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25/11/2014 | MONACO | N°12753

Monaco | Cour d'appel, 25 novembre 2014, j-a. BE. c/ La SARL FERRARI EXPEDITIONS MONACO PRIVÉ


Motifs

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2014

En la cause de :

- Monsieur j-a. BE., personne physique exerçant une activité commerciale sous l'enseigne «AGENCE IMMOBILIÈRE BE.», immatriculé au Répertoire du Commerce et de l'Industrie de Monaco, sous le n° Y, au X, à Monaco, demeurant et domicilié en cette qualité à ladite adresse ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANT,

d'une part,

contre :

- La SA

RL FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ, Société à responsabilité limitée, immatriculée au Répertoire du Commerce et de l'In...

Motifs

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2014

En la cause de :

- Monsieur j-a. BE., personne physique exerçant une activité commerciale sous l'enseigne «AGENCE IMMOBILIÈRE BE.», immatriculé au Répertoire du Commerce et de l'Industrie de Monaco, sous le n° Y, au X, à Monaco, demeurant et domicilié en cette qualité à ladite adresse ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANT,

d'une part,

contre :

- La SARL FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ, Société à responsabilité limitée, immatriculée au Répertoire du Commerce et de l'Industrie de Monaco, sous le n° 10S05253, dont le siège social est sis 2 Avenue des Ligures, Les Terrasses du Port, Bloc A, à Monaco, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité audit siège ;

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Olivier CARLES DE CAUDEMBERG, avocat au Barreau de Nice, substituant Maître Dominique SALVIA, avocat en ce même Barreau ;

INTIMÉE,

d'autre part,

LA COUR,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 27 juin 2013 (R.6514) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 15 octobre 2013 (enrôlé sous le numéro 2014/000049) ;

Vu les conclusions déposées le 17 février 2014, par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de la SARL FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ ;

Vu les conclusions déposées le 10 juin 2014, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de j-a. BE. ;

À l'audience du 21 octobre 2014, Ouï les conseils des parties en leurs plaidoiries ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Considérant les faits suivants :

La Cour statue sur l'appel relevé le 15 octobre 2013 par j-a. BE. à l'encontre d'un jugement rendu le 27 juin 2013 par le Tribunal de première instance de Monaco et entend se référer à l'exposé par les premiers juges des faits.

Il suffit, dès lors, de rappeler les éléments ci-après énoncés :

Le 26 janvier 2011 la SARL FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ a signé un engagement de location, moyennant un loyer annuel de 144.000 euros HT, de locaux sis … à Monaco composés de bureaux et de deux parkings, sous conditions suspensives, prévoyant la signature du bail avant le 17 février 2011 et le versement immédiat de la somme de 35.880 euros.

Un projet de bail conforme à cet engagement, si ce n'est un emplacement de voiture (n° 76 au lieu du n° 83), a été établi le 4 février 2011.

Aucune location n'a été conclue mais j-a. BE. a cependant conservé par devers lui la somme de 35.880 euros.

Saisi par la SARL FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ d'une demande en paiement de ladite somme, le Tribunal a :

* déclaré valables l'engagement de location du 26 janvier 2011 et la clause pénale qui y est contenue,

* dit n'y avoir lieu à examiner la demande tendant à la caducité de cet acte,

* condamné j-a. BE. à restituer à la SARL FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ la somme principale de 35.880 euros,

* rejeté les demandes d'exécution provisoire et de dommages-intérêts formées par elle,

* déclaré irrecevable la demande reconventionnelle de dommages-intérêts à hauteur de 36.000 euros et mal fondée celle formée à hauteur de 10.000 euros,

* condamné j-a. BE. aux dépens avec distraction au profit de Maître Frank MICHEL.

Au soutien de cette décision les premiers juges ont pour l'essentiel retenu que la mise en œuvre de la clause pénale, déclarée régulière ainsi que l'engagement de location, n'était pas acquise en l'absence de mise en demeure préalable.

Suivant exploit du 15 octobre 2013, j-a. BE. exerçant le commerce sous l'enseigne Agence Immobilière BE., a interjeté appel parte in qua de ce jugement signifié le 16 septembre 2013, dont il a sollicité la réformation partielle, pour entendre dire qu'il a été à tort condamné au remboursement de la somme de 35.880 euros et que :

Principalement,

* en fixant un terme dans l'engagement de location rompu unilatéralement par la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ, les parties ont eu pour intention de dispenser l'Agence BE. de toute mise en demeure,

* en portant à sa connaissance sa décision de renoncer à la location, cette société l'a exonéré de son obligation de mise en demeure.

Subsidiairement,

* le comportement fautif de la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ engage sa responsabilité contractuelle,

* la somme réclamée est justifiée par les préjudices causés (peines et soins, perte de gains, immobilisation du bien resté inoccupé).

Pour obtenir cette réformation, j-a. BE. fait valoir que :

* le sort du montant différait selon que l'option serait ou non levée (acompte sur les loyers ou somme restituée au preneur sauf en cas de refus par ce dernier de signer le bail),

* en l'espèce la société preneuse a, le 14 février 2011, renoncé à la location des bureaux, ce qui ouvrait droit à la conservation de la somme.

Il fait grief aux premiers juges d'avoir statué différemment en raison de l'absence de délivrance préalable de mise en demeure par ses soins alors que dès l'instant où le preneur a fait connaître au bailleur son intention de ne pas exécuter son engagement et se désister, la mise en demeure devient dépourvue de toute fonction et ne constitue plus une obligation à la charge du créancier de l'obligation, selon la jurisprudence de la Cour (27 mars 2007).

Subsidiairement et pour le cas où la Cour d'appel retiendrait la nécessité de l'envoi d'une mise en demeure, l'appelant demande à cette juridiction de retenir la responsabilité contractuelle du preneur et de le sanctionner sur le fondement de l'article 1002 en lui allouant la somme réclamée à titre de réparation des préjudices nés de l'immobilisation du bien et des peines et soins occasionnés.

La SARL FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ qui s'oppose aux prétentions de j-a. BE., sollicite à titre principal la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'appelant à lui restituer la somme de 35.880 euros.

À titre subsidiaire, elle forme un appel incident pour voir prononcer la nullité de l'engagement de location et de la clause pénale qu'il contient, sauf encore plus subsidiairement à dire que cet acte est caduc à défaut de réalisation des conditions suspensives dans le délai imparti.

En conséquence, j-a. BE. sera condamné à lui restituer la somme de 35.880 euros, ainsi qu'à lui payer celle de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive en réparation du préjudice causé, dont les frais exposés.

La société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ assure que la mise en demeure est un préalable nécessaire pour prétendre au bénéfice d'une clause pénale et qu'à défaut les conditions légales de l'article 1085 du Code civil n'étant pas réunies, j-a. BE. ne pouvait conserver par devers lui la somme concernée qui était une simple caution.

Selon elle, l'esprit de la jurisprudence citée par son adversaire est que le débiteur ait conscience de la menace résultant de la clause pénale et de ce que le non-respect de la mise en demeure l'exposera à en payer le montant.

À titre subsidiaire elle a formé un appel incident tendant à :

– la nullité de l'engagement de location pour :

* défaut de cause en l'absence de contrepartie procurée par le bailleur,

* erreur sur le bien donné à bail suite à la modification unilatérale par le bailleur de l'objet même du contrat (emplacement de parking différent) la privant de consentement éclairé, alors même qu'il est constant que l'emplacement de parking est essentiel dans le cadre de son activité de transport de marchandises,

* dol en présence d'une interdiction de l'activité envisagée édictée par l'article 8 du règlement de copropriété,

– la nullité de l'engagement de location contracté sous une condition impossible en l'état de l'interdiction de l'activité commerciale par le règlement de copropriété,

– la nullité de l'engagement de location contracté sous une condition potestative, savoir l'acceptation du bailleur,

– la nullité de la clause pénale compte tenu de son caractère excessif qui procurait un avantage au seul propriétaire.

À titre surabondant elle excipe de l'absence de droit de l'Agence BE. à conserver l'acompte versé et de son droit à remboursement en raison :

– de la caducité de l'engagement de location en l'absence de réalisation des conditions suspensives,

– de l'ambiguïté du contrat et de l'absence de droit de BE. à conserver le dépôt de garantie qui n'a été versé que pour valoir sur le décompte de location en cas d'acceptation de l'engagement par le bailleur,

– de l'extinction, par novation, de l'obligation ayant fait l'objet de la signature du premier acte en date du 26 janvier 2011, refusé par le bailleur, à l'occasion duquel la somme litigieuse a été versée.

Elle s'oppose enfin à la demande reconventionnelle de dommages-intérêts formée par l'appelant, non partie à l'engagement de location, en faisant observer que nul ne plaide par procureur, qu'elle n'est pas liée contractuellement à BE., lequel enfin est à l'origine de son propre préjudice pour lui avoir fait signer un document déséquilibré et illégal.

Compte tenu de la résistance abusive qui lui est opposée, elle s'estime fondée à solliciter l'allocation de la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts.

j-a. BE. a conclu en réplique le 10 juin 2014.

Il maintient que la mise en demeure était en l'espèce dépourvue de toute fonction compte tenu que la locataire avait expressément et positivement exprimé son désistement dès avant l'arrivée du terme.

Selon lui, l'engagement de location, constitutif d'une promesse unilatérale de bail, est valable pour être parfaitement causé dans la mesure où le versement de la somme pour la réservation des locaux engage le bailleur, bien que le bénéficiaire d'une promesse unilatérale n'ait aucune obligation envers le promettant.

Il n'encourt aucune nullité pour vice de consentement en l'absence :

– d'erreur, puisque l'emplacement de parking n'était pas un élément fondamental de l'engagement qui concernait essentiellement les bureaux,

– de manœuvre dolosive, n'étant nullement établi que la société promettante avait l'intention d'exercer des actes de manutentions dans les bureaux,

– de condition impossible, l'exercice de l'activité n'étant pas proscrit,

– de condition potestative, la somme versée restant acquise à titre de clause pénale en cas de défaillance du promettant seulement.

Selon lui la clause pénale doit trouver à s'appliquer car il n'y a ni excès, ni disproportion entre les engagements de l'une ou l'autre des parties, le sort de la somme versée dépendant de situations diverses.

Enfin la caducité ne peut être utilement invoquée dès lors que le promettant a lui-même rompu le contrat avant le délai imparti pour la réalisation des conditions suspensives.

Compte tenu de la mauvaise foi, du caractère abusif et vexatoire de la présente procédure, il réclame l'allocation de la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé ;

SUR CE,

Attendu que j-a. BE. a régulièrement interjeté appel le 15 octobre 2013 du jugement rendu par le Tribunal de première instance le 27 juin 2013, signifié le 16 septembre 2013 ;

Que l'appel principal est ainsi recevable, de même que l'appel incident régularisé par voie de conclusions en vertu de l'article 428 du Code de procédure civile ;

Attendu que les dispositions non critiquées du jugement relatives à l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle de dommages-intérêts à hauteur de 36.000 euros et au rejet de la demande d'exécution provisoire s'avèrent définitives ;

Attendu qu'en l'état des demandes telles que formulées par les parties, le litige qui les oppose porte sur l'application de l'engagement de location régularisé le 26 janvier 2011 (ensuite d'un précédent engagement de location proposé le même jour et refusé par la bailleresse) par c. DE. pour le compte de la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ et accepté le même jour par la propriétaire la société ROTWIN CORP. S.A., par lequel la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ s'est engagée, sous conditions suspensives, à louer à compter du 1er mars 2011 les biens dont s'agit (un bureau et deux emplacements de parking) et à signer le bail au plus tard le 17 février 2011, a versé la somme de 35.880 euros à valoir sur le décompte de location, sauf dans le cas de refus de sa part de procéder à la signature du bail, ladite somme étant alors conservée pour le règlement des honoraires de l'Agence BE. et l'Agence CONTINENTALE et de l'indemnité du bailleur ;

Attendu qu'aucun bail n'a été signé, la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ ayant dès le 14 février indiqué qu'elle renonçait à la location ;

Qu'il convient donc au préalable de vérifier si cet engagement et la clause pénale qui y est insérée sont valables et peuvent recevoir application ;

Sur la nullité de l'engagement de location

Attendu que c'est à bon droit et par une exacte appréciation des faits de la cause non démentie par les pièces produites devant la Cour que le Tribunal a admis la validité de l'engagement de prendre à bail, dès lors que :

– l'engagement signé le 26 janvier 2011 par la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ s'analyse, ce qui n'est pas discuté en cause d'appel, en une promesse unilatérale de prendre à bail des locaux,

– l'essence même du contrat unilatéral est de ne faire naître d'obligations qu'à la charge d'une seule des parties, ce qui n'est pas de nature à le priver d'une cause, laquelle réside en l'espèce dans la nécessité pour le promettant de prendre à bail des bureaux pour l'exercice de son activité,

– l'erreur de désignation des lots de parking n'apparaît pas substantielle au regard de la configuration matérielle des lieux, telle que résultant du plan d'ensemble produit, qui révèle une similitude de surface des deux lots en cause, leur contiguïté et une situation géographique identique « près de l'entrée », ce qui exclut toute incidence en terme de chargement et de déchargement des colis,

– le dol n'est pas caractérisé en l'état de la condition suspensive relative à l'obtention de l'autorisation de manipulation de marchandises dans les bureaux et de l'absence de preuve de manœuvres de la part de j-a. BE., alors que la location de bureaux ne relève pas du statut des baux commerciaux qui suppose, pour s'appliquer, l'exploitation d'un fonds de commerce dans les lieux loués, ce qui n'est pas soutenu, et que rien ne permet de retenir que l'interdiction portée dans le règlement de copropriété d'affecter les bureaux à une activité nécessitant la réception de marchandise était incompatible avec l'activité de logistique minime (pièce n° 10 : 2 véhicules type utilitaire le matin et 2 le soir pour des petits colis chargés à la main) envisagée par la société FERRARI dans les seuls garages pour laquelle elle avait sollicité une autorisation,

- la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ avait promis de louer les locaux litigieux à usage de « bureaux » nécessaires à son activité de « prestations de transport de valeurs, de sécurité et de logistique dans le domaine du luxe et de l'art » ; qu'en revanche rien ne permet de dire qu'elle entendait se livrer au transport de valeurs depuis lesdits locaux dans la mesure où la seule condition posée par elle concernait la petite manutention ; que les premiers juges ont donc à bon droit considéré que, l'activité à laquelle la société FERRARI EXPEDITIONS MONACO PRIVÉ entendait se livrer n'était pas soumise à la réalisation d'une condition impossible,

- la promesse unilatérale de conclure le bail est un contrat préparatoire de l'éventuel bail futur par lequel le promettant s'engage envers le bénéficiaire à louer les locaux si le bénéficiaire lève l'option ; que si cette acceptation rend définitif cet engagement et concrétise sa réalisation, elle s'avère toutefois sans incidence sur son exécution ; qu'il n'y a pas de condition potestative ;

Attendu au demeurant qu'il sera relevé que la renonciation à la location n'était fondée sur aucun des arguments avancés dans le cadre de la procédure, étant ici relevé que, dès le 8 février précédent, la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ avait manifesté son souhait de ne louer que la plus petite partie des locaux de référence, sans davantage mettre en cause la régularité de l'acte par lequel elle s'était engagée ;

Sur le caractère non écrit de la clause pénale

Attendu que du fait de l'acceptation de la bailleresse, l'engagement est devenu définitif et le contrat a été formé ; que néanmoins la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ soutient que la clause pénale insérée audit engagement de location serait excessive et devrait être réputée non écrite en ce qu'elle est applicable au seul locataire et procure un avantage au seul propriétaire ;

Mais attendu que l'économie générale de l'engagement de location n'est pas d'exclure dans tous les cas de figure le remboursement de la somme perçue ; que le sort du montant versé variait en effet en fonction des circonstances :

– si l'option n'était pas levée par le bailleur, le montant versé était restitué au preneur,

– si l'option était levée, ce montant valait en tant qu'acompte sur les loyers,

– si l'option était levée mais le preneur refusait de signer le bail, le montant était conservé à titre d'indemnité par le jeu de la clause pénale ;

Qu'aucun déséquilibre n'étant ainsi caractérisé, la clause pénale contractuellement prévue en cas de refus de signature par le preneur apparaît valable et avait vocation à s'appliquer dans son principe ;

Que le jugement sera confirmé sur ce point par substitution de motifs ;

Sur la caducité de l'engagement de location

Attendu, ainsi que l'a exactement constaté le Tribunal, que la renonciation, avant terme, à son engagement par la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ, prive de toute pertinence son argumentation selon laquelle les conditions suspensives n'auraient pas toutes été remplies, dès lors que la condition n'est réputée défaillante que lorsque le temps est expiré sans que l'événement soit arrivé selon l'article 1030 du Code civil ;

Attendu en définitive que l'engagement de location, rédigé dans des termes univoques, et la clause pénale selon laquelle le promettant s'engageait à verser au propriétaire une somme à titre de dommages-intérêts forfaitaires en cas de refus de sa part de signer le bail, doivent recevoir application ;

Attendu à cet égard que j-a. BE. estime avoir été condamné à tort au remboursement de la somme de 35.880 euros représentant cette clause et fait grief aux premiers juges d'en avoir conditionné la mise en œuvre à l'envoi d'une mise en demeure préalable faisant défaut en l'espèce ;

Attendu que si l'article 1085 du Code civil impose expressément de mettre en demeure le débiteur de l'obligation pour que le bénéfice de la clause pénale puisse être utilement acquis au créancier, cette formalité s'avère toutefois inutile lorsque le débiteur prend l'initiative de déclarer à son créancier qu'il refuse d'exécuter son obligation ;

Qu'il n'est pas discuté en l'espèce que la signature du bail était convenue au 17 février 2011 au plus tard ;

Que cependant dès le 14 février courant la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ informait l'Agence BE. de ce qu'elle renonçait à « la location des bureaux au SEASIDE » ;

Que dans ce cas particulier où le débiteur refuse expressément d'exécuter l'obligation, la mise en demeure n'apparaît pas nécessaire car ce comportement équivaut à la reconnaissance de son manquement ; que la violation définitive de l'obligation vaut en soi mise en demeure et donne immédiatement droit au créancier à des dommages et intérêts compensatoires ;

Que la décision critiquée sera en conséquence réformée de ce chef, en sorte que se pose dès lors la question de savoir si j-a. BE. est en droit de conserver l'acompte reçu entre ses mains ;

Que la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ prétend le contraire en alléguant une novation qui rendrait injustifiée la conservation par BE. de la somme versée, selon elle, dans le cadre d'un premier engagement de location non concrétisé ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1119 du Code civil la novation peut notamment s'opérer « lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne, laquelle est éteinte » ;

Que pour exister la novation suppose donc une obligation civile préexistante qui fait défaut en l'espèce dans la mesure où le premier engagement de location proposé par la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ a été refusé par la bailleresse et qu'il n'y avait pas d'obligation qui puisse servir de base à une novation ;

Attendu qu'en l'état des dispositions contractuelles la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ n'est pas en droit de récupérer la somme versée dans le cadre de l'engagement de location en cause, celle-ci étant, par le jeu de la clause pénale, acquise à titre d'indemnité forfaitaire pour le créancier et devant servir pour le règlement des honoraires des agences immobilières intervenues dans le cadre des négociations (Agences BE. et CONTINENTALE) et de l'indemnité de la bailleresse, la société ROTWIN ;

Qu'il résulte de l'acte régularisé le 26 janvier 2011 que les honoraires de location s'élevaient à la somme de 20.597,99 euros TTC, soit en conséquence une somme de 10.299 euros pour chaque agence et celle de 15.282,01 euros pour la bailleresse, à charge pour j-a. BE. d'en régulariser le versement entre les mains de l'Agence Continentale et de la société ROTWIN ;

Sur les dommages-intérêts

Attendu que j-a. BE. a formé une demande de dommages-intérêts ; mais attendu que la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ ayant pu légitimement se méprendre sur ses droits relativement à l'absence d'exigence d'une mise en demeure préalable dans le cas présent, cette prétention sera rejetée ;

Attendu que la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ réclame l'allocation de dommages-intérêts pour résistance abusive de j-a. BE. ; mais attendu que succombant en ses prétentions, elle n'est pas fondée en cette prétention et la demande sera rejetée ;

Attendu que la partie qui succombe supporte les dépens ; que la société FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ sera donc condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit les appels,

Confirme le jugement du Tribunal de première instance du 27 juin 2013 en ce qu'il a rejeté la demande aux fins d'annulation de l'engagement de location signé le 26 janvier 2011 et rejeté la demande tendant à voir annuler la clause pénale qui y est insérée ou la déclarer non écrite,

Y ajoutant,

Rejette la demande aux fins de caducité de l'engagement de location signé le 26 janvier 2011,

La réforme en ce qu'il a condamné j-a. BE., exerçant sous l'enseigne Agence Immobilière BE. à restituer à la SARL FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ la somme principale de 35.880 euros,

Statuant à nouveau,

Déboute la SARL FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ de l'intégralité de ses demandes,

Rejette les demandes de dommages-intérêts, et en tant que de besoin comme inutiles ou mal fondées toutes conclusions et demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne la SARL FERRARI EXPÉDITIONS MONACO PRIVÉ aux dépens de première instance et d'appel, distraits au profit de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, faisant fonction de Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Monsieur Marc SALVATICO, Conseiller, Madame Sylvaine ARFINENGO, Conseiller, assistés de Mademoiselle Florence TAILLEPIED, Greffier stagiaire,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 25 NOVEMBRE 2014, par Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, faisant fonction de Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Laura SPARACIA-SIOLI, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, en présence de Monsieur Michael BONNET, Premier substitut du Procureur Général.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12753
Date de la décision : 25/11/2014

Analyses

La promesse unilatérale de conclure un bail par lequel le promettant s'engage envers le bénéficiaire à laver les locaux du fait de l'acceptation de ce dernier à rendre cet engagement définitif, est ainsi applicable la clause pénale qui y était inséréeSi en principe l'article 1085 du Code civil impose expressément de mettre en demeure le débiteur de l'obligation pour que le bénéfice de la clause pénale puisse être utilement acquis au créancier, cette formalité s'avère toutefois inutile lorsque le débiteur prend l'initiative de déclarer à son créancier qu'il refuse d'exécuter son obligation. En effet dans ce cas particulier la mise en demeure n'apparaît pas nécessaire car ce comportement équivaut à la reconnaissance de son manquement en sorte que la violation définitive de l'obligation vaut en soi mise en demeure et donne immédiatement droit au créancier à des dommages-intérêts compensatoires par le jeu de la clause pénale acquise à ce dernier à titre d'indemnité forfaitaire.

Baux  - Procédure pénale - Général.

Clause pénale - Conditions - Mise en demeure du débiteur d'exécuter son obligation - Dispense de mise en demeure en cas de refus du débiteur d'exécuter son obligation.


Parties
Demandeurs : j-a. BE.
Défendeurs : La SARL FERRARI EXPEDITIONS MONACO PRIVÉ

Références :

article 1085 du Code civil
article 1030 du Code civil
article 1119 du Code civil
27 mars 2007
article 428 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2014-11-25;12753 ?

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