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29/03/2011 | MONACO | N°509112

Monaco | Cour d'appel, 29 mars 2011, SAM Crédit Foncier de Monaco c/ N.


Motifs

(en matière civile)

La Cour,

SUR CE,

Attendu que figurent au dossier plusieurs documents tous datés du 5 juin 2002 ;

Attendu qu'il s'agit de pièces communiquées par le CFM en première instance (pièces n° 25, 26 et 27) ;

Que sur chacune de ces pièces figure en en-tête la mention manuscrite « attention fax » ;

Que le document pièce n° 25 est une convention de prêt entre le Crédit Foncier de Monaco et D. R. dont l'objet est le financement de l'acquisition d'un voilier pour un montant de 587.000 euros ;

Que la

garantie prévue au contrat est la caution solidaire et indivisible de N., (cf. acte du 5 juin 2002) appuyée par une cons...

Motifs

(en matière civile)

La Cour,

SUR CE,

Attendu que figurent au dossier plusieurs documents tous datés du 5 juin 2002 ;

Attendu qu'il s'agit de pièces communiquées par le CFM en première instance (pièces n° 25, 26 et 27) ;

Que sur chacune de ces pièces figure en en-tête la mention manuscrite « attention fax » ;

Que le document pièce n° 25 est une convention de prêt entre le Crédit Foncier de Monaco et D. R. dont l'objet est le financement de l'acquisition d'un voilier pour un montant de 587.000 euros ;

Que la garantie prévue au contrat est la caution solidaire et indivisible de N., (cf. acte du 5 juin 2002) appuyée par une constitution de gage (acte du 5 juin 2002) ;

Que ce document qui porte de la main de N., qui ne le conteste pas, «  bon pour Accord en concurrence de 587.000 euros outre intérêts frais et accessoires » est parvenu à la banque le 6 juin 2002 ainsi que la mention du fax reçue par la banque en atteste ;

Que le numéro figurant sur ce fax est selon la banque un numéro belge, ce que ne conteste pas N., lequel indique avoir été absent de Monaco le 5 juin 2002, date de la signature de l'acte de prêt par son gendre ;

Que la banque produit de la même façon les pièces n° 26 et n° 27 lesquelles sont constituées de l'engagement de caution et de la constitution par N. d'une garantie équivalente au montant du prêt consenti à son gendre au profit de la banque ;

Attendu que ces deux documents sont parvenus à la banque par fax du 6 juin 2002 de la même manière que l'acte de prêt ;

Attendu que l'acte de caution porte l'engagement solidaire et indivisible de N. « avec le principal obligé au remboursement en principal, outre intérêts, frais, pénalités ou intérêts de retard de toutes les sommes qu'il doit ou pourra devoir à la banque pour quelque cause que ce soit même indirectement et renonce expressément au bénéfice de division et de discussion » ;

Que cette garantie est fixée à hauteur de 587.000 euros ;

Attendu que pour justifier son absence de Monaco lors de la signature de l'acte de prêt, N. soutient qu'il était à Bruxelles ;

Attendu toutefois que cet emploi du temps n'exclut pas l'envoi depuis Bruxelles des fax communiqués par la banque ;

Attendu qu'un second contrat de prêt identique au premier en date du 5 juin 2002 est communiqué par N. sous le numéro 80 et porte une mention manuscrite de N. différente, de celle portée sur l'acte faxé, le premier portant la mention « bon pour accord », le second portant la mention « bon pour caution solidaire » (pièce n° 80) ;

Attendu que ces pièces eussent-elles été remises ultérieurement à la banque en original avec les corrections que le premier envoi rendait nécessaire, n'ont pas pour effet d'effacer la volonté avérée de N. de se porter caution du prêt consenti à son gendre et de garantir le remboursement de ce prêt sur ses propres fonds par l'acte de caution d'une part et par l'affectation d'un portefeuille de valeurs mobilières au remboursement de ce prêt d'autre part, et ce, dès le 5 juin 2002 ;

Attendu que pour échapper à l'obligation mise à sa charge par la convention, N. doit démontrer qu'il avait fait de la solvabilité de son gendre la condition de son engagement ;

Attendu qu'aucune mention de l'acte de caution ne le précise ; qu'il ne démontre même pas qu'il aurait tacitement fait de la solvabilité de son gendre la condition de son engagement ; que bien au contraire, le nantissement des valeurs mobilières destiné outre sa caution à garantir le remboursement du prêt démontre que la solvabilité de D.R. n'était pas la condition de son engagement, N. ayant lui-même mis en œuvre au profit de la banque la faculté d'un remboursement immédiat du prêt consenti en cas de défaillance du débiteur principal ;

Attendu d'ailleurs qu'il a réglé spontanément les trois premières échéances du prêt que D. R. n'était pas en mesure de payer ;

Qu'il indique au surplus avoir déjà dû dans le passé prêter la somme de 30.000 euros à D. R. en 2000, démontrant ainsi qu'il connaissait sa situation financière ;

Attendu que pour annuler la caution, le tribunal a retenu que la condition de l'engagement de N. consistait dans le gage constitué par le bateau que le prêt permettait d'acquérir, et que la banque qui savait que ce bateau était acquis par une société et non par D. R. lui-même, en dissimulant cette information à la caution aurait commis un dol et surpris ainsi frauduleusement son consentement ;

Attendu que l'engagement de caution solidaire rédigé séparément par N. est général et ne fait aucune référence à l'objet du prêt ;

Que N. s'est présenté lui-même comme un entrepreneur important, à la tête d'un groupe gérant des PME ;

Qu'il est lui même propriétaire d'un voilier et pratique la régate ainsi que le CFM en rapporte la preuve ;

Attendu que rien dans son comportement au moment de l'engagement de caution solidaire, ni par la suite lorsqu'il a payé lui-même les premières échéances du bateau, ne démontre qu'il avait soumis son engagement même tacitement à la garantie que constituait le bateau ; qu'il n'avait d'ailleurs à cet égard aucunement affecté sa caution à l'acquisition du bateau, ni tenté d'obtenir de la banque qu'elle prit elle-même une garantie sur le bateau ;

Attendu que N., homme d'affaire avisé et connaisseur du milieu de la voile ainsi que le démontre les pièces versées par lui aux débats, n'a soumis sa caution et l'affectation du nantissement au remboursement du prêt à aucune condition même tacitement ; qu'il n'en rapporte pas la preuve ;

Qu'il a voulu favoriser par sa caution l'engagement de son gendre dans la course du Vendée Globe ;

Que la banque, face à un homme d'affaire avisé président d'un groupe important, spécialiste de voile n'a pas non plus manqué à son obligation d'information et de conseil, cette obligation étant allégée en présence d'un client averti, ce qui était le cas de N. ;

Attendu qu'il y a lieu en conséquence de réformer le jugement, de dire n'y avoir lieu à annulation de l'acte de caution solidaire et indivisible et de débouter N. de ses demandes ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu d'examiner la validité des attestations, celles-ci n'étant pas utiles à la solution du litige ;

Attendu que N. n'a commis aucun abus dans l'exercice de ses droits ; qu'il y a lieu de débouter le CFM de sa demande en dommages et intérêts ;

Qu'il y a lieu de condamner N. aux dépens de première instance et d'appel ;

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

Statuant contradictoirement,

– Réforme le jugement en date du 29 mai 2008,

– Déboute N. de ses demandes,

– Déboute le Crédit Foncier de Monaco de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

– Condamne N. aux dépens de première instance et d'appel, distraits au profit de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

– Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition

M. CORDAS prem. pres ; Mme MABRUT v. pres, M. PERRIQUET cons ;

M. DUBES prem. subst. proc. général. Mme BARDY gref. en chef

Mes LICARI et PALMERO av. chef ; Me PILLON av. bar. de Caen.

Note

Cet arrêt reforme le jugement en date du 29 mai 2008 en déboutant notamment N. de ses demandes.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 509112
Date de la décision : 29/03/2011

Analyses

Figurent au dossier plusieurs documents tous datés du 5 juin 2002. Il s'agit de pièces communiquées par le CFM en première instance (pièces n° 25, 26 et 27). Sur chacune de ces pièces figure en en-tête la mention manuscrite « attention fax ». Le document pièce n° 25 est une convention de prêt entre le Crédit Foncier de Monaco et P.D.R. dont l'objet est le financement de l'acquisition d'un voilier pour un montant de 587 000 euros.La garantie prévue au contrat est la caution solidaire et indivisible de J.N., (cf. acte du 5 juin 2002) appuyée par une constitution de gage (acte du 5 juin 2002). Ce document qui porte de la main de J.N., qui ne le conteste pas, « bon pour Accord en concurrence de 587 000 euros outre intérêts frais et accessoires » est parvenu à la banque le 6 juin 2002 ainsi que la mention du fax reçue par la banque en atteste.Le numéro figurant sur ce fax est selon la banque un numéro belge, ce que ne conteste pas J.N., lequel indique avoir été absent de Monaco le 5 juin 2002, date de la signature de l'acte de prêt par son gendre.La banque produit de la même façon les pièces n° 26 et n° 27 lesquelles sont constituées de l'engagement de caution et de la constitution par J.N. d'une garantie équivalente au montant du prêt consenti à son gendre au profit de la banque.Ces deux documents sont parvenus à la banque par fax du 6 juin 2002 de la même manière que l'acte de prêt.L'acte de caution porte l'engagement solidaire et indivisible de J.N. « avec le principal obligé au remboursement en principal, outre intérêts, frais, pénalités ou intérêts de retard de toutes les sommes qu'il doit ou pourra devoir à la banque pour quelque cause que ce soit même indirectement et renonce expressément au bénéfice de division et de discussion ». Cette garantie est fixée à hauteur de 587 000 euros.Pour justifier son absence de Monaco lors de la signature de l'acte de prêt, J.N. soutient qu'il était à Bruxelles. Toutefois, cet emploi du temps n'exclut pas l'envoi depuis Bruxelles des fax communiqués par la banque.Un second contrat de prêt identique au premier en date du 5 juin 2002 est communiqué par J.N. sous le numéro 80 et porte une mention manuscrite de J.N. différente, de celle portée sur l'acte faxé, le premier portant la mention « bon pour accord », le second portant la mention « bon pour caution solidaire » (pièce n° 80).Ces pièces eussent-elles été remises ultérieurement à la banque en original avec les corrections que le premier envoi rendait nécessaire, n'ont pas pour effet d'effacer la volonté avérée de J.N. de se porter caution du prêt consenti à son gendre et de garantir le remboursement de ce prêt sur ses propres fonds par l'acte de caution d'une part et par l'affectation d'un portefeuille de valeurs mobilières au remboursement de ce prêt d'autre part, et ce, dès le 5 juin 2002.Pour échapper à l'obligation mise à sa charge par la convention, J.N. doit démontrer qu'il avait fait de la solvabilité de son gendre la condition de son engagement.Aucune mention de l'acte de caution ne le précise. Il ne démontre même pas qu'il aurait tacitement fait de la solvabilité de son gendre la condition de son engagement. Au contraire, le nantissement des valeurs mobilières destiné outre sa caution à garantir le remboursement du prêt démontre que la solvabilité de P.D.R. n'était pas la condition de son engagement, J.N. ayant lui-même mis en œuvre au profit de la banque la faculté d'un remboursement immédiat du prêt consenti en cas de défaillance du débiteur principal.D'ailleurs qu'il a réglé spontanément les trois premières échéances du prêt que P.D.R. n'était pas en mesure de payer.Il indique au surplus avoir déjà dû dans le passé prêter la somme de 30 000 euros à P.D.R. en 2000, démontrant ainsi qu'il connaissait sa situation financière.Pour annuler la caution, le tribunal a retenu que la condition de l'engagement de J.N. consistait dans le gage constitué par le bateau que le prêt permettait d'acquérir, et que la banque qui savait que ce bateau était acquis par une société et non par P.D.R. lui-même, en dissimulant cette information à la caution aurait commis un dol et surpris ainsi frauduleusement son consentement.L'engagement de caution solidaire rédigé séparément par J.N. est général et ne fait aucune référence à l'objet du prêt.J.N. s'est présenté lui-même comme un entrepreneur important, à la tête d'un groupe gérant des PME.Il est lui même propriétaire d'un voilier et pratique la régate ainsi que le CFM en rapporte la preuve.Rien dans son comportement au moment de l'engagement de caution solidaire, ni par la suite lorsqu'il a payé lui-même les premières échéances du bateau, ne démontre qu'il avait soumis son engagement même tacitement à la garantie que constituait le bateau. Il n'avait d'ailleurs à cet égard aucunement affecté sa caution à l'acquisition du bateau, ni tenté d'obtenir de la banque qu'elle prit elle-même une garantie sur le bateau.J.N., homme d'affaire avisé et connaisseur du milieu de la voile ainsi que le démontre les pièces versées par lui aux débats, n'a soumis sa caution et l'affectation du nantissement au remboursement du prêt à aucune condition même tacitement. Il n'en rapporte pas la preuve.Il a voulu favoriser par sa caution l'engagement de son gendre dans la course du Vendée Globe.La banque, face à un homme d'affaire avisé président d'un groupe important, spécialiste de voile n'a pas non plus manqué à son obligation d'information et de conseil, cette obligation étant allégée en présence d'un client averti, ce qui était le cas de J.N.Il y a lieu en conséquence de réformer le jugement, de dire n'y avoir lieu à annulation de l'acte de caution solidaire et indivisible et de débouter J.N. de ses demandes.

Opérations bancaires et boursières.

Contrats et ObligationsCaution solidaire et indivisible - Assortie d'un nantissement garantissant le remboursement d'un prêt bancaire destiné à l'acquisition d'un bateau par un tiers et non par l'emprunteur - Engagement de la caution - homme d'affaires avisé - non conditionné par la solvabilité de l'emprunteur (gendre de la caution) et sans se référer à l'objet du prêt - Paiement spontané des premières échéances par la caution - Non manquement de la banque à son obligation d'information et de conseil - Absence de motifs tendant à fonder une annulation de l'acte de caution solidaire et indivisible - en prétendant que la banque aurait commis un dol en dissimulant à la caution le fait que le bateau était acquis par un tiers et non par l'emprunteur.


Parties
Demandeurs : SAM Crédit Foncier de Monaco
Défendeurs : N.

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2011-03-29;509112 ?

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