelles et d'expert engagées par la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED pour se défendre dans la procédure pendante devant les tribunaux de Jersey et obtenir exécution par e. V. veuve C. des décisions rendues à son encontre, issue du point 27 de l'ordonnance en date du 11 septembre 2017 et ne faisant pas l'objet des appels par BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED, c. C. ou encore APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED,

Subsidiairement,

- la déclarer recevable et bien fondée en sa demande tendant à voir déclarer exécutoires à Monaco les condamnations issues des points 21(a), 27 et 33 de l'ordonnance du 11 septembre 2017 de la Cour royale de Jersey, reproduites ci-dessous :

- 21. « Ordonne que les Premier e. V. veuve C.) et Troisième défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) paient, conjointement et solidairement, au Nouvel Administrateur :

a. Dans un délai de 28 jours, la somme de 100 347 046 USD, étant la valeur du compte n° 1401551 de BNP Genève, à la date à laquelle il a été transféré au Fortunate Trust »,

- 27. « Ordonne que le Premier Défendeur e. V. veuve C. indemnise le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) pour toutes sommes payées par lui pour respecter les paragraphes 21, 26, 32 et 33 de la présente Ordonnance à l'égard des dépenses juridiques, professionnelles et d'expert engagées par le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) pour se défendre dans la présente ordonnance et afin d'avoir le droit d'être indemnisé »,

- 33. « Sur acceptation des Troisième (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) et Quatrième Défendeurs de payer les frais du Plaignant sur une base standard et sur décision du Commissaire d'accorder le paiement des frais du Plaignant par le Premier Défendeur e. V. veuve C. sur au moins cette base, ordonne que le Premier e. V. veuve C., Troisième et Quatrième Défendeurs paient au Plaignant, conjointement et solidairement, un acompte représentant 50 % des frais du Plaignant dans la présente procédure calculé sur une base standard, à savoir un paiement aux Plaignants d'un montant de 2 884 437,83 £, et ce dans un délai de 28 jours à partir de la date de la présente décision. Les Troisième (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) et Quatrième Défendeurs ont accepté (tout en réservant leurs droits de chercher la contribution des Premier e. V. veuve C., Cinquième, Sixième et Huitième Défendeurs) de répartir cet acompte entre eux dans un ratio de soixante-quinze pour cent (75 %) et vingt-cinq pour cent (25 %), le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) payant la somme de 2 163 328,37 £ et le Quatrième Défendeur payant la somme de 721 109,46 £ dans un délai de vingt-huit jours à partir de la date ci-dessous »,

À titre infiniment subsidiaire,

- la déclarer recevable et bien fondée en sa demande tendant à voir déclarer exécutoire à Monaco la condamnation issue du point 27 de l'ordonnance du 11 septembre 2017 de la Cour royale de Jersey, ci-dessous reproduite :

- « Ordonne que le Premier Défendeur e. V. veuve C. indemnise le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) pour toutes sommes payées par lui pour respecter les paragraphes 21, 26, 32 et 33 de la présente Ordonnance à l'égard des dépenses juridiques, professionnelles et d'expert engagées par le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) pour se défendre dans la présente ordonnance et afin d'avoir le droit d'être indemnisé »,

En tout état de cause,

- débouter e. V. veuve C. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, notamment de son appel incident,

- condamner e. V. veuve C. aux entiers dépens, en ce compris ceux de première instance dont distraction au profit de Maître Géraldine GAZO, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Après avoir procédé à un rappel factuel et procédural exhaustif de la situation opposant les parties, elle fait valoir en soutien de la recevabilité de sa demande d'exequatur que :

- sa demande d'exequatur ne constitue pas une révision de la décision étrangère, dès lors qu'elle n'a pas sollicité de modification du dispositif de la décision invoquée tant sur le quantum des condamnations que concernant son bénéficiaire,

- la demande telle que présentée visait uniquement à permettre, par souci de clarté et de loyauté envers le Tribunal, d'avoir une parfaite compréhension des conséquences des décisions rendues,

- elle se bornait à faire état de certaines conséquences incontestables issues des décisions de la Cour d'appel de Jersey et visait à éviter toute conséquence injuste pour e. V. veuve C. qui n'était pas partie à ces procédures d'appel,

- contrairement à ce qui a été retenu par les premiers juges, elle ne demande pas l'exequatur moyennant la modification de la condamnation prononcée à l'étranger puisque les chefs du jugement dont elle sollicite l'exequatur sont définitifs, exécutoires et dissociables des autres chefs de jugement,

- la jurisprudence en la matière et l'avis de droit du Professeur SERAGLINI, viennent confirmer qu'un exequatur partiel est possible au cas d'espèce, comme l'a d'ailleurs admis la Cour d'appel de Milan par arrêt rendu le 28 janvier 2019, dans une instance similaire,

- sa demande subsidiaire ne constitue pas une demande nouvelle dès lors qu'elle se contente de retrancher de ses demandes certaines de celles formées en première instance, en y renonçant.

Elle affirme ensuite le bien-fondé de sa demande d'exequatur, dont les conditions requises sont remplies, prétendant avoir intérêt à solliciter l'exequatur de condamnations définitives et exécutoires, à l'égard desquelles il n'existe aucun motif de refus d'y voir procéder au sens de l'article 15 du Code de droit international privé et alors que les pièces nécessaires à cet égard ont été produites.

Elle conteste toute violation aux droits de la défense qui porterait atteinte au respect de l'Ordre public monégasque de procédure, avançant que :

- e. V. veuve C. est malvenue à s'en prévaloir dès lors que son défaut de comparution aux audiences finales lui est seule imputable et soulignant qu'elle n'a pas interjeté appel à l'encontre du jugement et de l'ordonnance du 11 septembre 2017,

- les droits de la défense de l'appelante ont été en l'espèce respectés, dès lors que toutes les pièces présentées par les parties ont été examinées, que la Cour royale a rendu une décision particulièrement motivée tant en fait qu'en droit à l'issue d'un procès qui a duré plus de trois mois et que le jugement et l'ordonnance en cause n'ont pas été rendus par défaut.

Elle fait observer que les juridictions italiennes lui ont accordé l'exequatur et que la Cour d'appel de Milan a considéré, dans son ordonnance du 1er février 2019, que le droit à un procès équitable d'e. V. veuve C. avait été respecté par la Cour royale de Jersey et qu'aucune violation de l'article 6 n'avait été commise à son préjudice.

Elle s'appuie également sur le jugement d'exequatur rendu à son bénéfice par le Tribunal de grande instance de Paris le 12 novembre 2018 retenant l'absence de violation des droits de cette dernière, dont il précise que l'arrêt infirmatif est soumis à la censure de la Cour de cassation suivant pourvoi introduit le 16 mars 2021.

Elle conteste les allégations de l'appelante selon laquelle ses demandes reconventionnelles n'auraient pas été examinées par la Cour royale de Jersey, affirmant au contraire qu'elles ont donné lieu à un examen effectif, comme le confirment les paragraphes 46, 47 et 823 à 825 du Jugement rendu.

Elle affirme enfin que les condamnations issues des points 21(a), 27 et 33 de l'ordonnance du 11 septembre 2017 ne contiennent rien de contraire à l'ordre public de fond, ce que ne conteste pas la partie adverse.

Elle fait état de la production de l'ensemble des pièces requises par l'article 18 du Code de droit international privé pour soutenir sa demande d'exequatur.

Concernant le caractère exécutoire de la décision, elle réfute les prétentions adverses, soutenant qu'il lui est possible de rendre exécutoire les chefs de la décision du 11 septembre 2017 dont elle demande l'exequatur sans rendre exécutoires les décisions rendues les 25 juillet et 7 août 2018 par la Cour d'appel de Jersey, puisque ces dernières décisions ont statué sur des appels ne portant pas sur les mêmes chefs que ceux visés par l'exequatur.

Elle prétend que le recours exercé contre l'arrêt d'appel du 25 juillet 2018 par les deux filles de c. C. n'impacte aucunement la présente procédure puisqu'il concerne le trust de c. alors que la présente procédure d'exequatur n'est relative qu'au trust de c.

Elle soutient l'irrecevabilité de l'appel incident aux fins de sursis à statuer présenté par l'intimée en reprenant à son compte les motifs retenus par les premiers juges, affirmant par ailleurs le caractère inopérant de la jurisprudence produite par celle-ci, s'agissant d'instances dans lesquelles l'irrecevabilité de la demande de sursis à statuer n'avait pas été soulevée par la partie adverse.

Elle invoque également le caractère mal fondé d'une telle demande de sursis à statuer, énonçant que les dispositions de l'article 3 alinéa 2 du Code de procédure pénale ne revêtent aucun caractère obligatoire mais constituent une simple faculté et qu'un dépôt de plainte ne saurait automatiquement faire échec ou retarder l'issue d'une action civile, tout en relevant la parfaite mauvaise foi et l'intention dilatoire déployées par l'intimée dans son exception de sursis à statuer.

Par conclusions datées du 2 octobre 2020, Madame le Procureur Général demande à la Cour de déclarer l'appel recevable, de rejeter la demande de sursis à statuer, de déclarer irrecevable la demande d'exequatur et de confirmer le jugement déféré, relevant que la plainte avec constitution de partie civile d'e. V. veuve C. a été opportunément déposée après l'assignation aux fins d'exequatur, sans faire valoir cet argument dans ses premières conclusions et reprenant pour le surplus à son compte les arguments développés par les premiers juges s'agissant de l'irrecevabilité de la demande d'exequatur.

Par écritures en réponse datées des 14 juillet 2020, 1er mars 2021, 25 mai 2021 et 30 septembre 2021, portant appel incident, e. V. veuve C. demande pour sa part à la Cour de :

À titre principal,

Au visa des articles 13 et suivants de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 relative au Droit international privé,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu en première instance le 17 octobre 2019 avec toutes conséquences de droit,

- déclarer BNP JERSEY irrecevable en ses demandes subsidiaires d'exequatur modifiées, de surcroît nouvelles,

- débouter en tout état de cause BNP JERSEY de ses demandes, fins et prétentions, plus amples ou contraires,

À titre subsidiaire,

Au visa de la règle suivant laquelle « le pénal tient le civil en l »état «,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de sursis à statuer et statuant à nouveau,

- juger que l'issue de la plainte avec constitution de partie civile par elle déposée le 2 novembre 2018 a nécessairement un impact sur la présente cause aux fins d'exequatur et demeure de nature à influer sur l'issue de la présente instance,

- ordonner en conséquence un sursis à statuer sur l'intégralité des prétentions respectives des parties dans l'attente de voir intervenir une décision définitive sur l'action publique mise en mouvement par la plainte avec constitution de partie civile par elle déposée le 2 novembre 2018,

À titre plus subsidiaire,

Au visa de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des articles 13 et suivants de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 relative au Droit international privé,

- juger que les certificats produits par BNP JERSEY ne permettent pas d'établir le caractère exécutoire de l'ordonnance du 11 septembre 2017 indépendamment des décisions d'appel postérieures qui l'ont révisée,

- juger que BNP JERSEY ne peut valablement solliciter l'exequatur d'une partie seulement du dispositif de l'ordonnance du 11 septembre 2017, laquelle a de surcroît été modifiée par les décisions rendues par la Cour d'appel de Jersey,

- juger que le jugement rendu le 11 septembre 2017 par la Cour royale de Jersey, Samedi Division et l'Ordonnance de la Cour datée du même jour, portent en tout état de cause atteinte à l'Ordre Public international monégasque de procédure,

- débouter en conséquence BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions, plus amples ou contraires,

- juger et déclarer que le jugement rendu le 11 septembre 2017 par la Cour royale de Jersey, Samedi Division et l'Ordonnance de la Cour datée du même jour ne sont ni reconnus ni déclarés exécutoires en Principauté de Monaco,

En tout état de cause,

- condamner BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître BALLERIO, avocat-défenseur sous sa due affirmation.

S'agissant des demandes principales adverses, elle fait valoir pour l'essentiel que :

- BNP JERSEY ne peut justifier sa demande d'exequatur limité à » la condamnation concernant le Trust de c. qu'elle a exécutée et qui est dissociable de la partie du jugement de Jersey concernant le Trust de c. « dès lors que l'ordonnance rendue le 11 septembre 2017 ne distingue pas le Trust de c. de celui de c.

- la banque ne peut prétendre que le paragraphe 21(a) seulement » été mis à jour pour tenir compte du fait que la reconstitution du Grand Trust ne portait que sur 50 % de ce dernier «,

- BNP JERSEY sollicite, sous couvert d'une dissociation entre les sommes revenant à c. et celle dévolues à c. une révision au fond de l'ordonnance du 11 juin 2017,

- la Cour de céans ne peut modifier le point 21(a) de l'ordonnance ni réduire ou cantonner le quantum des condamnations qui y figurent en application du principe de non révision des jugements étrangers,

- les points 21(a), 27 et 33 de l'ordonnance précitée n'existent plus dans l'ordre juridique de Jersey pour avoir été modifiés par l'ordonnance du 7 août 2018 rendue par la Cour d'appel de Jersey,

- le Professeur D'AVOUT confirme que la demande d'exequatur de ces dispositions est irrecevable, en l'état des modifications intervenues,

- BNP JERSEY n'a que partiellement exécuté la condamnation issue du point 21 (a) de l'ordonnance du 11 septembre 2017 en s'acquittant de la somme de 50 173 523 USD et de celle de 2 163 328,37 £ correspondant, selon elle, » aux parties définitives et exécutoires du jugement et de la première ordonnance en date du 11 septembre 2017 «,

- l'appel interjeté par BNP JERSEY à l'encontre de l'ordonnance du 11 septembre 2017 visait précisément à limiter l'obligation de reconstitution au seul Trust de c. de sorte qu'elle estimait que sa condamnation à ce titre pouvait donner lieu à exequatur ce qui expliquait qu'elle ait limité sa demande au titre du point 21(a) à la somme de 50 173 523 USD, en anticipant le résultat de son appel,

- l'ordonnance du 11 septembre 2017 ayant modifié le quantum des condamnations prononcées, son exequatur ne peut plus être poursuivi sans solliciter désormais celui des trois ordonnances rendues par la Cour d'appel de Jersey,

- le juge de l'exequatur ne peut modifier les éléments du dispositif de la décision étrangère qui lui est soumise, quand bien même il ne s'agirait que de tenir compte de l'impact de la décision d'appel rendue par la juridiction étrangère compétente,

- BNP JERSEY a assigné prématurément aux fins d'exequatur de l'ordonnance du 11 septembre 2017 en sollicitant sa modification pour tenir compte de son appel en cours et s'est entêtée à poursuivre la procédure malgré les décisions postérieures qui l'ont réformée, et dont elle ne sollicite finalement pas l'exequatur,

- l'appelante ne peut valablement se prévaloir de la décision intervenue devant le Tribunal de grande instance de Paris le 12 décembre 2018, en l'état de sa réformation ultérieure par la Cour d'appel de Paris suivant arrêt du 2 février 2021,

- BNP JERSEY ne poursuit pas l'exequatur des points 21(a), 27 et 33 de l'ordonnance du 11 septembre 2017 mais celle des condamnations qui en résulteraient,

- l'office du juge ne lui permet pas de modifier les demandes d'une partie, sous peine de statuer infra ou ultra petita,

- le Professeur D'AVOUT confirme que l'exequatur des points 21(a), 27 et 33 de l'ordonnance du 11 septembre 2017 est irrecevable, dès lors que la division d'un même chef de condamnation monétaire est contraire à la jurisprudence française et que le juge de l'exequatur ne peut remodeler un chef de la décision étrangère,

- la consultation adverse menée par le Professeur SERAGLINI se contente de critiquer l'approche prétendument trop formaliste du Professeur D'AVOUT,

- le Professeur SERAGLINI persiste à affirmer à tort que les points 21(a), 27 et 33 de l'ordonnance du 11 septembre 2017 sont dissociables et divisibles alors qu'aucune distinction n'est opérée dans le dispositif entre le fonds de c.et celui de c.

- la modification de l'ordonnance initiale par l'ordonnance d'appel loin d'être mineure, se révèle substantielle,

- la stratégie de BNP JERSEY de maintenir sa demande d'exequatur de l'ordonnance de 2017 sans y adjoindre la décision d'appel suscite l'incompréhension,

S'agissant des demandes subsidiaires, elle prétend que :

- si l'action initialement introduite par BNP JERSEY est de nouveau jugée irrecevable, la Cour n'est plus alors en mesure de faire droit, même partiellement, à la nouvelle prétention soutenue,

- cette prétention s'analyse en tout état de cause comme une demande nouvelle prohibée par l'article 431 du Code de procédure civile, et non pas comme un moyen nouveau,

- la demande d'exequatur est irrecevable pour porter sur une décision qui n'existe plus dans l'ordre juridique de l'État où elle a été rendue,

S'agissant de la demande infiniment subsidiaire, elle avance que la demande portant sur l'exequatur du seul point 27 est irrecevable car ce point n'est pas dissociable et détachable des points 21 et 33 de l'ordonnance.

Pour soutenir sa demande incidente de sursis à statuer, elle explique que sa plainte avec constitution de partie civile déposée le 2 novembre 2018, à l'origine de l'ouverture d'une information le 27 novembre suivant, vise notamment des faits d'escroquerie au jugement portant sur les circonstances dans lesquelles les décisions judiciaires de Jersey du 11 septembres 2017 dont BNP JERSEY poursuit l'exequatur, ont été obtenues, et nommément BNP JERSEY, ce qui caractérise un lien incontestable entre les deux instances,

Elle ajoute que la condamnation de BNP JERSEY pour tout ou partie des faits qui lui sont reprochés rendrait les décisions rendues par les juridictions de Jersey contraire à l'Ordre public monégasque et par voie de conséquence insusceptible de reconnaissance ou d'exécution en Principauté.

Elle affirme enfin que les dispositions de l'article 3 du Code de procédure pénale selon lesquelles » le criminel tient le civil en l'état « n'imposent pas que cette exception de procédure soit invoquée in limine litis.

Pour s'opposer à titre subsidiaire à la demande d'exequatur, elle fait valoir en premier lieu l'absence de production d'un certificat valable attestant que le jugement dont l'exequatur est sollicité est exécutoire, dès lors que :

- d'une part, le premier certificat daté du 12 octobre 2017 a été délivré antérieurement aux décisions d'appel qui ont révisé l'ordonnance du 11 septembre 2017,

- d'autre part, le second certificat daté du 22 février 2018, également établi avant les décisions de la Cour d'appel, opère une distinction à l'égard de la condamnation que l'ordonnance du 11 septembre 2017 elle-même ne fait pas,

- enfin, le certificat de non-recours délivré le 17 octobre 2018 fait référence aux quatre décisions rendues par la Cour d'appel qui doivent être lues ensemble.

Elle ajoute que, quelles que soient les interprétations données par ces certificats, ce ne sont pas ceux-ci qui peuvent être rendus exécutoires mais seulement la décision étrangère et que ces certificats ne peuvent autoriser le juge de l'exequatur à modifier le dispositif de la décision.

Elle se prévaut ensuite du recours formé par les enfants de c. C. épouse DE B. DES DEUX SICILES contre l'arrêt de la Cour d'appel du 25 juillet 2018, de nature à impacter les décisions inférieures, notamment les dispositions de l'ordonnance du 11 septembre 2017, puisque la réclamation porte sur le quantum des avoirs du GRAND TRUST que BNP JERSEY et Madame C. sont tenus de recomposer, de sorte que la preuve du caractère exécutoire des dispositions dont l'exequatur est poursuivi n'est, de plus fort, pas établie.

Elle invoque en second lieu l'atteinte du jugement étranger à l'Ordre public international procédural monégasque, faute pour les autorités judiciaires de Jersey d'avoir rendu leurs décisions dans le respect d'un exercice effectif des droits de la défense, la privant du droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la CEDH.

Elle ajoute que la sanction du rejet sans examen par la Cour de Jersey de ses demandes reconventionnelles qui lui a été infligée, pour un simple défaut de révélation de son entier patrimoine est manifestement disproportionnée.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Sur la recevabilité des appels

Attendu que les appels tant principal qu'incident respectant les règles de forme et de délai édictées par le Code de procédure civile doivent être déclarés recevables ;

Sur la demande d'exequatur

Attendu qu'en vertu de l'article 14 du Code de droit international privé, lorsqu'ils sont exécutoires dans l'État dans lequel ils sont intervenus, les jugements rendus par les tribunaux étrangers, passés en force de chose jugée, ne sont susceptibles d'exécution dans la Principauté qu'après avoir été déclarés exécutoires par le Tribunal de première instance ;

Qu'une procédure d'exequatur s'impose donc pour reconnaître force exécutoire à la décision, préalable nécessaire à la mise en œuvre de mesures d'exécution forcée sur le territoire de l'État où celui-ci a été accordé ;

Que l'article 16 du même code énonce qu'un jugement rendu par un Tribunal étranger ne peut en aucun cas faire l'objet d'une révision au fond ;

Qu'il s'en déduit que l'office du juge consiste à accorder ou refuser l'exequatur de la décision étrangère, sans jamais pouvoir la modifier, fût-ce en cas » d'adaptation «, pour faits nouveaux de la décision étrangère ;

Que le juge de l'exéquatur ne peut donc être amené à compléter la décision étrangère, ce qui conduirait à opérer des révisions au fond masquées, de nature à porter atteinte à l'intangibilité de la décision d'origine ;

Qu'il est ensuite de jurisprudence constante qu'une décision étrangère peut être reconnue partiellement dès lors que les différents chefs de la décision sont dissociables et divisibles ;

Que pour pouvoir scinder une décision et ne recevoir qu'une partie du dispositif, sans porter atteinte à l'intégrité de la décision et en déformer le sens, les chefs de dispositif de la décision en cause doivent être autonomes, se rapportant à des situations indépendantes ;

Attendu qu'en l'espèce, se prévalant de l'interdiction faite au juge de l'exequatur de modifier les éléments du dispositif de la décision étrangère qui lui est soumise, e. C. soutient l'irrecevabilité de la demande d'exequatur des points 21(a), 27 et 33 de l'ordonnance rendue le 21 septembre 2017 par la Cour royale de Jersey lesquels ont été modifiés par l'ordonnance du 7 août 2018 rendue par la Cour d'appel de Jersey ;

Que BNP JERSEY affirme pour sa part qu'elle n'a pas sollicité de modification du dispositif de la décision présente à l'exequatur, s'étant contentée, dans un souci de loyauté, de faire état de certaines conséquences issues des décisions de la Cour d'appel de Jersey, de sorte que sa demande d'exequatur qui n'emporte pas de révision de la décision étrangère, est régulière ;

Qu'au demeurant, le jugement et l'ordonnance de la Cour royale de Jersey du 11 septembre 2017 ont prononcé, selon les traductions produites aux débats, les condamnations suivantes au titre des points 21(a), 27 et 33 visés par la demande d'exequatur :

- 21. » Ordonne que les Premier e. V. veuve C.) et Troisième défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) paient, conjointement et solidairement, au Nouvel Administrateur :

c. Dans un délai de 28 jours, la somme de 100 347 046 USD, étant la valeur du compte n° 1401551 de BNP Genève, à la date à laquelle il a été transféré au Fortunate Trust «,

- 27. » Ordonne que le Premier Défendeur e. V. veuve C. indemnise le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) pour toutes sommes payées par lui pour respecter les paragraphes 21, 26, 32 et 33 de la présente Ordonnance à l'égard des dépenses juridiques, professionnelles et d'expert engagées par le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) pour se défendre dans la présente ordonnance et afin d'avoir le droit d'être indemnisé «,

- 33. » Sur acceptation des Troisième (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) et Quatrième Défendeurs de payer les frais du Plaignant sur une base standard et sur décision du Commissaire d'accorder le paiement des frais du Plaignant par le Premier Défendeur e. V. veuve C. sur au moins cette base, ordonne que le Premier e. V. veuve C., Troisième et Quatrième Défendeurs paient au Plaignant, conjointement et solidairement, un acompte représentant 50 % des frais du Plaignant dans la présente procédure calculé sur une base standard, à savoir un paiement aux Plaignants d'un montant de 2 884 437,83 £, et ce dans un délai de 28 jours à partir de la date de la présente décision. Les Troisième (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) et Quatrième Défendeurs ont accepté (tout en réservant leurs droits de chercher la contribution des Premier e. V. veuve C., Cinquième, Sixième et Huitième Défendeurs) de répartir cet acompte entre eux dans un ratio de soixante-quinze pour cent (75 %) et vingt-cinq pour cent (25 %), le Troisième Défendeur (la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED) payant la somme de 2 163 328,37 £ et le Quatrième Défendeur payant la somme de 721 109,46 £ dans un délai de vingt-huit jours à partir de la date ci-dessous « ;

- Que la demande formée à titre principal par BNP JERSEY telle qu'elle ressort du dispositif de ses écritures, tend à voir déclarer exécutoires les condamnations issues des 3 points ci-dessus rappelés, » avec toutes conséquences de droit, à savoir :

a) la condamnation conjointe et solidaire de la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED et Madame e. V. veuve C. en qualité de trustees du GRAND TRUST, à reconstituer les avoirs du GRAND TRUST revenant à c. C. à hauteur de 50 173 523 USD, issue du point 21(a) de l'ordonnance en date du 11 septembre 2017 et ne faisant pas l'objet des appels par BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED, c. C. ou encore APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED,

b) la condamnation conjointe et solidaire de la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED, e. V. veuve C. et APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED à payer à c. C. un acompte de 50 % des frais engagés par elle dans le cadre de la procédure judiciaire à Jersey, soit la somme de 2 884 437,83 £, la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED et APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED ayant accepté par ailleurs de répartir cet acompte entre eux comme suit : 75 % à la charge de la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED (2 163 328,37 £) et 25 % à la charge de APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED (721 109,46 £), issue du point 33 de l'ordonnance en date du 11 septembre 2017 et ne faisant pas l'objet des appels par BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED, c. C. ou encore APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED,

c) la condamnation d'e. V. veuve C. à rembourser à la société « BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED » toutes sommes qui seraient versées par elle au titre des décisions susvisées ainsi qu'à l'égard des dépenses juridiques, professionnelles et d'expert engagées par la société BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED pour se défendre dans la procédure pendante devant les Tribunaux de Jersey et obtenir exécution par e. V. veuve C. des décisions rendues à son encontre, issue du point 27 de l'ordonnance en date du 11 septembre 2017 et ne faisant pas l'objet des appels par BNP PARIBAS JERSEY TRUST CORPORATION LIMITED, c. C. ou encore APPLEBY TRUST MAURITIUS LIMITED « ;

Qu'il s'évince clairement de cette formulation de la demande en deux temps, que la BNP JERSEY entend tirer les conséquences des arrêts rendus par la Cour d'appel de Jersey les 25 juillet et 7 août 2018, qui ont limité son obligation à la dette et par voie subséquente l'obligation d'indemnisation d'e. C. à son endroit ;

Qu'à cet égard, la BNP JERSEY fait valoir qu'elle n'a pas formé appel à l'encontre de la décision lui imposant de reconstituer la valeur de la partie du Grand trust dont c. est bénéficiaire, ayant limité son appel à la reconstitution de la part de c. dans le trust, à laquelle elle conteste devoir procéder ;

Que pourtant la Cour observe qu'aucune distinction n'est opérée dans la condamnation initiale, prononcée au point 21(a), entre un trust de c. et un trust de c. seuls les avoirs du GRAND TRUST étant visés ;

Que bien plus, l'affirmation du caractère divisible des condamnations entre le Trust de c. et celui de c. invoqué par BNP JERSEY pour soutenir une demande d'exequatur partiel, est fondée sur une approche personnelle de cette dernière notion qui suppose habituellement le caractère dissociable et divisible des divers chefs de condamnations figurant au dispositif de la décision, les uns par rapport aux autres ;

Que BNP JERSEY s'appuie sur l'avis de droit rendu le 7 avril 2021 par le Professeur SERAGLINI, mandaté par ses soins, qui considère pour sa part que l'exequatur partiel peut également prospérer s'agissant de chefs de décision distincts et divisibles au sein d'un même chef de condamnation ;

Que toutefois, les deux jurisprudences dont il se prévaut ne sont pas transposables au cas présent, ainsi que le fait justement remarquer le Professeur D'AVOUT missionné par la partie adverse, à l'avis duquel la Cour se range, dès lors que :

- la distinction opérée dans la première espèce en fonction de la qualification des condamnations s'expliquait à raison du morcellement des régimes de reconnaissance et d'exequatur, la Convention de Bruxelles ne s'appliquant pas à l'ensemble du jugement étranger,

- la seconde décision rendue en matière d'adoption est trop spécifique pour autoriser des conclusions de portée générale ;

Que la Cour ne peut donc suivre l'appelante dans son argumentaire autour du concept de divisibilité et de dissociabilité qui s'appliquerait à de prétendues condamnations distinctes et différenciées au sein du même chef de condamnation ;

Qu'en tout état de cause, aux termes de son arrêt rendu le 7 août 2018, la Cour d'appel de Jersey a ordonné notamment que le paragraphe 21 de la Cour royale du 11 septembre 2017 soit révisé comme suit :

- » Ordonnons que le Premier et le Troisième Défendeurs paient conjointement et solidairement au Nouveau Trustee au titre du Trust de c. :

a) Dans les 28 jours, 50 % de la somme de 100 347 046 USD représentant la valeur du compte n° 1401551 chez BNP PARIBAS Genève, à la date à laquelle elle a été transférée au Fortunate Trust « ;

Qu'il s'ensuit dès lors clairement que, quand bien même la BNP JERSEY n'aurait interjeté qu'un appel limité, l'arrêt précité a révisé le dispositif de l'ordonnance du 11 septembre 2017 et précisément le point 21 soumis à exequatur ;

Que ce chef de la décision a donc été modifié par l'exercice de la voie de recours et n'existe plus comme tel dans son pays d'origine ;

Que l'appelante a d'ailleurs pleinement conscience de l'incidence des décisions rendues en cause d'appel, en mentionnant en page 32 de ses dernières écritures que le paragraphe 21 de l'Ordonnance du 11 septembre 2017 a » été mis à jour « ;

Que les premiers juges ont retenu à juste titre qu'en complétant ainsi les condamnations issues des points 21(a), 27 et 33 précités par des dispositions qui en modifient le quantum, le bénéficiaire ou la portée, l'appelante procède à une modification du dispositif de la décision qui sous-tend la demande d'exequatur, sans pouvoir raisonnablement encourir la critique d'une analyse excessivement formelle avancée par le Professeur SERAGLINI dans son avis de droit du 7 avril 2021 ;

Que cette » mise à jour « conduit à une révision de l'Ordonnance du 11 septembre 2017, prohibée par les dispositions de l'article 16 du Code de droit international privé ;

Que par ailleurs, cette modification a également touché par voie subséquente les points 27 et 33 de l'Ordonnance du 11 septembre 2017 ;

Qu'en effet, contrairement aux affirmations portées par la BNP JERSEY, les points 21, 27 et 33 ne sont pas dissociables des autres points de la décision ni même entre eux ;

Qu'ainsi, le point 21(a) de l'ordonnance du 11 septembre 2017 est mentionné dans le point 22 tandis que la condamnation à revalorisation prévue par le point 21(c) est basée sur la somme de 100 347 046 USD précisément retenue au pont 21(a) ;

Que d'autre part, la Cour relève que le point 27 portant condamnation à paiement d'e. C. (premier défendeur) envers BNP JERSEY (troisième défendeur) fait expressément référence aux sommes payées » par lui pour respecter les paragraphes 21, 26, 32 et 33 « de l'ordonnance, scellant ainsi leur interdépendance ;

Que cette analyse se trouve confirmée par l'avis de droit du Professeur D'AVOUT daté du 21 mai 2021, lequel explique de manière pertinente que le paragraphe 27, qui correspond à la clause fixant le recours de BNP JERSEY contre e. C. comme le point 33, présupposent le chef primordial de la condamnation du point 21(a), dont elles sont l'accessoire ou le corolaire, de sorte que leur exequatur ne saurait être envisagé sans celui du point 21 dans sa version initiale ;

Que pour le surplus, la Cour relève qu'en application de l'article 14 du code précité, seuls les jugements rendus par les tribunaux étrangers passés en force de chose jugée sont susceptibles d'exequatur ;

Qu'une telle exigence implique que la décision ne soit susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution, ne pouvant s'agir dès lors que d'une décision rendue en dernier ressort ou après l'expiration des délais de recours suspensifs ;

Que le caractère exécutoire et définitif d'un jugement étranger s'apprécie suivant le droit étranger ;

Que les certificats émanant d'autorités étrangères peuvent renseigner le juge de l'exequatur à cet égard ;

Que les premiers certificats présentés par BNP JERSEY ont été délivrés les 12 octobre 2017 et 22 février 2018, soit antérieurement à l'arrêt de la Cour d'appel de Jersey du 7 août 2018 qui a, selon ses propres termes, révisé le point 21 de l'ordonnance de la Cour royale de Jersey du 11 septembre 2017 ;

Que ces certificats ne permettent donc pas d'établir valablement que la décision de première instance est définitive selon ses termes initiaux, de manière irréversible au jour où elle a été prononcée, alors précisément que la juridiction supérieure a décidé du contraire, comme le relève de manière pertinente le Professeur D'AVOUT dans son avis de droit du 2 mai 2021 ;

Que la BNP JERSEY se prévaut également d'un troisième certificat établi le 17 octobre 2018 par le greffier de la Cour royale de Jersey attestant que l'obligation d'e. C. de l'indemniser en vertu des paragraphes 21(a) et 33 de l'ordonnance du 11 septembre 2017 et pour toutes les sommes qu'il a engagées en frais juridiques, d'expertise et professionnels dans la défense de ces procédures et la poursuite du droit à indemnisation, n'est pas susceptible d'appel et a autorité de la chose jugée depuis le 11 septembre 2017 ;

Que ce certificat précise que les ordonnances consécutives à l'arrêt au fond de la Cour d'appel comprennent » des modifications au premier acte de la Cour en date du 11 septembre 2017 «, et ne vise dans son point 10 que l'obligation irrévocable de payer un certain montant, sans affirmer le caractère définitif du jugement de première instance au 11 septembre 2017 ;

Qu'il s'en déduit que, contrairement aux affirmations de l'appelante, la décision du 11 septembre 2017 de la Cour royale de Jersey, qui a subi ultérieurement une modification sur le point essentiel de la condamnation monétaire, n'était pas définitive au jour où elle a été rendue ;

Qu'au terme de son avis de droit établi le 29 mars 2021 à la demande de l'appelante, Howard SHARP QC expose quant à lui que ces certificats confirment » que la décision relative au Fonds de c. a autorité de chose jugée et est exécutoire à Jersey " ;

Que toutefois, le seul caractère exécutoire de cette décision (au demeurant relative au seul Fonds de c. revêtue de l'autorité de chose jugée, est insuffisant à démontrer que la décision soumise à exequatur est passée en force de chose jugée, au demeurant contredite par la lecture de l'arrêt de la Cour d'appel de Jersey portant réformation partielle de la décision de première instance ;

Qu'en l'état de ces éléments, la demande principale présentée par la BNP JERSEY ne peut prospérer, sans qu'il y ait lieu de suivre davantage les parties dans le détail foisonnant de leur argumentaire ;

Que la décision des premiers juges mérite confirmation de ce chef ;

Que la demande formulée à titre subsidiaire ne peut être analysée comme constituant une demande nouvelle, irrecevable comme prohibée en cause d'appel, dès lors qu'elle est contenue dans la demande principale soumise aux premiers juges, réitérée en cause d'appel, et n'induit qu'un abandon d'une partie des prétentions qui l'accompagnaient ;

Qu'en tout état de cause, cette demande tendant à obtenir l'exequatur des seuls points 21(a), 27 et 33 de l'Ordonnance du 11 septembre 2017 rendue par la Cour royale de Jersey, reproduits de manière littérale, ne peut davantage prospérer au regard des développements qui précèdent ;

Qu'en effet, il est acquis aux débats que la décision soumise à exequatur a été modifiée par les arrêts postérieurs de la Cour d'appel de Jersey, notamment la disposition principale 21(a) dont l'exequatur est sollicité ;

Qu'ainsi qu'il a été précédemment énoncé, le juge de l'exequatur ne peut en aucun cas actualiser les termes du dispositif de la décision étrangère soumise à l'exequatur, sous peine de procéder à sa révision, laquelle est légalement prohibée sous quelque forme que ce soit ;

Qu'il en va nécessairement de même s'agissant de la demande présentée à titre infiniment subsidiaire tendant à l'exequatur du seul point 27 de l'ordonnance du 11 septembre 2017 de la Cour royale de Jersey, qui se réfère lui-même au point 21, ce qui signe leur manque d'autonomie respective, les empêchant d'être dissociés alors que le point 21 a été expressément révisé par la Cour d'appel de Jersey ;

Que la décision des premiers juges sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions ;

Que par voie de conséquence, il n'y pas lieu de statuer sur la demande présentée à titre subsidiaire par e. C. au titre de son appel incident ;

Sur les dépens

Attendu que succombant en ses prétentions, la BNP JERSEY sera condamnée aux dépens d'appel ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant contradictoirement,

Déclare recevables les appels principal et incident dirigés contre le jugement rendu le 17 octobre 2019 par le Tribunal de première instance,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Condamne BNP JERSEY aux dépens d'appel, distraits au profit de Maître Christophe BALLERIO, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que les dépens distraits seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable,

Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,

Après débats en audience de la Cour d'appel de la Principauté de Monaco, et qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement,

Composition

Ainsi jugé et rendu au Palais de Justice, à Monaco, le 22 FÉVRIER 2022, par Madame Françoise CARRACHA, Conseiller, faisant fonction de Président, Madame Claire GHERA, Conseiller, Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller, assistées de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint, en présence de Monsieur Julien PRONIER, Premier Substitut du Procureur général.

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Synthèse
Numéro d'arrêt : 20359
Date de la décision : 22/02/2022

Analyses

Il résulte de l'article 14 du Code de droit international privé qu'une procédure d'exequatur s'impose pour reconnaître force exécutoire à la décision, préalable nécessaire à la mise en œuvre de mesures d'exécution forcée sur le territoire de l'État où celui-ci a été accordé.L'article 16 du même code énonce qu'un jugement rendu par un Tribunal étranger ne peut en aucun cas faire l'objet d'une révision au fond. Il s'en déduit que l'office du juge consiste à accorder ou refuser l'exequatur de la décision étrangère, sans jamais pouvoir la modifier, fût-ce en cas « d'adaptation », pour faits nouveaux de la décision étrangère. Le juge de l'exéquatur ne peut donc être amené à compléter la décision étrangère, ce qui conduirait à opérer des révisions au fond masquées, de nature à porter atteinte à l'intangibilité de la décision d'origine. Il est ensuite de jurisprudence constante qu'une décision étrangère peut être reconnue partiellement dès lors que les différents chefs de la décision sont dissociables et divisibles. Pour pouvoir scinder une décision et ne recevoir qu'une partie du dispositif, sans porter atteinte à l'intégrité de la décision et en déformer le sens, les chefs de dispositif de la décision en cause doivent être autonomes, se rapportant à des situations indépendantes.En application de l'article 14 du code précité, seuls les jugements rendus par les tribunaux étrangers passés en force de chose jugée sont susceptibles d'exequatur. Une telle exigence implique que la décision ne soit susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution, ne pouvant s'agir dès lors que d'une décision rendue en dernier ressort ou après l'expiration des délais de recours suspensifs. Le caractère exécutoire et définitif d'un jugement étranger s'apprécie suivant le droit étranger. Les certificats émanant d'autorités étrangères peuvent renseigner le juge de l'exequatur à cet égard. Le juge de l'exequatur ne peut en aucun cas actualiser les termes du dispositif de la décision étrangère soumise à l'exequatur, sous peine de procéder à sa révision, laquelle est légalement prohibée sous quelque forme que ce soit.

Exequatur  - Contentieux et coopération judiciaire.

Exequatur - Décision étrangère - Office du juge - Exequatur partielle - Conditions - Caractère exécutoire et définitif du jugement étranger.


Parties
Demandeurs : BNP Paribas
Défendeurs : Madame e. V. veuve C.

Références :

article 18 du Code de droit international privé
article 15 du Code de droit international privé
article 3 alinéa 2 du Code de procédure pénale
articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013
loi n° 1.448 du 28 juin 2017
ordonnance du 11 juin 2017
Code de procédure civile
article 14 du Code de droit international privé
article 431 du Code de procédure civile
ordonnance du 11 septembre 2017
ordonnance du 1er février 2019
article 16 du Code de droit international privé
ordonnance du 7 août 2018


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2022-02-22;20359 ?

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