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05/04/2011 | MONACO | N°6885

Monaco | Cour d'appel, 5 avril 2011, G. c/ C.


Motifs

(en matière civile)

LA COUR,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La cour statue sur l'appel relevé par G., à l'encontre d'un jugement du Tribunal de Première Instance du 7 février 2008.

Considérant les faits suivants :

Aux termes d'un acte reçu le 20 décembre 2000 par Maître AUREGLIA, Notaire à Monaco, C. et G. ont annulé les statuts d'une société en nom collectif dénommée SNC G. & C. précédemment constituée entre eux et ont convenu de lui substituer ceux d'une Société en Commandite Simple, sous la condit

ion suspensive de l'obtention des autorisations administratives nécessaires.

Cette condition ayant défailli, C....

Motifs

(en matière civile)

LA COUR,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

La cour statue sur l'appel relevé par G., à l'encontre d'un jugement du Tribunal de Première Instance du 7 février 2008.

Considérant les faits suivants :

Aux termes d'un acte reçu le 20 décembre 2000 par Maître AUREGLIA, Notaire à Monaco, C. et G. ont annulé les statuts d'une société en nom collectif dénommée SNC G. & C. précédemment constituée entre eux et ont convenu de lui substituer ceux d'une Société en Commandite Simple, sous la condition suspensive de l'obtention des autorisations administratives nécessaires.

Cette condition ayant défailli, C. a demandé à G. de lui restituer les montants des apports qu'il avait réalisés.

G. s'est opposé à cette demande en invoquant l'existence d'une société de fait ayant existé entre eux et la nécessité de procéder aux opérations de comptes de liquidation de celle-ci.

Après avoir obtenu l'autorisation d'inscrire un nantissement provisoire sur le fonds de commerce appartenant à G. en garantie de la somme de 2,8 millions de francs à laquelle il évaluait sa créance, C. a attrait celui-ci devant le Tribunal de Première Instance pour obtenir la condamnation au paiement à son profit de la somme de 400.000 euros montant des travaux qu'il a fait réaliser sur le fonds dénommé « Colonial Café » et de celle de 500.000 francs virée par lui à la trésorerie de l'établissement.

Le 2 octobre 2003, le Tribunal de Première Instance a :

– constaté que la promesse de constitution de société conclue le 20 décembre 2000 était devenue caduque,

– dit que C. et G. se sont comportés en associés de fait dans le cadre de l'administration et de la gestion du fonds de commerce « Colonial Café »,

– ordonné la liquidation des intérêts communs ayant pu exister entre eux,

– ordonné avant dire droit au fond, une mesure d'expertise ayant pour mission d'établir un compte entre les parties en déterminant, outre la nature et le montant des apports et déductions respectivement opérés par chaque associé de fait dans le cadre de l'exploitation du restaurant « Colonial Café », les pertes et les bénéfices réalisés durant la période d'association de fait.

Le 27 octobre 2005, l'expert a déposé un procès-verbal de carence en raison :

– de ce que la comptabilité du « Colonial Café » ne traduisait pas l'intégralité des flux et la gestion de l'entreprise,

– de documents transmis par les parties insuffisamment fiables,

– de l'impossibilité pour G. de fournir des informations complémentaires.

Par le jugement entrepris intervenu le 7 février 2008, le Tribunal de Première Instance a :

– condamné G. à payer à C. les sommes de 400.000 euros et de 76.224,51 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2001,

– débouté C. du surplus de ses demandes et condamné celui-ci aux dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que :

– le jugement intervenu le 2 octobre 2003 avait consacré le principe de créance de C. à hauteur des sommes réclamées, tout en estimant que cette créance n'était pas immédiatement exigible en l'état des relations ayant existé entre les parties et de la nécessité de procéder aux comptes de liquidation de cette société de fait,

– G. n'avait pas relevé appel de cette décision,

– la liquidation des intérêts communs n'a pu être réalisée par l'expert notamment du fait de l'impossibilité de G. d'apporter les éléments justificatifs de sa réclamation,

– la dette qu'il avait contractée envers C. existait toujours.

Aux termes de la demande de réformation de ce jugement dont il a saisi la Cour le 23 avril 2008, G. sollicite :

– qu'il soit ordonné à C. de verser aux débats et communiquer les pièces justificatives du règlement par lui à la société SODETEK de la somme de 400.000 euros au titre des travaux exécutés dans le fonds de commerce à l'enseigne « Colonial Café »,

– le débouté de toutes les prétentions de C.,

– de voir dire et juger que C. est redevable à son égard de la somme de 45.740 euros au titre d'une reconnaissance de dette signée par lui le 15 septembre 2000 dans le cadre de la constitution de la S.N.C. G. & C.,

– de voir condamner C. au versement à son profit de la somme de 45.470 euros.

G. expose pour l'essentiel à l'appui de sa demande que :

– c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le jugement du 2 octobre 2003 consacrait le principe de créance de C., alors que le dispositif de cette décision qui est avant dire droit au fond, ne mentionne pas une quelconque condamnation à la somme de 400.000 euros et se borne à prévoir la liquidation des intérêts communs entre les parties en recourant à une expertise,

– il n'avait pas intérêt à relever appel de cette décision qui avait fait droit à ses prétentions quant à l'existence d'une société de fait entre eux,

– il a toujours demandé depuis l'introduction à son encontre de l'instance initiée par C., que celui-ci justifie du paiement effectif des travaux de transformation du fonds de commerce par le débit de son compte au crédit du compte de la société SODETEK qui a émis les factures n° 221 et 258 des 26 juin 2000 et 25 juillet 2000 au nom du « Colonial Café ».

Sur la demande présentée par G. de voir ordonner à C. de produire les pièces justificatives du règlement à la société SODETEK de la somme de 400.000 euros au titre des travaux exécutés par celle-ci dans le fonds de commerce à l'enseigne « Colonial Café », à laquelle C. s'était opposé, la Cour par arrêt intervenu le 30 juin 2009, a débouté G. de son incident de communication de pièces.

En suite de cet arrêt, G. a déposé devant la Cour des conclusions récapitulatives respectivement les 27 avril et 7 décembre 2010 pour solliciter :

– la réformation de la décision entreprise en toutes ses dispositions et de constater que :

• le jugement du 2 octobre 2003 n'a pas tranché la contestation relative à l'existence d'un principe de créance du chef de C. à son égard, et que ce jugement est dépourvu d'autorité de chose jugée sur ce point,

• l'existence d'une prétendue dette personnelle de G. envers C. d'un montant de 400.000 euros n'a pas été constatée par Maître AUREGLIA et qu'il peut en être apporté la preuve contraire,

• en vertu de la volonté des parties, la somme de 400.000 euros devait constituer un apport de C. à la future société en commandite simple « C. & Cie » et qu'il n'existe pas de dette personnelle de 400.000 euros de son chef,

•  C. et G. se sont comportés en associés de fait ainsi que l'a définitivement tranché le tribunal le 2 octobre 2003 et qu'il y a lieu d'établir la liquidation des intérêts communs ayant existé entre eux,

•  C. n'a pas payé les deux factures émises par la société Sodetek/Lecohno Design pour un montant total s'élevant à 400.606,04 euros et que C. n'a pas apporté cette somme au fonds de commerce « Colonial Café »,

•  C. a apporté la somme totale de 35.021,65 euros au dit fonds de commerce et retiré de la caisse la somme de 105.152,24 euros pour son profit personnel,

• Il a apporté à la société de fait le fonds de commerce « Colonial Café » pour un montant évalué à 686.020,57 euros ainsi que des apports en numéraires pour 22.156,02 euros,

• Il a payé avec des fonds propres des dettes d'exploitation du fonds de commerce pour 138.613,16 euros,

• Le fonds de commerce a été perdu en raison des fautes de gestion de C.,

• Il est titulaire d'une créance de 45.734,70 euros sur C. selon reconnaissance de dette du 15 septembre 2000,

– obtenir condamnation de C. au paiement à son profit de la somme de 951.941,79 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er mai 2001 sur la somme de 105.152,24 euros à titre de réparation de son préjudice ainsi que celle de 45.734,70 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2008 au titre de sa dette personnelle,

– subsidiairement de voir condamner C. au paiement à son profit de la somme de 847.205,15 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 1er mai 2001 sur la somme de 36.065,29 euros et des intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2008 sur la somme de 45.734,70 euros à titre de liquidation des intérêts communs ayant existé entre les parties,

– plus subsidiairement de voir ordonner une expertise,

– en tout état de cause de voir débouter C. de toutes ses prétentions et le voir condamner au versement à son profit de la somme de 45.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Il expose pour l'essentiel à l'appui de ses demandes que :

– les prétendues créances de C. envers lui ne sont pas établies,

– les motifs du jugement du 2 octobre 2003 ne sont pas revêtus de l'autorité de chose jugée,

– l'article 6 du projet de statuts de la société en commandite simple établis le 20 décembre 2000 n'est pas conforme à la réalité,

– le contenu des statuts établis le 20 décembre 2000 par Maître AUREGLIA sont dénués de force probante,

– il n'existe aucune dette personnelle à sa charge,

– les travaux effectués dans les locaux d'exploitation du fonds de commerce n'ont jamais été réglés par C.,

– l'absence de dette à sa charge d'un montant de 400.000 euros doit être constatée,

– l'existence d'une société de fait est établie et il doit être procédé à la liquidation des comptes entre les parties,

– C. n'a pas payé 400.000 euros de travaux et a effectué des apports en numéraires pour la seule somme de 48.783,68 euros tout en retirant en espèces 13.762,03 euros et celle de 105.152,24 euros en compte courant,

– Il a lui même apporté la somme de 22.156,02 euros, payé les fournisseurs pour 114.099,94 euros, le fisc pour 24.513,22 euros,

– Les fautes de C. ont généré la résiliation fautive du bail pour défaut de paiement des loyers dont il est seul responsable, ce qui lui occasionne un préjudice s'élevant à 686.020,57 euros,

– C. dispose d'une dette personnelle à son égard s'élevant à 45.734,70 euros aux termes de la reconnaissance de dette du 15 septembre 2000 dont il sollicite également le paiement.

C. a conclu en défense le 26 octobre 2010 pour s'opposer à ces prétentions et solliciter, outre la confirmation du jugement, de voir déclarer irrecevable la demande en paiement de la somme de 45.740 euros comme étant constitutive d'une demande nouvelle en appel et obtenir le versement à son profit de la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts.

Il expose pour l'essentiel que :

– le jugement du 2 octobre 2003 a consacré de manière définitive le principe de sa créance tout en reportant la consécration du caractère exigible de celle-ci à la liquidation des comptes entre les parties,

– sa qualité de créancier de G. résulte des énonciations de l'acte authentique dressé par Maître AUREGLIA,

– le rapport de Monsieur BOISSON sur lequel l'appelant se fonde n'a pas été établi à son contradictoire et ne saurait se substituer au rapport de carence établi par Monsieur GARINO à la suite de la défaillance de ce chef de l'appelant,

– les comptes établis par l'appelant de son seul chef n'ont aucune valeur probante.

SUR CE,

Attendu qu'il résulte des statuts de la société en commandite simple « C. & Cie » rédigés par Maître Paul-Louis AUREGLIA Notaire à Monaco et signés par les deux parties le 20 décembre 2000, que « la société prendra en charge le remboursement d'une dette chirographaire de 400.000 euros contractée par G. auprès C.... ce dernier ayant réglé le montant des travaux qui ont été récemment accomplis au sein du fonds de commerce... » (article 13 § g) ;

Que ces statuts disposent qu'en contrepartie de cette somme de 400.000 euros montant des travaux réglés par C., ce dernier se voyait attribuer 400 parts représentant la moitié du capital social ;

Attendu que cette convention caduque par l'effet de la non réalisation de la condition suspensive dont elle était assortie, contient néanmoins dans les rapports entre les parties, reconnaissance expresse par G. de ce qu'il est personnellement débiteur de la somme de 400.000 euros en conséquence de la plus-value apportée à son fonds de commerce par les travaux que C. a réglés, fonds de commerce dont la propriété lui demeure acquise en l'état de la défaillance de la condition assortissant son apport en société ;

Attendu que G. conteste la valeur probatoire du contenu de cet acte dès lors que le notaire instrumentaire n'a pas constaté personnellement la réalisation des travaux ou leur paiement par C., et conclut conséquemment que la force probante des actes authentiques ne peut être reconnue à ces dispositions ;

Attendu que si les mentions d'un acte authentique que le notaire n'a pas pu vérifier lui-même ne sont pas de celles qui font foi jusqu'à inscription de faux, elles bénéficient à tout le moins de la force probante attachée aux actes sous seing privé ;

Qu'à leur encontre la preuve n'est pas libre mais soumise aux dispositions des articles 1188 à 1195 du Code civil, selon lesquelles on ne peut prouver contre un acte que par écrit sauf si l'on dispose d'un commencement de preuve par écrit ou si l'on est dans un cas d'impossibilité morale de se procurer un écrit ;

Attendu que sans satisfaire à l'une ou l'autre de ces conditions, G. argumente à l'encontre de l'acte authentique et de la reconnaissance de dette qu'il contient à sa charge, en demandant à C. de justifier des dépenses qu'il dit avoir réalisées en juin 2000 pour le compte du « Colonial Café » ;

Qu'en procédant ainsi, G. tente de faire supporter par C. en ses lieu et place, la charge d'une preuve qui ne lui incombe pas d'une part, alors même qu'il ne justifie pas d'autre part des conditions d'ouverture propres à lui permettre d'apporter la preuve contraire au contenu des dispositions de l'acte qu'il critique ;

Attendu que la reconnaissance de dette contenue dans l'acte authentique du 20 décembre 2000 est claire et ne saurait donner lieu à interprétation ;

Attendu que pour réaliser la liquidation des intérêts communs ayant pu exister de fait entre C. et G. dans le cadre de l'administration et de la gestion du fonds de commerce « Colonial Café », le jugement du 2 octobre 2003 avait ordonné une expertise comptable ;

Qu'il n'est pas contesté que l'expert en charge de cette mission a déposé un procès-verbal de carence daté du 9 octobre 2005, dénonçant l'impossibilité dans laquelle se trouvait G. de justifier de ses réclamations ;

Que ce procès-verbal n'est pas intervenu de manière inopinée mais après que l'expert ait réclamé à diverses reprises les pièces dont il avait besoin et alors même que G. était régulièrement assisté d'un conseil ;

Que G. ne peut se retrancher derrière la carence dont il a fait preuve au cours de cette mesure d'instruction pour tenter désormais de justifier des éléments dont il se prévaut, en produisant une « expertise » qui ne revêt aucun caractère contradictoire pour avoir été conduite en dehors d'un mandat judiciaire et sur sa seule initiative ;

Que ces documents postérieurs au procès-verbal de carence, ne pourront valablement être retenus par la Cour dès lors qu'ils viennent contredire les observations réalisées par l'expert selon lesquelles G. n'avait pas été en mesure de lui produire durant le temps de l'expertise, les éléments comptables qu'il lui réclamait pour les besoins de celle-ci ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu davantage de faire droit à la nouvelle demande d'expertise présentée par G., alors qu'il n'a pas été en mesure de satisfaire aux exigences de celle qui avait été précédemment ordonnée et qu'il ne justifie aucunement des circonstances de force majeure qui l'aurait placé dans l'impossibilité d'y satisfaire dans les délais à lui impartis ;

Attendu qu'en considération du procès-verbal de carence établi par l'expert, il apparaît que G. ne justifie pas objectivement du bien fondé du montant des réclamations qu'il articule à l'encontre de C. du chef de la société de fait ayant existé entre eux ;

Attendu que c'est dès lors à juste titre que le jugement dont appel a procédé aux comptes entre les parties sur la base des éléments comptables dont le tribunal disposait dans le cadre de la liquidation des intérêts communs des parties en conséquence du jugement du 2 octobre 2003 l'ayant ordonnée, qui avait retenu à la charge de G. l'existence d'une dette chirographaire s'élevant à 400.000 euros outre les apports réalisés en numéraires par C. d'un montant de 500.000 francs soit 76.224,51 euros ;

Que le jugement sera en conséquence confirmé de ce chef ;

Attendu que la demande en paiement de la somme de 45.734,70 euros présentée par G. à l'encontre de C. est fondée sur une reconnaissance de dette signée par ce dernier le 15 septembre 2000, soit à une date intermédiaire entre celle des travaux exécutés par C. sur le fonds de commerce et l'intervention de l'acte constitutif des statuts de la société ;

Qu'il ne peut valablement être soutenu que cette reconnaissance de dette n'a pas un lien de connexité étroit entre toutes les opérations d'investissements réalisés à cette période, de sorte que la demande de condamnation à son paiement présentée par G. participe nécessairement et étroitement du règlement et de la liquidation des intérêts communs ayant existé entre les parties ;

Qu'en outre si son bien fondé vient à être établi, elle ne peut que conduire à ce que la compensation soit ordonnée avec la créance dont C. est désormais titulaire à l'encontre de G. ;

Qu'il convient de déclarer G. recevable en sa demande de ce chef en application des dispositions de l'article 431 alinéa 2 du Code de procédure civile ;

Attendu qu'il résulte du document intitulé reconnaissance de dette, établi à Monaco le 15 septembre 2000 dont un exemplaire a été remis à G., que C. reconnaît devoir la somme de 300.000 francs à G. dans le cadre de la constitution de la SNC G. & C. et pour solde de tous comptes arrêtés au 19 juin 2000, somme qu'il s'engage à lui restituer au plus tard dans un délai de 5 mois ;

Que les signatures des deux parties qui y sont apposées sont certifiées par Maître AUREGLIA ;

Attendu que cette reconnaissance de dette est régulière en la forme ;

Que C. ne conteste pas au fond la réalité de cet engagement de débit à sa charge ;

Que la créance de G. qui est certaine et liquide au regard de la reconnaissance de dette qui l'établit, a été rendue régulièrement exigible par la mise en demeure réalisée par G. aux termes de sa lettre recommandée avec accusé de réception du 2 avril 2008 ;

Qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande de G. de ce chef ;

Que le jugement sera en conséquence complété sur ce point et la compensation entre les deux créances dont sont respectivement titulaires C. et G. sera en conséquence ordonnée dans la limite de la plus faible d'entre elles ;

Attendu que les procédures conduites par chaque partie ne revêtent aucun caractère abusif dès lors qu'elles ont été au moins pour partie satisfaites, de sorte que les demandes de dommages-intérêts présentées respectivement à leur encontre seront rejetées ;

Attendu que la présente décision profitant à l'une et l'autre partie mais dans une moindre mesure au profit de G., il sera fait masse des dépens d'appel lesquels seront supportés dans la proportion de deux tiers à la charge de G. et d'un tiers à la charge de C ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco, statuant contradictoirement

– Déclare G. recevable en son appel,

Au fond,

– Confirme le jugement prononcé par le Tribunal de Première Instance le 7 février 2008 en ce qu'il a condamné G. à payer à C. les sommes de 400.000 euros et de 76.224,51 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 9 novembre 2001,

Y ajoutant,

– Condamne C. au paiement au profit de G. de la somme de 45.734,70 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 avril 2008,

– Ordonne la compensation entre ces deux créances dans la limite de la plus faible d'entre elles,

– Fait masse des dépens d'appel et dit qu'ils seront supportés pour les deux tiers par G. et pour un tiers par C. dont distraction au profit de Maître Jean-Charles GARDETTO et de Maître Christiane PALMERO pour ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision ;

– Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition

M. CORDAS prem. pres. M. FORÊT-DODELIN et CAMINADE cons. - M. DUBES prem. subst. proc. gen, Mme BARDY gref. en chef - M. BLOT, GARDETTO et PALMERO av. chef M. ELLIA av. bar. de Nice

Note

Le présent arrêt confirme le jugement prononcé par le tribunal de première instance le 7 février 2008 ; y ajoutant il condamne l'intimé au paiement, au profit de l'appelant d'une somme et ordonne la compensation entre les deux créances.

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Synthèse
Numéro d'arrêt : 6885
Date de la décision : 05/04/2011

Analyses

Il résulte des statuts de la société en commandite simple « L.C. & Cie » rédigés par Maître Paul-Louis AUREGLIA Notaire à Monaco et signés par les deux parties le 20 décembre 2000, que « la société prendra en charge le remboursement d'une dette chirographaire de 400 000 euros contractée par D.G. auprès de L.C. ... ce dernier ayant réglé le montant des travaux qui ont été récemment accomplis au sein du fonds de commerce... » (art. 13 § g).Ces statuts disposent qu'en contrepartie de cette somme de 400 000 euros montant des travaux réglés par L.C., ce dernier se voyait attribuer 400 parts représentant la moitié du capital social.Cette convention caduque par l'effet de la non réalisation de la condition suspensive dont elle était assortie, contient néanmoins dans les rapports entre les parties, reconnaissance expresse par D.G. de ce qu'il est personnellement débiteur de la somme de 400 000 euros en conséquence de la plus-value apportée à son fonds de commerce par les travaux que L.C. a réglés, fonds de commerce dont la propriété lui demeure acquise en l'état de la défaillance de la condition assortissant son apport en société.D.G. conteste la valeur probatoire du contenu de cet acte dès lors que le notaire instrumentaire n'a pas constaté personnellement la réalisation des travaux ou leur paiement par L.C., et conclut conséquemment que la force probante des actes authentiques ne peut être reconnue à ces dispositions.Si les mentions d'un acte authentique que le notaire n'a pas pu vérifier lui-même ne sont pas de celles qui font foi jusqu'à inscription de faux, elles bénéficient à tout le moins de la force probante attachée aux actes sous seing privé.À leur encontre la preuve n'est pas libre mais soumise aux dispositions des articles 1188 à 1195 du Code civil, selon lesquelles on ne peut prouver contre un acte que par écrit sauf si l'on dispose d'un commencement de preuve par écrit ou si l'on est dans un cas d'impossibilité morale de se procurer un écrit.Sans satisfaire à l'une ou l'autre de ces conditions, D.G. argumente à l'encontre de l'acte authentique et de la reconnaissance de dette qu'il contient à sa charge, en demandant à L.C. de justifier des dépenses qu'il dit avoir réalisées en juin 2000 pour le compte du « Colonial Café ».En procédant ainsi, D.G. tente de faire supporter par L.C. en ses lieu et place, la charge d'une preuve qui ne lui incombe pas d'une part, alors même qu'il ne justifie pas d'autre part des conditions d'ouverture propres à lui permettre d'apporter la preuve contraire au contenu des dispositions de l'acte qu'il critique.La reconnaissance de dette contenue dans l'acte authentique du 20 décembre 2000 est claire et ne saurait donner lieu à interprétation.Pour réaliser la liquidation des intérêts communs ayant pu exister de fait entre L.C. et D.G. dans le cadre de l'administration et de la gestion du fonds de commerce « Colonial Café », le jugement du 2 octobre 2003 avait ordonné une expertise comptable.Il n'est pas contesté que l'expert en charge de cette mission a déposé un procès-verbal de carence daté du 9 octobre 2005, dénonçant l'impossibilité dans laquelle se trouvait D.G. de justifier de ses réclamations.Ce procès-verbal n'est pas intervenu de manière inopinée mais après que l'expert ait réclamé à diverses reprises les pièces dont il avait besoin et alors même que D.G. était régulièrement assisté d'un conseil.D.G. ne peut se retrancher derrière la carence dont il a fait preuve au cours de cette mesure d'instruction pour tenter désormais de justifier des éléments dont il se prévaut, en produisant une « expertise » qui ne revêt aucun caractère contradictoire pour avoir été conduite en dehors d'un mandat judiciaire et sur sa seule initiative.Ces documents postérieurs au procès-verbal de carence, ne pourront valablement être retenus par la Cour dès lors qu'ils viennent contredire les observations réalisées par l'expert selon lesquelles D.G. n'avait pas été en mesure de lui produire durant le temps de l'expertise, les éléments comptables qu'il lui réclamait pour les besoins de celle-ci.Il n'y a pas lieu davantage de faire droit à la nouvelle demande d'expertise présentée par D.G., alors qu'il n'a pas été en mesure de satisfaire aux exigences de celle qui avait été précédemment ordonnée et qu'il ne justifie aucunement des circonstances de force majeure qui l'aurait placé dans l'impossibilité d'y satisfaire dans les délais à lui impartis.En considération du procès-verbal de carence établi par l'expert, il apparaît que D.G. ne justifie pas objectivement du bien fondé du montant des réclamations qu'il articule à l'encontre de L.C. du chef de la société de fait ayant existé entre eux.C'est dès lors à juste titre que le jugement dont appel a procédé aux comptes entre les parties sur la base des éléments comptables dont le tribunal disposait dans le cadre de la liquidation des intérêts communs des parties en conséquence du jugement du 2 octobre 2003 l'ayant ordonnée, qui avait retenu à la charge de D.G. l'existence d'une dette chirographaire s'élevant à 400.000 euros outre les apports réalisés en numéraires par L.C. d'un montant de 500 000 francs soit 76 224,51 euros.Le jugement sera en conséquence confirmé de ce chef.La demande en paiement de la somme de 45 734,70 euros présentée par D.G. à l'encontre de L.C. est fondée sur une reconnaissance de dette signée par ce dernier le 15 septembre 2000, soit à une date intermédiaire entre celle des travaux exécutés par L.C. sur le fonds de commerce et l'intervention de l'acte constitutif des statuts de la société.Il ne peut valablement être soutenu que cette reconnaissance de dette n'a pas un lien de connexité étroit entre toutes les opérations d'investissements réalisés à cette période, de sorte que la demande de condamnation à son paiement présentée par D.G. participe nécessairement et étroitement du règlement et de la liquidation des intérêts communs ayant existé entre les parties.En outre si son bien fondé vient à être établi, elle ne peut que conduire à ce que la compensation soit ordonnée avec la créance dont L.C. est désormais titulaire à l'encontre de D.G.Il convient de déclarer D.G. recevable en sa demande de ce chef en application des dispositions de l'article 431, alinéa 2 du Code de procédure civile.Il résulte du document intitulé reconnaissance de dette, établi à Monaco le 15 septembre 2000 dont un exemplaire a été remis à D.G., que L.C. reconnaît devoir la somme de 300 000 francs à D.G. dans le cadre de la constitution de la SNC G. & C. et pour solde de tous comptes arrêtés au 19 juin 2000, somme qu'il s'engage à lui restituer au plus tard dans un délai de 5 mois.Les signatures des deux parties qui y sont apposées sont certifiées par Maître AUREGLIA. Cette reconnaissance de dette est régulière en la forme.L.C. ne conteste pas au fond la réalité de cet engagement de débit à sa charge.La créance de D.G. qui est certaine et liquide au regard de la reconnaissance de dette qui l'établit, a été rendue régulièrement exigible par la mise en demeure réalisée par D.G. aux termes de sa lettre recommandée avec accusé de réception du 2 avril 2008.Il convient en conséquence de faire droit à la demande de D.G. de ce chef.Le jugement sera en conséquence complété sur ce point et la compensation entre les deux créances dont sont respectivement titulaires L.C. et D.G. sera en conséquence ordonnée dans la limite de la plus faible d'entre elles.Les procédures conduites par chaque partie ne revêtent aucun caractère abusif dès lors qu'elles ont été au moins pour partie satisfaites, de sorte que les demandes de dommages-intérêts présentées respectivement à leur encontre seront rejetées.La présente décision profitant à l'une et l'autre partie mais dans une moindre mesure au profit de D.G., il sera fait masse des dépens d'appel lesquels seront supportés dans la proportion de deux tiers à la charge de D.G. et d'un tiers à la charge de L.C.

Contrat - Effets.

Contrats obligations :Reconnaissance de dettes - Convention caduque pour non réalisation d'une condition suspensive - contenant une reconnaissance de dette - Contestation de cette reconnaissance injustifiée : celle-ci étant régulière en la forme et la contestation n'étant pas justifiée alors que la preuve à l'encontre de cet acte n'est point libre mais soumise aux dispositions des articles 1188 et 1195 du Code civil.


Parties
Demandeurs : G.
Défendeurs : C.

Références :

articles 1188 à 1195 du Code civil
articles 1188 et 1195 du Code civil
article 431, alinéa 2 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2011-04-05;6885 ?

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