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06/01/2004 | MONACO | N°27090

Monaco | Cour d'appel, 6 janvier 2004, C. c/ Sté Suisse Crédit Agricole Indosuez


Abstract

Jugements et arrêts

Jugement statuant sur opposition à un commandement de payer : litige non constitutif d'un incident de saisie immobilière - Appel : délai de droit commun et non point de 10 jours concernant l'incident de saisie (art. 655 ter alinéa 1er)

Résumé

Aux termes de l'article 655 ter alinéa 1er du Code de procédure civile, qui est invoqué par la société Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA afin de justifier de l'irrecevabilité prétendue de l'actuel appel de C. C., l'appel des jugements, autres que ceux dont l'appel est exclu par l'a

rticle 655 bis précédent, doit être considéré comme non avenu s'il est interjeté plus ...

Abstract

Jugements et arrêts

Jugement statuant sur opposition à un commandement de payer : litige non constitutif d'un incident de saisie immobilière - Appel : délai de droit commun et non point de 10 jours concernant l'incident de saisie (art. 655 ter alinéa 1er)

Résumé

Aux termes de l'article 655 ter alinéa 1er du Code de procédure civile, qui est invoqué par la société Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA afin de justifier de l'irrecevabilité prétendue de l'actuel appel de C. C., l'appel des jugements, autres que ceux dont l'appel est exclu par l'article 655 bis précédent, doit être considéré comme non avenu s'il est interjeté plus de dix jours après leur signification ;

Au regard de l'emplacement des deux articles précités sous le titre IX consacré aux incidents de la saisie immobilière, du livre IV de la première partie du Code de procédure civile, l'appel ainsi soumis à ce délai de 10 jours concerne seulement les jugements rendus sur des incidents de saisie, ceux-ci constituant en effet des instances particulières aboutissant à des jugements contentieux qui doivent être régis par des normes spéciales de procédure destinées à rendre plus rapide et moins coûteuse leur solution ;

Il est de principe que constitue un incident de la saisie immobilière tout débat ayant pour cause la saisie, qui s'y réfère directement et qui exerce une influence nécessaire sur sa marche et son issue ;

Il convient donc de rechercher pour caractériser un tel incident si, par sa nature et son but, l'action en cause forme un débat accessoire qui soit une conséquence directe de la saisie et en suspende le cours ;

Dans cette perspective l'opposition du débiteur au commandement de payer mentionné à l'article 578 du Code de procédure civile ne constitue pas un incident de la saisie, dès lors que litige en résultant ne naît pas de celle-ci, en tant que relatif à un acte qui la précède comme en dispose le texte précité, le commandement ne faisant pas en effet partie de la saisie mais étant seulement un acte préalable à celle-ci ;

Il s'ensuit que les dispositions invoquées à l'article 655 ter, alinéa 1er, du Code de procédure civile, ne sont pas applicables au jugement dont est appel, par lequel le Tribunal de première instance a statué sur l'opposition de C. C. au commandement de payer qui lui a été signifié le 14 mars 2003 ;

L'appel de ce jugement et signifié le 16 septembre 2003, ayant été formé selon des règles et délais de droit commun doit, donc, être déclaré recevable en la forme.

Motifs

La Cour,

Considérant les faits suivants :

Par l'acte d'appel et d'assignation susvisé du 9 octobre 2003, régulièrement signifié à la société anonyme de droit suisse Crédit Agricole Indosuez (Suisse), au domicile par elle élu en l'étude de son avocat-défenseur, C. C. a saisi la Cour de l'appel d'un jugement du Tribunal de première instance, rendu à son encontre le 3 juillet 2003, par lequel il a été débouté de diverses demandes qu'il avait formulées contre ladite société, ensuite d'un commandement de payer que celle-ci lui avait fait signifier par huissier le 14 mars 2003, préalable à une saisie immobilière par elle poursuivie contre lui mais dont il a critiqué par ailleurs la régularité.

Ce même jugement l'a, d'autre part, condamné, outre dépens, à payer la somme de 5 000 euros à la société défenderesse, à titre de dommages-intérêts.

Par le commandement précité, celle-ci avait sollicité de C. C., paiement dans un délai de 30 jours de la somme de 3 161 385,46 francs suisses représentant le solde d'un compte n° 1690824 N 0001 qu'il avait ouvert auprès d'elle et qu'elle avait arrêté à cette somme principale le 27 février 2003, outre 12 700,90 suisses d'intérêts contractuels afférents à la période du 1er janvier au 27 février 2003, et ceux courus depuis lors.

Ce commandement avait été cependant contesté en sa validité par C. C., d'une part en ce que la société Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA, ne justifiait pas de la capacité à agir des personnes mentionnées dans cet acte comme étant aptes à la représenter, d'autre part en ce qu'il lui serait inopposable dès lors qu'il porterait sur des sommes excluant celles pour le paiement desquelles elle se trouvait subrogée à d'autres créanciers dans l'exercice des poursuites.

C. C. avait, par ailleurs, sollicité des délais de paiement et estimé en définitive que, dépourvu d'effet, le commandement en cause ne pouvait donner lieu à saisie immobilière à son encontre.

Réitérant en cause d'appel l'essentiel de ses moyens de première instance, C. C. demande désormais qu'il plaise à la Cour dire et juger nul et de nul effet, en l'état, le commandement aux fins de saisie immobilière lui ayant été délivré le 14 mars 2003, à défaut pour le Crédit Agricole Indosuez Suisse SA de justifier de la capacité et de la qualité à agir des représentants de celle-ci, A. C., directeur, et P. R., directeur adjoint.

C. C. demande également à la Cour de lui dire inopposable ce commandement, les droits du Crédit Agricole Indosuez Suisse SA étant limités par les effets d'une subrogation, de lui donner acte de ce qu'il considère que cette limitation détermine un montant maximum de réclamation et qu'il se réserve le droit de revendiquer d'autres moyens à suppléer, et de dire et juger enfin que le commandement est sans effet, et qu'il n'y a pas lieu à saisie immobilière.

C. C., sollicite, par ailleurs, la réformation du jugement entrepris en ce qu'il l'a condamné à des dommages-intérêts.

En défense et concluant principalement à l'irrecevabilité de l'appel ainsi formé, qui aurait dû respecter, à ses dires, la condition de délai prescrite par l'article 655 alinéa 1er du Code de procédure civile, la société intimée a conclu au débouté de C. C. des fins de son appel, à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de l'appelant à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour appel abusif.

À l'appui de ses moyens de fond la société Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA, se référant à un certificat de coutume versé aux débats, soutient qu'il n'est pas nécessaire en droit suisse que le conseil d'administration d'une société adopte une quelconque résolution pour conférer, aux personnes inscrites au Registre du commerce comme habiles à la représenter, le pouvoir d'introduire une action en justice pour son compte.

En l'état d'un extrait du Registre du commerce la concernant, qu'elle a produit, cette même société estime donc que ses directeurs C. et R. qui y apparaissaient mentionnés, avaient donc qualité pour agir en son nom, alors de surcroît que la jurisprudence monégasque devrait conduire à la tenir pour valablement représentée lors du commandement par ces deux personnes, mentionnées en effet à l'acte comme étant ses représentantes.

La société intimée estime, par ailleurs, qu'à supposer que la somme, objet du commandement en cause, excède le montant de la créance principale devant être admise en l'occurrence, ledit commandement n'en serait pas moins valable tout comme la procédure de saisie subséquente à due concurrence de cette créance.

Sur quoi,

En la forme,

Considérant qu'aux termes de l'article 655 ter alinéa 1er du Code de procédure civile, qui est invoqué par la société Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA afin de justifier de l'irrecevabilité prétendue de l'actuel appel de C. C., l'appel des jugements, autres que ceux dont l'appel est exclu par l'article 655 bis précédent, doit être considéré comme non avenu s'il est interjeté plus de dix jours après leur signification ;

Considérant qu'au regard de l'emplacement des deux articles précités sous le titre IX consacré aux incidents de la saisie immobilière, du livre IV de la première partie du Code de procédure civile, l'appel ainsi soumis à ce délai de 10 jours concerne seulement les jugements rendus sur des incidents de saisie, ceux-ci constituant en effet des instances particulières aboutissant à des jugements contentieux qui doivent être régis par des normes spéciales de procédure destinées à rendre plus rapide et moins coûteuses leur solution ;

Considérant qu'il est de principe que constitue un incident de la saisie immobilière tout débat ayant pour cause la saisie, qui s'y réfère directement et qui exerce une influence nécessaire sur sa marche et son issue ;

Qu'il convient donc de rechercher pour caractériser un tel incident si, par sa nature et son but, l'action en cause forme un débat accessoire qui soit une conséquence directe de la saisie et en suspende le cours ;

Considérant que dans cette perspective l'opposition du débiteur au commandement de payer mentionné à l'article 578 du Code de procédure civile ne constitue pas un incident de la saisie, dès lors que le litige en résultant ne naît pas de celle-ci, en tant que relatif à un acte qui la précède comme en dispose le texte précité le commandement ne faisant pas en effet partie de la saisie mais étant seulement un acte préalable à celle-ci ;

Considérant qu'il s'ensuit que les dispositions invoquées à l'article 655 ter, alinéa 1er, du Code de procédure civile, ne sont pas applicables au jugement dont est appel, par lequel le Tribunal de première instance a statué sur l'opposition de C. C. au commandement de payer qui lui a été signifié le 14 mars 2003 ;

Que l'appel de ce jugement signifié le 16 septembre 2003, ayant été formé selon des règles et délais de droit commun doit, donc, être déclaré recevable en la forme ;

Au fond,

Considérant par ailleurs qu'aux termes de l'article 136 (2e) du Code de procédure civile, « tout exploit contiendra (...) le nom, les prénoms, la profession et le domicile de la partie requérante et de la partie à laquelle l'exploit sera signifié, ou du moins une désignation précise de l'une et de l'autre » ;

Qu'en outre l'article 141 du même code dispose que les sociétés de commerce seront désignées par leur raison sociale ou par l'objet de leur entreprise et représentées conformément aux règles du droit commercial ;

Considérant qu'en l'espèce l'exploit d'huissier critiqué par l'appelant, et contenant le commandement de payer du 14 mars 2003, satisfait sans conteste, au regard de ses mentions, aux prescriptions précitées de l'article 136 du Code de procédure civile ;

Considérant, d'autre part, que ledit exploit comporte également l'indication des représentants de la société Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA qui a requis l'huissier instrumentaire de procéder à cet acte, ce, conformément aux dispositions de l'article 141, § 1 du Code de procédure civile dont l'application impose soit l'indication de la personne, soit celle de l'organe social qui a pris l'initiative de requérir la signification de l'exploit, s'agissant d'une personne morale exerçant une activité commerciale au regard du droit monégasque dont relève cette qualification, compte tenu du caractère interne des règles de procédure applicables, étant rappelé que l'article 2 du Code de commerce, répute actes de commerce, notamment, toutes opérations de banque ;

Considérant que le commandement dont s'agit mentionne, en effet, le nom des directeurs C. et R., agissant comme mandataires de la société requérante, aptes donc à représenter celle-ci lors dudit commandement, dès lors qu'au regard des mentions du registre du commerce joint à la signification de cet acte, ces deux personnes avaient qualité pour engager la banque vis-à-vis des tiers, et, par là même, pour représenter celle-ci lors d'un acte unilatéral de mise en demeure notifié à un débiteur consacré par les mentions de ce document, opposable aux tiers, n'ayant été établie en la circonstance par l'appelant ;

Considérant que, par voie de conséquence, le commandement de payer incriminé doit être déclaré valable ce chef ;

Considérant, en outre, qu'indépendamment de la somme qui est portée par ce commandement, il est constant que la société Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA est titulaire de droits pour la somme de 1 853 140 euros que C. C. n'a pas actuellement contesté lui devoir, aucun élément sérieux de discussion n'ayant été par lui avancé à cet égard ;

Que, de ce chef, le commandement de payer ne peut donc être déclaré nul comme le prétend C. C. ;

Considérant que ce dernier, qui ne pouvait se méprendre de bonne foi sur la portée de ses droits, et qui apparaît ainsi avoir témérairement introduit une action purement dilatoire, doit être condamné, outre dépens, à payer à la société Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA la somme que celle-ci a réclamée de ce chef pour appel abusif, ce, par application des articles 234 dernier alinéa, 431 et 435 du Code de procédure civile, le jugement entrepris devant être confirmé, pour le surplus, quant aux dommages intérêts alloués en première instance ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LA COUR D'APPEL DE LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO,

Statuant contradictoirement,

* Reçoit C. C. en son appel, régulier en la forme, Au fond l'en déboute,

* Confirme en toutes ses dispositions le jugement susvisé du 3 juillet 2003,

* Condamne C. C. à payer à la société Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Composition

M. Landwerlin prem. prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. proc. gén. ; Mes Blot et Licari av. déf. ; David, av. bar. de Nice.

Note

Cet arrêt confirme le jugement rendu le 3 juillet 2003.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 27090
Date de la décision : 06/01/2004

Analyses

Procédure civile


Parties
Demandeurs : C.
Défendeurs : Sté Suisse Crédit Agricole Indosuez

Références :

Code de procédure civile
article 2 du Code de commerce
article 136 (2e) du Code de procédure civile
article 578 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2004-01-06;27090 ?

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