Abstract
Procédure civile - Appel - Demande nouvelle - Recevabilité (non)
Divorce - Mesures provisoires - Résidence des enfants au domicile du père - Droit de visite et d'hébergement de la mère
Résumé
La demande du père tendant à mettre à la charge de la mère une contribution à l'entretien des enfants caractérise une demande nouvelle présentée pour la première fois en cause d'appel. Elle ne procède pas d'une compensation et n'apparaît pas être la défense nécessaire à l'action principale, de sorte que la cour la déclare irrecevable en application des dispositions de l'article 431 alinéa 2 du Code de procédure civile.
Il y a lieu de confirmer l'ordonnance entreprise et de fixer la résidence des deux enfants, âgés de 13 et 10 ans, au domicile du père dès lors que ce dernier s'oppose formellement à la demande de la mère de voir instaurer une résidence alternée et qu'aucun élément ne permet de conclure en l'état à l'apaisement général du conflit parental, ni à la cessation définitive des propos dénigrants de la mère préjudiciables à l'image du père et contraires à l'intérêt supérieur des enfants. Par ailleurs, les modalités du droit de visite et d'hébergement de la mère procédant de l'ordonnance entreprise apparaissent conformes à l'intérêt actuel des enfants et de nature à favoriser les échanges de chacun d'eux avec leurs deux parents dans le respect du cadre de vie de chacun jusqu'à ce que l'apaisement général de la situation conflictuelle permette aux parents d'adhérer pleinement à un projet de résidence alternée, conforme à l'intérêt de leurs deux enfants. La cour déboute ainsi les parties de l'intégralité de leurs prétentions.
Motifs
COUR D'APPEL
ARRÊT DU 9 JUILLET 2019
En la cause de :
* - Madame a. B. épouse BO., née le 12 octobre 1982 à Monaco, de nationalités française et suisse, demeurant et domiciliée X1 à Monaco ;
Bénéficiaire de l'assistance judiciaire n° XX, par décision du Bureau du 9 avril 2018
Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Raphaëlle SVARA, avocat près la même Cour ;
APPELANTE,
d'une part,
contre :
* - Monsieur m. BO., né le 19 octobre 1976 à Menton, de nationalité française, demeurant et domicilié X2 à Menton ;
Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant ledit avocat-défenseur ;
INTIMÉ,
d'autre part,
LA COUR,
Vu l'ordonnance de non-conciliation rendue par le magistrat conciliateur, le 7 juin 2018 (R. 5277) ;
Vu l'exploit d'appel parte in qua et d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 6 juillet 2018 (enrôlé sous le numéro 2019/000003) ;
Vu les conclusions déposées les 29 janvier 2018, 23 avril 2019 et 28 mai 2019 par Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur, au nom de Monsieur m. BO.;
Vu les conclusions déposées les 5 mars 2019 et 2 mai 2019 par Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur, au nom de Madame a. B.épouse BO.;
À l'audience du 4 juin 2019, vu la production de leurs pièces par les conseils des parties et en leurs plaidoiries ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
La cause ayant été débattue hors la présence du public ;
La Cour statue sur l'appel parte in qua relevé par Madame a. B. épouse BO. à l'encontre d'une ordonnance de non-conciliation du 7 juin 2018.
Considérant les faits suivants :
Monsieur m. BO. et Madame a. B. se sont mariés le 14 août 2014 par devant l'officier d'Etat civil de la Mairie de Monaco sans contrat de mariage.
Deux enfants sont issus de cette union, j. né le 31 juillet 2005 et b. né le 15 juin 2009.
Deux requêtes en divorce ont été déposées par chacun des époux respectivement le 17 avril 2018 par le mari et le 18 avril 2018 par l'épouse, ayant donné lieu à deux ordonnances présidentielles distinctes qui ont fait l'objet d'une ordonnance de jonction par ordonnance du magistrat conciliateur en date du 11 mai 2018.
Après avoir entendu chacun des époux séparément, puis réunis et en présence de leurs avocats et leur avoir fait les observations propres à opérer un rapprochement entre eux, le juge conciliateur, sans parvenir à les concilier a constaté que les époux BO. B. ont manifesté leur accord sur le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci, en présence des avocats constitués.
Suivant ordonnance en date du 7 juin 2018, le magistrat conciliateur a, contradictoirement et en premier ressort :
* « - constaté le maintien de la demande en divorce,
* - autorisé m. BO. à assigner a. B. par-devant le Tribunal aux fins de sa demande en divorce, sur le fondement de l'article 198 du Code civil du fait de l'accord des parties pour voir prononcer le divorce sur ce fondement,
* - autorisé a. B. à assigner m. BO. par-devant le Tribunal aux fins de sa demande en divorce, sur le fondement de l'article 198 du Code civil du fait de l'accord des parties pour voir prononcer le divorce sur ce fondement,
* - constaté que les époux résident séparément :
* a. B. à l'appartement ayant constitué le domicile conjugal, sis X1à Monaco,
* m. BO. hors le domicile conjugal, au X2 06500 MENTON,
* - attribué à a. B. la jouissance exclusive de l'appartement ayant constitué le domicile conjugal,
* - fait interdiction aux époux de se troubler mutuellement à leur domicile respectif, à défaut de quoi les autorisons à faire cesser ce trouble par toute voie de droit appropriée et si besoin avec le concours de la force publique,
* - dit qu'en conséquence, m. BO. restituera à a. B. les clefs de la boîte aux lettres, le passe de l'ascenseur et les clefs de la porte interne de l'appartement ayant constitué le domicile conjugal,
* - constaté l'accord des époux sur :
* l'attribution de la jouissance exclusive de la résidence secondaire à a. B. à charge pour elle de rembourser les échéances du crédit y afférent,
* L'attribution de la jouissance exclusive du véhicule de marque W immatriculé ZZ à a. B.
* - dit qu'en conséquence, m. BO. restituera à a. B. les clefs de la résidence secondaire, l'acte de propriété et les documents afférents au prêt, ainsi que les clefs du véhicule automobile de marque W et les documents administratifs y afférents,
* - renvoyé a. B. à mieux se pourvoir concernant sa demande d'attribution de la jouissance exclusive du véhicule de marque V,
* - constaté que l'autorité parentale sur j. et b. est exercée conjointement par les parents,
* - rappelé que l'exercice conjoint de l'autorité parentale implique que les parents doivent :
* prendre ensemble les décisions importantes concernant la santé, l'orientation scolaire, l'éducation religieuse et tout changement de résidence de l'enfant,
* s'informer réciproquement, dans le souci d'une indispensable communication entre les parents, sur l'organisation de la vie de l'enfant (vie scolaire, sportive, culturelle, traitements médicaux, loisirs, vacances),
* permettre les échanges de l'enfant avec l'autre parent, dans le respect du cadre de vie de chacun,
* - fixé la résidence habituelle des enfants chez le père,
* - accordé à a. B. un droit de visite et d'hébergement qui exercera, sauf meilleur accord entre les parties, comme suit :
* les semaines paires : du mercredi après l'école au vendredi matin retour à l'école,
* les semaines impaires : du jeudi soir après l'école au lundi matin retour à l'école, en ce compris le week-end de la fête des mères et à l'exclusion du week-end de la fête des pères,
La moitié des vacances scolaires :
* pour les petites vacances scolaires : la première moitié les années paires et la seconde moitié les années impaires,
* pour les vacances d'été : la première quinzaine des mois de juillet et d'août les années paires, et la seconde quinzaine des mois de juillet et d'août les années impaires,
À charge pour la mère ou une personne honorable d'aller chercher les enfants, selon les cas, au domicile du père ou à l'établissement scolaire,
* Avec les précisions suivantes :
* - tout jour férié qui précède ou qui suit immédiatement une période normale d'exercice du droit de visite et d'hébergement s'ajoute automatiquement à cette période,
* - à défaut d'accord amiable si le titulaire du droit d'hébergement ne l'a pas exercé dans la première heure pour les fins de semaine ou dans la première journée pour les périodes de vacances, il sera présumé avoir renoncé à la totalité de la période.
* Concernant les périodes de vacances scolaires uniquement, le droit de visite et d'hébergement s'exercera :
* pour la première moitié : à compter de la sortie de l'école au dernier jour de la période de vacances accordée, à 19 heures,
* pour la seconde moitié : à compter de 19 heures le premier jour de la période accordée au lundi matin retour à l'école,
* - dit n'y avoir lieu à fixation d'une contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant,
* - réservé les dépens en fin de cause,
* - dit la présente ordonnance exécutoire par provision ».
Suivant exploit en date du 6 juillet 2018, Madame a. B. a relevé appel parte in qua de l'ordonnance susvisée signifiée le 2 juillet 2018 dont elle a sollicité la réformation partielle en ce qu'elle a :
* - fixé la résidence des enfants au domicile du père,
* - accordé à Madame B. un droit de visite et d'hébergement défini comme suit :
* les semaines paires du mercredi après l'école au vendredi matin retour de l'école,
* les semaines impaires du jeudi soir après l'école au lundi matin retour à l'école en ce compris le week-end de la fête des mères et à l'exclusion du week-end de la fête des pères,
* la moitié des vacances scolaires, pour les petites vacances scolaires la première moitié des années paires et la seconde moitié les années impaires et pour les vacances d'été la première quinzaine des mois de juillet et d'août les années paires et la seconde quinzaine des mois de juillet et d'août les années impaires,
* la confirmer pour le surplus,
* et, statuant à nouveau :
À titre principal :
* - fixer la résidence habituelle des enfants au domicile de la mère,
* - accorder à Monsieur m. BO. un droit de visite et d'hébergement s'exerçant sauf meilleur accord des parties :
* hors vacances scolaires : un week-end sur deux du vendredi soir après l'école jusqu'au lundi matin à la reprise des cours à charge pour le père de récupérer les enfants à l'école et de les y ramener,
* un lundi soir sur deux de la sortie de l'école jusqu'au mardi matin à charge pour le père de venir récupérer les enfants à l'école et de les y reconduire,
* en période de vacances scolaires : une semaine sur deux la moitié des petites vacances scolaires, la première moitié pour les années impaires et la seconde pour les années paires,
* les vacances estivales : toutes les deux semaines en alternance.
À titre subsidiaire,
* - fixer la résidence des enfants au domicile de la mère,
* - accorder un droit de visite et d'hébergement au père s'exerçant sauf meilleur accord des parties comme suit :
* hors vacances scolaires : une semaine sur deux du jeudi soir après l'école jusqu'au mardi matin à la reprise des cours à charge pour le père de récupérer les enfants à l'école et de les y reconduire,
* en période de vacances scolaires : une semaine sur deux la moitié des petites vacances scolaires, la première moitié pour les années impaires et la seconde moitié pour les années paires,
* les vacances estivales : toutes les deux semaines en alternance.
En tout état de cause,
* - débouter Monsieur m. BO. de toutes ses demandes, fins et conclusions,
* le condamner aux entiers dépens.
Par conclusions ultérieures en date du 5 mars 2019, l'appelante, faisant valoir qu'elle avait entrepris un important travail sur elle-même dans l'intérêt supérieur des enfants, a modifié ses demandes initiales en demandant à titre principal que la résidence habituelle des enfants soit fixée en alternance aux domiciles des père et mère et à titre subsidiaire si sa demande principale ne pouvait aboutir qu'elle soit fixée à son domicile et qu'un large droit de visite et d'hébergement soit accordé au père, de telles modalités permettant aux enfants de voir leur père sans interruption 5 jours sur 7, une semaine sur deux.
Au soutien de cet appel, et aux termes de l'ensemble de ses écritures judiciaires, Madame a. B. expose en substance que :
* - le magistrat conciliateur n'a pas tiré les conséquences utiles des pièces versées aux débats par chacune des parties et a statué sans tenir compte de l'intérêt supérieur des enfants,
* - le premier juge l'a sanctionnée car elle s'opposait alors à la mise en place de la résidence alternée,
* - sa religion a été trompée par le père prétendant encenser la mère et favoriser la poursuite des relations mère-fils alors qu'aucune pièce n'atteste de cet élément de fait,
* - depuis la naissance de ses enfants, Madame B. se dévoue entièrement à leur éducation et à leur entretien, puisque c'est elle qui les conduit à l'école et les amène à leurs activités ou chez le médecin,
* - ses qualités maternelles et son dévouement sont reconnus par son entourage et établis par les attestations versées aux débats,
* - les sous-entendus concernant ces prétendus problèmes d'alcoolisme sont mensongers et elle le prouve en versant à la procédure des analyses de sang et les témoignages,
* - le père éprouve au contraire des difficultés pour gérer le quotidien des enfants en l'état de ses horaires de travail et de ses contraintes professionnelles,
* - les allers-retours incessants effectués par les enfants entre le domicile du père et de la mère leur ont fait perdre stabilité et repères entre le dépôt de la requête en divorce et l'ordonnance de non-conciliation en sorte que leurs résultats scolaires et leur santé en ont été affectés,
* - elle n'a jamais entendu dénigrer le père mais a souhaité faire état devant le Premier juge de l'omission par ce dernier de nombreux rendez-vous extrascolaires et médicaux ayant porté préjudice aux enfants,
* - la résidence des enfants devra dans leur intérêt être fixée au domicile de la mère car ils sont scolarisés à Monaco depuis toujours, pratiquent leurs activités extrascolaires à Monaco et y sont suivis médicalement,
* - la résidence habituelle des enfants ne peut être fixée à Menton car ils sont des enfants du pays et perdraient tous leurs avantages,
* - la demande subsidiaire formulée au titre du droit de visite et d'hébergement ne présente pas en cause d'appel le caractère d'une demande nouvelle au sens des dispositions de l'article 431 du Code de procédure civile dans la mesure où elle tend aux mêmes fins juridiques qu'en première instance,
* - en tout état de cause, les propositions formulées en appel tendent à titre tant principal que subsidiaire de permettre aux enfants de voir leur père dans de meilleures conditions que le rythme saccadé auxquelles le magistrat conciliateur les a astreints.
Monsieur m. BO. intimé, entend pour sa part aux termes de l'ensemble de ses écritures voir confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de non-conciliation du 7 juin 2018 et, y ajoutant, entend voir condamner Madame B. à assumer pour moitié les frais liés à l'éducation des enfants sur simple présentation d'un justificatif par le père avec effet rétroactif depuis le 7 juin 2018 et débouter Madame B. de ses demandes, fins et conclusions tout en la condamnant aux entiers dépens.
Il fait valoir pour l'essentiel que :
* - l'ordonnance de non-conciliation doit être confirmée en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à fixation d'une part contributive à l'éducation des enfants,
* - le juge conciliateur a estimé qu'une résidence alternée était adaptée à la situation et permettre aux enfants de s'épanouir pleinement et ce n'est qu'en l'état de l'opposition de la mère, dénuée de motif légitime, que la résidence des enfants a été fixée à son propre domicile,
* - depuis la séparation du couple, il a pris toutes les dispositions pour pouvoir accueillir ses enfants dans de bonnes conditions dans un appartement situé à Menton tout en s'organisant professionnellement pour aménager son emploi du temps, travaillant aujourd'hui de 9 heures à 18 heures,
* - depuis l'ordonnance de non-conciliation, aucun incident n'a été signalé à l'exception d'un simple retard à l'école pour j. au mois d'avril 2018 et d'une légère baisse de ses résultats scolaires et de deux séances chez l'orthophoniste manquée par b.
* - il a été contraint quant à lui de déposer plainte le 13 juin 2018 face aux colères de la mère et aux propos dénigrants et insultants qu'elle tient à son encontre devant les enfants, ce comportement s'étant récemment amélioré à la suite du rappel adressé par le Procureur général au mois de novembre 2018,
* - la répartition des droits hors vacances scolaires ne pose aucun problème, Madame B. disposant d'un droit de visite et d'hébergement du mercredi après l'école au vendredi matin en semaines paires et du jeudi soir au lundi matin en semaines impaires ainsi qu'il l'avait proposé,
* - Madame B. entend en cause d'appel voir réduire de manière drastique ses droits du père au regard de torts qui ne sont pas prouvés, aucune négligence ne pouvant lui être imputée,
* - la mère se refusant à toute participation financière des frais liés à l'éducation des enfants, il doit assumer seul la totalité des frais scolaires, extrascolaires et médicaux alors qu'il a des revenus modestes et il entend voir son épouse assumer son obligation la plus élémentaire de prise en charge pour moitié de l'ensemble de ces dépenses avec effet rétroactif depuis le 7 juin 2018.
Aux termes de conclusions en réponse en date du 2 mai 2019, Madame a. B. a qualifié de « nouvelle » une telle demande de part contributive à l'entretien et l'éducation des enfants, comme étant formée pour la première fois en cause d'appel, et a conclu à son irrecevabilité.
Elle a par ailleurs déclaré avoir récemment découvert que le père avait inscrit b. dans un établissement scolaire de Menton pour la rentrée 2019-2020 sans l'en avoir au préalable informée alors que l'autorité parentale est exercée conjointement par les parents, méconnaissant de la sorte l'intérêt supérieur de leur fils.
Dans le dernier état de ses écritures, Madame a. B. entend donc voir la Cour :
* déclarer Madame B. recevable dans son appel et au fond l'y déclarer bien fondée,
* réformer partiellement l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :
* fixé la résidence des enfants au domicile de leur père,
* accordé à Madame B. un droit de visite et d'hébergement défini comme suit :
* les semaines paires : du mercredi après l'école au vendredi matin retour de l'école,
* les semaines impaires : du jeudi soir après l'école au lundi matin retour à l'école, en ce compris le week-end de la fête des mères et à l'exclusion du week-end de la fête des pères,
* la moitié des vacances scolaires :
* pour les petites vacances scolaires ; la première moitié les années paires et la seconde moitié les années impaires,
* pour les vacances d'été ; la première quinzaine des mois de juillet et d'août les années paires, et la seconde quinzaine des mois de juillet et d'août les années impaires,
* la confirmer pour le surplus,
Et statuant à nouveau :
* - constater que Monsieur BO. a démontré une aptitude limitée à respecter Madame B. en ne respectant pas l'autorité parentale conjointe,
* - dire et juger que ce comportement est contraire à l'intérêt supérieur des enfants communs mineurs,
Par conséquent,
* - fixer la résidence habituelle des enfants au domicile de la mère,
* - accorder à Monsieur BO. un droit de visite et d'hébergement qui s'exercera, sauf meilleur accord des parties :
* hors vacances scolaires : une semaine sur deux, du jeudi soir après l'école jusqu'au mardi matin à la reprise des cours, à charge pour le père de récupérer les enfants à l'école et les y reconduire,
* en période de vacances scolaires : une semaine sur deux la moitié des petites vacances scolaires, la première moitié pour les années impaires et la seconde pour les années paires,
* les vacances estivales : toutes les deux semaines en alternance,
* - prendre acte de ce que Madame B. renonce à ses demandes antérieures,
En tout état de cause, sur la demande nouvelle de part contributive à l'entretien et à l'éducation des enfants,
* - dire et juger que la demande de Monsieur BO. constitue une demande nouvelle formulée pour la première fois en cause d'appel,
Par conséquent,
* - dire et juger que cette demande est irrecevable,
En tout état de cause,
* - débouter Monsieur BO. de toutes ses demandes, fins et conclusions,
* - condamner Monsieur m. BO. aux entiers dépens distraits au profit de Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.
Monsieur m. BO. réitérant par conclusions du 28 mai 2019 les termes de ses précédentes écritures et sa demande de confirmation de l'ordonnance de non-conciliation en date du 7 juin 2018, maintient le principe de sa demande de contribution par moitié aux frais liés à l'éducation des enfants tout en communiquant les justificatifs de frais qu'il assume à ce titre.
S'agissant de la demande d'établissement d'un passeport français pour les enfants, il s'inscrit en faux en faisant valoir que le consentement des deux parents est requis et confirme avoir communiqué les coordonnées de la maman dans le but d'une inscription de b. dans un nouvel établissement scolaire de Menton. Il confirme avoir entamé seul les démarches car le dialogue avec la mère demeure difficile et qu'elle n'a jamais donné suite à ses demandes à ce sujet.
En tout état de cause, le consentement des deux parents demeurant requis pour l'inscription de leur fils, il constate que Madame a. B. s'y est formellement opposée en imposant la scolarisation de b. à Monaco.
S'agissant de la modification des demandes de l'appelante, consistant à instaurer une résidence alternée, il déclare s'y opposer car les relations entretenues par la mère avec les enfants demeurent toujours complexes, un rappel à la loi lui ayant été adressé par le Procureur général le 27 novembre 2018.
Il rappelle que les pressions exercées par la mère ont été mal vécues par les enfants et leur confiance altérée.
Il expose enfin que les deux enfants âgés de 13 et 10 ans ont retrouvé un parfait équilibre et se sont adaptés à leur nouveau rythme de vie sans jamais verbaliser une quelconque volonté de résidence alternée dans le cadre de l'enquête sociale qui a été conduite. Le père en déduit qu'une telle demande serait prématurée, une résidence alternée ne pouvant être mise en place que si la situation évoluait à l'avenir favorablement.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.
SUR CE,
Attendu que l'appel principal apparaît relevé dans les conditions de forme et de délai prescrites par le Code de procédure civile et doit être déclaré recevable ;
Attendu que la demande de condamnation à une part contributive à l'entretien des enfants formée par l'intimé, Monsieur m. BO. caractérise une demande nouvelle présentée pour la première fois en cause d'appel qui ne procède pas d'une compensation, ni n'apparaît être la défense nécessaire à l'action principale, en sorte que, conformément à ce qui a été conclu par l'appelante, elle doit être déclarée irrecevable par application des dispositions de l'article 431 alinéa 2 du Code de procédure civile ;
Attendu que l'appel formé par Madame a. B. tend à remettre en cause la décision du premier juge en ce que celui-ci a fixé la résidence des enfants au domicile du père, et accordé à Madame B. un droit de visite et d'hébergement défini comme suit : les semaines paires du mercredi après l'école au vendredi matin retour de l'école, les semaines impaires du jeudi soir après l'école au lundi matin retour à l'école en ce compris le week-end de la fête des mères et à l'exclusion du week-end de la fête des pères et enfin la moitié des vacances scolaires, pour les petites vacances scolaires la première moitié les années paires et la seconde moitié les années impaires et pour les vacances d'été la première quinzaine des mois de juillet et d'août les années paires et la seconde quinzaine des mois de juillet et d'août les années impaires ;
Attendu que le premier juge apparaît avoir en premier lieu à bon droit constaté qu'à défaut d'accord entre les parties, la résidence habituelle de j. et b. ne pourrait pas être fixée en alternance aux domiciles parentaux en vertu des dispositions de l'article 303-3 du Code civil ;
Attendu que si en cause d'appel et dans le dernier état de ses écritures, Madame a. B. entend désormais voir instaurer une telle résidence alternée, force est de constater que le père s'y oppose formellement, en sorte que la Cour, qui dispose des mêmes prérogatives que le juge tutélaire au sens des dispositions légales susvisées, ne peut constater le commun accord des parties pour fixer la résidence habituelle des enfants en alternance au domicile de chacun de ses père et mère ;
Attendu que pour fixer la résidence habituelle des enfants au domicile du père, le premier juge a en substance tenu compte de l'attitude générale de la mère qui s'oppose sans aucune raison légitime à des modalités de résidence plus conformes à l'intérêt supérieur des enfants et adopte un discours dénigrant à l'égard du père ;
Attendu qu'il s'induit en l'état des débats et des pièces produites devant le magistrat conciliateur comme au demeurant des échanges d'écritures et des pièces communiquées en cause d'appel que si les capacités éducatives, les aptitudes affectives et l'investissement général de la mère ne sont pas contestables, le père apparaît, à l'heure actuelle, le plus apte à favoriser une reprise de lien entre les enfants et les deux parents, sans mêler j. et b. au conflit parental ;
Qu'une telle situation et la gravité de certains faits dénoncés par les enfants à l'origine de l'ouverture d'une enquête sociale et d'un rappel à la loi de Madame a. B. au mois de novembre 2018 ne permettent pas de conclure en l'état à l'apaisement général du conflit parental, ni à la cessation définitive des propos dénigrants préjudiciables à l'image du père et contraires à l'intérêt supérieur des enfants, les pièces produites en cause d'appel laissant présumer la persistance d'un discours négatif, voire d'une tendance à exacerber toutes les difficultés induites par les relations entre parents, qui n'apparaît guère propice au besoin de sérénité éprouvé par les enfants du couple ;
Attendu que la décision du premier juge sera dès lors confirmée en ce que la résidence habituelle des enfants a été fixée au domicile du père ;
Qu'au demeurant, l'intérêt des enfants et la nécessité de permettre la poursuite de liens étroits avec chacun des parents apparaît avoir été au centre de la préoccupation du premier juge qui a organisé l'accueil des enfants de manière équilibrée au domicile de chacun des parents dans le but affirmé de leur permettre de s'épanouir, se construire dans la dualité des images parentales ;
Que la volonté du père et de la mère de s'investir pleinement dans l'éducation des enfants apparaît dénuée d'équivoque et se trouve fortement réaffirmée en cause d'appel, alors qu'il est par ailleurs essentiel de tenir compte des sentiments respectivement éprouvés et exprimés par j. et b. de souhaitant résider avec son père tandis que l'autre préférerait résider avec sa mère ;
Que dès lors, le premier juge a souverainement estimé qu'il était essentiel de préserver l'équilibre des enfants et de leur apporter la plus grande stabilité possible dans leur vie quotidienne, en prohibant de trop nombreux allers-retours entre le domicile du père et de la mère, que Madame B. avait elle-même légitimement dénoncés comme générateur d'une trop grande fatigue ;
Qu'enfin, les pièces produites en cause d'appel n'établissent nullement une quelconque défaillance du père dans l'exercice de sa mission éducative auprès des enfants, la séparation de leurs parents pouvant à elle seule expliquer la baisse des résultats scolaires de j. et aucune conséquence ne devant être tirée d'une demande de carte d'identité française pour les enfants ou de formalités de pré-inscription par le père dans un nouvel établissement scolaire, étant observé que le consentement des deux parents apparaît en tout état de cause légalement requis, de tels faits révélant simplement une fois de plus l'absence totale de communication entre les parents ;
Attendu en définitive que les modalités du droit de visite et d'hébergement de la mère procédant de l'ordonnance entreprise apparaissent à cet égard conformes à l'intérêt actuel de j. et b. et de nature à favoriser les échanges de chacun d'eux avec leurs deux parents dans le respect du cadre de vie de chacun et ce, jusqu'à ce que l'apaisement général de la situation conflictuelle permette aux parents d'adhérer pleinement à un projet de résidence alternée, conforme à l'intérêt de leurs deux enfants ;
Qu'il convient dès lors de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a accordé à a. B. un droit de visite et d'hébergement qui s'exercera, sauf meilleur accord entre les parties, comme suit :
Les semaines paires : du mercredi après l'école au vendredi matin retour à l'école ;
* - les semaines impaires : du jeudi soir après l'école au lundi matin retour à l'école, en ce compris le week-end de la fête des mères et à l'exclusion du week-end de la fête des pères,
* - la moitié des vacances scolaires :
* pour les petites vacances scolaires : la première moitié les années paires et la seconde moitié les années impaires,
* pour les vacances d'été : la première quinzaine des mois de juillet et d'août les années paires, et la seconde quinzaine des mois de juillet et d'août les années impaires,
* à charge pour la mère ou une personne honorable d'aller chercher les enfants, selon les cas, au domicile du père ou à l'établissement scolaire ;
* et ce, sous les précisions données par le premier juge consistant à dire que tout jour férié qui précède ou qui suit immédiatement une période normale d'exercice du droit de visite et d'hébergement s'ajoute automatiquement à cette période et qu'à défaut d'accord amiable si le titulaire du droit d'hébergement ne l'a pas exercé dans la première heure pour les fins de semaine ou dans la première journée pour les périodes de vacances, il sera présumé avoir renoncé à la totalité de la période ;
* et qu'en ce qui concerne les périodes de vacances scolaires uniquement, le droit de visite et d'hébergement devra s'exercer de la manière suivante :
* - pour la première moitié : à compter de la sortie de l'école au dernier jour de la période de vacances accordée, à 19 heures,
* - pour la seconde moitié : à compter de 19 heures le premier jour de la période accordée au lundi matin retour à l'école ;
Attendu que les parties seront déboutées du surplus de leurs prétentions et l'ordonnance rendue le 7 juin 2018 par le magistrat conciliateur confirmée en toutes ses dispositions ;
Attendu que Madame B. devra supporter les dépens d'appel en l'état de sa succombance, les dépens de première instance ayant été réservés par le magistrat ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,
statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare l'appel recevable,
Déclare irrecevable la demande nouvelle tendant à l'octroi d'une part contributive formée pour la première fois en cause d'appel, par l'intimé, m. BO.
Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 7 juin 2018 par le magistrat conciliateur,
Déboute les parties de l'ensemble de leurs prétentions,
Laisse les dépens d'appel à la charge de Madame a. B. et dit qu'ils seront distraits au profit de Maître Sarah FILIPPI, avocat- défenseur, sous sa due affirmation,
Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable,
Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires,
Composition
Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, Monsieur Éric SENNA, Conseiller, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint,
Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,
Lecture est donnée à l'audience publique du 9 JUILLET 2019, par Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Bénédicte SEREN-PASTEAU, Greffier, en présence de Monsieur Olivier ZAMPHIROFF, Premier Substitut du Procureur Général.
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