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07/02/2006 | MONACO | N°27194

Monaco | Cour d'appel, 7 février 2006, Sté National Fertilizers Limited (NFL) c/ Sté K. Limited


Abstract

Exequatur

Sentence arbitrale étrangère - Compétence de la juridiction monégasque - Textes applicables : art. 3-10° et 956 du Code de procédure civile - Convention de New York du 10 juin 1958 rendue exécutoire à Monaco par l'ordonnance n° 7485 du 14 septembre 1982 - Juridiction compétente : président du tribunal de première instance - art. 957 du Code de procédure civile

Conventions internationales

Convention de New York du 10 juin 1958 relative à l'exécution des sentences arbitrales étrangères, applicable à Monaco (ord. du 14 septembre 198

2) - Conditions d'application : production de l'original, ou de la copie authentifiée et ...

Abstract

Exequatur

Sentence arbitrale étrangère - Compétence de la juridiction monégasque - Textes applicables : art. 3-10° et 956 du Code de procédure civile - Convention de New York du 10 juin 1958 rendue exécutoire à Monaco par l'ordonnance n° 7485 du 14 septembre 1982 - Juridiction compétente : président du tribunal de première instance - art. 957 du Code de procédure civile

Conventions internationales

Convention de New York du 10 juin 1958 relative à l'exécution des sentences arbitrales étrangères, applicable à Monaco (ord. du 14 septembre 1982) - Conditions d'application : production de l'original, ou de la copie authentifiée et de sa traduction sous peine de rejet de la demande d'exequatur

Résumé

Aux termes de l'article III de la Convention pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères faite à New York le 10 juin 1958, rendue exécutoire à Monaco par l'ordonnance n° 7485 du 14 septembre 1982, chacun des États contractants reconnaîtra l'autorité d'une sentence arbitrale et accordera l'exécution de cette sentence conformément aux règles de procédure suivies sur le territoire où la sentence est invoquée ;

Cette convention, applicable dans la Principauté, a pour effet de rendre les juridictions monégasques compétentes pour connaître des demandes d'exequatur des sentences arbitrales étrangères, compétence également reconnue par l'article 3-10° du Code de procédure civile, le terme jugement également repris par l'article 956 du Code de procédure civile à propos de l'arbitrage, visant toute décision, qu'elle émane des juridictions étatiques ou d'autorités arbitrales et dans ce dernier cas qu'elle s'intitule jugement ou sentence arbitrale ;

La sentence arbitrale qui a pour base une clause compromissoire issue de la volonté des parties a un caractère conventionnel qui oblige les contractants en quelque lieu que ce soit, et non un caractère juridictionnel ;

Il n'y a pas lieu de distinguer suivant que la sentence est intervenue à Monaco ou dans un pays étranger ;

La sentence arbitrale étrangère est soumise à Monaco aux mêmes formalités que la sentence arbitrale monégasque ;

Il s'ensuit que l'exequatur doit être donné par le Président du Tribunal de première instance conformément à l'article 957 du Code de procédure civile et non par le Tribunal dans son entier lequel est donc incompétent pour connaître de la demande ;

Cette incompétence ratione materiae peut être soulevée en tout état de cause et même d'office ;

Il y a donc lieu de réforme le jugement rendu par le Tribunal de première instance et de renvoyer la société National Fertilizers Limited à mieux se pourvoir.

Motifs

La Cour,

Considérant les faits suivants :

La société d'État indienne dénommée National Fertilizers Limited a fait assigner devant le Tribunal de première instance de la Principauté la société de droit turc dénommée K. Limited (en abrégé K.) aux fins d'exequatur à Monaco d'une sentence arbitrale prononcée le 3 décembre 1998 par le Tribunal arbitral d'Amsterdam et confirmée le 12 décembre 2001 par la Cour internationale d'arbitrage de La Haye, par laquelle la société K. a été condamnée à payer à la société National Fertilizers Limited diverses sommes d'argent dans le cadre d'un contrat de vente d'urée.

Par le jugement déféré, le Tribunal de première instance a débouté la société K. de ses exceptions d'incompétence et d'irrecevabilité, a débouté la société National Fertilizers Limited de sa demande et l'a condamnée aux dépens.

Le Tribunal s'est, en effet, déclaré compétent pour connaître de la demande d'exequatur par application de l'article 3-10° du Code de procédure civile et estimé qu'elle pouvait être portée devant le Tribunal dans son entier.

Il a, par ailleurs, estimé que la société demanderesse avait un intérêt à agir en exécution forcée à Monaco d'un titre obtenu à l'étranger.

Il a en revanche constaté que cette société n'avait pas fourni les pièces visées à l'article IV de la convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères, rendue exécutoire à Monaco par l'ordonnance n° 7485 du 14 septembre 1982.

La société d'État indienne National Fertilizers Limited a relevé appel de cette décision en soulignant qu'elle verse désormais aux débats les pièces qui faisaient défaut en première instance et indique que l'exequatur qu'elle sollicite sous-tend l'action oblique qu'elle a engagée à Monaco contre la société K. et contre le directeur de celle-ci à l'effet d'obtenir la restitution par ce dernier des sommes que la société K. a été condamnée à rembourser par le jugement arbitral.

Par conclusions du 11 octobre 2005, la société K. a relevé appel parte in qua dudit jugement, au motif que la société National Fertilizers Limited ne justifiait pas d'un intérêt à agir à Monaco puisque la sentence arbitrale a été rendue contre la société K. et non contre une personne privée, le sieur A., et qu'en outre la mise en œuvre de mesures conservatoires n'est pas subordonnée à un exequatur préalable.

Elle demande donc à la Cour de réformer la décision du Tribunal en ce qu'il l'a déboutée de son exception d'irrecevabilité et donc de déclarer la société National Fertilizers Limited irrecevable en son action.

Les parties ont été invitées par la Cour à conclure sur la compétence du Tribunal de première instance au regard des articles 263 et 956 du Code de procédure civile.

La société National Fertilizers Limited a soutenu, par conclusions du 25 octobre 2005, que l'article 956 du Code de procédure civile ne s'appliquait qu'à des arbitrages effectués à Monaco, et que la convention de New York du 10 juin 1958 ratifiée par la Principauté de Monaco devait recevoir application.

La société K. a pris des conclusions le 25 octobre 2005 par lesquelles elle réitère les moyens d'incompétence du Tribunal qu'elle avait invoqués devant les premiers juges : incompétence territoriale dans la mesure où les obligations litigieuses ne sont pas susceptibles d'exécution à Monaco puisqu'elle n'y possède aucun bien et qu'aucune saisie-arrêt n'a été pratiquée à son encontre, incompétence ratione materiae au motif que l'article 956 du Code de procédure civile attribue compétence au seul président du Tribunal de première instance pour accorder l'exequatur d'une sentence arbitrale.

Le Ministère public a conclu le 16 décembre 2005 à l'incompétence du Tribunal de première instance statuant en forme collégiale.

Sur ce,

Considérant qu'aux termes de l'article III de la Convention pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères faite à New York le 10 juin 1958, rendue exécutoire à Monaco par l'ordonnance n° 7485 du 14 septembre 1982, chacun des États contractants reconnaîtra l'autorité d'une sentence arbitrale et accordera l'exécution de cette sentence conformément aux règles de procédure suivies dans le territoire où la sentence est invoquée ;

Considérant que cette convention, applicable dans la Principauté, a pour effet de rendre les juridictions monégasques compétentes pour connaître des demandes d'exequatur des sentences arbitrales étrangères, compétence également reconnue par l'article 3-10° du Code de procédure civile, le terme jugement également repris par l'article 956 du Code de procédure civile à propos de l'arbitrage, visant toute décision, qu'elle émane de juridictions étatiques ou d'autorités arbitrales et dans ce dernier cas qu'elle s'intitule jugement ou sentence arbitrale ;

Considérant que la sentence arbitrale qui a pour base une clause compromissoire issue de la volonté des parties a un caractère conventionnel qui oblige les contractants en quelque lieu que ce soit, et non un caractère juridictionnel ;

Qu'il n'y a pas lieu de distinguer suivant que la sentence est intervenue à Monaco ou dans un pays étranger ;

Que la sentence arbitrale étrangère est soumise à Monaco aux mêmes formalités que la sentence arbitrale monégasque ;

Qu'il s'ensuit que l'exequatur doit être donné par le Président du Tribunal de première instance conformément à l'article 957 du Code de procédure civile et non par le Tribunal dans son entier lequel est donc incompétent pour connaître de la demande ;

Que cette incompétence ratione materiae peut être soulevée en tout état de cause et même d'office ;

Qu'il y a donc lieu de réformer le jugement rendu par le Tribunal de première instance et de renvoyer la société National Fertilizers Limited à mieux se pourvoir ;

Que les dépens d'appel doivent demeurer à la charge de cette société qui succombe ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

- Dit les juridictions monégasques compétentes pour connaître d'une demande d'exequatur d'une sentence arbitrale,

- Dit que cette demande ne pouvait être portée devant le Tribunal de première instance,

- Réforme en conséquence de ce chef le jugement du Tribunal de première instance du 28 avril 2005,

- Renvoie la société d'État indienne National Fertilizers Limited à se mieux pourvoir,

Composition

Mme François, prem. prés. ; Mme Gonelle, prem. subst. Proc. gén. ; Mes Brugnetti et Gardetto, av. déf.

Note

Cet arrêt réforme le jugement entrepris du 28 avril 2005 qui avait considéré qu'il était loisible à la société demanderesse de recourir à la procédure ordinaire d'exequatur devant le Tribunal de première instance plutôt qu'à la procédure simplifiée prévue à l'article 957 du Code de procédure civile ; il soulève d'office l'incompétence materiae du Tribunal.

Décision sélectionnée par la Revue de Droit Monégasque pour son intérêt jurisprudentiel, Revue de Droit Monégasque, 2006, n° 8, p. 181 à 183.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 27194
Date de la décision : 07/02/2006

Analyses

Exequatur


Parties
Demandeurs : Sté National Fertilizers Limited (NFL)
Défendeurs : Sté K. Limited

Références :

art. 957 du Code de procédure civile
article 3-10° du Code de procédure civile
ordonnance n° 7485 du 14 septembre 1982
article 956 du Code de procédure civile
articles 263 et 956 du Code de procédure civile
art. 3-10° et 956 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2006-02-07;27194 ?

Source

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