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31/10/2017 | MONACO | N°16490

Monaco | Cour d'appel, 31 octobre 2017, La société Anonyme de droit luxembourgeois dénommée WALLY YACHTS S.A., en faillite et Maître Alain RUKAVINA c/ la société des Iles Vierges Britanniques ARCHIMEDIA (BVI) CORP et la Société Anonyme Monégasque dénommée WALLY


Motifs

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 31 OCTOBRE 2017

En la cause de :

1 - La société Anonyme de droit luxembourgeois dénommée WALLY YACHTS S. A., en faillite, ayant son siège social à L - 1420 Luxembourg, 5 avenue Gaston Diderich, inscrite au Registre de Commerce et des Sociétés de Luxembourg sous le numéro B 79.548 agissant poursuites et diligences de son Curateur désigné par jugement rendu par le Tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg en date du 23 décembre 2013, Maître Alain RUKAVINA, Avocat à la Cour, domicilié et demeurant à L - 1142 Luxembourg,

9 rue de Pierre d'Aspelt ;

2 - Maître Alain RUKAVINA, Avocat à la Cour, domicilié et de...

Motifs

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 31 OCTOBRE 2017

En la cause de :

1 - La société Anonyme de droit luxembourgeois dénommée WALLY YACHTS S. A., en faillite, ayant son siège social à L - 1420 Luxembourg, 5 avenue Gaston Diderich, inscrite au Registre de Commerce et des Sociétés de Luxembourg sous le numéro B 79.548 agissant poursuites et diligences de son Curateur désigné par jugement rendu par le Tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg en date du 23 décembre 2013, Maître Alain RUKAVINA, Avocat à la Cour, domicilié et demeurant à L - 1142 Luxembourg, 9 rue de Pierre d'Aspelt ;

2 - Maître Alain RUKAVINA, Avocat à la Cour, domicilié et demeurant à L - 1142 Luxembourg, 9 rue Pierre d'Aspelt, ès qualités de représentant de la masse des créanciers de la faillite de la société de droit Luxembourgeois dénommée WALLY YACHTS S. A., en faillite selon jugement rendu par le Tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg en date du 23 décembre 2013 ;

Ayant tous deux élu domicile en l'Étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANTS

d'une part,

contre :

1- La société des Iles Vierges Britanniques ARCHIMEDIA (BVI) CORP, dont le siège social est sis Fleming House, Wiskhams Cay, P. O. Box 662, Road Town, Tortola, Iles Vierges Britanniques, prise en la personne de son administrateur en exercice ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

2 - La Société Anonyme Monégasque dénommée WALLY, immatriculée au Répertoire du Commerce et de l'Industrie de Monaco sous le numéro 94 S0 03020, dont le siège social est sis 4/6, avenue Albert II à MC 98000 MONACO, prise en la personne de son Président Délégué en exercice, domicilié et demeurant en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

INTIMÉS,

d'autre part,

LA COUR,

Vu l'Ordonnance de référé rendue le 1er mars 2017 (R.3296) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 15 mars 2017 (enrôlé sous le numéro 2017/000127) ;

Vu les conclusions déposées le 11 juillet 2017 par Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de la Société des Iles Vierges Britanniques ARCHIMEDIA (B. V. I.) CORP ;

Vu les conclusions déposées le 11 juillet 2017 par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de la Société Anonyme Monégasque WALLY ;

À l'audience du 10 octobre 2017, vu la production de leurs pièces par les conseils des parties ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par la société Anonyme de droit luxembourgeois dénommée WALLY YACHTS S.A. et par Maître Alain RUKAVINA à l'encontre d'une Ordonnance de référé en date du 1ermars 2017.

Considérant les faits suivants :

Par arrêt en date du 24 février 2016, la Cour d'appel a infirmé partiellement l'Ordonnance rendue le 20 janvier 2016 par le Président du Tribunal de première instance, en ce qu'elle avait dit n'y avoir lieu de faire droit à la requête n° 2016/000212 et, statuant à nouveau, a autorisé la société des Iles Vierges Britanniques ARCHIMEDIA à procéder à la saisie-arrêt de la totalité des 19.997 actions détenues par la société de droit luxembourgeois WALLY YACHTS dans le capital de la SAM WALLY.

Selon acte d'huissier en date du 11 avril 2016, la SA WALLY YACHTS SA et Maître Alain RUKAVINA, agissant en qualité de représentant de la masse des créanciers de ladite société en faillite selon jugement rendu par le Tribunal d'arrondissement de et à Luxembourg en date du 23 décembre 2013, ont fait citer en référé devant le Président du Tribunal de première instance la société des Iles Vierges Britanniques ARCHIMEDIA, en présence de la SAM WALLY, à l'effet de voir :

« À titre principal :

* constater que la créance de la société ARCHIMEDIA n'est pas fixée provisoirement dans l'arrêt d'autorisation de saisie en date du 24 février 2016 et de dire en conséquence nulle la saisie-arrêt du 25 février 2016,

subsidiairement :

* constater que la créance de la société ARCHIMEDIA a été rejetée par le Tribunal des faillites de Luxembourg et dire en conséquence n'y avoir lieu à autoriser la saisie-arrêt,

en tout état de cause :

* d'ordonner la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée le 25 février 2016 ».

Dans leurs dernières conclusions, la SA WALLY YACHTS et Maître Alain RUKAVINA, son curateur, demandaient au juge des référés de leur donner acte de ce qu'ils renonçaient à leur demande de nullité dirigée contre la saisie-arrêt du 25 février 2016, de débouter par suite la société ARCHIMEDIA de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de l'assignation en date du 11 avril 2016 et de constater que par l'effet du jugement de faillite luxembourgeois du 23 décembre 2013 déclaré exécutoire en Principauté de Monaco avec toutes conséquences de droit par jugement du Tribunal de Première Instance du 1er décembre 2016 assorti de l'exécution provisoire, la SA WALLY YACHTS est dessaisie de ses biens, y compris ceux situés en Principauté de Monaco, et maintiennent pour le surplus leur prétentions initiales.

La société des Iles Vierges Britanniques ARCHIMEDIA, dans le dernier état de ses écritures judiciaires, demandait pour sa part au juge des référés :

« À titre principal :

* de prononcer la nullité, avec toutes conséquences de droit, de l'exploit d'assignation en date du 11 avril 2016,

À titre subsidiaire :

* de rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de la SA WALLY YACHTS et de Maître Alain RUKAVINA et de « confirmer » (sic) l'arrêt rendu le 24 février 2016 par la Cour d'appel ».

Suivant ordonnance en date du 1er mars 2017, le juge des référés se déclarait incompétent pour connaître des demandes tendant à voir apprécier, dans le cadre de la voie de recours du pourvoi en référé instituée par les articles 492 et 852-1° du Code de procédure civile, le bien-fondé de l'autorisation de saisie-arrêt délivrée le 24 février 2016 par la Chambre du Conseil de la Cour d'appel à la société ARCHIIMEDIA et à ordonner consécutivement la mainlevée de ladite saisie-arrêt, toutes demandes formées par la SA WALLY YACHTS et son curateur, auxquelles s'est associée la SAM WALLY, et laissait les dépens de la présente ordonnance à la charge de la SA WALLY YACHTS et de son curateur et de la SAM WALLY.

Au soutien de cette décision, le Premier juge relevait en substance que :

* au soutien de leurs recours, les demandeurs entendent voir reconnaître au Juge des référés le pouvoir d'apprécier si l'autorisation de saisie a été délivrée à tort ou à raison, y compris lorsqu'une telle autorisation émane de la Cour d'appel,

* l'incompétence éventuelle du Juge des référés relevant du principe de l'ordre mais surtout du degré des juridictions doit être relevée d'office par le magistrat saisi, en application des dispositions de l'article 263 du Code de procédure civile,

* la Chambre du Conseil de la Cour d'appel, lorsqu'elle a autorisé le 24 février 2016 la société ARCHIMEDIA à pratiquer une saisie-arrêt de parts sociales, a expressément indiqué dans le dispositif de son arrêt qu'il devrait lui en être référé en cas de difficultés,

* l'article 492 du Code de procédure civile combiné avec le 1° de l'article 852 du Code de procédure civile, ouvre spécifiquement la voie de recours en référé rétractation à celui auquel une ordonnance unilatérale de saisie-arrêt fait grief et qui n'a pu faire valoir ses droits lors de l'instance initiale,

* l'autorisation de saisie-arrêt peut ainsi émaner de plusieurs juridictions distinctes à différents niveaux de l'organisation judiciaire, mais l'article 492 du Code de Procédure Civile ne précise toutefois pas devant quelle juridiction le pourvoi en référé qu'il institue doit être porté et n'attribue pas davantage spécifiquement compétence au Juge des référés du Tribunal de Première Instance pour connaître de toutes les demandes de rétractation de décisions ordonnant une saisie-arrêt, quelle que soit la juridiction dont elles émanent,

* l'instance en rétractation introduite par la partie à laquelle une autorisation de saisie-arrêt fait grief ne peut donc être utilement portée que devant la juridiction qui a autorisé la saisie-arrêt, à fortiori lorsque cette dernière s'est expressément réservée cette faculté dans sa décision,

* un juge unique du Tribunal de première instance, fut-il son Président, n'a pas le pouvoir de remettre en cause le bien-fondé d'une autorisation de saisie-arrêt octroyée collégialement par une juridiction d'un degré supérieur,

* le Président du Tribunal de première instance n'est donc pas compétent pour apprécier, dans le cadre de la voie du recours en référé, instituée par les articles 492 et 852-1° du Code de procédure civile, si l'autorisation de saisie-arrêt donnée le 24 février 2016 à la société ARCHIMEDIA par la Chambre du Conseil de la Cour d'appel a été délivrée à tort ou à raison et pour statuer sur la demande de mainlevée de cette saisie-arrêt.

Suivant exploit en date du 15 mars 2017, la société WALLY YACHTS et Maître Alain RUKAVINA représentant la masse des créanciers de la faillite de la société WALLY YACHTS ont interjeté appel de l'ordonnance rendue le 1er mars 2017 par le Juge des référés dont ils ont sollicité la réformation en demandant à la Cour de :

* dire que le Président du Tribunal de première instance était compétent pour statuer sur l'autorisation de saisie-arrêt du 24 février 2016,

* constater que la créance de la société ARCHIMEDIA CORP a été rejetée par le tribunal des faillites de Luxembourg et que cette décision à l'autorité de la chose jugée,

* dire n'y avoir lieu à autoriser la saisie-arrêt,

* constater en tout état de cause que le jugement de faillite luxembourgeois du 23 décembre 2013 a été déclaré exécutoire en Principauté de Monaco par jugement du Tribunal de première instance du 1er décembre 2016 assorti de l'exécution provisoire,

* constater dès lors que la société WALLY YACHTS est dessaisie de ses biens y compris en Principauté de Monaco,

* ordonner la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée le 25 février 2016 et condamner la société ARCHIMEDIA CORP aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Les appelants soutiennent pour l'essentiel que :

* la jurisprudence faisant une application stricte des dispositions de l'article 492 du Code de procédure civile donne compétence au juge des référés pour confirmer ou infirmer l'autorisation de saisie-arrêt même lorsque celle-ci émane d'une juridiction supérieure eu égard au recours exercé par le créancier requérant auquel la mesure conservatoire avait été refusée par ordonnance unilatérale,

* une telle compétence n'a au demeurant pas été contestée par la société ARCHIMEDIA, une décision de principe consacrant de surcroît cette compétence exclusive ayant été publiée au recueil des décisions judiciaires, en l'occurrence l'ordonnance prise le 21 décembre 1998 par le Juge des référés,

* la présence de la clause de réserve de référé dans l'arrêt de la Chambre du conseil de la Cour d'appel ne peut procéder que d'une erreur matérielle car le référé devant la Chambre du conseil de la Cour d'appel ne repose sur aucune existence procédurale légalement consacrée,

* seul un référé restreint sur les difficultés d'exécution des arrêts rendus par la Cour devant le Premier président de la Cour est prévu par l'article 434 du Code de procédure civile,

* l'argument inhérent à la procédure en la forme des référés ou en matière de référé n'est pas davantage convaincant car aucun texte de loi n'instaure cette procédure spéciale devant la Cour d'appel, alors même que l'article 492 du Code de procédure civile prévoit que le débiteur peut se pourvoir en référé, ce qui laisse supposer qu'il ne peut le faire que devant une juridiction disposant de telles prérogatives légales,

* la suspension des poursuites et le caractère insaisissable des biens de la société WALLY YACHTS résultent du droit luxembourgeois et de la procédure ayant abouti aux termes d'un jugement rendu le 1er décembre 2016 à l'exequatur des jugements de faillite luxembourgeois lesquels produisent désormais leurs effets en Principauté de Monaco.

La société anonyme WALLY, intimée, entend voir réformer l'ordonnance de référé entreprise en ce que le juge des référés s'est déclaré incompétent pour apprécier le recours en mainlevée et en ce qu'elle l'a condamné solidairement aux dépens.

Relevant appel incident, elle entend voir dire et juger que le Président du Tribunal de première instance statuant en référé était compétent pour statuer sur la demande de rétractation de l'autorisation de saisie-arrêt du 24 février 2016, constater que la société WALLY YACHTS a bien fait l'objet d'une procédure collective au Luxembourg dont les effets s'imposent à Monaco en suite du jugement du 1er décembre 2016 par lequel le Tribunal de première instance déclarant exécutoire à Monaco la décision du 23 décembre 2013 ouvrant la faillite de la société WALLY YACHTS et constater que ce jugement d'exequatur est assorti de l'exécution provisoire et a été signifié le 12 décembre 2016 en sorte qu'il est exécutoire et donner acte à la société WALLY de ce qu'elle s'associe pleinement à l'argumentation présentée par la société WALLY YACHTS et son curateur, et ordonner en conséquence la mainlevée la saisie-arrêt pratiquée le 24 février 2016 avec toutes conséquences de droit.

La société WALLY fait pour l'essentiel valoir que :

* le Président du Tribunal de première instance a indéniablement compétence pour statuer en référé sur le bien-fondé d'une autorisation de saisie-arrêt même quand celle-ci était prononcée par la Cour d'appel statuant en Chambre du conseil dans le cadre d'une procédure unilatérale,

* la solution retenue par le Premier juge priverait la partie saisie d'un éventuel recours à l'encontre de l'arrêt de la Cour d'appel statuant en forme des référés ce qui serait inéquitable et non conforme aux principes essentiels posés par la Convention européenne des droits de l'homme,

* la mainlevée est une conséquence inéluctable des effets de la faillite luxembourgeoise reconnue judiciairement à Monaco,

* la mainlevée de cette saisie-arrêt s'impose avec toutes conséquences de droit,

* les dépens ne pouvaient être mis à la charge du tiers saisi, lequel n'a pas la qualité de partie à l'instance.

La société ARCHIMEDIA CORP, intimée, entend pour sa part voir à titre principal confirmer l'ordonnance du 1er mars 2017 en ce que le Président du tribunal s'est déclaré incompétent pour statuer sur le bien-fondé de la saisie-arrêt du 24 février 2016, et à titre subsidiaire voir constater que la société ARCHIMEDIA justifie d'une créance certaine en son principe et confirmer l'arrêt rendu le 24 février 2016 par la Cour d'appel en ce qu'il a autorisé la saisie-arrêt des parts sociales détenues par la société WALLY YACHTS dans le capital de la société WALLY et en conséquence rejeter l'ensemble des demandes de la société WALLY YACHTS et de son curateur et les condamner aux entiers dépens.

La société ARCHIMEDIA expose notamment que :

* le premier juge a valablement estimé que la demande de mainlevée d'une mesure conservatoire pouvait être valablement formée devant la juridiction ayant autorisé cette mesure tout en relevant justement que le juge unique du tribunal de première instance ne pouvait remettre en cause le bien-fondé d'une autorisation de saisie-arrêt prise par une juridiction d'un degré supérieur,

* l'arrêt de la Chambre du conseil du 24 février 2016 s'est expressément réservé la connaissance du contentieux de rétractation et la décision du 8 décembre 1998 n'est pas transposable au cas d'espèce,

* le Président du tribunal était donc incompétent pour connaître de la demande de mainlevée de la saisie-arrêt qui lui a été soumise,

* le principe certain de créance a été confirmé par le jugement du 23 décembre 2013 et par le jugement du 26 mai 2014 rendu par le tribunal d'arrondissement de Luxembourg siégeant en matière commerciale,

* le jugement rendu le 1er décembre 2016 par le Tribunal de première instance de Monaco ordonnant l'exécution provisoire des décisions luxembourgeoises susvisées n'est pas définitif puisqu'il a été frappé d'appel et qu'un arrêt rendu le 9 janvier 2017 a ordonné la réouverture des débats,

* la présente juridiction statuant en référé rejettera donc les demandes de la société WALLY YACHTS et confirmera la saisie-arrêt des actions détenues par elle dans le capital de la société WALLY.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Attendu que tant l'appel principal que l'appel incident ont été formés régulièrement dans les conditions de forme et de délai prévues par le Code de procédure civile et doivent être déclarés recevables ;

Attendu sur la compétence de la juridiction amenée à connaître des demandes formées par la société WALLY YACHTS et le représentant de la masse des créanciers, qu'en dépit de la formule présente dans le dispositif de l'arrêt du 24 février 2016, procédant vraisemblablement d'une erreur matérielle, il n'appartient pas à la Chambre du conseil de la Cour d'appel de se prononcer sur la demande de rétractation concernant la décision d'autorisation de saisie-arrêt prise par ses soins dans le cadre d'un contentieux unilatéral ;

Qu'en effet, la voie procédurale instituée par les dispositions combinées des articles 492 du Code de procédure civile et 852-1 du Code de procédure civile caractérise un recours en référé ;

Mais attendu que la procédure de référé, voire en la forme des référés, n'existe devant la Cour d'appel que dans le cadre exclusif du recours en difficulté d'exécution concernant un de ses arrêts, relevant de la compétence du Premier président de la Cour d'appel, par application des dispositions de l'article 434 du Code de procédure civile.

Attendu que si l'autorisation contestée émane en l'espèce de la Chambre du conseil de la Cour d'appel, en l'état du recours exercé par la société ARCHIMEDIA à l'encontre d'une ordonnance refusant de faire droit à sa demande de saisie-arrêt, une telle circonstance n'a pas pour effet, contrairement à ce qu'a jugé l'ordonnance entreprise, de priver le Juge des référés de ses prérogatives naturelles inhérentes à sa faculté de rétractation de l'autorisation de saisie-arrêt ;

Attendu qu'il est par ailleurs constant que la décision prise le 24 février 2016 par la Chambre du conseil de la Cour d'appel à l'occasion de la dévolution d'un contentieux unilatéral, se substitue implicitement mais nécessairement à la décision du juge autorisant la saisie et doit pouvoir être utilement contestée dans le cadre d'un débat contradictoire et dans les conditions posées par la loi ;

Qu'en décider autrement, à l'image de la décision déférée, serait de nature à donner à la Cour d'appel une compétence qui ne lui est pas légalement conférée d'une part et à priver d'autre part les parties de leur droit essentiel au double degré de juridiction ;

Attendu que l'ordonnance entreprise du 1er mars 2017 sera dès lors réformée en ce que le Premier juge s'est déclaré incompétent pour connaître des demandes tendant à voir apprécier le bien-fondé de l'autorisation de saisie-arrêt délivrée le 24 février 2016 par la Chambre du conseil de la Cour d'appel ;

Attendu que l'affaire apparaissant en état et aucune des parties ne s'opposant à l'évocation en cause d'appel de la procédure soumise aux premiers juges, il convient de relever que la Cour d'appel a, dans l'arrêt d'autorisation de saisie-arrêt du 24 février 2016, jugé qu'en l'absence d'exequatur du jugement de faillite prononcé par le tribunal d'arrondissement de chambre le 23 décembre 2013, cette décision ne pouvait produire à Monaco aucun effet suspensif des poursuites individuelles ;

Mais attendu que par jugement du 1er décembre 2016, le Tribunal de première instance a déclaré exécutoires en Principauté de Monaco, avec toutes conséquences de droit, le jugement rendu par le tribunal d'arrondissement de Luxembourg en date du 23 décembre 2013, outre le jugement rendu sur tierce-opposition par le même tribunal d'arrondissement de Luxembourg rendu le 26 mai 2014, et ce, tout en ordonnant l'exécution provisoire ;

Que cette décision exécutoire et régulièrement signifiée le 12 décembre 2016 a donc autorité de la chose jugée sur le territoire monégasque ;

Qu'il résulte de ce jugement de faillite luxembourgeois produisant désormais ses effets en Principauté de Monaco, que la société WALLY YACHTS apparaît dessaisie de ses biens qui ne peuvent plus faire l'objet de poursuites et ne sont donc plus actuellement saisissables par ses créanciers ;

Attendu qu'il y a donc lieu de rétracter l'autorisation accordée par arrêt de la Chambre du conseil en date du 24 février 2016 et d'ordonner la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée le 25 février 2016 avec toutes conséquences de droit ;

Attendu que la société ARCHIMEDIA sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare recevables les appels principal et incident,

Réforme l'ordonnance rendue le 1er mars 2017 par le juge des référés en ce que ce magistrat s'est déclaré incompétent pour connaître des demandes tendant à voir apprécier le bien-fondé de l'autorisation de saisie-arrêt délivrée le 24 février 2016 par la Chambre du conseil de la Cour d'appel,

Dit que la compétence du juge des référés résulte des dispositions combinées des articles 492 et 852-1 du Code de procédure civile,

Usant de son pouvoir d'évocation,

Rétracte l'autorisation de saisie-arrêt accordée à la société ARCHIMEDIA CORP par arrêt de la Chambre du conseil en date du 24 février 2016 et ordonne la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée par la société ARCHIMEDIA le 25 février 2016 avec toutes conséquences de droit,

Condamne la société ARCHIMEDIA aux entiers dépens de première instance et d'appel distraits au profit de Maître Jean-Pierre LICARI et Maître Richard MULLOT, avocats-défenseurs, chacun pour ce qui le concerne sous sa due affirmation,

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Vice-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Monsieur Éric SENNA, Conseiller, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 31 OCTOBRE 2017, par Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Premier Président, Commandeur de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Nadine VALLAURI, Greffier, en présence d'Olivier ZAMPHIROFF, Premier Substitut du Procureur Général.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 16490
Date de la décision : 31/10/2017

Analyses

En dépit de la formule présente dans le dispositif de l'arrêt du 24 février 2016, procédant vraisemblablement d'une erreur matérielle, il n'appartient pas à la Chambre du conseil de la Cour d'appel de se prononcer sur la demande de rétractation concernant la décision d'autorisation de saisie-arrêt prise par ses soins dans le cadre d'un contentieux unilatéral. En effet, la voie procédurale instituée par les dispositions combinées des articles 492 du Code de procédure civile et 852-1 du Code de procédure civile caractérise un recours en référé.Cependant, la procédure de référé, voire en la forme des référés, n'existe devant la Cour d'appel que dans le cadre exclusif du recours en difficulté d'exécution concernant un de ses arrêts, relevant de la compétence du Premier président de la Cour d'appel, par application des dispositions de l'article 434 du Code de procédure civile.En l'espèce, si l'autorisation contestée émane de la Chambre du conseil de la Cour d'appel, en l'état du recours exercé par l'intimée la société ARCHIMEDIA à l'encontre d'une ordonnance refusant de faire droit à sa demande de saisie-arrêt, une telle circonstance n'a pas pour effet, contrairement à ce qu'a jugé l'ordonnance entreprise, de priver le juge des référés de ses prérogatives naturelles inhérentes à sa faculté de rétractation de l'autorisation de saisie-arrêt.Par ailleurs, il est constant que la décision prise le 24 février 2016 par la Chambre du conseil de la Cour d'appel à l'occasion de la dévolution d'un contentieux unilatéral, se substitue implicitement mais nécessairement à la décision du juge autorisant la saisie et doit pouvoir être utilement contestée dans le cadre d'un débat contradictoire et dans les conditions posées par la loi.Ainsi, en décider autrement, à l'image de la décision déférée, serait de nature à donner, d'une part, à la Cour d'appel une compétence qui ne lui est pas légalement conférée, et d'autre part à priver les parties de leur droit essentiel au double degré de juridiction.En l'espèce, l'ordonnance entreprise du 1er mars 2017 sera dès lors réformée en ce que le Premier juge s'est déclaré incompétent pour connaître des demandes tendant à voir apprécier le bien-fondé de l'autorisation de saisie-arrêt délivrée le 24 février 2016 par la Chambre du conseil de la Cour d'appel.Il convient de relever que puisque l'affaire apparaissant en état et aucune des parties ne s'opposant à l'évocation en cause d'appel de la procédure soumise aux premiers juges, la Cour d'appel a, dans l'arrêt d'autorisation de saisie-arrêt du 24 février 2016, jugé qu'en l'absence d'exequatur du jugement de faillite prononcé par le tribunal d'arrondissement de chambre le 23 décembre 2013, cette décision ne pouvait produire à Monaco aucun effet suspensif des poursuites individuelles.Par jugement du 1er décembre 2016, le Tribunal de première instance a déclaré exécutoires en Principauté de Monaco, avec toutes conséquences de droit, le jugement rendu par le tribunal d'arrondissement de Luxembourg en date du 23 décembre 2013, outre le jugement rendu sur tierce-opposition par le même tribunal d'arrondissement de Luxembourg rendu le 26 mai 2014, et ce, tout en ordonnant l'exécution provisoire.Cette décision étant exécutoire et régulièrement signifiée le 12 décembre 2016 a donc autorité de la chose jugée sur le territoire monégasque.Il résulte de ce jugement de faillite luxembourgeois produisant désormais ses effets en Principauté de Monaco, que l'appelante la société WALLY YACHTS apparaît dessaisie de ses biens qui ne peuvent plus faire l'objet de poursuites et ne sont donc plus actuellement saisissables par ses créanciers.En conséquence, il y a lieu de rétracter l'autorisation accordée par arrêt de la Chambre du conseil en date du 24 février 2016 et d'ordonner la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée le 25 février 2016 avec toutes conséquences de droit.

Exequatur  - Procédure civile  - Procédures collectives et opérations de restructuration.

Saisie-arrêt - Mainlevée - Créance - Faillite - Recours en référé - Absence d'exequatur du jugement de faillite.


Parties
Demandeurs : La société Anonyme de droit luxembourgeois dénommée WALLY YACHTS S.A., en faillite et Maître Alain RUKAVINA
Défendeurs : la société des Iles Vierges Britanniques ARCHIMEDIA (BVI) CORP et la Société Anonyme Monégasque dénommée WALLY

Références :

articles 492 du Code de procédure civile
Code de procédure civile
article 434 du Code de procédure civile
articles 492 et 852-1 du Code de procédure civile
articles 492 et 852-1° du Code de procédure civile
article 852 du Code de procédure civile
article 263 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2017-10-31;16490 ?

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