Abstract
Agent immobilier - Droit à commission (oui) - Nécessité d'un mandat de l'acquéreur (non) - Vice du consentement - Demande en nullité de la vente (non) - Manquement au devoir d'information (non) - Qualification des baux - Acquéreur disposant des informations - Bon de commission annexé à l'acte authentique
Résumé
L'agent immobilier étant mandataire du vendeur, il ne ressort nullement de la loi n° 1.252 du 12 juillet 2002 qu'il aurait dû être également mandataire de l'acquéreur, et que le droit à commission serait subordonné à la justification d'un mandat donné par l'acquéreur. Le bon de commission, annexé à l'acte authentique de vente, constitue ainsi un acte unique, qui matérialise le principe et le montant du droit à commission de l'agence. L'acquéreur avance par ailleurs un vice du consentement. Cependant, il ne remet nullement en question la validité de son acquisition, ni dans la présente procédure ni par une procédure distincte et ne tire donc pas les conséquences des atteintes prétendues à son consentement à la vente. L'acquéreur reproche également un manquement au devoir d'information concernant le caractère commercial du bail. Cependant, le devoir d'information n'est opposable à l'agent immobilier qu'autant que le futur acquéreur ignorait les éléments dont le défaut d'information fait l'objet du grief. Or, l'acquéreur, signataire du bail en qualité de représentant de la société locataire, ne peut sérieusement prétendre à une dissimulation de la nature du bail. À supposer que la vente ait été précipitée, il disposait d'un délai avant la réitération pour consulter sur les droits tirés du statut des baux commerciaux. L'agent immobilier a pu à bon droit poursuivre le versement de la commission.
Motifs
COUR D'APPEL
ARRÊT DU 5 MARS 2019
En la cause de :
* - Monsieur a. A., né le 22 avril 1944 à Dorfen (Allemagne), de nationalité italienne, Président administrateur délégué de société, demeurant X1 à Monaco (98000) ;
Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant ledit avocat-défenseur ;
APPELANT,
d'une part,
contre :
* - La Société Anonyme Monégasque G, inscrite au Répertoire du Commerce et de l'Industrie de la Principauté de Monaco sous le n°XX, dont le siège social est sis X2 - 98000 Monaco, prise en la personne de son Président administrateur délégué en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité audit siège ;
Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et ayant pour avocat plaidant ledit avocat-défenseur ;
INTIMÉE,
d'autre part,
LA COUR,
Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 14 décembre 2017 (R. 1726) ;
Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 26 janvier 2018 (enrôlé sous le numéro 2018/000083) ;
Vu les conclusions déposées les 3 avril 2018 et 3 juillet 2018 par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de la Société Anonyme Monégasque G ;
Vu les conclusions déposées le 8 mai 2018 par Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de Monsieur a. A. ;
À l'audience du 8 janvier 2019, vu la production de leurs pièces par les conseils des parties ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
La Cour statue sur l'appel relevé par Monsieur a. A.à l'encontre d'un jugement du Tribunal de première instance du 14 décembre 2017.
Considérant les faits suivants :
La SA H a confié à la SAM G qui exploite à Monaco une activité d'agent immobilier, la gestion de biens immobiliers dont elle était propriétaire, constituée du local n°Z-lot 282, situé au premier étage du bloc C de l'immeuble « Y », sis X3 à Monaco et d'un emplacement de parking, lots n° 39, au quatrième sous-sol du même immeuble.
Le 19 novembre 2015, la SA H a confié à la SAM G un mandat de vente desdits biens au prix de 3.300.000 euros.
Ces locaux sont loués à la SAM I, dont a. A. est le Président administrateur délégué, en vertu d'un bail initial du 21 avril 1997 consenti à l'origine à a. A. auquel a succédé un nouveau bail du 21 avril 2003 au profit de la SAM I pour une période de trois ans à effet du 1er avril 2003, reconduit depuis lors.
Selon courrier du 23 novembre 2015, la SAM G a informé la SAM I de la mise en vente du bien, du prix sollicité de 3.300.000 euros ainsi que de la possibilité de s'en porter acquéreur.
Après avoir émis le 24 novembre 2015 une première offre au prix de 3.000.000 euros qui a été refusée par le propriétaire, a. A. a formulé le 25 novembre 2015 une seconde offre au prix de 3.300.000 euros, dans laquelle il indique que les frais d'actes liés à l'intervention du notaire, seraient à sa charge, ajoutant : « de même que la rémunération de l'agence, dont je m'engage à payer la commission due, suivant le bon de commissions et ce, en cas de réalisation de la vente ».
Il a en outre signé le même jour un bon de commission précisant une commission d'un montant de 118.000 euros TTC au profit de la SAM G.
Par acte du 15 février 2016, par-devant Maître REY, notaire, la vente du bien est intervenue au profit d'a. A.
En l'état du refus de celui-ci de lui payer la commission de 118.000 euros TTC à laquelle elle estime avoir droit, après mise en demeure et une tentative de saisie-arrêt infructueuse sur le compte bancaire de ce dernier, la SAM G a été autorisée, par ordonnance du 18 mai 2016, à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur le bien immobilier appartenant à a. A. situé X3- immeuble « Y » - 4ème sous-sol, lot n° 39.
Suivant acte d'huissier du 22 juin 2016 la SAM G a fait assigner a. A. en sollicitant sa condamnation, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à lui payer la somme de 118.800 euros représentant la commission d'agence à laquelle il s'était engagé, et la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive.
Par jugement rendu le 14 décembre 2017, le Tribunal de première instance a :
* - condamné a. A.à payer à SAM G la somme de 118.800 euros, représentant sa commission d'agence composée de 99.000 euros HT, outre 19.800 euros de TVA, au titre de la vente de biens immobiliers, par la SA H à a. A. suivant acte authentique du 17 février 2016,
* - débouté les parties du surplus de leurs demandes,
* - condamné a. A. aux dépens.
Pour statuer ainsi, le Tribunal a retenu en substance que :
* - la qualité de secrétaire de direction d'e. W. précisée dans son témoignage ne constitue pas une cause de nullité ou de rejet de cette pièce,
* - l'absence de mandat entre la SAM G et a. A. ne constitue pas un motif légitime d'opposition au droit à commission de l'agence mandataire du vendeur, alors que l'acquéreur s'est engagé à son versement dans le cadre de l'offre qu'il a signée,
* - a. A. ne peut valablement se prévaloir de vices du consentement affectant la vente immobilière pour priver l'agence de sa commission, sans que la vente soit remise en question en son principe ou sur son prix,
* - si l'agent immobilier en sa qualité d'intermédiaire professionnel est tenu d'une obligation d'information et de conseil, a. A. ne peut faire grief à la SAM G de ne pas l'avoir informé du caractère commercial du bail, qui ne pouvait résulter que d'une requalification effectuée par décision de justice, sous la réserve de la réunion des conditions légales, au regard de la nature civile mentionnée dans les contrats de bail successivement établis à son profit puis à celui de la SAM I,
* - le devoir d'information n'est opposable à l'agent immobilier qu'autant que le futur acquéreur ignorait les éléments dont le défaut d'information fait l'objet du grief, alors qu'a. A. signataire à titre personnel du premier bail et en qualité de représentant de la SAM I pour les suivants, ne peut sérieusement prétendre à une dissimulation de la nature du bail, et qu'il lui appartenait de prendre tout conseil professionnel et d'engager toute procédure s'il estimait devoir bénéficier, pour lui ou pour sa société, de la propriété commerciale,
* - si la visite des locaux réalisée par la directrice commerciale de la SAM G en compagnie d'un possible acquéreur, l'a placé comme il le prétend dans un état de panique, il s'en déduit que l'information prodiguée au cours de cet épisode lui paraissait suffisamment inquiétante pour mettre en péril les intérêts des sociétés qu'il dirige et justifier de sa part une réaction appropriée pour prendre tous conseils et mesures propres à rétablir les droits prétendument bafoués de la SAM I,
* - quand bien même son offre d'achat aurait été effectuée dans la précipitation, il disposait d'un large délai pour engager toute consultation utile sur ses droits éventuels tirés du statut des baux commerciaux avant la date prévue pour la réitération de l'acte,
* - son attention aurait encore dû être attirée par la signification de la copie de l'offre d'achat signée par ses soins à la SAM I, à l'initiative de la SA H, venderesse, l'informant de son droit de préemption, et renvoyant à la nature commerciale du bail,
* - le bon de commission annexé à l'acte authentique de vente, constitue un acte unique au sens des dispositions de l'article 12 de la loi n° 1.252 du 12 juillet 2006, matérialisant le principe et le montant du droit à commission de l'agence.
Par exploit signifié le 26 janvier 2018, a. A. a interjeté appel à l'encontre du jugement rendu le 14 décembre 2017, par le Tribunal de première instance.
Aux termes de cet acte et d'écritures déposées le 8 mai 2018, il demande à la Cour de réformer la décision appelée et statuant à nouveau de :
* - débouter la SAM G de l'ensemble de ses demandes,
* - dire et juger que le bon de commission daté du 25 novembre 2015 n'est pas valable au sens de la loi et ne peut produire aucun effet,
* - dire et juger que le bon de commission daté du 25 novembre 2015 est entaché de nullité, à tout le moins qu'il ne peut valoir reconnaissance par lui-même d'une quelconque somme à la SAM G,
* - dire et juger que la SAM G n'a pas justifié d'un droit à commission et se trouve par conséquent irrecevable, en tout cas mal fondée en ses demandes,
* - dire et juger que la SAM G a manqué à ses obligations de diligence, de conseil et d'information,
* - dire et juger que la SAM G a commis une faute de nature à engager sa responsabilité,
* - dire et juger que les fautes ainsi commises la privent de son droit à commission,
* - condamner la SAM G à lui payer la somme de 310.000 euros, à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice tant moral que financier,
* - ordonner la rétractation de l'ordonnance sur requête en date du 18 mai 2016, et par voie de conséquence la radiation de l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire prise le 24 mai 2016 à la Conservation des Hypothèques de Monaco, volume 212 n° 33 avec toutes conséquence de droit.
a. A. conteste devoir payer une commission au motif que la SAM G a failli à ses obligations de conseil et d'information en lui dissimulant la nature commerciale du bail et partant le droit de préemption dont bénéficiait le locataire en cas de vente à un tiers et la possibilité de prétendre à une indemnité d'éviction.
Il soutient que :
* - l'article 12 de la loi n° 1.252 du 12 juillet 2002, à l'instar de la loi française du 2 janvier 1970 dite Hoguet, impose à l'agent immobilier d'obtenir un mandat préalable à toute intervention,
* - la rémunération de la SAM G n'est pas justifiée, dès lors que :
* le mandat de vente simple auquel s'est référé le Tribunal mettait la rémunération du mandataire à la charge du vendeur et que seul un mandat de recherche signé par ses soins aurait permis à l'agence de justifier sa rémunération selon des modalités distinctes,
* le montant de la commission est disproportionné par rapport aux diligences accomplies, ne comprenant ni recherche, ni visite, ni rédaction d'acte puisque l'acquéreur occupait les lieux qui lui ont été proposés à l'achat, et alors qui plus est qu'il bénéficiait d'un droit de préemption que lui avait reconnu le propriétaire du bien,
* - le droit à commission est subordonné à l'exigence d'un mandat écrit, de sorte que le seul bon de commission établi est insuffisant pour reconnaître l'existence d'un droit à commission,
* - en l'absence de mandat écrit, la perception d'une commission ne peut résulter que d'une convention conclue postérieurement à la signature de l'acte authentique,
* - le bon de commission annexé à l'acte de vente est insuffisant dès lors que l'acte authentique de vente ne contient aucune mention relative à la commission réclamée,
* - en s'abstenant de le mettre en garde et de l'informer sur l'utilité de l'acquisition (malgré le droit de préemption dont il bénéficiait) et/ou les conséquences de la nature du bail (lui laissant croire que le bail était de nature civile), ainsi que sur la transaction immobilière qu'elle proposait de négocier, la SAM G a manqué à ses obligations d'information et de conseil, engageant sa responsabilité professionnelle.
Par écritures déposées les 3 avril et 3 juillet 2018, la SAM G a conclu au débouté de l'appel interjeté, sollicité la confirmation du jugement critiqué en toutes ses dispositions et y ajoutant, réclamé condamnation d'a. A. à lui payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive outre les entiers dépens.
Elle objecte que l'article 12 de la loi n° 1.252 du 12 juillet 2002 ne subordonne pas la validité d'une commission à un mandat écrit, lequel constitue une simple faculté, tout en précisant qu'elle a bien agi au cas présent en vertu du mandat de vente que lui a consenti la SA H le 19 novembre 2015.
Elle affirme que la seule condition nécessaire au paiement de la commission au regard de la loi monégasque est la conclusion effective de l'acte de vente et que les jurisprudences françaises sur lesquelles se fonde l'appelant rendues en application d'une législation différente, ne sont pas transposables.
Elle souligne qu'elle n'a pas signé de mandat avec a. A. de sorte que les dispositions du Code civil qu'il invoque ne sont pas applicables.
Elle conteste tout manquement fautif dans son devoir d'information et de conseil :
* - en relevant que le bail signé entre les parties a été convenu comme étant de nature civile et non commerciale,
* - en précisant que les locaux loués consistent en un appartement situé en étage ne présentant pas les caractéristiques d'un local à usage commercial,
* - en indiquant que seule la SA H a jugé utile de signifier à la SAM I le droit de préemption qu'elle pouvait tenir de la loi n° 490 du 24 novembre 1948, de sorte que n'étant pas elle-même professionnelle du droit, elle ne pouvait conseiller utilement l'appelant sur la prétendue commercialité du bail.
Elle dément également toute pression que son employée Madame O. aurait exercé à l'égard de la SAM G, contestant la valeur probante de l'attestation produite au débat pour en justifier et rédigée par la propre secrétaire de direction de la SAM I et par la même d'a. A.
Elle invoque la mauvaise foi et la résistance abusive de ce dernier, homme d'affaires averti, qui n'a jamais remis en cause la validité de l'acquisition de l'appartement et n'a émis de reproches à son encontre qu'a posteriori, pour tenter de remettre en cause le paiement de la commission auquel il avait pourtant consenti, l'obligeant à poursuivre le paiement de sa créance par la voie judiciaire et à engager des frais importants pour procéder à son recouvrement.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.
SUR CE,
* Sur la recevabilité de l'appel :
Attendu que le jugement rendu le 14 décembre 2017 par le Tribunal de première instance a été signifié le 9 janvier 2018 à a. A. ;
Que se trouvant formé dans le respect des règles de délai et de forme applicables, l'appel sera déclaré recevable ;
* Sur la demande en paiement de la commission d'agent immobilier :
Attendu que l'appelant soutient que l'article 12 de la loi n° 1.252 du 12 juillet 2002 impose à l'agent immobilier d'obtenir un mandat préalable à toute intervention, de sorte qu'en considérant que le seul bon de commission était suffisant pour prétendre à une commission, les premiers juges ont violé les règles impératives posées par ce texte dont le non-respect entraine pourtant notamment la perte de la rémunération ;
Attendu que la perception de commissions par un agent immobilier, à l'occasion des opérations portant sur les immeubles ou les fonds de commerce qu'il est autorisé à effectuer pour le compte d'autrui, est encadrée par la loi n° 1.252 du 12 juillet 2002 ;
Que l'article 12 de ce texte dispose que :
« À la demande du client, le titulaire de l'autorisation administrative doit établir un mandat par lequel il est habilité à négocier ou à s'engager à l'occasion d'opérations spécifiées à l'article premier. Ce mandat doit être écrit et limité dans le temps.
Même en l'absence d'un mandat, aucun bien, effet, valeur, somme d'argent représentatif de commissions, de frais de recherche, de démarche, de publicité ou d'entremise quelconque, n'est dû au titulaire d'une autorisation administrative ou ne peut être accepté par lui, avant qu'une des opérations visées à l'article premier ait été effectivement conclue et constatée dans un même acte constatant l'engagement des parties » ;
Que l'article premier vise notamment la vente d'immeubles bâtis au titre des opérations concernées ;
Qu'il s'évince en premier lieu de ces dispositions que l'exigence d'un mandat écrit est subordonnée à la demande du client et ne constitue pas un préalable obligatoire à toute intervention, tel que soutenu à tort par l'appelant ;
Qu'en tout état de cause, si la SA H a confié le 19 novembre 2015 un mandat de vente du bien, objet du bail, à la SAM G, auquel a. A. est tiers, ce dernier n'a pas consenti de mandat de recherche ni d'autre nature à la SAM G, et a fortiori demandé l'établissement d'un tel mandat par cette dernière ;
Que les premiers juges ont également relevé de manière pertinente que la SAM G étant mandataire du vendeur, il ne ressort nullement de la loi précitée qu'elle aurait dû être également mandataire de l'acquéreur et que le droit à commission serait subordonné à la justification d'un mandat donné par celui-ci ;
Que les développements opérés à ce titre sont donc inopérants ;
Qu'il ressort en second lieu des dispositions légales précitées que l'agent immobilier ne peut prétendre au paiement d'une commission que si celle-ci a été convenue avant la vente ou à tout le moins qu'elle apparaisse dans un acte unique constatant l'engagement des parties, avant la signature duquel elle ne peut en tout état de cause être versée ;
Attendu qu'au cas d'espèce, a. A. précise au terme de sa seconde offre formulée le 25 novembre 2015 au prix de 3.330.000 euros, qu'il prendra en charge les frais d'actes d'intervention du notaire outre la rémunération de l'agence, à titre de commission, suivant bon de commission annexé ;
Qu'il reconnaît par ce bon revêtu de sa signature le droit à commission de la SAM G sur la vente, fixé à 3 % plus TVA 20 %, soit 99.000 euros + 19.800 euros = 118.800 euros, payable au plus tard le jour de sa signature de l'acte authentique chez le notaire, prévue au plus tard le 15 février 2016 ;
Que les parties se trouvent donc liées par ce bon de commission, indissolublement attaché à l'offre d'achat, sans que l'absence de mandat entre elles constitue un motif valable d'opposition au droit à commission de l'agence, mandataire du vendeur ;
Attendu par ailleurs que ce bon de commission se trouve annexé à l'acte authentique de vente, qui constitue ainsi un acte unique au sens de l'article 12 alinéa 2 de la loi n° 1.252 du 12 juillet 2002, qui matérialise le principe et le montant du droit à commission de l'agence ;
Que la perception éventuelle de commissions de la part tout à la fois du vendeur et de l'acquéreur n'est pas prohibée, rendant inopérante la critique encore avancée à ce titre par l'appelant ;
Attendu pour le surplus qu'a. A. invoque des vices du consentement, constitués de la contrainte morale alimentée par une rétention dolosive d'informations essentielles, déterminants selon lui, au motif que s'il en avait eu connaissance il n'aurait pas acheté le bien ;
Que cependant force est de constater, comme l'ont souligné à juste titre les premiers juges, que nonobstant les vices déterminants dont il se prévaut, l'appelant n'en a tiré aucune conséquence au plan juridique à l'égard de la vente ;
Qu'il ne justifie en effet d'aucune procédure initiée aux fins de voir sanctionner l'atteinte portée à son consentement, alors que la reconnaissance de tels vices est censurée par l'annulation du contrat qui en est atteint outre l'allocation de dommages-intérêts ;
Qu'il ne peut donc valablement tirer argument des vices allégués pour se limiter à priver l'agence de la commission au versement de laquelle il s'est engagé, alors que l'acte a été régularisé et qu'il ne remet d'aucune manière en cause la validité de son acquisition ;
Attendu encore qu'en sa qualité d'intermédiaire professionnel, même s'il n'est pas mandataire de l'acquéreur, l'agent immobilier est tenu d'une obligation d'information et de conseil qui lui impose de délivrer loyalement à celui qui se porte acquéreur les informations en sa possession de nature à influer sur sa décision ;
Que l'appelant reproche d'abord à la SAM G de ne pas l'avoir informé du caractère commercial du bail dont était titulaire la SAM I ;
Qu'à cet égard, le devoir d'information n'est opposable à l'agent immobilier qu'autant que le futur acquéreur ignorait les éléments dont le défaut d'information sous-tend le grief ;
Attendu qu'il ressort en l'espèce des contrats de bail successifs, établis au profit d'a. A. puis au profit de la SAM I dont il est le Président administrateur délégué, que ceux-ci ne sont pas des contrats de bail commercial ;
Qu'en effet comme l'ont justement relevé les premiers juges, le dernier bail en date établi le 21 avril 2003 porte sur une location « à usage d'habitation bourgeoise et sans activité commerciale » tandis que les précédents, depuis 1997, portaient sur une location « à usage exclusif de bureaux administratifs sans aucune activité commerciale » ;
Que l'appelant reconnaît lui-même dans ses écritures (page 3 des conclusions du 8 mai 2018) que « la nature civile du bail était donc expressément visée » ;
Que les mentions expresses qui y figurent ne militent donc pas en faveur d'une évidence concernant le caractère commercial de la location en cause, dont la SAM G aurait dû l'informer ;
Qu'il ne peut être reproché à l'agent immobilier une quelconque réticence ou manœuvre, en dissimulant la nature commerciale du bail et laissant croire que le bail était de nature civile, alors que toutes ses mentions l'affirment précisément ;
Que bien plus, a. A. signataire à titre personnel du bail d'origine et en qualité de représentant de la SAM I des suivants ne peut raisonnablement prétendre à une dissimulation de la nature du bail auquel il est partie ;
Qu'en sa qualité de chef d'entreprise, dirigeant de trois sociétés hébergées dans les mêmes locaux, dont le rôle social consiste à prendre des décisions préservant l'intérêt de ses sociétés, comme relevé pertinemment par les premiers juges, il lui appartenait le cas échéant de prendre tout conseil professionnel et d'engager toute procédure s'il estimait devoir bénéficier pour lui ou sa société de la propriété commerciale ;
Que par ailleurs les conditions de la visite de vente réalisée dans les locaux loués le 10 novembre 2015 par Madame O. directrice commerciale de la SAM G, accompagnée d'une personne présentée comme un potentiel acquéreur, qui, à cette occasion, l'aurait menacé d'un déménagement imminent s'il ne se portait pas acquéreur, faute de prorogation du bail au-delà du 30 avril 2016, ne permettent pas de caractériser un comportement fautif de la part de cette dernière, dès lors que l'information délivrée correspondait à la réalité juridique, en l'état des informations en sa possession au regard des mentions figurant au bail ;
Que bien plus le climat de pression dont il aurait été victime, suscitant terreur et panique de sa part, ne ressort pas des courriels échangés avec a. O. dans le cadre de la concrétisation de la vente ;
Qu'il convient par contre de relever que les répercussions psychologiques de cette information sur a. A. telles qu'il les rapporte, qui paraissaient suffisamment inquiétantes pour mettre en péril les intérêts de ses sociétés, auraient justifié une réaction adaptée et immédiate de sa part, en sollicitant tout conseil extérieur utile pour faire face à une telle situation ;
Que si son consentement a été surpris comme il le prétend, le conduisant à présenter une offre dans la précipitation, il n'en demeure pas moins que passé le premier temps de stupeur, il disposait d'un délai de réflexion suffisant, de l'ordre de quatre mois, avant la réitération de la vente prévue au plus tard le 15 février 2016, qu'il lui appartenait de mettre à profit pour lancer toute consultation sur ses droits éventuels tirés du statut des baux commerciaux ;
Qu'il ne justifie pourtant avoir entrepris aucune démarche en ce sens ;
Que la crédulité doublée d'une totale passivité dont se prévaut a. A. a pourtant cessé après la signature de l'acte authentique, lorsqu'il a entrepris de contester le principe du paiement du bon de commission signé par ses soins, interrogeant de plus fort sur le caractère différé de sa réaction ;
Que les premiers juges ont encore stigmatisé à juste titre son manque de réactivité alors que le 29 janvier 2016 la SA H a fait signifier par voie d'huissier à la SAM I une copie de l'offre d'achat signée par ses soins, en l'informant de ce qu'elle bénéficiait d'un droit de préemption prévu par l'article 32 ter de la loi n° 490 ;
Qu'au-delà des interrogations que peut susciter cette démarche de la part de la société venderesse, alors que le statut des baux commerciaux ne pouvait résulter, au regard des mentions contenues au bail, que d'une requalification effectuée par décision de justice sous la réserve de la réunion des conditions légales, force est de constater qu'a. A. disposait à compter de cette date des éléments d'informations suffisants pour l'alerter sur la nature du bail et engager toute consultation propre à répondre à ses inquiétudes et interrogations ;
Que contrairement à toute attente, il ne justifie encore d'aucune réaction, de quelque nature que ce soit ;
Qu'il ne peut sérieusement soutenir, au regard des informations dont il disposait dès l'origine (contrat de bail de nature civile en sa possession) et de celles portées alors à sa connaissance (dénonce d'un prétendu droit de préemption bénéficiant à sa société renvoyant à la nature commerciale d'un bail), dont le caractère contradictoire manifeste devait nécessairement l'interpeller, avoir subi de la part de la SAM G des agissements qu'il qualifie de dolosifs ;
Attendu qu'il doit enfin être relevé que la notification dont il a été destinataire le 29 janvier 2016, aux termes de laquelle a été pour la première fois évoqué un droit de préemption au bénéfice de la SAM I, a été réalisée à l'initiative de la SA H, élisant domicile en l'étude de Maître REY, notaire, sans que la SAM G ne soit mentionnée à un quelconque titre dans cette démarche ;
Qu'aucun manquement à son obligation d'information et de conseil ne peut dès lors être caractérisé à l'encontre de la SAM G du fait d'un acte où elle ne figure pas et dont il n'est pas démontré qu'elle en aurait eu préalablement connaissance ;
Attendu qu'au regard de ces éléments, la SAM G a pu à bon droit poursuivre le versement de la commission à laquelle a. A. s'était engagé à son profit et mettre en œuvre les voies d'exécution propres à assurer son recouvrement ;
Qu'il convient en conséquence de confirmer la décision entreprise de ce chef ;
* Sur la demande de dommages-intérêts présentée par a. A. :
Attendu que l'appelant réclame le paiement à son profit de la somme de 310.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices moral et financier ;
Que faute pour lui de démontrer le comportement fautif de la SAM G à son endroit dans le cadre de la vente dont elle avait la charge, sa demande non fondée ne peut prospérer ;
Que le jugement entrepris mérite également confirmation à cet égard ;
* Sur la demande de radiation d'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire :
Attendu que l'appelant succombant en son appel, sa demande à ce titre est en voie de rejet ;
Que la décision de première instance sera confirmée sur ce point ;
* Sur la demande de dommages-intérêts présentée par la SAM G :
Attendu que la SAM G sollicite le paiement à son profit de la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, invoquant la mauvaise foi et la résistance déployées par a. A. pour s'opposer à la commission qui lui était due, allant jusqu'à vider son compte bancaire, rendant inopérante la saisie-arrêt qui avait été autorisée à son bénéfice ;
Attendu que, la Cour se référant aux développements précédents, relève que l'appelant n'a pas pu se méprendre sur la portée de ses engagements à l'égard de la SAM G, alors qu'il a contesté tardivement la rémunération dont il se trouve redevable à son égard pour des éléments dont il n'est pas démontré qu'elle ait eu connaissance, la contraignant à engager des frais pour défendre ses droits en justice ;
Qu'au regard des circonstances de la cause, il convient de lui allouer une somme de 5.000 euros en réparation de son préjudice ;
* Sur les dépens :
Partie succombante, a. A. sera condamné aux dépens d'appel, distraits au profit de Maître Thomas GIACCARDI, Avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,
statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare recevable l'appel formé par a. A.
Confirme le jugement rendu le 14 décembre 2017 par le Tribunal de première instance en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne a. A. à payer la somme de 5.000 euros à la SAM G à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,
Condamne a. A. aux dépens d'appel, dont distraction au profit de Maître Thomas GIACCARDI, Avocat-défenseur, sous sa due affirmation,
Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable,
Vu les articles 58 et 62 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires.
Composition
Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Claire GHERA, Conseiller, assistées de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint,
Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,
Lecture est donnée à l'audience publique du 5 MARS 2019, par Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Nadine VALLAURI, Greffier en Chef adjoint, en présence de Madame Sylvie PETIT- LECLAIR, Procureur Général.
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