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16/11/1999 | MONACO | N°26757

Monaco | Cour d'appel, 16 novembre 1999, M.-G., SAM MGTT c/ P.


Abstract

Sociétés commerciales

Société anonyme - Cession d'actions nominatives - Conditions - Inscription du transfert sur le registre des sociétés : art. 43 du Code de commerce - Clause d'agrément prévue dans les statuts de la société pour les non-actionnaires

Résumé

Aux termes des statuts de la société anonyme monégasque MGTT les actions de cette société ont exclusivement un caractère nominatif ce qui suppose que leur propriété s'établit par une inscription sur les registres sociaux, comme le prévoit l'article 43 du Code de commerce.

E

n application de cet article, et conformément aux statuts de cette société la cession de ces action...

Abstract

Sociétés commerciales

Société anonyme - Cession d'actions nominatives - Conditions - Inscription du transfert sur le registre des sociétés : art. 43 du Code de commerce - Clause d'agrément prévue dans les statuts de la société pour les non-actionnaires

Résumé

Aux termes des statuts de la société anonyme monégasque MGTT les actions de cette société ont exclusivement un caractère nominatif ce qui suppose que leur propriété s'établit par une inscription sur les registres sociaux, comme le prévoit l'article 43 du Code de commerce.

En application de cet article, et conformément aux statuts de cette société la cession de ces actions s'opère par une déclaration de transfert inscrite sur ces registres, et signée de celui qui fait le transfert ou d'un fondé de pouvoir.

Ces dispositions impliquant, en pratique, qu'un acte de cession soit d'abord remis à la société, accompagné du certificat d'inscription nominative antérieurement délivré par celle-ci au cédant et que soit ensuite substitué dans les registres de la société, au vu de ces documents, le nom du cessionnaire à celui du cédant.

En l'espèce, les formalités initiales ainsi prévues ont été réalisées lors de l'établissement de « l'ordre de mouvement » du 30 mars 1993 portant sur le transfert au profit de G. P. d'une action qui a été, en effet, signé par S. G. avec la mention « bon pour cession d'une action ».

Indépendamment de l'inscription ultérieure de la déclaration de transfert, sur les registres de la société, ce dont il n'a pas été en l'état justifié, la cession d'action, objet de cette déclaration, n'était soumise, pour sa validité entre cédant et cessionnaire, qu'au seul consentement de ces parties, sous réserve cependant de l'application des statuts de la Société MGTT qui déterminaient en l'occurrence, les droits respectifs de celles-ci.

Or ces statuts subordonnent le transfert des actions nominatives de ladite société, lorsqu'un tel transfert s'opère au profit de personnes physiques ou morales n'ayant pas la qualité d'actionnaire, à un agrément préalable donné par une assemblée générale ordinaire convoquée extraordinairement ou, à défaut, par l'unanimité des actionnaires consultés par écrit.

La clause d'agrément ainsi prévue a pour effet d'affecter le droit de l'actionnaire de vendre ses titres, d'une condition suspensive qui fait échec à l'existence même de ce droit tant que l'agrément n'a pas été obtenu.

Les parties s'opposant quant à la réalité d'un tel agrément, dès lors que celui-ci ne peut être tenu en l'état pour acquis, alors qu'il conditionne l'existence du droit de cession bénéficiant à S. G., quant au transfert de l'action revendiquée par G. P., ce dernier ne saurait actuellement prétendre à des droits d'actionnaire dans la société MGTT.

En conséquence, ses demandes tendant à obtenir la reconnaissance de tels droits, et, sur le fondement de ceux-ci, la communication de documents sociaux de la part de la société MGTT, ne pouvaient donc être accueillies en référé sauf à préjudicier au principal, quant aux droits des parties sur le fond.

Motifs

La Cour,

Considérant les faits suivants :

La société anonyme monégasque dénommée RMO Monaco a été constituée par acte du 12 juin 1991, reçu par Maître Jean-Charles Rey, notaire à Monaco.

Sa constitution a été dûment autorisée le 6 septembre 1991 par Arrêté ministériel.

Elle a pour objet social la prestation de services, dans le cadre d'une entreprise de travail temporaire qui a été apportée à la société par S. G. sous la forme d'un fonds de commerce dénommé MGTT-RMO Monaco, ce, en contrepartie de 90 actions d'apport de 10 000 francs chacune.

Pour sa part, M. B. agissant pour le compte d'une société anonyme française dénommée « RMO Travail temporaire » a également fait apport à la société RMO Monaco de la marque française RMO, apport rémunéré par l'octroi de 150 actions de 10 000 francs chacune.

Le capital de la société RMO Monaco ainsi constituée ayant été fixé à 3 000 000 de francs, réparti en 300 actions de 10 000 francs chacune, 60 actions restaient donc à souscrire lors de la création de la société.

Aux termes de l'article 7 des statuts de la société RMO Monaco toutes les actions de celle-ci sont obligatoirement nominatives.

Elles sont en outre librement cessibles entre actionnaires, mais ne peuvent être cédées à des tiers qu'une fois ceux-ci agréés par une assemblée générale ordinaire, convoquée extraordinairement, ou, à défaut, par l'unanimité des actionnaires consultés par écrit.

Les titres d'actions doivent être extraits d'un registre à souche et mentionner le nombre d'actions qu'ils représentent.

Ce même article 7 des statuts prévoit, en outre, que la propriété des actions nominatives est établie par une inscription sur les registres de la société et que leur transmission s'opère en vertu d'un transfert inscrit sur lesdits registres, signé par le cédant et le cessionnaire ou leur fondé de pouvoir respectif.

Inscrite au répertoire du commerce et de l'industrie sous le numéro 92.S.2811, la société anonyme monégasque RMO Monaco a fait l'objet d'une demande d'inscription rectificative le 9 novembre 1992, destinée à lui conférer désormais la dénomination « MGTT Monaco » et à enregistrer, au titre d'un changement d'administrateur, la démission de la société française « RMO Travail temporaire » représentée par M. B.

Une nouvelle modification des inscriptions portées au répertoire du commerce et de l'industrie, du chef de la société RMO Monaco (devenue MGTT Monaco) a été apportée le 12 mai 1993, indiquant la démission de M. B. de ses fonctions d'administrateur et de président, et le remplacement de ce dernier, en ces mêmes qualités, par G. P.

Outre trois modifications de forme, par ailleurs apportées à ces mêmes inscriptions, S. G., agissant comme administrateur délégué et présidente du conseil d'administration de la société MGTT, a signalé, le 16 septembre 1998, au service du Répertoire du commerce et de l'industrie, qu'elle avait été désignée à ces fonctions par une assemblée générale ordinaire tenue le 14 août 1998, et que, lors de celle-ci, avait en outre été acceptée la nomination, comme administrateur, d'une société « SCI Laurence ».

Préalablement à la nomination de G. P. aux fonctions d'administrateur et de président, en remplacement de M. B., S. G. avait signé le 30 mars 1993 un « ordre de mouvement » correspondant au modèle normalisé applicable en France aux cessions de valeurs mobilières non admises en dépôt collectif auprès de la « Société interprofessionnelle pour la compensation des valeurs mobilières, » dite « Sicovam », laquelle a notamment pour objet, en France, d'assurer la négociation des titres placés auprès d'elle en compte courant par ses adhérents, les valeurs « non admises en Sicovam » devant être, néanmoins, inscrites en compte auprès de la société émettrice, selon la loi française.

Cet « ordre de mouvement » portait sur le transfert, au profit de G. P., d'une action de la société émettrice RMO Monaco.

Par assignation du 1er avril 1999, G. P. s'est prévalu de cet ordre pour prétendre à sa qualité d'associé de la société RMO Monaco, devenue MGTT.

Aux termes de cette assignation, signifiée à S. G. et à la société précitée, il a demandé, en effet, au Président du tribunal de première instance, statuant en référé, de constater cette qualité d'associé, et, en conséquence de cette constatation, d'ordonner, sous astreinte de 10 000 francs par jour de retard, la remise par les parties défenderesses de divers documents sociaux énumérés comme suit :

* le registre des mouvements des titres de la société MGTT, les procès-verbaux des assemblées générales intervenues depuis le 8 janvier 1998,

* le texte d'une démission qu'il aurait transmise à la société MGTT et aux associés,

* la décision du 14 avril 1998 désignant la SCI Laurence en qualité d'Administrateur et de Président du conseil d'administration, ainsi que la fiche de présence alors dressée.

Au soutien des demandes ainsi formulées G. P. a fait valoir :

* qu'ensuite de sa désignation à la tête de la société il avait, le 26 juin 1997, régulièrement reçu le procès-verbal du Conseil d'administration, qui s'était tenu le 7 juin 1997,

* qu'auparavant une assemblée générale de la société avait constaté sa présence comme titulaire d'une action, tandis que S. G. y apparaissait comme détenant 129 actions (outre ses 150 actions d'apport) et M. B., 20 actions, et que le procès-verbal de cette assemblée, signé de S. G. et de M. B., le désignait bien comme président du conseil d'administration.

* que, de même, le procès-verbal de l'assemblée ordinaire du 28 juin 1997 mentionnait une répartition identique des actions de la société et sa qualité de président du conseil d'administration,

* qu'enfin aux termes d'une délibération de ce conseil, réuni le 27 avril 1998, il était lui-même bien mentionné, sous sa signature et celle de S. G., comme étant président.

Sur la base de ces documents G. P. estimait qu'il avait bien été reconnu comme étant propriétaire d'une action aux assemblées des 8 juin 1996 et 28 juin 1997, alors surtout qu'il avait été nommé président du conseil d'administration le 15 avril 1993, ce qui impliquait de sa part qu'il eût la qualité d'associé.

G. P. estimait, en outre, que l'absence avérée d'une assemblée générale extraordinaire l'ayant agréé en qualité d'associé était sans influence sur l'agrément effectif dont il a bénéficié, dès lors, en effet, que l'ensemble des associés avait été consulté, chacun ayant émis alors une volonté non équivoque de lui conférer la qualité d'actionnaire.

Sur ces bases de discussion, et outre les documents sociaux qu'il a énumérés, G. P. a, en définitive, demandé au Président du tribunal de première instance de constater qu'il était associé de la société MGTT Monaco et appelé à demeurer en fonction, en l'absence de démission, jusqu'à l'assemblée générale ordinaire annuelle devant se réunir pour statuer sur les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 1999, dès lors qu'il avait été désigné aux fonctions d'administrateur et de président du Conseil d'administration, le 15 avril 1993, et que son mandat s'était renouvelé tacitement lors de l'approbation des comptes de l'exercice, clos le 31 décembre 1996, par l'assemblée générale annuelle ordinaire du 28 janvier 1997.

En défense à l'action en référé ainsi introduite à leur encontre, S. G. et la société MGTT Monaco ont conclu principalement à l'incompétence du magistrat des référés, eu égard à l'existence d'une contestation sérieuse quant à la propriété de l'action revendiquée par G. P., et, subsidiairement, à ce qu'il soit constaté que ce dernier ne pouvait aucunement se prévaloir de sa qualité prétendue d'actionnaire, faute d'avoir été agréé comme tel en conformité des statuts de la société, et de pouvoir justifier d'un quelconque certificat faisant la preuve de la propriété de l'action litigieuse.

Pour appuyer cette défense, S. G. a liminairement fait valoir, en fait, tout comme sa société, que cette dernière avait originairement accueilli M. B., qui avait été à la tête d'un important groupe français de travail temporaire, avant qu'il ne connaisse par la suite des difficultés en France, ce qui l'avait en définitive conduit à mettre un terme à toute association avec l'entreprise ; qu'elle avait depuis lors assumé seule la responsabilité des engagements financiers de la société, et qu'alors qu'elle avait, en dernier lieu, envisagé de céder ses actions à un entrepreneur désireux d'exercer une activité de travail temporaire à Monaco, l'attitude de G. P. tendait, en réalité, à faire échec à ce projet.

S. G. et la société MGTT Monaco, outre un litige distinct et antérieur, portant sur 204 actions revendiquées par G. P., ont, dès lors, contesté à celui-ci la propriété de l'unique action faisant l'objet de son assignation du 1er avril 1999, et dont il s'est prétendu titulaire depuis le 30 mars 1993 au regard de l'ordre de mouvement susvisé.

Ces deux parties ont, en effet, mentionné qu'au cours d'une enquête pénale G. P. avait indiqué que c'était en réalité M. B. qui lui avait cédé cette action ; elles ont également fait valoir que ce même P. avait été totalement incapable de produire un quelconque certificat de propriété concernant ce titre.

Ces mêmes parties ont, d'autre part, invoqué les dispositions de l'article 7 des statuts de la société, relatives à l'agrément des nouveaux actionnaires, pour conclure que les formalités prévues n'avaient pas été accomplies.

Elles ont, en outre, souligné, qu'afin de mettre fin au litige en cours, une assemblée générale ordinaire, convoquée extraordinairement le 8 janvier 1999, avait, à l'unanimité de ses membres, décidé de refuser l'agrément à G. P. pour la cession de l'action unique revendiquée, portant le numéro 279.

Par ordonnance du 4 janvier 1999, le Président du tribunal de première instance, statuant par mesure provisoire et urgente de référé, a d'abord constaté que G. P. était actionnaire de la société MGTT Monaco en l'état de la propriété d'une action par lui acquise le 30 mars 1993 de S. G. Il a ensuite autorisé G. P. à obtenir de S. G., ou de tout autre représentant légal de la société MGTT Monaco, avec l'assistance d'un huissier, la communication en copie certifiée conforme par cet officier ministériel :

* des registres de la société, ou de tout document en tenant lieu, retraçant les transmissions ou cessions des actions.

* et des procès-verbaux des assemblées générales d'actionnaires tenues depuis le 8 juin 1998 à l'exception de celui relatif à l'assemblée générale tenue le 30 juin 1998.

Le juge des référés a cependant rejeté le surplus des demandes dont il était saisi.

Pour statuer de la sorte, ce magistrat a d'abord relevé que l'urgence résultait, en la circonstance, de ce que le litige opposant les parties mettait en cause le fonctionnement normal de l'organe délibérant de la société, entravant par là-même son activité commerciale, et qu'il était donc nécessaire de connaître, au plus tôt, même à titre provisoire, si G. P. pouvait ou non se prévaloir de la qualité d'actionnaire de la société MGTT.

Après avoir rappelé les dispositions de l'article 7 des statuts de la société MGTT relatives à la propriété et au transfert des actions, le Président du Tribunal de première instance a considéré que G. P. justifiait, par les pièces produites, et notamment par l'ordre de transfert signé le 30 mars 1993 par S. G., outre les feuilles de présence relatives aux assemblées générales des 8 janvier 1996 et 28 janvier 1997, qu'il était bien propriétaire d'une action de la société, à tout le moins sur le plan de l'apparence, ce qui résultait de cet ordre, de la lecture des documents sociaux et de sa nomination, le 25 avril 1993, au sein du conseil d'administration en qualité de président, cette nomination supposant la propriété d'une action au moins, conformément à l'article 10 des statuts.

Le Président du tribunal de première instance a toutefois relevé que la procédure statutairement prévue en matière de cession d'actions n'avait pas été suivie pour le transfert de l'action litigieuse ; que, cela apparaissant au premier chef imputable à S. G., celle-ci était mal venue à l'opposer à G. P., mais qu'en revanche ce dernier ne pouvait utilement invoquer la circonstance qu'aurait été sans incidence, sur son agrément comme nouvel actionnaire, l'inobservation des formalités statutairement prévues à cet effet, dès lors que le moyen tiré de cette circonstance ne pouvait être apprécié en référé sans le préjudice au principal qu'exclut l'article 414 du Code de procédure civile.

Le Président du tribunal de première instance a, par ailleurs, considéré qu'en l'état de la qualité d'actionnaire constatée comme il vient d'être rapporté, aucun effet de droit ne pouvait être reconnu à l'assemblée générale du 8 janvier 1999, au cours de laquelle l'agrément avait été refusé à G. P., relativement à la cession de 1993.

Ce magistrat a cependant estimé que, s'il pouvait être déduit du procès-verbal du conseil d'administration du 14 avril 1993 que P. avait été nommé comme administrateur, aucun élément ne permettait de vérifier que son mandat eût été renouvelé à l'expiration de la durée statutaire de trois années prévue par les articles 9 et 11 des statuts, ni non plus que ce même mandat ait fait l'objet d'une reconduction tacite, de sorte qu'il ne pouvait être statué en référé sur la qualité invoquée par P., d'administrateur et de président du Conseil d'administration, par effet de renouvellement tacite de son antérieure nomination à ces fonctions, depuis le 15 avril 1993.

Au regard de ces éléments le magistrat des référés a donc rejeté également la demande formulée de ce chef, de même que la demande de production du texte d'une démission alléguée de la part de P., dont la réalité formelle n'était nullement avérée.

Par acte du 17 juin 1999, régulièrement signifié à G. P., S. G. et la société MGTT ont interjeté appel de l'ordonnance de référé ainsi rendue, en demandant à la Cour de réformer cette décision en toutes ses dispositions, dès lors, soutiennent-ils, que le juge des référés aurait dû se déclarer incompétent.

Ils rappellent, à ce propos, qu'après ses difficultés survenues en France, M. B., qui avait pour représentant à Monaco G. P., avait dû cesser son activité dans la Principauté et qu'il avait alors proposé à S. G. de céder une action à ce même P., afin de permettre à ce dernier d'être nommé président du Conseil d'administration.

Ils considèrent cependant, en leur acte d'appel, que G. P. ne pouvait nullement, ce faisant, se voir reconnaître la qualité d'actionnaire de la société MGTT dès lors qu'au vœu des statuts la cession d'une action à une personne qui n'est pas actionnaire est soumise à un formalisme précis et impératif, qui n'a pas été respecté en l'occurrence, de sorte que l'ordonnance entreprise contreviendrait manifestement aux statuts en reconnaissant à G. P. la qualité d'actionnaire en l'absence d'agrément régulier, qualité qui, au demeurant, impliquait un débat au fond ne pouvant être tranché par le magistrat des référés.

Par conclusions en défense du 27 septembre 1999, il est demandé, en premier lieu, à la Cour de confirmer l'ordonnance entreprise du 4 juin 1999, après avoir constaté que :

* Madame G. a signé un ordre de mouvement concernant le transfert d'une action du capital de la SAM RMO Monaco au capital de 3 000 000 de francs dont le siège social est 1, avenue des Castellans RCS 803 MC 304 111 60 n° de gestion 92 S 2811 le 30 mars 1993 au bénéfice de Monsieur G. P., société dont le président était au moment du transfert Monsieur M. B.

* Le 15 avril 1993, le Conseil d'administration de la SAM RMO Monaco, qui s'est tenu en présence de Mme S. G. et de M. G. P., administrateur désigné, avait désigné M. G. P. pendant la durée restant de son mandat d'Administrateur, comme Président du Conseil d'administration.

* Ce procès-verbal a été signé par Mme S. G. et M. G. P., ce dernier ayant mentionné « bon pour acceptation des fonctions de président ».

* Les assemblées postérieures ont bien désigné M. P. comme étant propriétaire d'une action et comme président du conseil d'administration à savoir assemblée du 8 juin 1996, 28 juin 1997 et que M. P. était bien considéré comme président du Conseil d'administration aux termes du procès-verbal du 26 juin 1997 et du 27 avril 1998.

* M. G. P. est bien propriétaire de l'action, objet de l'ordre de mouvement du 30 mars 1993 et que sa qualité d'associé est opposable à la société, eu égard à sa désignation en qualité de président du Conseil d'administration le 15 avril 1993, enregistré au Registre du commerce et de l'industrie le 12 mai 1993 ainsi qu'aux assemblées générales des conseils d'administration ultérieures suscitées et ce, conformément à l'article 7 des statuts de la SAM RMO Monaco, devenue MGTT.

En outre G. P., formant appel incident, a conclu par les mêmes écritures à la condamnation, in solidum, de S. G. et de la société MGTT Monaco à lui remettre, sous astreinte :

* le registre des mouvements titres de la société MGTT,

* les procès-verbaux des assemblées générales intervenues depuis le 8 juin 1998, à l'exception de celle du 30 juin 1998, et notamment la décision du 14 avril 1998 qui a désigné la SCI Laurence en qualité d'administrateur et de président du Conseil d'administration, ainsi que la fiche de présence de l'assemblée correspondante,

* le texte de la démission susvisée qui aurait été transmise à la société MGTT ainsi qu'aux associés.

G. P. a, enfin, demandé à la Cour de condamner les appelants principaux, in solidum, à lui payer une somme de 10 000 francs à titre de dommages-intérêts pour appel abusif.

Sur ses qualités d'actionnaire, d'administrateur et de président G. P., a repris, en cause d'appel, ses moyens développés en première instance tenant à l'existence de documents établissant, à ses dires, que la qualité d'associé lui aurait été reconnue par les deux autres seuls associés de la société MGTT de 1993 à 1998, alors surtout que l'assemblée générale ordinaire du 19 mai 1995 l'avait renouvelé dans ses fonctions d'administrateur.

En deuxième lieu G. P. réitère que l'absence d'une assemblée générale extraordinaire l'ayant agréé en qualité d'associé demeure sans influence, en l'espèce, quant à la réalité de l'agrément qu'il invoque, puisque celui-ci serait à l'évidence démontré par sa désignation comme associé et dirigeant de la société, dès lors qu'il a été effectivement accepté par les deux autres associés, S. G. et M. B., comme administrateur et président du Conseil d'administration.

Sur quoi :

Considérant qu'aux termes des statuts de la société MGTT ci-dessus mentionnés, les actions de cette société ont exclusivement un caractère nominatif, ce qui suppose que leur propriété s'établit par une inscription sur les registres sociaux, comme le prévoit l'article 43 du Code de commerce ;

Considérant, qu'en application de cet article, et conformément, d'ailleurs, aux statuts de la société MGTT, la cession de ces actions s'opère par une déclaration de transfert inscrite sur ces registres, et signée de celui qui fait le transfert ou d'un fondé de pouvoir ;

Considérant que ces dispositions impliquent, en pratique, qu'un acte de cession soit d'abord remis à la société, accompagné du certificat d'inscription nominative antérieurement délivré par celle-ci au cédant, et que soit ensuite substitué dans les registres de la société, au vu de ces documents, le nom du cessionnaire à celui du cédant ;

Considérant qu'en l'espèce, les formalités initiales ainsi prévues ont été réalisées lors de l'établissement de « l'ordre de mouvement » ci-dessus mentionné, du 30 mars 1993 qui a été, en effet, signé de S. G. avec la mention « bon pour cession d'une action » ;

Considérant qu'indépendamment de l'inscription ultérieure de la déclaration de transfert ainsi réalisée, sur les registres de la société, ce dont il n'a pas été en l'état justifié, la cession d'actions, objet de cette déclaration, n'était soumise, pour sa validité entre cédant et cessionnaire, qu'au seul consentement de ces parties, sous réserve cependant de l'application des statuts de la société MGTT qui déterminaient, en l'occurrence, les droits respectifs de celles-ci ;

Considérant, qu'ainsi qu'il a été rapporté, ces statuts subordonnent le transfert des actions nominatives de la société MGTT lorsqu'un tel transfert s'opère au profit de personnes physiques ou morales n'ayant pas la qualité d'actionnaire, à un agrément préalable donné par une assemblée générale ordinaire convoquée extraordinairement ou, à défaut, par l'unanimité des actionnaires consultés par écrit ;

Considérant que la clause d'agrément ainsi prévue a pour effet d'affecter le droit de l'actionnaire, de vendre ses titres, d'une condition suspensive qui fait échec à l'existence même de ce droit tant que l'agrément n'a pas été obtenu ;

Considérant qu'en l'espèce les parties s'opposent quant à la réalité d'un tel agrément dont aurait bénéficié G. P., pour le transfert dont il se prévaut d'une action de la société MGTT, puisque ce dernier estime que son agrément résulte d'une manifestation de volonté au moins implicite des autres actionnaires de cette société, tandis que S. G. prétend en revanche, avec la société MGTT, que ce même agrément est inexistant, dès lors, d'une part, que les formalités statutaires impérativement prévues pour le mettre en œuvre n'ont pas été respectées, ce qui est constant, et que, d'autre part, une assemblée générale des actionnaires de la société tenue le 8 janvier 1999 l'a formellement dénié à G. P. ;

Considérant que ces circonstances rendent de la sorte manifestement litigieux l'agrément dont s'agit ;

Qu'ainsi que l'a, à juste titre, estimé le Président du tribunal de première instance, il ne peut donc être statué en référé de ce chef, sauf à préjudicier, au principal, quant aux droits des parties sur le fond ;

Considérant que par voie de conséquence, et dès lors que l'agrément dont s'agit ne peut, dans ces conditions, être tenu en l'état pour acquis, alors qu'il conditionne l'existence du droit de cession bénéficiant à S. G. quant au transfert de l'action revendiquée par G. P., ce dernier ne saurait actuellement prétendre à des droits d'actionnaire dans la société MGTT ;

Que ses demandes tendant à obtenir la reconnaissance de tels droits, et, sur le fondement de ceux-ci, la communication de documents sociaux de la part de la société MGTT, ne pouvaient donc être accueillies en référé ;

Considérant que l'appel de S. G. et de la société MGTT doit être, dès lors, déclaré fondé ;

Qu'il convient, en conséquence, de débouter G. P. de son appel incident tendant, notamment, à l'octroi de dommages-intérêts pour appel abusif ;

Considérant, enfin, que cette partie, qui succombe ainsi en ses demandes devra supporter les dépens de première instance et d'appel ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco infirmant l'ordonnance susvisée du 4 juin 1999,

* Dit n'y avoir lieu à référé ;

* Déboute G. P. des fins de son appel incident ;

Composition

MM. Landwerlin, prem. Prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. proc. gén. ; Mes Pasquier-Ciulla, Licari, av. déf. ; Seigle, av. bar. de Lyon.

Note

Cet arrêt infirme une ordonnance de référé du 4 juin 1999.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26757
Date de la décision : 16/11/1999

Analyses

Pacte d'actionnaires et d'associés


Parties
Demandeurs : M.-G., SAM MGTT
Défendeurs : P.

Références :

article 414 du Code de procédure civile
art. 43 du Code de commerce
ordonnance du 4 janvier 1999


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;1999-11-16;26757 ?

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