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07/03/2006 | MONACO | N°27195

Monaco | Cour d'appel, 7 mars 2006, SAM BSI 1873 - Gérance Internationale SAM c/ Société C. Ltd et Société H. Consulting Ltd et G. G.


Abstract

Contrats et obligations

Contrat d'apporteur d'affaires - Banque agissant comme simple dépositaire des actifs des clients apportés, ces actifs étant gérés par l'apporteur - Obligations de la banque : tenir les comptes des clients et exécuter les ordres de l'apporteur - Inexécution des ordres : faute engageant la responsabilité de la banque

Résumé

Les deux instances d'appel ci-dessus rappelées, dirigées contre le même jugement présentent un lien de connexité certain et qu'il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de les jug

er ensemble, et donc d'en prononcer la jonction ;

Le compte Starlight

a) Sur les conve...

Abstract

Contrats et obligations

Contrat d'apporteur d'affaires - Banque agissant comme simple dépositaire des actifs des clients apportés, ces actifs étant gérés par l'apporteur - Obligations de la banque : tenir les comptes des clients et exécuter les ordres de l'apporteur - Inexécution des ordres : faute engageant la responsabilité de la banque

Résumé

Les deux instances d'appel ci-dessus rappelées, dirigées contre le même jugement présentent un lien de connexité certain et qu'il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de les juger ensemble, et donc d'en prononcer la jonction ;

Le compte Starlight

a) Sur les conventions

Par acte sous seing privé du 15 novembre 1999, la société C. Ltd a signé avec la banque BSI 1873 un contrat d'apporteur d'affaires ; selon ce contrat, la banque agissant comme simple dépositaire des actifs des clients apportés et à exécuter les ordres ; elle était en revanche déchargée de l'obligation de surveiller les opérations effectuées par l'apporteur, comme celle de vérifier ou d'évaluer les conséquences des ordres transmis par l'apporteur ;

Il a été également convenu que la banque rétrocéderait à la société C. Ltd, deux fois par an, la moitié des commissions et frais qu'elle percevrait sur les opérations, et lui verserait (article 4.2) une commission d'administration ;

C'est ainsi que par acte sous seing privé du 20 décembre 1999 portant en annexe comme faisant partie intégrante du contrat, les conditions générales et le règlement édictés par la banque, G. G. a ouvert dans les livres de celle-ci, un compte n° A570521 intitulé « Starlight » en dollars US, en euros et en titres ;

Par acte sous seing privé du même jour, libellé sur un document portant l'entête BSU 1873 et intitulé « pouvoir administratif », G. G. a autorisé la banque à donner suite aux instructions de la société C. Ltd concernant « l'exécution d'opérations d'achats, de ventes, de souscriptions, de conversions, de dépôts et de changes, contrats à terme (y compris les options et financial futures) sur tous genres de titres, métaux, monnaies et valeurs mobilières - même celles non indiquées explicitement (y compris la faculté de désigner les contrats y relatifs) et ce dans les limites des disponibilités du mandat » ;

Par cet acte, le mandant a en outre, déchargé la banque de toute responsabilité, qu'il a déclaré assumer personnellement « ne considérant d'ores et déjà comme bons et valables tous les actes du mandataire » ;

Le mandant a souscrit aux « conditions générales pour la négociation d'instruments dérivés » définissant les droits et obligations découlant des opérations effectuées par la banque en son nom, lors de l'achat, de la vente ou de la souscription d'instruments dérivés traités en bourse (options standardisées et financial futures) ainsi que pour les instruments dérivés non traités en bourse ;

C'est ainsi qu'il s'est engagé à ne donner à la banque que des ordres tenant compte de sa situation financière, et à mettre à sa disposition la marge de couverture définie par les marchés ou par elle-même ;

À cet égard, la banque a demandé à G. G. la mise à disposition pour la négociation de « financial futures » d'une marge de couverture « en espèces ou sous la forme d'autres actifs acceptés par la banque » ; (paragraphe D-1 des conditions pour la négociation d'instruments dérivés) ; la banque s'est réservée un droit de gage et de compensation sur toutes les valeurs, titres, créances et droits sans exception actuels ou à venir, en dépôt et en compte ;

Il ressort de ces documents, que la couverture - fixée par la banque à 15 000 euros par contrat - existait dès lors qu'un tel montant ressortait de l'ensemble des dépôts, c'est-à-dire non seulement du solde du compte courant mais aussi des autres actifs susceptibles, si nécessaire, d'être liquidés par la banque, (paragraphe c des conditions pour la négociation d'instruments dérivés annexées au contrat du 20 décembre 1999) ;

b) Sur l'ordre des 15 et 16 mars 2000 :

Le 15 mars 2000, la société C. Ltd a donné l'ordre à la banque, confirmé par un fax du 16 mars 2000, d'ouvrir de nouvelles positions de vente sur les produits Fib 30 ;

Cet ordre faisait suite au refus exprimé par la banque lors d'une réunion tenue le 14 mars 2000 d'exécuter d'autres ordres que ceux donnés par la société C. Ltd pour son propre compte et celui de la société H. ;

La banque a reconnu tant dans sa lettre du 21 mars 2000 que dans l'exploit d'appel du 3 février 2004 n'avoir autorisé, à l'issue de la réunion du 14 mars 2000, les sociétés C. Ltd et H. à ouvrir de nouvelles positions que pour leur propre compte ;

Cependant, c'est à tort que la banque a refusé d'exécuter l'ordre du 16 mars 2000 par la société C. Ltd pour le compte de G. G. alors que contrairement à ce qu'elle soutient, d'une part, le nombre de contrat à ouvrir, soit 69, était parfaitement déterminé (pièce n° 23 dossier C.), d'autre part, l'ensemble des actifs de G. G. se chiffrait au 14 mars 2000 à 1 127 380,80 euros, somme supérieure à la marge de garantie imposée par la banque pour ces 69 contrats (1 035 000 euros) ;

Il appartenait à la banque, spécialiste en la matière, d'exécuter ces ordres au prix de la cotation du 16 mars 2000, date non contestable ; en outre, parfaitement informée du caractère hautement spéculatif des opérations exécutées pour le compte de G. G. avec pour seule limite - de la volonté du client - les disponibilités déposées dans ses livres, ce qui est confirmé par la décharge de responsabilité ressortant de l'acte sous seing privé du 20 décembre 1999, la banque qui n'était ainsi tenue envers le mandant d'aucune obligation d'information, ne pouvait justifier son refus d'exécuter l'ordre du 16 mars 2000 par le souci de « faire vérifier si le mandant était parfaitement informé et approuvait la stratégie de gestion de C. » ;

C'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont relevé pour caractériser la faute, une inexécution manifeste des ordres reçus de la société C. Ltd ainsi qu'une ingérence volontaire de la banque dans les affaires menées par cette société.

Motifs

La Cour,

Considérant les faits suivants :

La banque BSI 1873 a conclu le 15 novembre 1999 avec la société C. Ltd un contrat d'apporteur d'affaires et de gestion d'actifs.

Aux termes de ce contrat, la société C. Ltd gérait elle-même les actifs déposés par les clients apportés, la banque agissant comme simple dépositaire de ces actifs et n'ayant pas à surveiller les opérations effectuées par la société C. Ltd, ni à vérifier ou évaluer les conséquences des ordres passés par cette société.

G. G., client apporté par la société C. Ltd, a ouvert le 20 décembre 1999 auprès de la banque un compte de devises et un compte titres sous l'intitulé Starlight.

Par acte sous seing privé du même jour, G. G. qui a confié la gestion de ses avoirs à la société C. Ltd a autorisé la banque à donner suite aux instructions de cette société dans la limite des disponibilités du compte.

Par le même acte, le mandant déchargeait la banque de toute responsabilité relative aux opérations effectuées dans le cadre de ce pouvoir de gestion, responsabilité qu'il déclarait assumer personnellement en considérant d'ores et déjà comme bons et valables tous les actes de son mandataire.

Par ailleurs, la société C. Ltd ainsi que la société H. ouvraient également, chacune, un compte dans les livres de la banque.

G. G., reprochant tant à la banque qu'à la société C. Ltd des dysfonctionnements fautifs à l'occasion de la passation d'ordres donnés par cette société et lui ayant occasionné un préjudice pécuniaire, a fait assigner celles-ci devant le Tribunal de première instance afin d'obtenir une condamnation in solidum, au paiement avec intérêts au taux légal, de la somme de 1 676 375 euros auxquels il a ajouté par ses conclusions du 19 décembre 2002, la somme de 2 814 050 euros pour « manque à gagner des opérations projetées non réalisées du fait de BSI » et de celle de 1 000 000 francs soit 152 449,02 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive.

De leur côté, les sociétés C. Ltd et H. ont fait assigner devant le même tribunal G. G. et la Banque BSI à laquelle elles réclament, pour chacune d'elle, le paiement de 536 395 197 lires pour le manque à gagner subi au titre des opérations sur les contrats Fib 30, la société C. Ltd demandant, en outre, le paiement de la somme de 100 000 000 lires pour la perte de sa rémunération d'apporteur d'affaires et la somme de 1 362 190 479 lires pour la perte de la commission de performance convenue avec G. G.

Ces sociétés, comme G. G., reprochent à la banque d'avoir refusé d'exécuter des ordres passés, la banque invoquant quant à elle, son obligation de vigilance et de prudence.

Enfin, la société C. Ltd a fait assigner la banque en intervention forcée dans l'instance engagée par G. G. et demande que cette banque soit condamnée à la relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre au profit de G. G., également assigné en intervention forcée.

Par le jugement déféré, le Tribunal de première instance a joint les trois instances ci-dessus rappelées, a déclaré recevables et bien fondés G. G., la société C. Ltd, la société H. en leur action en responsabilité dirigée contre la banque, a dit et jugé que cette dernière a commis une faute à leur égard, l'a déclarée tenue de réparer le préjudice qui en est résulté ; le tribunal a condamné la banque à payer à chacune des sociétés C. Ltd et H. pour les ordres passés pour leur propre compte la somme de 227 025 euros, à titre de dommages-intérêts, a dit et jugé que la banque a commis une faute à l'égard de G. G. et de la société C. Ltd, a ordonné une mesure d'expertise sur le montant des dommages-intérêts pouvant revenir à ces parties, a débouté les parties du surplus de leurs demandes.

I. - La Banque BSI a relevé appel de cette décision par exploit du 3 février 2004.

Elle demande à la Cour de réformer partiellement cette décision et de débouter G. G., la société C. Ltd et la société H. Consulting Ltd de l'ensemble de leurs demandes.

Elle fait grief aux premiers juges :

a) En ce qui concerne le compte de G. G., d'avoir analysé l'ordre du 15 mars 2000 donné par la société C. ltd « d'avoir à rétablir la position de vente sur le compte Starlight au prix de rachat des 6 et 7 mars en faisant en sorte de recréditer sur le compte même les différences positives par rapport à cette valeur » en une demande d'ouverture de nouvelles positions au prix convenu les 6 et 7 mars 2000, alors qu'elle a, en réalité, refusé d'annuler, par une contre-passation, les opérations effectuées le 7 mars 2000.

Elle soutient que la société C. Ltd n'a donné aucun ordre d'achat ou de vente de contrats Fib 30 pour le compte de G. G. postérieurement au 7 mars 2000 et qu'elle n'a fait que demander à la société C. Ltd du fait de l'importance des pertes subies par le compte Starlight au 7 mars 2000, lesquelles avaient nécessité les 29 février et 1er mars 2000 la vente de valeurs mobilières détenues par G. G. pour un total de 633 186,56 euros de justifier de la connaissance par G. G. de la situation et de son approbation de la stratégie de gestion qui avait abouti en trois mois à la dépréciation de l'ordre de 60 % de la valeur de ses actifs.

Elle estime en conséquence qu'aucun refus d'exécuter de nouvelles opérations n'a été opposé à la société C. Ltd.

b) En ce qui concerne les propres comptes des sociétés C. Ltd et H., d'avoir estimé que son refus d'exécuter l'ordre du 13 mars 2000 donné par la société C. Ltd constituait une faute d'ingérence de sa part, alors que cet ordre ne précisait pas l'identité des mandants sur les comptes desquels devaient porter les opérations.

Elle précise que ces opérations sont totalement étrangères à celles réalisées par la Société C. Ltd le 15 mars 2000, ayant consisté en un aller et retour sur dix positions de vente et d'achat de contrats Fib 30.

Elle affirme que le 14 mars 2000 à l'issue d'une réunion entre ses représentants et les dirigeants des sociétés C. Ltd et H., elle les a autorisées à ouvrir de nouvelles positions mais seulement pour leur propre compte.

c) À titre subsidiaire sur le préjudice invoqué par G. G., elle estime que l'expertise ordonnée par le tribunal est inopérante puisqu'ainsi que le tribunal l'a relevé, aucune date de clôture des positions n'a été fixée.

Sur le préjudice des sociétés C. Ltd et H., la banque estime que le Tribunal a inversé la charge de la preuve en retenant un tableau d'évolution du titre, établi par les sociétés elles-mêmes et en lui reprochant de n'avoir pas contesté sérieusement le montant du préjudice invoqué ;

Elle soutient que le préjudice ne peut être constitué en toute hypothèse que par la perte d'une chance sur laquelle les sociétés n'ont fourni aucune explication.

Concluant en réponse sur cet appel, les sociétés C. Ltd et H. ont demandé le débouté de l'appelante.

La société C. Ltd rappelle à propos de la gestion des avoir de G. G., qu'elle avait avisé expressément les dirigeants de la banque du caractère hautement spéculatif de la gestion envisagée et indique que la banque s'était renseignée, avant l'ouverture du compte, auprès de sa maison mère à Lugano où ce client possédait un compte depuis plus de dix ans, sur l'importance de son patrimoine mobilier qui excédait 7,5 millions d'euros.

Elle rappelle que la stratégie adoptée en accord avec son client consistait en une spéculation à la baisse, sur un produit financier à court terme dénommé Fib 30 qui présentait d'intéressantes potentialités en raison de ses fluctuations susceptibles de dégager des profits importants à l'échéance.

Elle soutient que contrairement à ce qu'a prétendu la banque en présentant une situation partielle du compte au 28 février 2000, la valeur patrimoniale de celui-ci était de 1 376 564,52 euros à cette date ce qui excédait le dépôt de garantie de 15 000 euros par contrat (69 contrats) imposé par la banque.

Elle indique qu'au 7 mars 2000 au soir, les opérations effectuées ont eu pour effet de liquider l'intégralité des contrats en cours à cette date. La banque l'informait alors que désormais aucun ordre d'opération sur des contrats Fib 30 ne serait exécuté sans son autorisation expresse et préalable, hormis les opérations passées par la société pour son propre compte.

Elle fait valoir que contrairement à ce que la banque soutient, celle-ci a bien refusé d'exécuter ses ordres postérieurement au 7 mars 2000, notamment le 15 mars 2000 ainsi que la banque le reconnaît tant dans son courrier du 21 mars 2000 que dans ses écritures de première instance du 18 octobre 2001 déposées dans l'instance introduite par les deux intimées.

Elle estime que la dépréciation du portefeuille de G. G. est avérée à hauteur de 1 676 375 euros.

Elle soutient que la baisse continue des cours postérieurement au 7 mars 2000 aurait permis non seulement d'effacer cette perte mais de dégager une plus-value de 3 406 255 euros.

La société C. Ltd rappelle qu'en ce qui concerne la gestion de ses propres avoirs et de ceux de la Société H., la banque a refusé le 13 mars 2000, l'ordre d'ouverture en position de vente de 10 contrats Fib 30 (5 contrats sur chacune des sociétés) alors que l'ordre concomitant de clôture d'un contrat sur un autre compte a été lui, régulièrement exécuté par la banque.

Elle estime que l'argument déontologique avancé par la banque est inopérant à un double titre, d'une part, parce qu'elle n'explicite pas les prétendues anomalies qu'auraient présentées les opérations, d'autre part, parce que ces opérations étaient passées par les deux sociétés sur leur propre compte.

Elle conclut que le préjudice qu'elles sont subi (227 025 euros chacune) est la conséquence directe du comportement de la banque.

G. G. a conclu, quant à lui, à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré la banque responsable en l'état de la faute commise ;

Formant un appel incident, il estime n'y avoir lieu à expertise et demande en conséquence la condamnation de la banque à lui payer la somme de 3 406 255 euros avec intérêts au taux légal à compter de la première réclamation, représentant la plus-value qu'il aurait dû réaliser si les ordres donnés par la société C. Ltd le 15 mars 2000 avaient été exécutés par la banque, et de dire que la société C. Ltd sera tenue solidairement à ce paiement.

Il soutient que la banque a outrepassé le cadre contractuel existant entre elle et la société C. Ltd, que les ordres donnés par cette société n'avaient aucun caractère d'anormalité, que la société C. Ltd avait reçu le pouvoir de gérer ses avoirs dans la limite des disponibilités, c'est-à-dire sans limite de montant, ni de perte, autre que celle des avoirs disponibles.

Il estime qu'une expertise n'est pas nécessaire pour déterminer le montant de son préjudice puisqu'au 4 avril 2000, la plus-value sur les ordres refusés aurait été de 3 406 255 euros.

Il demande en outre la condamnation de la banque au paiement d'une somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts pour appel abusif.

Il soutient par ailleurs, que la condamnation solidaire de la Société C. Ltd est justifiée par le fait qu'elle a été défaillante dans son obligation de gérer ses comptes.

En réponse sur ce dernier point, la société C. Ltd conclut à l'irrecevabilité et au débouté de cette demande en relevant que G. G. ne démontre pas l'existence d'une faute qui lui soit imputable.

La banque BSI a réitéré son argumentation par ses conclusions des 8 mars et 28 juin 2005.

Elle estime en ce qui concerne le compte Starlight que contrairement à ce qu'ont dit les premiers juges, la jurisprudence retient que ce n'est qu'en cas d'opérations non spéculatives que le banquier teneur de compte de titres n'est pas tenu à une obligation de mise en garde. Or, en l'espèce, à la suite de deux mois d'opérations hautement spéculatives, le patrimoine du client avait disparu à 60 % ce qui a normalement conduit la banque à interroger la société sur le point de savoir si le client était bien informé de cette situation.

Elle se reporte à une analyse faite par un expert-comptable J.-F.B. qu'elle verse aux débats pour affirmer désormais que l'ordre du 15 mars 2000 s'analyse, ainsi que le tribunal l'a retenu, comme ayant pour objet l'ouverture de positions nouvelles mais que cet ordre était techniquement inexécutable car d'une part, il est impossible d'ouvrir une position sur une valeur autre que celle que dégage le jeu de l'offre et de la demande lors de la souscription du contrat et par conséquent pour un niveau d'indice constaté sur le marché en référence plusieurs jours auparavant, d'autre part, le compte espèces de G. G. ne permettait pas de constituer la marge initiale de 1 035 000 euros (15 000 euros x 69 contrats) puisqu'il n'était créditeur que de la somme de 634 321,83 euros, l'argumentation de la société C. Ltd consistant à assimiler les « disponibilités du mandant » (pouvoir de gestion) à la totalité des avoirs en ce compris le portefeuille titres qui s'élevait au 15 mars 2000 à 1 117 026,76 euros, constitué d'obligations et d'actions, n'étant pas fondée car ce portefeuille n'était pas immédiatement disponible alors que la marge initiale est exigée dès l'ouverture du contrat, et que la banque n'avait reçu aucune instruction pour procéder à la réalisation de ce portefeuille, qu'enfin, il est impossible de déterminer le nombre de contrats dont la société C. Ltd demandait l'ouverture qu'elle sous-entend être de 69 alors qu'à la veille des 6 et 7 mars 2000, seuls 39 contrats étaient encore ouverts à la vente.

Elle fait valoir, en ce qui concerne les comptes des sociétés C. Ltd et H. à propos de l'ordre non exécuté du 13 mars 2000, que selon le rapport qu'elle verse aux débats, le préjudice de 227 025 euros qu'elles invoquent n'est pas fondé car d'une part, les contrats en cause comportaient une échéance au 17 mars 2000 en sorte qu'il est non pertinent de dérouler les contrats au-delà de cette date, d'autre part, que les prémices de la démonstration de ces sociétés ne sont pas en rapport avec le type de gestion pratiqué par la Société C. Ltd au moment des faits et qui consistait à effectuer des opérations d'achat et de vente dans la même journée.

Elle demande, à titre subsidiaire, à la Cour de dire et juger que le préjudice des sociétés C. Ltd et H. ne peut être supérieur à 19 500 euros.

Elle sollicite enfin la jonction de la présente instance avec celle engagée devant la Cour par ces deux sociétés.

Les sociétés C. Ltd et H. ont réitéré leur argumentation antérieure par leurs écritures du 3 mai 2005.

Elles répondent à l'argumentation soutenue par la banque qui se fonde sur le rapport B., en estimant qu'il n'y avait pas d'impossibilité matérielle de rétablir au 15 mars 2000 les positions aux prix de rachat des 6 et 7 mars précédents puisque la Banque reconnaît implicitement qu'il s'agissait d'ouverture de nouvelles positions au prix convenu des 6 et 7 mars 2000, que les avoirs du compte Starlight s'élevaient au 14 mars 2000 à 1 127 380,81 euros et excédaient donc la marge de 1 035 000 euros nécessaire, que le nombre de contrats dont la société C. Ltd demandait l'ouverture au 15 mars 2000 était de 69, selon les pièces qu'elles versent aux débats.

Elles relèvent, sur la gestion des avoirs des deux sociétés que l'aveu de la banque de l'imputation sur le compte de la société C. Ltd des profits dégagés par la clôture d'office du 13 mars 2000 (conclusions de la banque p. 11) ôte toute pertinence à l'argument selon lequel l'ordre aurait été insuffisamment instruit.

Elles estiment que la critique que leur oppose la banque à propos de l'évaluation à 227 025 euros du profit perdu par chacune des sociétés n'est pas fondée car d'une part, le caractère « fictif » des opérations résulte exclusivement de leur clôture intempestive par la banque, d'autre part, la société C. Ltd aurait pu, quelques jours avant l'échéance du 17 mars 2000, proroger ces contrats jusqu'au terme trimestriel suivant, c'est-à-dire jusqu'en juin 2000.

II. - La Société C. Ltd et la Société H. ont elles-mêmes relevé appel du jugement du 6 novembre 2003 par exploit du 2 mars 2004.

Elles demandent à la Cour de réformer partiellement le jugement, de condamner la banque BSI à payer à la société C. Ltd la somme de 51 646 euros en réparation de son préjudice résultant de la perte de sa rémunération d'apporteur et celle de 2 989 357,42 euros au titre de la perte de ses commissions de performance, de dire et juger non fondée la demande de condamnation solidaire formée par G. G. à son encontre, l'en débouter, subsidiairement, de dire et juger que la banque devra la relever et garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre, de condamner la banque à payer à chacune des sociétés appelantes la somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts.

La société C. Ltd, gestionnaire du compte de G. G. estime en premier lieu, que le tribunal a, à tort, retenu que les éléments du dossier ne permettaient pas de dire que la fermeture des positions les 6 et 7 mars 2000 avait été opérée par la banque contre la volonté de la société C. Ltd alors que l'attestation qu'elle a versée aux débats en première instance révèle les pressions exercées par la banque pour contraindre la société à clôturer les opérations à cette date.

Elle admet en revanche que le tribunal a justement retenu le caractère fautif du comportement de la banque postérieurement au 7 mars 2000 en refusant d'exécuter l'ordre du 15 mars 2000.

Sur l'évaluation de son préjudice résultant de ce comportement fautif de la banque postérieurement au 7 mars 2000, la société C. Ltd soutient que l'expertise ordonnée par le tribunal n'est pas nécessaire car d'une part, il est établi par la situation de clôture arrêtée au 31 mars 2000 signée par G. G. que, malgré la perte de 1 676 375 euros subie le 7 mars 2000, le compte Starlight présentait au 31 mars 2000 un solde positif de 2 220 582 894 lires soit 1 146 835 euros ce qui permettait de couvrir le dépôt de garantie de 1 035 000 euros exigé pour ouvrir de nouvelles positions (15 000 € x 69 contrats), d'autre part, le tribunal a tiré du constat que les contrats Fib 30 avaient une durée de trois mois la déduction erronée qu'il fallait entendre ce terme pour apprécier le dénouement de l'opération alors qu'il s'agissait d'opérations à découvert pouvant se nouer ou se dénouer à tout moment comme le montrent d'ailleurs les opérations effectuées sur ces contrats.

Selon la société C. Ltd, à la date du 12 avril 2000 à laquelle s'arrêtaient les éléments chiffrés produits devant les premiers juges, la plus-value sur 69 contrats rétablis à compter du 9 mars 2000 aurait été pour le compte Starlight de 2 814 050 euros. Elle estime, reprenant ses calculs dans le cadre de l'appel, qu'en cas de rétablissement de ces contrats au 9 mars 2000 la plus-value que Giuseppe Gentille aurait pu réaliser à la date de la clôture effective de son compte dans les livres de la banque, soit le 4 avril 2000, était de 3 406 255 euros.

C'est cette somme que la société C. Ltd demande à la Cour de retenir pour le calcul de sa commission d'apporteur (51 646 euros) et de celle de performance (434 666,17 euros).

- Par ailleurs, la société C. Ltd sollicite la condamnation de la banque au paiement d'une commission de performance de 2 554 691,25 euros qu'elle aurait pu percevoir des autres clients qu'elle avait amenés à la banque, si celle-ci n'avait pas commis les agissements fautifs qui lui sont reprochés.

- Sur l'appel en garantie formé par la Société C. Ltd à l'encontre de la banque, la société C. Ltd sollicite, pour le cas où G. G. viendrait à réintégrer sa demande de condamnation solidaire contre la banque et C. Ltd, de débouter G. G. de cette demande ou, à tout le moins, de condamner la banque à la relever et garantir des condamnations qui seraient prononcées contre elle.

G. G. a conclu en réponse à l'exploit d'appel des sociétés C. Ltd et H. Consulting Ltd le 23 novembre 2004. Il a sollicité la jonction des procédures, a déclaré s'en rapporter à justice en ce qui concerne la demande des appelantes sur la perte des commissions d'apporteur et de performance.

Il sollicite, par voie d'appel incident, la réformation du jugement qui l'a débouté de sa demande de condamnation solidaire contre la banque et la Société C. Ltd, et sollicite leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 3 406 255 euros outre celle de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Répondant sur la demande de condamnation solidaire formée par G. G. à son encontre, la société C. Ltd conclut, en se référant aux motifs contenus dans le jugement, à l'irrecevabilité et au débouté de G. G.

La banque BSI a conclu quant à elle, en développant la même argumentation que celle qu'elle a explicitée dans ses écritures prises devant la Cour sur l'appel qu'elle a formé contre le jugement et ci-dessus rappelé, au débouté des appelantes et de G. G.

Elle demande, à titre subsidiaire, de dire et juger que le préjudice subi par les sociétés C. Ltd et H. ne peut être supérieur à 19 500 euros.

Elle sollicite la condamnation de G. G., des sociétés C. Ltd et H. à lui payer in solidum la somme de 15 000 euros à titres de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Elle demande la jonction des deux instances d'appel ;

Les appelantes, de même que la banque BSI, ont réitéré leur argumentation dans des écritures ultérieures.

Sur ce,

Considérant que les deux instances d'appel ci-dessus rappelées, dirigées contre le même jugement présentent un lien de connexité certain et qu'il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de les juger ensemble, et donc d'en prononcer la jonction ;

I. - Le compte Starlight

a) Sur les conventions

Considérant que par acte sous seing privé du 15 novembre 1999, la société C. Ltd a signé avec la banque BSI 1873 un contrat d'apporteur d'affaires ; que selon ce contrat, la banque agissant comme simple dépositaire des actifs des clients présentés et gérés par l'apporteur s'engageait à tenir les comptes des clients apportés et à exécuter les ordres ; qu'elle était en revanche déchargée de l'obligation de surveiller les opérations effectuées par l'apporteur, comme celle de vérifier ou d'évaluer les conséquences des ordres transmis par l'apporteur ;

Qu'il a été également convenu que la banque rétrocéderait à la société C. Ltd, deux fois par an, la moitié des commissions et frais qu'elle percevrait sur les opérations, et lui verserait (article 4.2) une commission d'administration ;

Considérant que c'est ainsi que par acte sous seing privé du 20 décembre 1999 portant en annexe comme faisant partie intégrante du contrat, les conditions générales et le règlement édictés par la banque, G. G. a ouvert dans les livres de celle-ci, un compte n° A570521 intitulé « Starlight » en dollars US, en euros et en titres ;

Considérant que par acte sous seing privé du même jour, libellé sur un document portant l'en-tête BSI 1873 et intitulé « pouvoir administratif », G. G. a autorisé la banque à donner suite aux instructions de la société C. Ltd concernant « l'exécution d'opérations d'achats, de ventes, de souscriptions, de conversions, de dépôts et de changes, contrats à terme (y compris les options et financial futures) sur tous genres de titres, métaux, monnaies et valeurs mobilières - même celles non indiquées explicitement (y compris la faculté de désigner les contrats y relatifs) et ce dans les limites des disponibilités du mandant » ;

Que par cet acte, le mandat a en outre, déchargé la banque de toute responsabilité, qu'il a déclaré assumer personnellement « en considérant d'ores et déjà comme bons et valables tous les actes du mandataire » ;

Considérant que le mandant a souscrit aux « conditions générales pour la négociation d'instruments dérivés » définissant les droits et obligations découlant des opérations effectuées par la banque en son nom, lors de l'achat, de la vente ou de la souscription d'instruments dérivés traités en bourse (options standardisées et financial futures) ainsi que pour les instruments dérivés non traités en bourse ;

Que c'est ainsi qu'il s'est engagé à ne donner à la banque que des ordres tenant compte de sa situation financière, et à mettre à sa disposition la marge de couverture définie par les marchés ou par elle-même ;

Qu'à cet égard, la banque a demandé à G. G. la mise à disposition pour la négociation de « financial futures » d'une marge de couverture « en espèces ou sous la forme d'autres actifs acceptés par la banque » (paragraphe D-1 des conditions pour la négociation d'instruments dérivés) ; que la banque s'est réservée un droit de gage et de compensation sur toutes les valeurs, titres, créances et droits sans exception actuels ou à venir, en dépôt et en compte ;

Considérant qu'il ressort de ces documents, que la couverture - fixée par la banque à 15 000 euros par contrat - existait dès lors qu'un tel montant ressortait de l'ensemble des dépôts, c'est-à-dire non seulement du solde du compte courant mais aussi des autres actifs susceptibles, si nécessaire, d'être liquidés par la banque (paragraphe c des conditions pour la négociation d'instruments dérivés annexées au contrat du 20 décembre 1999) ;

b) Sur l'ordre des 15 et 16 mars 2000 :

Considérant que le 15 mars 2000, la société C. Ltd a donné l'ordre à la banque, confirmé par un fax du 16 mars 2000, d'ouvrir de nouvelles positions de vente sur les produits Fib 30 ;

Que cet ordre faisait suite au refus exprimé par la banque lors d'une réunion tenue le 14 mars 2000 d'exécuter d'autres ordres que ceux donnés par la société C. Ltd pour son propre compte et celui de la société H. ;

Que la banque a reconnu tant dans sa lettre du 21 mars 2000 que dans l'exploit d'appel du 3 février 2004 n'avoir autorisé, à l'issue de la réunion du 14 mars 2000, les sociétés C. Ltd et H. à ouvrir de nouvelles positions que pour leur propre compte ;

Considérant cependant que c'est à tort que la banque a refusé d'exécuter l'ordre du 16 mars 2000 donné par la société C. Ltd pour le compte de G. G. alors que contrairement à ce qu'elle soutient, d'une part, le nombre de contrats à ouvrir, soit 69, était parfaitement déterminé (pièce n° 23 dossier C.), d'autre part, l'ensemble des actifs de G. G. se chiffrait au 14 mars 2000 à 1 127 380,80 euros, somme supérieure à la marge de garantie imposée par la banque pour ces 69 contrats (1 035 000 euros) ;

Considérant qu'il appartenait à la banque, spécialiste en la matière, d'exécuter ces ordres au prix de la cotation du 16 mars 2000, date non contestable ; qu'en outre, parfaitement informée du caractère hautement spéculatif des opérations exécutées pour le compte de G. G. avec pour seule limite - de la volonté du client - les disponibilités déposées dans ses livres, ce qui est confirmé par la décharge de responsabilité ressortant de l'acte sous seing privé du 20 décembre 1999, la banque qui n'était ainsi tenue envers le mandant d'aucune obligation d'information, ne pouvait justifier son refus d'exécuter l'ordre du 16 mars 2000 par le souci de « faire vérifier si le mandant était parfaitement informé et approuvait la stratégie de gestion de C. » ;

Considérant que c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont relevé pour caractériser la faute, une inexécution manifeste des ordres reçus de la société C. Ltd ainsi qu'une ingérence volontaire de la banque dans les affaires menées par cette société ;

c) Sur le préjudice qui en est résulté pour G. G. :

Considérant qu'en refusant d'ouvrir le 16 mars 2000 les positions demandées pour son compte par la société C. Ltd, la banque a occasionné à G. G. un préjudice avéré dès lors qu'il a été privé du profit engendré par la baisse des produits dans lesquels il avait investi et qui s'était amorcée depuis le 13 mars 2000, ainsi qu'il ressort des données officielles de la bourse italienne reproduites dans un document versé aux débats par la société C. Ltd ;

Que ce préjudice a pris fin le 31 mars 2000, date à laquelle G. G. a confirmé à la banque son ordre de transfert de ses comptes dans une autre banque, ce qui a eu pour effet de clôturer l'ensemble des positions en cours ;

Considérant qu'il est établi par les documents versés aux débats qui reproduisent les données officielles de la bourse italienne des Fib 30, dont les Fib 30 étaient des dérivés, que la différence à la baisse de cotation entre le 16 mars 2000 et le 31 mars 2000 s'établit à : 48 572 - 46 262 soit 2 310 ;

Considérant que selon le rapport B. produit par la banque, la valeur Fib 30 est déterminée en multipliant la valeur de l'indice, exprimée en nombre de points par 5, valeur de chaque point, ce qui fait ressortir une marge de variation pour les 69 contrats de 796 950 euros ;

Considérant que la banque doit donc être condamnée au profit de G. G., au paiement de cette somme ; qu'il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu à expertise de ce chef ;

d) Sur la solidarité entre la banque et la société C. Ltd :

Considérant que G. G. demande à la Cour de condamner la société C. solidairement avec la banque ;

Considérant d'une part, que par le pouvoir administratif signé le 20 décembre 1999 avec la société C. Ltd, G. G. a, par anticipation, considéré comme « bons et valables tous actes du mandataire » ;

Considérant d'autre part, que Giuseppe Gentille ne critique ni la gestion de la société, ni les termes du jugement du Tribunal de première instance qui a retenu que cette société qui s'est conformée aux prescriptions imposées par la banque pour les opérations spéculatives n'est jamais sortie du cadre contractuel défini par les parties ;

Considérant qu'il échet en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a écarté la responsabilité de la société C. Ltd, ce qui exclut tout solidarité ;

e) sur les ordres des 6 et 7 mars 2000 :

Considérant que la société Corin Ltd ne conteste pas (page 12 de son acte d'appel du 2 mars 2004) avoir passé les 6 et 7 mars les ordres de clôture des contrats Fib 30 du compte Starlight ;

Qu'il en résulte que c'est à bon droit que le Tribunal a écarté, de ce chef, la responsabilité de la banque au motif qu'aucun élément du dossier ne permet de dire que la fermeture des positions résulterait en réalité d'une fermeture opérée du propre chef de la banque contre la volonté de la société C. ;

Considérant que celle-ci n'établit pas, hormis par l'attestation de ses propres dirigeants G. T. et M. O., co-signataires des contrats du 15 novembre 1999 et donc décideurs de la société, avoir agi sous la pression de la banque ;

Considérant par ailleurs, qu'en acceptant par anticipation, selon les termes du contrat du 20 décembre 1999, comme bons et valables tous les actes de sa mandataire, G. G. s'est interdit pour toute opération exécutée dans le respect de la convention, de rechercher la responsabilité de la société C. Ltd ;

Considérant que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont, pour les opérations querellées des 6 et 7 mars 2000 écarté tant la responsabilité de la banque que celle de la société C. Ltd ;

II. - Les actes passés par la société C. Ltd et H. Consulting Ltd pour leur propre compte :

Considérant qu'il est établi par le fax du 13 mars 2000 (pièce n° 21 du dossier C. Ltd) que celle-ci a, à cette date, donné l'ordre d'ouverture à la banque de deux fois cinq contrats Fib 30, cinq pour elle-même et cinq pour la société H. ;

Que la banque devait exécuter cet ordre clair et précis, ce dont elle s'est abstenue sans justifier d'un motif légitime ;

Considérant que cette inexécution fautive a privé tant la société C. Ltd que la société H. Consulting Ltd d'une chance de profit ; que compte tenu de la baisse régulière de valeur du contrat Fib 30 telle qu'elle ressort des données officielles de la bourse italienne mais aussi de l'incertitude quant à la date à laquelle les sociétés C. Ltd et H. auraient décidé de clôturer leurs positions, la Cour évalue le préjudice subi par ces sociétés, en l'état des éléments dont elle dispose à 150 000 euros pour chacune des sociétés ;

III. - Sur les commissions réclamées par la société C. Ltd à la banque :

a) Considérant que par le contrat du 15 novembre 1999, la banque s'est obligée à rétrocéder à la société C. Ltd, la moitié des commissions et frais perçus du client, en rémunération de ses prestations relatives aux opérations d'achat et vente d'obligations et d'actions, de dépôt à terme, opérations de change supérieures à la contre-valeur de 1 000 000 de francs, de droits de garde et produits dérivés ; qu'elle s'est également obligée à verser à l'apporteur, une commission d'administration ;

Considérant que la société C. Ltd, qui est ainsi fondée en sa demande, chiffre celle-ci à 51 646 euros sans que la banque n'en conteste expressément le montant et alors qu'il résulte d'un document versé aux débats (pièce n° 35 dossier C.), qu'elle lui a, au titre du premier trimestre 2000, réglé la somme de 36 134,56 euros ;

Considérant qu'il sera alloué à la société C. Ltd la somme de 51 646 - 36 134,56 soit 15 511,44 euros ; qu'il n'y a donc pas lieu à expertise de ce chef ;

b) Considérant que par le jugement entrepris, le Tribunal a rejeté le chef de demande de la société C. Ltd afférent à la commission de performance que celle-ci évalue en cause d'appel à 2 989 357,42 euros soit 434 666,17 euros demandés en première instance, et calculés sur la plus-value manquée sur le compte Starlight, outre 2 554 691,25 euros calculés sur les avoirs des autres clients, demande nouvelle contre laquelle la banque n'a émis aucune contestation ;

Considérant que la société C. Ltd ne justifie pas plus en cause d'appel qu'elle ne l'a fait par devant les premiers juges du ou des contrats la liant à G. G. ou à ses autres clients, et donc de la réalité de ces commissions pour l'évaluation desquelles elle ne fournit, hormis des documents par elle établis, aucun élément de preuve ;

Considérant que de ce chef le jugement sera confirmée et la demande nouvelle rejetée ;

IV. - Sur les dommages-intérêts :

Considérant que G. G. ne saurait obtenir paiement de dommages-intérêts de la société C. Ltd, en l'absence de toute faute caractérisée à son encontre ;

Considérant que l'appel de la banque n'apparaît pas avoir été formé de façon abusive ; qu'il y a donc lieu de débouter Giuseppe Gentille de sa demande en paiement de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts pour appel abusif ;

Considérant que la demande formée par voie d'appel incident par G. G. au paiement de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts dirigée solidairement contre la société C. Ltd et la banque doit être rejetée en l'absence d'un préjudice établi par G. G. distinct de celui qui vient d'être réparé ci-dessus ;

Considérant sur les demandes en paiement de dommages-intérêts supplémentaires formées par les sociétés C. Ltd et H., que ces sociétés n'établissent pas l'existence d'un préjudice distinct de celui qui a été réparé au titre de la perte d'une chance de profit ; qu'elles doivent être déboutées de leurs demandes ;

Considérant que la banque qui succombe en son appel doit être déboutée de ses demandes de dommages-intérêts ;

V. - Sur les dépens :

Considérant qu'eu égard aux succombances respectives, il y a lieu de condamner la banque BSI 1873 aux trois quarts des dépens d'appel et les sociétés C. Ltd et H. Consulting Ltd au quart restant, ceux de première instance étant confirmés ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS, ET CEUX NON CONTRAIRES DES PREMIERS JUGES,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

- Ordonne la jonction des instances d'appel enrôlées sous les n° 72-2004 (acte d'appel du 3 février 2004) et 81-2004 (acte d'appel du 2 mars 2004),

- Déclare la société anonyme monégasque dénommée BSI 1873 recevable en son appel,

- Au fond, l'en déboute,

- Déclare recevables et partiellement fondés, les sociétés C. Ltd et H. Consulting Ltd en leur appel principal, ainsi que G. G. en son appel incident,

- Réformant parte in qua le jugement du Tribunal de première instance du 6 novembre 2003,

- Condamne la société anonyme monégasque dénommée BSI 1873 à payer :

• à G. G. la somme de 796 950 euros au titre des plus-values qu'il aurait dû percevoir si l'ordre des 15 et 16 mars 2000 avait été exécuté par la banque, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

• à chacune des sociétés C. Ltd et H. Consulting Ltd la somme de 150 000 euros à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

• à la société C. Ltd la somme de 15 511,44 euros au titre de solde des commissions contractuelles du premier trimestre 2000,

- Dit n'y avoir lieu à expertise,

- Confirme le jugement pour le surplus,

- Déboute les parties de toutes autres demandes,

- condamne la société anonyme monégasque dénommée BSI 1873 aux trois quarts des dépens d'appel et des sociétés C. Ltd et H. Consulting Ltd au quart restant.

Composition

Mme François, prem. prés. ; Mme Gonelle, prem. subst. proc. gén. ; Mes Sbarrato, Blot et Escaut, av. déf. ; Mes Manceau et Hayaux du Tilly, av. bar. de Paris.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 27195
Date de la décision : 07/03/2006

Analyses

Civil - Général ; Contrat - Général


Parties
Demandeurs : SAM BSI 1873 - Gérance Internationale SAM
Défendeurs : Société C. Ltd et Société H. Consulting Ltd et G. G.

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2006-03-07;27195 ?

Source

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