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02/03/1999 | MONACO | N°26657

Monaco | Cour d'appel, 2 mars 1999, Compagnie d'assurances l'Union et Le Phenix Espagnol c/ G. et Sté Krap Nus


Abstract

Procédure civile

Exceptions

- Exception dilatoire

- Soulevée par l'appelé en garantie (irrecevable)

Appel civil

Jugement de jonction d'instances

- Mesure d'Administration judiciaire insusceptible d'appel

Résumé

L'exception dilatoire d'appel en garantie formée devant la Cour doit être rejetée car les dispositions des articles 267 et 268 du Code de procédure civile sont édictées dans le seul intérêt du demandeur originaire afin de lui éviter un retard préjudiciable ; l'appelé en garantie ne saurait donc s'en

prévaloir.

La décision de jonction des instances principale et en garantie, mesure d'Administration judiciaire, n'es...

Abstract

Procédure civile

Exceptions

- Exception dilatoire

- Soulevée par l'appelé en garantie (irrecevable)

Appel civil

Jugement de jonction d'instances

- Mesure d'Administration judiciaire insusceptible d'appel

Résumé

L'exception dilatoire d'appel en garantie formée devant la Cour doit être rejetée car les dispositions des articles 267 et 268 du Code de procédure civile sont édictées dans le seul intérêt du demandeur originaire afin de lui éviter un retard préjudiciable ; l'appelé en garantie ne saurait donc s'en prévaloir.

La décision de jonction des instances principale et en garantie, mesure d'Administration judiciaire, n'est sujette à aucun recours.

Motifs

La Cour

La Cour statue sur l'appel formé par la Compagnie d'assurances La Union et le Phenix Espagnol, d'un jugement du Tribunal de première instance en date du 30 mai 1996.

Référence étant faite pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties au jugement déféré et aux écritures échangées en appel, il suffit de rappeler les éléments ci-après énoncés :

Saisi par A. G. :

* en premier lieu, d'une demande tendant à obtenir la condamnation de la Compagnie d'assurances la Union et Le Phenix Espagnol à lui payer, au titre de sa garantie, la somme de 72 900 francs, montant des loyers acquittés à sa bailleresse, la société Krap Nus, depuis le 10 juin 1993, jour où s'est déclaré un incendie dans son appartement, jusqu'à l'expiration du bail le 31 août 1993 ;

* en second lieu, d'une demande tendant à obtenir la condamnation de sa bailleresse à lui rembourser le montant du dépôt de garantie versé lors de la signature du bail et s'élevant à la somme de 72 000 francs ;

* en troisième lieu, d'une demande tendant à être relevé et garanti par la compagnie La Union et le Phenix Espagnol de toutes les condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre au profit de la société Krap Nus, au titre de la perte de loyers et des frais de remise en état de l'appartement qu'elle lui avait donné à bail.

Le Tribunal, après avoir joint les instances susvisées, a :

* condamné la compagnie La Union et le Phenix Espagnol à rembourser à A. G. la somme de 72 900 francs ;

* condamné A. G. à payer à la société Krap Nus les sommes de 42 805,33 francs et 1 500 francs, au titre des travaux de remise en état et de nettoyage de l'appartement ainsi que celle de 40 000 francs pour perte de loyers pendant la durée desdits travaux, soit au total 84 305,33 francs ;

* dit qu'A. G. sera relevé et garanti du paiement de cette somme par la compagnie La Union et le Phenix Espagnol ;

* condamné A. G. à payer à la société Krap Nus la somme de 11 750 francs ;

* condamné la société Krap Nus à rembourser à A. G. la somme de 72 000 francs, montant du dépôt de garantie.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont, pour l'essentiel, relevé :

* que G. était fondé à obtenir de son assureur le remboursement des loyers acquittés sans contrepartie jusqu'à l'expiration du bail, en vertu de l'article 7 du contrat d'assurance qui garantit à l'assuré les frais de déplacement et de relogement au motif que G. avait nécessairement engagé de tels frais même s'il s'était relogé dans un local lui appartenant et avait subi un trouble de jouissance certain ;

* que la réparation des dégâts causés par l'incendie et l'indisponibilité de l'appartement subie par le propriétaire qui n'avait pu relouer son bien pendant les travaux de remise en état qui s'étaient poursuivis après l'expiration du bail devaient être supportés par G. redevable envers sa bailleresse de la somme de 84 305,33 francs, condamnation dont il devait cependant être relevé et garanti par sa compagnie d'assurances ;

* que G. était débiteur, à titre personnel, d'une somme de 11 750,34 francs envers sa bailleresse représentant un reliquat de charges locatives ainsi que le coût de remplacement de clés et cartes magnétiques non restituées ;

* que moyennant ces paiements, la bailleresse devait restituer à G. la caution de 72 000 francs destinée à garantir en fin de bail la remise en bon état des lieux.

Au soutien de son appel tendant à l'infirmation du jugement déféré, la compagnie La Union et Le Phenix Espagnol fait grief aux premiers juges :

* en premier lieu, d'avoir omis de statuer sur son exception d'irrecevabilité de la demande en garantie formée par A. G., dès lors que celui-ci n'avait pas sollicité du Tribunal, l'autorisation de l'appeler en cause, en application des articles 267 et 268 du Code de procédure civile ;

* en second lieu, de l'avoir déclarée tenue de payer à A. G. des frais de déplacement et de relogement du fait de l'incendie en l'absence de toutes justifications des dépenses qu'il aurait exposées à cet effet alors qu'il s'était relogé dans un appartement dont il était propriétaire ;

* en troisième lieu, d'avoir également retenu sa garantie relative aux condamnations mises à la charge de G. concernant tant les frais de remise en état de l'appartement exposés par la société Krap Nus que la perte de loyers subie par celle-ci du fait de l'indisponibilité des lieux pour cause de travaux de réfection, alors que la demande de la bailleresse était fondée autant sur le défaut d'entretien imputable au locataire que sur l'incendie.

Qu'elle fait, en outre, observer que ladite société a été indemnisée par sa propre compagnie d'assurances de ces frais de remise en état et que les factures sur lesquelles s'est fondé le Tribunal pour allouer ces indemnités ne lui ont pas été communiquées en première instance.

A. G. qui fait valoir, sur le moyen d'irrecevabilité soulevé par l'appelante que les textes invoqués sont inapplicables en cas d'instance distincte, sollicite la confirmation du jugement déféré sauf à débouter la société Krap Nus de ses demandes de remboursement s'il était établi qu'elle avait été indemnisée par son propre assureur ; il sollicite, en outre, la condamnation de l'appelante au paiement d'une somme de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts pour appel abusif.

La société Krap Nus n'a pas relevé appel de la partie du jugement l'ayant condamnée à rembourser le dépôt de garantie et a conclu à la confirmation du jugement en sollicitant la condamnation de l'appelante au paiement d'une somme de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts pour appel abusif. Elle estime par ailleurs que G., co-intimé, est irrecevable à conclure contre elle.

SUR CE :

Sur la garantie contractuelle :

1) Considérant que l'article 7 des conditions générales du contrat d'assurances prévoit, en cas d'incendie, la prise en charge par l'assureur des frais de déplacement et de relogement subis par l'assuré ;

Considérant que si cette disposition contractuelle ouvre droit au profit de ce dernier qui ne peut pas occuper les lieux par suite du sinistre à une indemnité de relogement, celle-ci est limitée par l'article 1.13.2 des conditions générales précitées définissant les frais de relogement, à la différence entre le loyer que l'assuré a exposé pour se réinstaller temporairement dans des conditions identiques et le loyer des locaux visés par le contrat d'assurances ;

Considérant qu'A. G. qui s'est réinstallé dans un appartement dont il est propriétaire et qui n'établit pas avoir exposé des frais ainsi définis n'est pas fondé en sa demande en paiement de la totalité du loyer qu'il a acquitté à la société Krap Nus, étant relevé que l'article 1.24 des conditions générales auquel il se réfère dans ses écritures d'appel bien que le tribunal ait déjà écarté cette clause comme inapplicable en l'espèce, vise la perte de loyers subie par le propriétaire pendant le temps nécessaire à la remise en état des lieux et qu'elle est donc étrangère à la demande de G. en remboursement des loyers qu'il a régulièrement acquitté à sa bailleresse ;

2) Considérant que l'appelante prétend avoir soulevé par ses conclusions de première instance du 22 juin 1995, l'irrecevabilité de l'action de G. en déclaration de jugement commun, notamment pour non-respect des dispositions des articles 267 et 268 du Code de procédure civile, faisant grief au tribunal de n'avoir pas répondu à cette exception ;

Considérant cependant qu'il ressort des conclusions précitées que l'entière argumentation de la Compagnie La Union et Le Phenix Espagnol a été exclusivement fondée sur l'analyse de la clause 1.24 des conditions particulières du contrat d'assurance la liant à G. pour s'opposer à la demande en garantie formée par ce dernier à son encontre ; qu'à aucun moment de ses conclusions de première instance, l'appelante n'a invoqué les dispositions des articles 267 et 268 du Code de procédure civile ; que si elle a conclu à l'irrecevabilité de l'appel en garantie et au déboutement subséquent de G., c'est uniquement comme conséquence de l'inapplicabilité qu'elle invoquait de la clause contractuelle précitée ;

Considérant dès lors, que l'appelante est particulièrement mal venue à reprocher aux premiers juges d'avoir omis de répondre à un moyen de procédure qu'elle n'a pas invoqué, la Cour s'étonnant de l'interprétation erronée qu'elle donne au terme d'irrecevabilité qu'elle a employé dans une toute autre acception dans les conclusions précitées ;

Considérant que l'exception dilatoire d'appel en garantie formée devant la Cour doit être rejetée car les dispositions des articles 267 et 268 du Code de procédure civile sont édictées dans le seul intérêt du demandeur originaire afin de lui éviter un retard préjudiciable ; que l'appelé en garantie ne saurait donc s'en prévaloir ;

Considérant, enfin que la décision de jonction des instances principale et en garantie, mesure d'administration judiciaire, n'est sujette à aucun recours ;

Considérant au fond, qu'en vertu de l'article 7 des conditions générales précitées, l'assureur garantit en cas d'incendie à son assuré, la responsabilité locative et la responsabilité pour perte de loyers ;

a) Considérant que la responsabilité locative est définie par le contrat d'assurance (art. 1.23) comme étant la responsabilité encourue par le locataire pour les dommages matériels causés aux bâtiments ainsi qu'à leurs aménagements, immobiliers et mobiliers ;

Considérant que la compagnie d'assurance La Union et Le Phenix Espagnol ne peut être tenue de relever et garantir G. que pour les dommages liés à l'incendie, à l'exclusion de ceux résultant d'un défaut d'entretien lesquels doivent demeurer à la charge personnelle du locataire ;

Considérant qu'il ressort tant des écritures judiciaires de première instance et d'appel de la société Krap Nus que du procès-verbal de constat de sortie qu'elle a fait dresser à l'issue du bail que les travaux de remise en état de l'appartement ont été rendus nécessaires pour la majeure partie par le défaut d'entretien locatif imputable à G. (peintures défraîchies, tâchées, tissu des murs décoloré, tâché, déchiré, murs perforés, moquette décolorée, toilettes entartrées, etc.) et pour une faible partie seulement par l'incendie qui a endommagé la cuisine où il a pris naissance et en outre, l'entrée et le couloir, les traces noires relevées dans les autres pièces concernant un défaut d'entretien évident ;

Considérant que parmi les factures produites en première instance par la société Krap Nus pour un montant de 42 805,33 francs et au paiement desquelles G. a été condamné au profit de sa bailleresse, deux d'entre elles sont étrangères à l'incendie ; qu'ainsi la facture L. du 6 novembre 1993 d'un montant de 3 535,96 francs concerne de menus travaux d'entretien effectués dans les salles de bain de l'appartement (remplacement d'abattants, d'aérateurs, de flexible de douche, etc...) ; que de même la facture P. A. du 19 avril 1994 d'un montant de 1 400,86 francs concerne des réparations locatives (pose ou remplacement d'ampoules, de prise de courant, réglages divers) sans rapport avec l'incendie ;

Considérant que seules sont en relation directe avec l'incendie et relèvent de la garantie de l'assureur, d'une part la facture F. du 7 mars 1994 d'un montant de 76 778 francs (appareils électro-ménagers) réclamée pour un solde de 6 500 francs en raison du remboursement partiel opéré par l'assureur de la copropriété et d'autre part, la facture Moquette Decor du 23 février 1994 mais seulement en ce qu'elle se rapporte au couloir détérioré par l'incendie dont les travaux de réfection se sont élevés à la somme de 10 297,23 francs TTC ;

Considérant enfin que l'assureur doit également sa garantie pour le coût de nettoyage de l'appartement (1 500 francs) ;

Considérant en définitive que la compagnie La Union et Le Phenix Espagnol doit relever et garantir A. G. dans la limite de la somme de 18 297,23 francs ;

Que la décision du tribunal doit donc être réformée de ce chef ;

Considérant enfin que les écritures judiciaires prises par G., non-appelant, à l'encontre de la société Krap Nus pour le cas où celle-ci aurait été remboursée par son assureur doivent être purement et simplement rejetées eu égard à leur inconsistance juridique ;

b) Considérant que l'assureur est encore tenu, aux termes de l'article 1.24 des conditions générales du contrat, de garantir la responsabilité du locataire en raison des pertes de loyers subies par le propriétaire pendant le temps nécessaire à la remise en état des lieux ;

Considérant que la compagnie La Union et le Phenix Espagnol qui a elle-même évalué cette perte de loyers à la somme de 40 000 francs (rapport de son expert en date du 13 juin 1994) est mal venue à contester aujourd'hui cette évaluation ;

Considérant que la décision du tribunal l'ayant condamnée à relever et garantir G. de ce chef doit être confirmée ;

Sur les demandes en paiement de dommages-intérêts :

Considérant qu'en l'état de sa succombance partielle, A. G. doit être débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour appel abusif et dirigée à l'encontre de son assureur ;

Considérant que l'appel formé par ce dernier à l'encontre de la société Krap Nus ne revêt pas un caractère abusif, la présence du bailleur ayant été utile aux débats ; qu'il y a donc lieu de débouter cette société de sa demande en paiement de dommages-intérêts ;

Considérant qu'en l'état de la succombance partielle d'A. G. et de son assureur, il y a lieu de partager les dépens par moitié entre eux ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

Réforme parte in qua le jugement du Tribunal de première nstance en date du 30 mai 1996 ;

Déboute A. G. de sa demande en paiement de loyers ;

Rejette l'exception d'irrecevabilité invoquée par la compagnie d'assurances La Union et Le Phenix Espagnol ;

Condamne cette compagnie d'assurances à relever et garantir A. G. dans la limite de la somme de 18 297,23 francs au titre de la remise en état consécutive à l'incendie ;

Confirme le jugement du 30 mai 1996 pour le surplus ;

Déboute A. G. et la société Krap Nus de leurs demandes reconventionnelles en paiement de dommages-intérêts.

Composition

Mme François, vice prés. f.f. prem. prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. proc. gén. ; Mes Escaut, Pasquier-Ciulla, Pastor, Karczag-Mencarelli et Licari, av. déf. ; Michel, av.

Note

Cet arrêt réforme parte in qua un jugement du Tribunal de première instance du 30 mai 1996.

La Compagnie d'assurances appelante n'avait pas invoqué en première instance les dispositions des articles 267 et 268 du Code de procédure civile mais avait soulevé l'inapplicabilité de la clause contractuelle invoquée par l'assuré.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26657
Date de la décision : 02/03/1999

Analyses

Procédure civile


Parties
Demandeurs : Compagnie d'assurances l'Union et Le Phenix Espagnol
Défendeurs : G. et Sté Krap Nus

Références :

L. du 6 novembre 1993
articles 267 et 268 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;1999-03-02;26657 ?

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