La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/12/2014 | MONACO | N°12792

Monaco | Cour d'appel, 16 décembre 2014, a. SP. née VA. c/ a. MA. divorcée JA., j. MA. et Maître Y.


Motifs

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 16 DÉCEMBRE 2014

En la cause de :

- Madame a. SP. née VA., le 5 octobre 1951 à Armentières (Nord), de nationalité monégasque, demeurant et domiciliée X à Monaco (98000),

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANTE,

d'une part,

contre :

1. Madame a. MA. divorcée JA., née le 2 octobre 1951 à Munich (Allemagne), de nationalité allemande, enseignante à la retraite, demeuran

t et domiciliée X à Alling (Allemagne),

2. Monsieur j. MA., né le 26 septembre 1954 à Munich (Allemagne), de nationalité...

Motifs

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 16 DÉCEMBRE 2014

En la cause de :

- Madame a. SP. née VA., le 5 octobre 1951 à Armentières (Nord), de nationalité monégasque, demeurant et domiciliée X à Monaco (98000),

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANTE,

d'une part,

contre :

1. Madame a. MA. divorcée JA., née le 2 octobre 1951 à Munich (Allemagne), de nationalité allemande, enseignante à la retraite, demeurant et domiciliée X à Alling (Allemagne),

2. Monsieur j. MA., né le 26 septembre 1954 à Munich (Allemagne), de nationalité allemande, ingénieur, demeurant et domicilié X à Seehaupt (Allemagne),

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Régis BERGONZI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

3. Maître Henry REY, Notaire, demeurant en son Etude, 2 rue Colonel Bellando de Castro à Monaco,

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

INTIMÉS,

d'autre part,

LA COUR,

Vu l'ordonnance de référé rendue le 18 juin 2014 (R.6144) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 2 juillet 2014 (enrôlé sous le numéro 2015/000006) ;

Vu les conclusions déposées les 29 septembre et 11 novembre 2014, par Maître BERGONZI, avocat-défenseur, au nom de a. MA. et j. MA. ;

Vu les conclusions déposées le 4 novembre 2014, par Maître PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de Maître Henry REY, Notaire ;

Vu les conclusions déposées les 6 et 14 novembre 2014, par Maître LICARI, avocat-défenseur, au nom de a. SP. née VA. ;

À l'audience du 18 novembre 2014,

- Vu la production de ses pièces par le conseil de Me Henry REY,

- Ouï les conseils des autres parties en leurs plaidoiries ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La Cour statue sur l'appel relevé par a. SP. née VA., à l'encontre d'une ordonnance de référé du 18 juin 2014 ;

Considérant les faits suivants :

Les 15, 24 avril et 15 mai 2013 les consorts MA., en qualité de vendeurs, et a. SP., en qualité d'acquéreur, ont signé une promesse de vente et d'achat concernant des biens sis immeuble LES CARAVELLES à Monaco, moyennant un prix de 16.000.000 euros, avec versement de la somme de 800.000 euros et sous la condition de la réitération de la vente par acte authentique au plus tard le 31 octobre 2013.

À la demande d'a. SP. un avenant de prorogation de cette promesse a été régularisé les 8 et 19 novembre 2013 repoussant la date de réitération au 29 novembre 2013.

Aucune vente n'a finalement été conclue malgré l'envoi le 3 décembre 213 d'une mise en demeure de régulariser la situation au 16 décembre suivant et après le refus d'une nouvelle prorogation de délai.

Par lettre 13 décembre 2013 adressée à Maître Y., Notaire, a. SP. a formé opposition auprès du notaire détenteur des fonds à la libération de l'acompte versé et à la régularisation d'un acte de vente avec un nouvel acquéreur concernant le bien promis.

Les consorts MA. ont fait assigner en référé Maître Y., Notaire, en vue d'obtenir la mainlevée de l'opposition.

Par ordonnance du 18 juin 2014, le juge des référés a constaté l'intervention volontaire d'a. SP., a déclaré irrégulière cette opposition et en a ordonné la mainlevée, laquelle n'est pas devenue effective, le notaire ayant estimé ne pouvoir se libérer de ladite somme compte tenu de la saisine postérieure du fond par a. SP.

a. SP. a suivant exploit du 2 juillet 2014 relevé appel de ladite ordonnance de référé dont elle sollicite la réformation pour obtenir le rejet des demandes des consorts MA.

À l'appui de son appel a. SP., qui assure qu'aucun texte n'interdit de former opposition auprès d'un notaire, soutient que cette opposition repose tant sur le fondement légal de l'article 1090 du Code civil, en l'absence d'existence d'une dette, que sur un fondement contractuel, la clause contenue à l'avenant de prorogation de délai selon laquelle l'acompte n'est déblocable que sur instruction de sa part, et reproche au premier juge de n'avoir pas répondu à ce dernier moyen.

Les consorts MA. s'opposent à titre principal aux prétentions de l'appelante et sollicitent la confirmation de l'ordonnance entreprise.

Ils entendent en outre en cause d'appel voir la Cour ordonner à Maître Y. :

* de libérer la somme de 800.000 euros entre leurs mains, dès signification de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard,

* de passer la vente du bien avec tout nouvel acquéreur présenté par leurs soins, sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter de la présentation qui lui sera faite du nouvel acquéreur.

Ils font valoir en substance que l'opposition formée par lettre est irrégulière, faute d'être autorisée par un texte, et qu'elle constitue une violation de leur droit de disposer de leur bien.

Ils soutiennent que la référence à l'article 1090 du Code civil, qui consacre une règle générale en matière de paiement, est dénuée de pertinence, alors que la clause de l'avenant évoquée, qui constitue une clause pénale en cas de non-respect du nouveau délai accordé, ne permet pas à l'appelante de s'opposer au paiement contractuellement « irrévocable », de la somme de 800.000 euros.

Ils assurent que la somme de 66.000 euros réglée par a. SP. n'a pas été versée pour obtenir un nouveau délai, comme erronément soutenu par ses soins, mais à titre d'indemnité représentant le mois d'intérêts conventionnellement défini dans l'avenant en cas d'inobservation du nouveau délai accordé.

Ils contestent enfin le caractère « nouveau » des demandes qu'ils présentent suite à l'évolution du litige en cause d'appel, dans la mesure où elles ne tendent qu'à vaincre la résistance opposée par le notaire à l'exécution d'une décision exécutoire par provision.

Maître Y. a conclu le 5 novembre 2014 pour se voir donner acte de ce qu'il s'en rapporte sur la demande d'infirmation de l'ordonnance de référé du 18 septembre 2013.

Il expose avoir agi avec prudence dans la mesure où il pouvait d'autant moins être juge de l'opposition formée entre ses mains qu'a. SP. l'avait réitérée par l'assignation au fond du 22 juillet 2014.

Il ajoute que les dernières demandes des consorts MA. sont irrecevables pour être nouvelles et formées en outre d'intimé à intimé.

À titre subsidiaire, il demande le rejet.

Il entend enfin voir dire qu'il ne pourra être tenu au paiement des dépens.

Par conclusions en date du 6 novembre 2014 a. SP. soulève l'irrecevabilité des demandes formées par les consorts MA. dans leurs conclusions du 29 septembre 2014, motifs pris de leur caractère nouveau et de ce qu'elles sont faites d'intimé à intimé.

En réponse aux intimés elle rappelle que le sens de l'avenant était la prorogation du délai et que la somme de 66.000 euros en représentait le prix.

Elle soutient enfin que la saisine par ses soins du juge du fond excluant la compétence du juge des référés, il y a lieu de plus fort de dire n'y avoir lieu à référé.

Dans leurs écritures du 11 novembre 2014, les consorts MA., intimés, rétorquent essentiellement que l'urgence à faire cesser la voie de fait commise par a. SP., conjuguée au fait que la saisine du juge du fond n'est pas de nature à faire disparaître l'ordonnance entreprise, donne compétence à la Cour pour statuer en référé.

Ils assurent que la demande d'astreinte est une mesure de contrainte accessoire à la demande principale, rendue nécessaire par la résistance du notaire, défendeur en première instance, qui s'inscrit dans l'évolution du litige.

Enfin le 14 novembre 2014, les consorts MA. ont déposé de nouvelles conclusions hors calendrier procédural.

a. SP., par l'intermédiaire de son conseil, en a sollicité le rejet pour ce motif.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Attendu que les consorts MA. ont adressé le 14 novembre 2014, soit 4 jours avant la date des plaidoiries, des conclusions en réponse à celles d'a. SP. dont il est sollicité le rejet ;

Que le dépôt de ces conclusions n'était pas prévu selon le calendrier procédural régulièrement communiqué aux parties, ce qu'indique le conseil des intimés lui-même ;

Que dès lors ces écritures, non soumises au débat contradictoire, seront rejetées par application des dispositions de l'article 181 du Code de procédure civile ;

Attendu que le présent litige porte sur la régularité de l'opposition entre les mains du notaire Maître Y. formée par a. SP. par lettre simple.

Attendu en effet que les consorts MA. sollicitent la mainlevée de l'opposition ainsi pratiquée sur la somme de 800.000 euros versée dans le cadre de la promesse de vente et d'achat régularisée avec a. SP., au motif qu'elle serait dénuée de base légale.

Attendu qu'il sera préliminairement observé qu'a. SP. ne saurait assurer que la saisine par ses soins du juge du fond le 22 juillet 2014 exclurait la compétence du juge des référés et justifierait en conséquence de dire n'y avoir lieu à référé ;

Qu'en effet, il n'est pas contesté que ce magistrat a valablement statué dans le cadre de sa saisine, avant que le juge du fond ne soit saisi, de sorte que la Cour régulièrement saisie par l'acte d'appel, dont la recevabilité n'est pas contestée, doit désormais se prononcer sur le litige qui lui est dévolu ;

Attendu que l'article 414 du Code de procédure civile dispose qu'en cas d'urgence le président du Tribunal de Première Instance peut ordonner, en référé, toutes les mesures qui ne préjudicient pas au principal ;

Attendu que le blocage d'une somme, assorti de l'interdiction de contracter avec un nouvel acquéreur, peut porter atteinte à des droits juridiquement reconnus en l'absence de fondement légal pour ce faire et caractériser une situation d'urgence pour la faire cesser ;

Attendu, en droit, qu'un créancier qui entend se garantir pour le paiement de sa créance ne peut faire bloquer les fonds de ses débiteurs entre les mains d'un tiers qu'en vertu d'un titre exécutoire ou d'une autorisation judiciaire consacrant un principe de créance ;

Que tel n'est manifestement pas le cas en l'espèce, ce qu'a. SP. ne soutient au demeurant pas ;

Attendu, dès lors, que pour cette raison, la référence à la notion de paiement de l'article 1090 du Code civil, en ce qu'elle ne constitue pas un régime dérogatoire au droit commun pour garantir une créance et à la clause pénale de l'avenant de prorogation qui fonde en réalité la contestation même de la dette, apparaît dénuée de pertinence ;

Attendu que l'opposition pratiquée par a. SP. entre les mains de Maître Y., Notaire, apparaît ainsi dépourvue de base légale ; qu'il était urgent de faire cesser cette situation ;

Qu'il suit que c'est à bon droit que le premier juge l'a déclarée irrégulière et en a ordonné la mainlevée ; que sa décision doit donc être confirmée ;

Attendu sur la recevabilité des demandes formées par les consorts MA. en cause d'appel ayant trait au prononcé d'une astreinte et à la régularisation d'un acte de vente avec tout nouvel acquéreur présenté par leurs soins, que l'article 431 alinéa 2 du Code de procédure civile dispose que les parties ne peuvent former aucune demande nouvelle à moins qu'il ne s'agisse de compensation ou que la demande nouvelle ne soit la défense à l'action principale ;

Attendu qu'en demandant à la Cour de prononcer une astreinte et d'ordonner au notaire de passer la vente du bien, les intimés, qui n'avaient rien sollicité de tel du magistrat des référés, ont formé des demandes nouvelles qui ne procèdent ni d'une compensation ni d'une défense à l'action principale, en sorte que leur irrecevabilité sera constatée ;

Attendu qu'a. SP. qui succombe supportera les dépens d'appel, à l'exception de ceux de Maître REY qui demeureront à sa propre charge, sa mise en cause en appel résultant de son refus d'exécuter l'ordonnance de référé pourtant exécutoire sur minute depuis le 18 juin 2014, en application de l'article 419 du Code de procédure civile ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit a. SP. née VA. en son appel,

La déboutant,

Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé en date du 18 juin 2014,

Déclare irrecevables les demandes des consorts MA. formées en cause d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne a. SP. aux dépens d'appel, à l'exception de ceux de Maître Y. qui demeureront à sa propre charge, avec distraction au profit de Maître BERGONZI, avocat-défenseur sous sa due affirmation,

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, faisant fonction de Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, Monsieur Eric SENNA, Conseiller, assistés de Madame Laura SPARACIA-SIOLI, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 16 DECEMBRE 2014, par Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Laura SPARACIA-SIOLI, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, en présence de Mademoiselle Cyrielle COLLE, substitut du Procureur Général.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12792
Date de la décision : 16/12/2014

Analyses

Le blocage d'une somme d'argent peut porter atteinte à des droits juridiquement reconnus en l'absence de fondement légal et caractériser ainsi une situation d'urgence pour la faire cesser.L'article 414 du Code de procédure civile dispose qu'en cas d'urgence, le président du Tribunal de grande instance peut ordonner en référé, toutes mesures qui ne préjudicient pas au principal.Un créancier qui entend se garantir pour le paiement de sa créance ne peut faire bloquer les fonds de son débiteur entre les mains d'un tiers qu'en vertu d'un titre exécutoire ou à défaut, d'une autorisation judiciaire consacrant un principe certain de créance.Tel n'est pas le cas, en l'espèce, en sorte que l'opposition pratiquée sans titre, ni autorisation du juge par l'acheteur d'un bien mobilier entre les mains d'une tierce personne apparaît dépourvue de toute base légale, ce qui caractérise l'urgence de faire cesser cette situation.Il s'ensuit que s'avère fondée la décision du premier juge qui statuant en référé a déclaré cette mesure irrégulière et en a ordonné la mainlevée en sorte que son ordonnance doit être confirmée en toutes ses dispositions.

Procédure civile  - Procédures spécifiques.

Saisie-arrêt - Opposition formée entre les mains d'un tiers - Absence de titre exécutoire ou d'autorisation judiciaire - Mesure dépourvue de tout effet juridique - Mainlevée par voie de référé.


Parties
Demandeurs : a. SP. née VA.
Défendeurs : a. MA. divorcée JA., j. MA. et Maître Y.

Références :

article 431 alinéa 2 du Code de procédure civile
article 1090 du Code civil
article 419 du Code de procédure civile
article 414 du Code de procédure civile
article 181 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2014-12-16;12792 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award