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29/09/2014 | MONACO | N°12579

Monaco | Cour d'appel, 29 septembre 2014, La société à responsabilité limitée dénommée PACIFIC MONTE-CARLO c/ Maître Y.


Motifs

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2014

En la cause de :

- la société à responsabilité limitée dénommée PACIFIC MONTE-CARLO, dont le siège social est 17 avenue des Spélugues - 98000 Monaco, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège social,

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANTE,

d'une part,

contre :

- Maître Y, avocat-défenseur p

rès la Cour d'appel de Monaco, y demeurant X,

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseu...

Motifs

COUR D'APPEL

ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2014

En la cause de :

- la société à responsabilité limitée dénommée PACIFIC MONTE-CARLO, dont le siège social est 17 avenue des Spélugues - 98000 Monaco, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège social,

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

APPELANTE,

d'une part,

contre :

- Maître Y, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, y demeurant X,

Ayant élu domicile en l'Étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

INTIMÉ,

d'autre part,

LA COUR,

Vu le jugement rendu par le Tribunal de première instance, le 13 février 2014 (R. 3098) ;

Vu l'exploit d'appel et d'assignation du ministère de Maître Z Y Z, huissier, en date du 14 avril 2014 (enrôlé sous le numéro 2014/000149) ;

Vu les conclusions déposées le 1er juillet 2014, par Maître PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de Maître Y. ;

À l'audience du 8 juillet 2014, vu la production de leurs pièces par les conseils des parties ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Considérant les faits suivants :

Statuant sur l'appel interjeté par la société PACIFIC MONTE-CARLO SARL à l'encontre du jugement rendu le 13 février 2014 par le Tribunal de première instance de Monaco dans l'instance opposant cette partie à Maître Y., en personne, ayant :

• débouté la société PACIFIC MONTE-CARLO SARL de sa demande de mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée le 14 août 2013 à la requête de Maître Y.,

• condamné la société PACIFIC MONTE-CARLO SARL aux dépens distraits au profit de Maître PASTOR-BENSA, avocat défenseur sous sa due affirmation.

La société appelante demande à la Cour de :

* juger l'appel régulier en la forme et bien-fondé,

* réformer le jugement entrepris rendu par le Tribunal de première instance le 13 février 2014 en toutes ses dispositions, et, statuant à nouveau :

* constater que Maître Y. ne détient aucun titre exécutoire lui permettant de procéder au recouvrement forcé des états de frais dont il se prévaut,

* en conséquence dire et juger que la saisie-arrêt diligentée par Maître Y. le 14 août 2013 sur le fondement des articles 495 et suivants du Code de procédure civile ne peut pas prospérer et en ordonner la mainlevée,

* condamner Maître Y. aux dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de Maître

GIACCARDI.

Au soutien de son appel, la société PACIFIC MONTE-CARLO rappelle que les premiers juges ont à bon droit retenu que la liquidation des frais et dépens effectuée par le greffier en chef sur délégation du Tribunal est par nature provisoire, en sorte que l'état de frais ainsi liquidé n'a aucune force exécutoire.

Elle estime que seule l'ordonnance du président de la juridiction devant laquelle l'affaire a été appelée, laquelle n'est susceptible d'aucun recours, constitue un titre permettant de procéder au recouvrement forcé des sommes dues à l'avocat défenseur au titre de son état de frais et observe au demeurant que l'absence de paiement par la société PACIFIC MONTE-CARLO de cet état de frais est révélatrice d'une contestation de sa part, dont Maître Y. doit saisir le bâtonnier conformément à l'article 27 de la loi n° 1.047.

La société appelante fait en conséquence grief aux premiers juges d'avoir considéré que le montant fixé par l'évaluation du greffier en chef permettait le recouvrement forcé des sommes visées dans l'état de frais de l'avocat défenseur au moyen d'une saisie-arrêt des comptes bancaires de la société PACIFIQUE MONTE-CARLO.

Maître Y., intimé, demande à la Cour de :

* confirmer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de première instance du 13 février 2014 et, subsidiairement, si la Cour entendait recevoir en son moyen la société PACIFIC MONTE-CARLO, surseoir à statuer en l'attente de l'issue de la procédure de taxation engagée le 25 juin 2014 par Maître Y. et condamner la société PACIFIC MONTE-CARLO au paiement de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel manifestement abusif.

Maître Y. considère que le demandeur en contestation des états de frais et dépens aurait dû saisir le Bâtonnier en application de l'article 27 de la loi n° 1.047, ce qui n'a pas été fait tout au long des procédures judiciaires concernées et ce qu'il a lui-même été amené à faire le 25 juin 2014, la procédure de taxation étant actuellement pendante devant le Bâtonnier de l'Ordre des avocats défenseurs et avocats.

Il estime par ailleurs que l'ordonnance du Président du Tribunal de première instance est claire en ce qu'il bénéficie d'ores et déjà d'un titre lui permettant de procéder au recouvrement forcé des états de frais dont il se prévaut.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la Cour se réfère à leurs écritures ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé.

SUR CE,

Attendu que suivant exploit de saisie-arrêt et signification du 14 août 2013 Maître Y. a fait procéder à la saisie-arrêt des comptes bancaires de la société PACIFIC MONTE-CARLO afin d'obtenir paiement de la somme de 48.828, 32 euros, correspondant à divers états de frais établis dans le cadre de plusieurs instances ayant opposé la société VISTULA et WOLCZANKA, sa cliente, à Monsieur g. TS. et la société PACIFIC MONTE-CARLO.

Que cette saisie-arrêt était pratiquée entre les mains de l'établissement bancaire CRÉDIT LYONNAIS qui déclarait détenir pour le compte de celle-ci la somme de 10.396,06 euros, et ce, pour garantir le paiement à Maître Y. de la somme de 48.828,32 euros.

Qu'il est désormais fait grief à Maître Y., au soutien de la demande de réformation du jugement entrepris et de mainlevée de la saisie-arrêt ainsi pratiquée, d'avoir procédé de la sorte sans détenir aucun titre exécutoire pour le recouvrement de ses états de frais.

Attendu que si les décisions juridictionnelles de condamnation aux dépens caractérisent de toute évidence des titres exécutoires, force est de relever que les premiers juges ont justement qualifié au contraire de « provisoire » la liquidation des états de frais effectuée par le greffier en chef dans la mesure où il est toujours possible à la partie qui en contesterait le montant de saisir d'abord le Bâtonnier de sa réclamation puis, en cas de non-conciliation, le Président de la juridiction ayant statué, et ce, par application des dispositions de l'article 27 de la loi n° 1.047 du 28 juillet 1982, sur les avocats défenseurs et les avocats.

Que l'aléa résultant du caractère facultatif de cette saisine ne saurait pour autant conférer une « force exécutoire anticipée » à un tel état de frais liquidé, et ce, contrairement à ce que les premiers juges ont affirmé, dans la mesure où seul peut avoir cette qualité un écrit constatant un acte juridique ou matériel pouvant produire des effets juridiques et dûment revêtu de la formule exécutoire, ce qui est assurément le cas des décisions juridictionnelles définitives de condamnation aux dépens, mais nullement de l'état liquidatif provisoire chiffré établi par le greffier en chef, toujours susceptible de contestation par l'une ou l'autre des parties dans le cadre de la procédure de taxation prévue par la loi n° 1.047 du 28 juillet 1982, n'instituant pour ce faire aucun délai ;

Qu'il s'ensuit qu'il y a lieu de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit n'y avoir lieu d'ordonner la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée le 14 août 2013 sur la base d'un titre qui n'est pas exécutoire au sens des dispositions de l'article 495 du Code de procédure civile, ce, sans qu'il y ait lieu de faire droit à la demande subsidiaire de sursis à statuer jusqu'à l'issue d'une procédure de taxation, dont l'initiation prouve au contraire le bien-fondé des griefs articulés contre le jugement entrepris ;

Attendu que l'appel n'étant pas abusif mais apparaissant au contraire fondé, la demande de dommages et intérêts formée par Maître Y. sera rejetée ;

Attendu que Maître Y. ayant été contraint de procéder à une saisie-arrêt sur titre en l'état du rejet de sa demande d'autorisation de saisie-arrêt, les dépens de première instance et d'appel seront compensés ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

statuant publiquement et contradictoirement,

Reçoit la société PACIFIC MONTE-CARLO SARL en son appel,

Infirme le jugement entrepris et ordonne la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée le 14 août 2013 à la requête de Maître Y, entre les mains de l'établissement bancaire CRÉDIT LYONNAIS,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,

Ordonne la compensation des dépens de première instance et d'appel.

Composition

Après débats en audience de la Cour d'Appel de la Principauté de Monaco, par-devant Madame Brigitte GRINDA GAMBARINI, Premier Président, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Muriel DORATO-CHICOURAS, Conseiller, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Mademoiselle Magali GHENASSIA, Juge de Paix, complétant la Cour et remplissant les fonctions de conseiller en vertu de l'article 22 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires, assistés de Madame Laura SPARACIA-SIOLI, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles,

Après qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement susvisée,

Lecture est donnée à l'audience publique du 29 SEPTEMBRE 2014, par Madame Brigitte GRINDA GAMBARINI, Premier Président, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Laura SPARACIA-SIOLI, Greffier en chef adjoint, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, en présence de Mademoiselle Cyrielle COLLE, substitut du Procureur Général.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12579
Date de la décision : 29/09/2014

Analyses

La liquidation des états de frais d'un avocat-défenseur effectuée par le Greffier en chef a un caractère provisoire dans la mesure où, en application de l'article 27 de la loi n° 1.047 du 28 juillet 1982 sur les avocats-défenseurs et les avocats, il est toujours possible à la partie qui en conteste le montant, sans avoir à respecter un délai, de saisir le bâtonnier de sa réclamation, puis en cas de non conciliation, le Président de la juridiction ayant statué, et ce,L'aléa résultant du caractère facultatif de cette saisine ne saurait conférer une « force exécutoire anticipée » à un tel état de frais liquidé contrairement à ce qu'ont affirmé les premiers juges, seule pouvant avoir cette qualité une décision juridictionnelle définitive de condamnation aux dépens mais nullement un état liquidatif provisoire toujours susceptible de contestation dans le cadre de la procédure de taxation.Le jugement entrepris est réformé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu d'ordonner la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée sur la base d'un titre dépourvu de caractère exécutoire, au sens des dispositions de l'article 495 du Code de procédure civile.

Professions juridiques et judiciaires  - Procédure civile.

Avocat-défenseur - État de frais - Liquidation - Absence de taxation - Caractère provisoire - Défaut de titre exécutoire.


Parties
Demandeurs : La société à responsabilité limitée dénommée PACIFIC MONTE-CARLO
Défendeurs : Maître Y.

Références :

Code de procédure civile
article 495 du Code de procédure civile
article 22 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013
article 27 de la loi n° 1.047 du 28 juillet 1982
loi n° 1.047 du 28 juillet 1982


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2014-09-29;12579 ?

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