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18/01/2000 | MONACO | N°26767

Monaco | Cour d'appel, 18 janvier 2000, T. c/ Sté Ichcape Shipping Services (CYPRUS) Ltd, en présence de l'État de Monaco


Abstract

Procédure civile

Comparution - Instance d'appel - Obligation pour la partie d'avoir en appel un avocat défenseur ; dans le cas contraire : défaut de non-comparution - - Pluralité de défendeurs dont l'un au moins est défaillant - Jugement (ou arrêt) réputé contradictoire si le défaillant a été cité à personne ou a eu connaissance de l'assignation

Hypothèques

Inscription provisoire d'hypothèque judiciaire - Ordonnance du président l'autorisant (art. 742 ter) sous réserve de la faculté de rétractation - Demande en référé de rétractation

: non compétence du Tribunal de première instance - Demande de main levée en référé contre con...

Abstract

Procédure civile

Comparution - Instance d'appel - Obligation pour la partie d'avoir en appel un avocat défenseur ; dans le cas contraire : défaut de non-comparution - - Pluralité de défendeurs dont l'un au moins est défaillant - Jugement (ou arrêt) réputé contradictoire si le défaillant a été cité à personne ou a eu connaissance de l'assignation

Hypothèques

Inscription provisoire d'hypothèque judiciaire - Ordonnance du président l'autorisant (art. 742 ter) sous réserve de la faculté de rétractation - Demande en référé de rétractation : non compétence du Tribunal de première instance - Demande de main levée en référé contre consignation : oui

Résumé

Quant à la comparution des parties

Aux termes de l'article 430 du Code de procédure civile, les parties ne peuvent comparaître devant la Cour d'appel que par des avocats défenseurs inscrits, de sorte qu'il convient de constater le défaut de comparution de l'État.

Cependant l'article 216 du CPC dispose qu'en cas de pluralité de défendeurs, lorsque l'un au moins d'entre eux ne comparaît pas, la décision est réputée contradictoire à l'égard de tous, si ceux, qui ne comparaissent pas, ont été cités en personne, circonstance assimilée par l'article 214 du même code au cas où il est établi, comme en l'espèce s'agissant de l'État, que le défendeur défaillant a eu connaissance de l'assignation.

En vertu des textes précités applicables en cause d'appel par l'article 435 du Code de procédure civile, le présent arrêt sera donc réputé contradictoire.

Quant à l'inscription provisoire d'hypothèque litigieuse.

Se prévalant d'une créance à l'encontre de M. T., la Sté Inchcape Schipping Services a obtenu du président du Tribunal de première instance par ordonnance du 8 mars l'autorisation de prendre une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire sur des biens immobiliers appartenant à M. T., laquelle a été prise dans la quinzaine de l'ordonnance. Celui-ci a assigné cette société d'une part le 2 avril devant la juge des référés aux fins de rétractation de l'ordonnance sur requête du 8 mars, d'autre part le 7 mars à savoir dans le délai légal de trois mois devant le Tribunal de première instance aux mêmes fins.

Par ordonnance du 21 juin le juge des référés a rejeté la demande de main levée. Par acte d'appel et d'assignation du 6 juillet M. T. a saisi la Cour d'appel en vue de la rétractation de l'inscription provisoire d'hypothèque.

Ceci étant exposé :

L'ordonnance sur requête susvisée, en date du 8 mars 1999, bien que visant l'article 762 ter du Code de procédure civile, n'a pas réservé pour sa rétractation, la voie du référé prévue par ce texte alors qu'une telle voie de recours, impliquant un examen contradictoire du principe de créance invoqué, n'est pas expressément autorisée par la loi, s'agissant des inscriptions provisoires d'hypothèque judiciaire.

Dès lors, et bien que le Tribunal de première instance n'ait été saisi au fond qu'après l'introduction de la demande en référé formée par M. T., et tendant à une telle rétractation aux fins de radiation, celle-ci ne pouvait intervenir, pour l'inscription provisoire dont s'agit, que dans les conditions, à juste titre rappelées par l'ordonnance du 21 juin 1999, résultant des articles 762 ter et 762 quater du Code de procédure civile.

L'ordonnance de référé, dont appel, doit donc être, de ce chef, confirmée.

Par ailleurs, en cause d'appel M. T. a subsidiairement offert de consigner la somme de 2 200 000 F en vue de la radiation d'inscription sollicitée, ce qui constitue un moyen nouveau formulé au soutien de sa demande originaire qui doit être admis, comme l'a fait la société intimée sur le fondement de l'article 431 du CPC.

Une telle consignation s'avère en l'état suffisante à la garantie de la Sté Inchcape Shipping Services (CYPRUS) Limited, en principal, intérêts et frais.

Il y a donc lieu d'ordonner la radiation d'inscription sollicitée en contre partie de cette consignation, tous droits des parties, quant au fond devant, pour le surplus demeurer réservés.

Motifs

La Cour,

Considérant les faits suivants :

Aux termes d'une ordonnance sur requête, rendue le 8 mars 1999, la société de droit chypriote dénommée Inchcape Shipping Services (CYPRUS) Ltd a obtenu du Président du tribunal de première instance, sur le fondement de l'article 762 ter du Code de procédure civile, l'autorisation de prendre une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire sur des biens immobiliers appartenant à G. T. et définis comme suit :

* la part lui revenant dans l'immeuble ..., d'un appartement n° 7 au 3e étage, avec l'aire libre au-dessus outre tous droits, indivis y relatifs,

* la part lui revenant dans l'immeuble ..., d'un appartement n° 5 au 2e étage et d'une cave n° 22 au 3e sous-étage outre tous droits indivis y relatifs,

* la part lui revenant dans l'immeuble ..., d'une place de garage lot 110 au 3e sous-sol, outre tous droits indivis y relatifs.

L'autorisation ainsi obtenue avait pour objet, selon l'ordonnance précitée, mais après diminution de la somme de 3 118 450 francs originairement avancée dans la requête préalable, de conférer sûreté à la société requérante, pour le règlement de la créance qu'elle invoquait à l'encontre de G. T., qui a été provisoirement évaluée à la somme de 2 200 00 francs par le Président du tribunal de première instance.

Ladite société avait fait valoir à ce propos, qu'elle avait, selon protocole d'accord du 21 septembre 1995, acquis l'intégralité des 1 000 actions composant le capital social de la société anonyme monégasque dénommée Monaco maritime moyennant le prix de 11 750 000 francs et que des cédants de ce capital avaient été, en l'occurrence, G. T., propriétaire de 500 actions de la société cédée, ainsi que la société civile particulière dénommée « le Crotale » propriétaire de 450 actions, et J.-L. G., propriétaire de 50 actions.

La société Inchcape Schipping Services (CYPRUS) Ltd, se référant à ce même protocole d'accord, qui stipulait une obligation de non-concurrence à la charge de G. T., tout comme les conventions salariales qui l'avaient maintenu au sein de la société, avait opposé à ce dernier, licencié le 21 août 1998, divers agissements déloyaux, tels qu'un détournement de clientèle, dont elle disait s'en être suivi pour elle un important préjudice.

L'inscription provisoire d'hypothèque autorisée comme il vient d'être dit par l'ordonnance précitée du 8 mars 1999 a été prise le 10 mars 1999 au registre des dépôts n° 843 de la Conservation des Hypothèques de Monaco (volume 186, numéro 35), puis notifiée à G. T. le 19 mars 1999, dans le délai de quinzaine prévu par l'article 762 quater du Code de procédure civile.

Dans le délai de trois mois édicté par l'article 762 ter du même code, la société Inchcape Shipping Services (CYPRUS) Ltd a saisi le Tribunal de première instance au fond par un acte d'assignation délivré le 7 mai 1999.

En vue d'obtenir la main levée immédiate de l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire susvisée, G. T. avait, le 2 avril 1999, antérieurement fait signifier à la société Inchcape Shipping Services (CYPRUS) Ltd une assignation en référé tenant principalement à la rétractation par le Président du Tribunal de première instance de son ordonnance sur requête du 8 mars 1999.

Cette assignation avait été également notifiée à l'État, afin de l'attraire à l'instance dès lors que celle-ci concernait le service de la conservation des hypothèques.

Par ordonnance de référé du 21 juin 1999, rendue par défaut à l'égard de l'État mais contradictoirement à l'encontre de G. T., le président du tribunal de première instance a dit n'y avoir lieu de faire droit à la demande de ce dernier et renvoyé les parties à se pourvoir éventuellement au principal.

Pour statuer de la sorte le Président du tribunal de première instance a considéré, par référence à un arrêt du 25 mars 1998 de la Cour de révision judiciaire, qu'aux termes de l'article 762 quater alinéa 2e du Code de procédure civile « la radiation ou le cantonnement de l'inscription provisoire de nantissement d'hypothèque prise à titre conservatoire pourra, s'il y a lieu, être ordonnée par le juge des référés sur consignation entre les mains du séquestre par lui désigné des sommes suffisantes pour garantir la créance en principal, intérêts et frais, avec affectation spéciale à ladite créance » et qu'il résultait de ce texte que la radiation de l'inscription d'hypothèque dont s'agit, par voie de référé, ne pouvait intervenir en l'espèce que sur la consignation prévue par la loi, seul le Tribunal de première instance, saisi par assignation du 7 mai 1999, étant alors compétent pour statuer sur le maintien ou la mainlevée de l'inscription litigieuse.

Par acte d'appel et assignation du 6 juillet 1999, G. T. a saisi la Cour d'un appel dirigé contre la société Inchcape Shippings Services (CYPRUS) Ltd, en présence de l'État de Monaco, tendant à l'infirmation de l'ordonnance de référé ainsi rendue le 21 juin 1999, en ce qu'elle aurait dû aboutir à la rétractation de l'ordonnance sur requête précitée du 8 mars 1999 et à la radiation de l'inscription provisoire d'hypothèque consécutive à celle-ci.

Par conclusions du 26 octobre 1999 la société Inchcape Schipping Services (CYPRUS) Ltd demande, en défense, qu'il plaise à la Cour dire et juger que G. T. est tenu de procéder à la consignation prévue par l'article 762 quater (alinéa 2e) du Code de procédure civile, et lui donner acte de ce qu'elle ne s'oppose pas à la mainlevée sollicitée, sous réserve de consignation soit de la somme de 3 132 757,70 francs, montant prétendu de sa créance, soit, à défaut de celle de 2 200 000 francs provisoirement retenue par l'ordonnance sur requête du 8 mars 1999, mais avec affectation spéciale à son profit de la somme consignée.

Subsidiairement, si la Cour ne devait pas ordonner une telle consignation, la société intimée demande qu'il soit constaté qu'au regard des agissements déloyaux de G. T., elle dispose bien d'un principe certain de créance à l'encontre de ce dernier, justifiant la sûreté obtenue par la garantie de celle-ci.

Par ses dernières conclusions du 14 décembre 1999 G. T., maintenant à titre principal ses demandes de rétractation et de radiation d'inscription provisoire formulées en première instance, offre subsidiairement, pour obtenir ces mesures, la consignation d'une somme de 2 200 000 francs tout en formulant des protestations quant au fond, dès lors que l'inscription provisoire d'hypothèque incriminée, et la nécessité de consigner, lui causeraient un important préjudice.

En effet, il conteste formellement, en cause d'appel, tout comme en première instance, le principe de créance invoquée par la société Inchcape Shipping Services (CYPRUS) Ltd estimant, pour l'essentiel, qu'en l'état de cette contestation et par application de l'article 852 du Code de procédure civile, le Président du tribunal de première instance aurait dû rétracter son antérieure ordonnance du 8 mars 1999.

Pour sa part, l'État de Monaco n'a pas constitué avocat-défenseur en cause d'appel, encore que le Conservateur des Hypothèques ait par courrier du 1er septembre 1999, adressé à la Cour pour les besoins de la présente instance, confirmé l'existence de l'inscription provisoire d'hypothèque litigieuse, et déclaré s'en rapporter à la décision de la Cour quant au maintien ou à la radiation d'une telle inscription.

Sur quoi :

Quant à la comparution des parties :

Considérant qu'aux termes de l'article 430 du Code de procédure civile, les parties ne peuvent comparaître devant la Cour d'appel que par des avocats-défenseurs inscrits ;

Qu'il convient donc de constater le défaut de comparution de l'État ;

Considérant, cependant, que l'article 216 du Code de procédure civile dispose qu'en de pluralité de défendeurs, lorsque l'un au moins d'entre eux ne comparaît pas, la décision est réputée contradictoire à l'égard de tous si ceux qui ne comparaissent pas ont été cités en personne, circonstance assimilée par l'article 214 du même code au cas où il est établi, comme en l'espèce de l'État, que le défendeur défaillant a eu connaissance de l'assignation ;

Qu'en vertu des textes précités, applicables en cause d'appel par l'article 435 du Code de procédure civile, le présent arrêt sera donc réputé contradictoire ;

Quant à l'inscription provisoire d'hypothèque litigieuse :

Considérant que l'ordonnance sur requête susvisée, en date du 8 mars 1999, bien que visant l'article 852 du Code de procédure civile, n'a pas réservé, pour sa rétractation, la voie du référé prévue par ce texte alors qu'une telle voie de recours, impliquant un examen contradictoire du principe de créance invoqué, n'est pas expressément autorisée par la loi, s'agissant des inscriptions provisoires d'hypothèque judiciaire ;

Que, dès lors, et bien que le Tribunal de première instance n'ait été saisi au fond qu'après l'introduction de la demande en référé formée par G. T. et tendant à une telle rétractation aux fins de radiation, celle-ci ne pouvait intervenir, pour l'inscription provisoire dont s'agit, que dans les conditions, à juste titre rappelées par le Président du tribunal de première instance, résultant des articles 762 ter et 762 quater du Code de procédure civile ;

Que l'ordonnance de référé, dont appel a été formé par G. T., doit donc être, de ce chef, confirmée ;

Considérant, par ailleurs, qu'en cause d'appel G. T. a subsidiairement offert de consigner la somme de 2 200 000 francs en vue de la radiation d'inscription sollicitée, ce qui constitue un moyen nouveau formulé au soutien de sa demande originaire qui doit être admis comme l'a fait la société intimée, sur le fondement de l'article 431 du Code de procédure civile ;

Qu'une telle consignation s'avère en l'état suffisante à la garantie de la créance de la société Inchcape Shipping Services (CYPRUS) Limited, en principal, intérêts et frais ;

Qu'il y a donc lieu d'ordonner la radiation d'inscription sollicitée en contrepartie de cette consignation, tous droits des parties, quant au fond devant, pour le surplus, demeurer réservés ;

Considérant enfin qu'il convient de réserver également les dépens d'appel, s'agissant d'une instance de référé dans laquelle les parties se sont subsidiairement accordées sur le principe d'une consignation ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco, statuant par arrêt réputé contradictoire à l'égard de toutes les parties,

* Confirme l'ordonnance de référé susvisée du 2 juin 1999 en ce qu'elle a rejeté la demande de radiation d'inscription provisoire d'hypothèque formulée par G. T., faute de consignation offerte ;

* mais statuant sur la demande originaire au vu des nouveaux éléments de la cause ;

* Constate que G. T. offre désormais de consigner la somme de 2 200 000 francs ;

* Ordonne la consignation par G. T. de cette somme, laquelle sera spécialement affectée à la créance de la société Inchcape Shipping Services (CYPRUS) Ltd, ce, auprès du Greffier en chef qui en demeurera séquestre jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné ;

* Ordonne que, sur justification d'une telle consignation, le Conservateur des Hypothèques procédera à la radiation de l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire prise le 10 mars 1999 par la société Inchcape Shipping Services (CYPRUS) Ltd à l'encontre de G. T. (volume 186, n° 35) ;

* Réserve les droits des parties quant au fond ;

Composition

M. Landwerlin, prem. prés. ; Mlle Le Lay, prem. Subst. proc. gén. ; Mas Leandri, Gardetto, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26767
Date de la décision : 18/01/2000

Analyses

Hypothèque ; Procédure civile


Parties
Demandeurs : T.
Défendeurs : Sté Ichcape Shipping Services (CYPRUS) Ltd, en présence de l'État de Monaco

Références :

article 435 du Code de procédure civile
article 852 du Code de procédure civile
article 430 du Code de procédure civile
articles 762 ter et 762 quater du Code de procédure civile
article 431 du CPC
article 216 du CPC
article 762 quater du Code de procédure civile
Code de procédure civile
article 762 ter du Code de procédure civile
ordonnance du 21 juin 1999
ordonnance du 8 mars 1999


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;2000-01-18;26767 ?

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