La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/03/1997 | MONACO | N°26485

Monaco | Cour d'appel, 25 mars 1997, Banque Nagelmackers c/ Société Vernal Establishment et tous autres


Abstract

Notaire

Contrat de prêt avec garantie hypothécaire - Acte authentique - Exécution en Principauté : vente forcée de l'immeuble hypothéqué

Saisie immobilière

Signification au domicile élu du commandement et du procès-verbal de saisie - Régularité de ces significations

Résumé

Les actes et contrats auxquels les parties veulent donner le caractère d'authenticité et que le notaire a mission de recevoir, ainsi qu'en dispose l'article 1er de l'ordonnance souveraine du 4 mars 1886, font foi en justice et sont exécutoires dans toute la

Principauté en vertu de l'article 19 de ladite ordonnance.

Il s'en suit que le dépôt du contrat de ...

Abstract

Notaire

Contrat de prêt avec garantie hypothécaire - Acte authentique - Exécution en Principauté : vente forcée de l'immeuble hypothéqué

Saisie immobilière

Signification au domicile élu du commandement et du procès-verbal de saisie - Régularité de ces significations

Résumé

Les actes et contrats auxquels les parties veulent donner le caractère d'authenticité et que le notaire a mission de recevoir, ainsi qu'en dispose l'article 1er de l'ordonnance souveraine du 4 mars 1886, font foi en justice et sont exécutoires dans toute la Principauté en vertu de l'article 19 de ladite ordonnance.

Il s'en suit que le dépôt du contrat de prêt sous seing privé au rang des minutes d'un notaire monégasque, par une société emprunteuse et une banque prêteuse qui l'avaient signé, a eu pour effet de conférer l'authenticité et le caractère exécutoire à toutes les dispositions qui s'y trouvaient contenues, dès lors que l'acte dressé par le notaire constatait la reconnaissance par l'emprunteur de l'ouverture de crédit qui lui avait été octroyée par la banque et son obligation d'en rembourser le montant. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont estimé que la banque était bien fondée à effectuer la saisie immobilière des biens appartenant à sa débitrice, que celle-ci avait hypothéqués à son profit, et à en poursuivre la vente forcée en justice, conformément aux dispositions des articles 2037 du Code civil et 480 du Code de procédure civile.

Si les articles 578 alinéa 1er et 580 du Code de procédure civile disposent respectivement, le premier, que le commandement doit être signifié « à la personne ou au domicile du débiteur », le second, que le procès-verbal de saisie soit signifié « au débiteur », ces textes ne peuvent, en aucune manière, exclure la signification de ces exploits au domicile que les parties contractantes ont élu dans un acte notarié, dès lors que cette élection de domicile conventionnelle prévue, précisément pour l'exécution de ce même acte et de ses suites, permettait à chacune des parties, de faire les significations relatives à l'exécution forcée dudit acte, en l'étude du notaire, mandataire commun de celles-ci.

En effet, l'élection de domicile est admise par la loi, ainsi qu'il en résulte des dispositions des articles 82 du Code civil, et 152 du Code de procédure civile, ces textes dérogeant aux articles 141 et 150 du dernier de ces codes dont ils excluaient l'application, en la cause, dès lors qu'ils ne concernaient pas le domicile réel de la société emprunteuse.

C'est à bon droit que les juges du premier degré ont estimé que le commandement et le procès-verbal de saisie avaient été régulièrement signifiés au domicile élu par les parties.

Motifs

La Cour

La Cour statue sur les appels relevés respectivement les 7 et 8 novembre 1995 par la société de droit liechtensteinois dénommée Vernal Establishment et la société de droit allemand dénommée Mercedes Benz AG d'un jugement du Tribunal de première instance en date du 5 octobre 1995.

Les faits, la procédure, les prétentions et moyens des parties peuvent être relatés comme suit, étant fait référence pour le surplus à la décision déférée et aux écritures échangées en appel :

Selon acte sous seing privé en date à Luxembourg du 30 juillet 1991, la société anonyme de droit luxembourgeois dénommée banque Nagelmackers a consenti à la société Intercontinental Resources Co Ltd et à la société Vernal Establishment, emprunteurs solidaires, une ouverture de crédit d'un montant de six millions de dollars pour une durée de douze mois, renouvelable.

En contrepartie de l'octroi de ce crédit, la société Vernal Establishment s'engageait à consentir à la Banque Nagelmackers une hypothèque en deuxième rang, sur divers biens immobiliers lui appartenant situés en Principauté de Monaco.

Aux termes d'un acte authentique reçu le 28 novembre 1991 par Maître Rey, notaire à Monaco, la société Vernal Establishment et la banque Nagelmackers ont déposé, d'un commun accord, l'original de l'acte d'ouverture de crédit dont s'agit et requis le notaire de le mettre au rang de ses minutes, tandis que, pour sa part, la société Vernal Establishment consentait à la banque Nagelmackers une inscription d'hypothèque conventionnelle sur les parties d'immeubles lui appartenant dans l'ensemble immobilier dénommé Résidences Monte-Carlo sun sis à Monaco, pour garantir ses engagements envers cet établissement financier.

Faisant état de ce qu'elle avait, par lettre du 29 juin 1994, informé la société Vernal Establishment de ce que le crédit qu'elle lui avait consenti venait à échéance le 1er août 1994 et ne serait pas renouvelé, la banque Nagelmackers a, suivant exploit en date du 15 mars 1995, fait délivrer commandement à ladite société d'avoir à lui payer, dans le mois, la somme de 6 733 155,34 dollars US, au titre du capital emprunté et des intérêts échus.

Ce commandement étant demeuré sans effet, la banque Nagelmackers a fait procéder, suivant procès-verbal en date du 12 juin 1995, à la saisie immobilière des biens hypothéqués, lequel a été signifié le 13 juin 1995 à la société Vernal Establishment et transcrit le même jour au bureau des hypothèques de Monaco, volume 11, numéro 25.

La banque Nagelmackers, après avoir fait déposer le cahier des charges le 27 juin 1995 au Greffe général, a, suivant exploits en date du 3 juillet 1995, fait sommation, d'une part à la société Vernal Establishment, en sa qualité de débitrice saisie, d'autre part, aux sociétés de droit français respectivement dénommées Banque La Hénin et Banque nationale de Paris, à la société de droit monégasque dénommée ABC Banque internationale de Monaco à la société de droit allemand dénommée Mercedez Benz AG ainsi qu'à la société de droit russe dénommée Gorky automobile Plant, en leur qualité de créancières inscrites, d'avoir à prendre communication dudit cahier des charges et de comparaître à l'audience de règlement du 8 août 1995.

Selon un premier dire déposé le 3 août 1995, la société Mercedes Benz a sollicité l'annulation du commandement du 15 mars 1995 ainsi que du procès-verbal de saisie du 12 juin 1995 ainsi que de la procédure subséquente aux motifs que ces actes n'ont pas été signifiés au représentant légal de la société Vernal Establishment, ni au siège social de ladite société situé à Vaduz et que, par ailleurs, la banque Nagelmackers ne justifiait pas d'un titre exécutoire, sa créance ne résultant que d'un acte sous seing privé en date à Luxembourg du 30 juillet 1991.

Selon un second dire déposé le même jour, la société Mercedez Benz a, en outre, sollicité le sursis à l'adjudication, en faisant état de ce qu'elle avait intenté une action oblique tendant à l'annulation de l'acte de prêt du 30 juillet 1990, actuellement pendante devant le Tribunal de première instance, et ce, dans l'attente de la décision de celui-ci.

Selon un dire déposé le 3 août 1995, la société Vernal Establishment a demandé l'annulation du commandement du 15 mars 1995 en ce que, d'une part, cet acte ne comporte pas la signification de l'acte sous seing privé du 30 juillet 1991 exigée par l'article 578-1er du Code de procédure civile, et que, d'autre part, ce même acte n'a pas été valablement signifié au représentant légal de la société Vernal Establishment, débitrice saisie, dès lors qu'H. L. n'était plus administrateur de ladite société depuis le 22 février 1992.

Par le jugement attaqué, le Tribunal de première instance a :

* d'une part, débouté les sociétés Mercedes Benz et Vernal Establishment de leur demande respective tendant à l'annulation du commandement et du procès-verbal de saisie ; d'autre part, déclaré la société Mercedes Benz irrecevable en son dire tendant au sursis à l'adjudication.

* constaté que toutes les formalités et délais prescrits par la loi avaient été respectés.

* validé le dire déposé par la banque Nagelmackers tendant à ce que la vente soit effectuée en un seul lot sur la mise à prix globale de 28 700 000 francs.

* fixé au mercredi 22 novembre 1995 à 11 heures la vente aux enchères publiques, en un seul lot, des portions saisies de l'ensemble immobilier dénommé Résidences Monte-Carlo sun sur la mise à prix de 28 700 000 francs outre les clauses, charges et conditions fixées par le cahier des charges.

* ordonné la publicité prévue par les articles 603 et 606 du Code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont, pour l'essentiel, relevé :

* que d'une part, le dépôt de l'acte sous seing privé constatant le prêt consenti par la banque Nagelmackers à la société Vernal Establishment au rang des minutes du notaire ayant été effectué par celles-ci, d'un commun accord, a eu pour effet de conférer à cet acte, l'authenticité et le caractère exécutoire permettant à la banque poursuivante de procéder à la saisie immobilière des biens hypothéqués à son profit par sa débitrice, et d'en poursuivre la vente forcée.

* que, d'autre part, la signification tant du commandement que du procès-verbal de saisie effectuée en l'étude de Maître Rey, notaire, domicile élu par les parties dans l'acte notarié, lesquels constituaient des actes relatifs à l'exécution forcée du contrat de prêt, a été valablement faite dès lors que l'élection de domicile est admise par la loi, ainsi qu'en disposent les articles 82 du Code civil et 152 du Code de procédure civile.

Qu'enfin, la demande de sursis à l'adjudication formulée à l'audience de règlement, tenue en application de l'article 601 du Code de procédure civile, ne pouvait y être admise, dès lors que les dispositions de l'article 609 du même code la prévoyant n'étaient applicables qu'à une telle demande formée lors de l'audience ultérieure d'adjudication.

Au soutien de son appel, la société Vernal Establishment, reprenant les moyens développés devant les premiers juges fait valoir pour l'essentiel :

Tout d'abord, que la banque Nagelmackers ne justifiait pas d'un titre exécutoire, dès lors que le dépôt de l'acte de prêt, sous seing privé, en l'étude du notaire Rey, ne pouvait conférer audit acte le caractère authentique, en sorte qu'il ne pouvait être procédé à la saisie immobilière des biens hypothéqués par la société Vernal Establishment sur le fondement d'un tel acte.

Qu'ensuite, le commandement ne contenant pas la copie de l'acte de prêt, sa signification intervenue en violation de l'article 578-1er du Code de procédure civile, était entachée de nullité.

Qu'enfin, la signification du commandement et du procès-verbal de saisie, à domicile élu, contrevenait aux dispositions des articles 578 alinéa 1er et 580 du Code de procédure civile, d'après lesquels ces actes doivent être signifiés à la personne ou au domicile du débiteur.

En définitive, la société Vernal Establishment demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, et statuant à nouveau, de déclarer nulle la procédure de saisie immobilière à compter de la signification du commandement ainsi que tous les actes subséquents tout en condamnant la banque Nagelmackers au paiement de la somme de 50 000 francs, à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Au soutien de son appel, la société Mercedes Benz, reprenant les moyens développés devant les premiers juges, fait valoir, pour l'essentiel :

* en premier lieu que la banque Nagelmackers ne pouvait se prévaloir d'un titre exécutoire, le dépôt de l'acte sous seing privé de prêt, effectué par le créancier seul entre les mains d'un officier public ne pouvant donner à cet acte un caractère authentique, en sorte que la vente forcée des immeubles de la société Vernal Establishment ne pouvait être valablement poursuivie en vertu de ce titre.

* en second lieu, que le commandement ne contenait pas la copie de cet acte de prêt, contrairement aux exigences de l'article 578-1er du Code de procédure civile, qu'ainsi faute d'accomplissement de cette formalité il devait être déclaré nul.

En troisième lieu, que la signification du commandement et du procès-verbal de saisie ne pouvait être valablement effectuée au domicile élu chez le notaire Rey, dès lors, qu'aux termes de l'article 150 du Code de procédure civile, la signification des exploits concernant des personnes habitant hors la Principauté, ce qui était le cas de la société Vernal Establishment dont le siège est à Vaduz, devait être effectuée au Parquet du Procureur général, étant, par ailleurs, relevé que la signification, en l'étude du notaire Rey, ne pouvait y avoir lieu, faute d'y trouver un représentant légal de la société Vernal Establishment ou son mandataire, ainsi que l'exige l'article 162 du même code.

En quatrième et dernier lieu, qu'en tout état de cause, dès lors qu'elle justifiait avoir introduit devant le Tribunal de première instance, suivant exploit du 26 juillet 1995, une action oblique tendant à obtenir l'annulation de l'acte de prêt consenti par la banque Nagelmackers à la société Vernal Establishment, et par voie de conséquence, l'inscription hypothécaire sur les biens de ladite société, le tribunal devait surseoir à l'adjudication, une telle décision pouvant être prise lors de l'audience de règlement.

En définitive, la société Mercedes Benz demande à la Cour d'infirmer le jugement attaqué, et statuant à nouveau, au principal, de prononcer l'annulation tant du commandement que du procès-verbal de saisie en dates des 15 mars et 12 juin 1995, et à titre subsidiaire, de surseoir à l'adjudication dans l'attente d'une décision de justice définitive sur l'action oblique introduite par ses soins selon exploit du 26 juillet 1995.

La banque Nagelmackers a conclu à la confirmation du jugement querellé, en toutes ses dispositions, tout en sollicitant de la Cour, la condamnation des sociétés Vernal Establishment et Mercedes Benz à lui payer la somme de 80 197 francs montant des frais qu'elle a dû exposer pour parvenir à la vente, outre celle de 50 000 francs correspondant aux frais d'avocat ainsi que la fixation d'une nouvelle date d'audience d'adjudication.

Elle fait observer, en réplique, pour l'essentiel :

* en premier lieu, que contrairement aux allégations des sociétés appelantes, le dépôt de l'acte sous seing privé constatant le prêt qu'elle avait consenti à la société Vernal Establishment avait été effectué, ainsi que cela résulte de l'acte dressé par Maître Rey, notaire, le 28 novembre 1991, d'un commun accord entre elle et ladite société - laquelle était valablement représentée par son administrateur H. L. - que dès lors, le dépôt de cet acte a eu nécessairement pour effet de lui conférer désormais l'authenticité et le caractère exécutoire lui permettant de procéder à la saisie des biens immobiliers ayant fait l'objet d'une affectation hypothécaire à son profit, aux termes du même acte notarié.

* en second lieu, que les appelantes ne sauraient davantage prétendre que le commandement ne contenait pas la copie de l'acte de prêt, dès lors que l'huissier déclare dans son exploit de commandement du 15 mars 1995 agir à la requête de la banque Nagelmackers, et « en vertu d'un acte de Maître Rey, notaire à Monaco, en date du 28 novembre 1991, par lequel il a été déposé au rang des minutes dudit officier ministériel, l'original d'un acte sous signature privée en date à Luxembourg du 30 juillet 1991 par lequel la requérante a consenti à une société » intercontinental Resources CO Ltd « et à la société Vernal Establishment, codébitrices solidaires, un crédit de six millions de dollars des États Unis d'Amérique, dont copie intégrale est donnée en tête des présentes », étant ici relevé que ces mentions valent jusqu'à inscription de faux.

* en troisième lieu, que les appelantes ne sauraient utilement exciper de la nullité de la signification du commandement et du procès-verbal de saisie au prétexte que celle-ci aurait été effectuée en l'étude du notaire Rey, domicile élu par la seule banque Nagelmackers à son profit, et alors que s'agissant de sociétés ayant leur siège social en dehors de la Principauté, ces actes auraient dû nécessairement leur être signifiés au Parquet du Procureur général, conformément à l'article 150 du Code de procédure civile.

Qu'en effet, l'acte notarié du 28 novembre 1991 intervenu entre la banque Nagelmackers et la société Vernal Establishment comporte une clause par lesquelles ces parties ont convenu de faire élection de domicile à Monaco, en l'étude de Maître Rey, notaire ayant établi l'acte dont s'agit, pour toutes difficultés pouvant naître de ce même acte, en sorte que, par l'effet de cette élection de domicile conventionnelle, le commandement et le procès-verbal de saisie pouvaient être valablement signifiés en l'étude de ce notaire, sans pour autant avoir contrevenu aux dispositions des articles 578 et 580 du Code de procédure civile lesquels n'excluent nullement une telle possibilité, l'élection de domicile formellement prévue par l'article 152 du Code de procédure civile, étant d'application générale en matière d'exploits, étant en outre précisé que l'huissier instrumentais a remis copie de ces actes à un préposé du notaire, mandataire commun des parties, conformément au texte susvisé.

La banque La Hénin, la société Gorky Gaz Automobile Plant ont déclaré s'en rapporter à justice sur le mérite des appels effectués par les sociétés Vernal Establishment et Mercedes Benz.

La Banque nationale de Paris et la Banque ABC internationale de Monaco n'ayant pas comparu, la Cour, suivant arrêt du 15 décembre 1995, a ordonné leur réassignation laquelle a été effectuée suivant exploit en date du 5 janvier 1996, ensuite duquel lesdites sociétés ont persisté à faire défaut.

Sur ce,

* Quant à la jonction des instances :

Considérant que les appels respectivement diligentés par la société Vernal Establishment et la société Mercedes Benz, suivant exploits en dates des 7 et 8 novembre 1995 étant dirigés contre le même jugement et ayant le même objet, il convient, en l'état de l'indivisibilité de ces appels, et dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'en ordonner la jonction pour être statué sur leur ensemble par un seul et même arrêt ;

* Quant aux moyens tirés de la nullité du commandement et du procès-verbal de saisie :

Considérant, sur le premier moyen, tiré du défaut de titre exécutoire, que l'acte sous seing privé, en date à Luxembourg du 30 juillet 1991, par lequel la banque Nagelmackers, créancière poursuivante, a consenti à la société Vernal Establishment, co-emprunteur solidaire, une ouverture de crédit de six millions de dollars US, venue à échéance le 1er août 1994, a été déposée d'un commun accord entre ces parties au rang des minutes du notaire Rey ainsi que cela résulte de l'acte authentique dressé par cet officier public le 28 novembre 1991 ;

Que ce acte révèle, en effet, que les représentants légaux de la banque Nagelmackers et de la société Vernal Establishment, dûment mandatés à cet effet, ont déposé entre les mains du notaire l'acte sous seing privé susvisé et en le requérant de le mettre au rang de ses minutes, étant, par ailleurs, précisé qu'à la sûreté et à la garantie des engagements pris, notamment la société Vernal Establishment envers la banque Nagelmackers, ladite société déclarait affecter et hypothéquer au profit de cet établissement divers biens immobiliers lui appartenant situés à Monaco ;

Considérant, à cet égard, que le notaire ayant pour mission de recevoir les actes et contrats auxquels les parties veulent donner le caractère d'authenticité, ainsi qu'en dispose l'article 1er de l'ordonnance souveraine du 4 mars 1886, lesquels actes et contrats font foi en justice et sont exécutoires dans toute la Principauté ainsi que l'édicte l'article 19 de ladite ordonnance ;

Qu'il s'ensuit que le dépôt du contrat de prêt sous seing privé en date du 30 juillet 1991, au rang des minutes de Maître Rey, notaire à Monaco, par la société Vernal et la banque Nagelmackers qui l'avaient signé, a eu pour effet de conférer l'authenticité et le caractère exécutoire à toutes les dispositions qui s'y trouvaient contenues, dès lors que l'acte dressé par ce notaire constatait la reconnaissance par la société Vernal Establishment de l'ouverture de crédit qui lui avait été octroyée et de son obligation d'en rembourser le montant ;

Considérant que c'est donc, à juste titre que les premiers juges ont estimé que la banque Nagelmackers était fondée à effectuer la saisie immobilière des biens appartenant à sa débitrice, la société Vernal Establishment que celle-ci avait hypothéqués à son profit et à en poursuivre la vente forcée en justice, conformément aux dispositions des articles 2037 du Code civil et 480 du Code de procédure civile ;

Considérant, sur le second moyen tiré de ce que le commandement ne contenait pas le titre exécutoire, qu'il suffit de se reporter à l'exploit de commandement du 15 mars 1995 pour y constater que l'huissier rédacteur de cet exploit, après avoir visé expressément l'acte dressé par Maître Jean-Charles Rey, notaire à Monaco, en date du 28 novembre 1991, en a signifié la copie intégrale, comprenant l'original de l'acte sous seing privé du 30 juillet 1991, en même temps que le commandement à la société Vernal Establishment, étant ici relevé que cette mention vaut jusqu'à inscription de faux ;

Considérant, sur le troisième moyen tiré de l'irrégularité de la signification du commandement et du procès-verbal de saisie effectuée à l'étude du notaire Rey, que si, les articles 578 alinéa 1er et 580 du Code de procédure civile disposent respectivement, le premier, que le commandement doit être signifié « à la personne ou au domicile du débiteur », le second, que le procès-verbal de saisie doit être signifié « au débiteur », ces textes ne peuvent, en aucune manière, exclure la signification de ces exploits au domicile que les parties contractantes ont élu dans l'acte notarié du 28 novembre 1991, dès lors que cette élection de domicile conventionnelle, prévue précisément pour l'exécution de ce même acte et de ses suites, permettait à chacune des parties, de faire les significations relatives à l'exécution forcée dudit acte, en l'étude du notaire Rey, mandataire commun de celles-ci ;

Qu'en effet, l'élection de domicile est admise par la loi, ainsi que cela résulte des dispositions des articles 82 du Code civil et 152 du Code de procédure civile, ces textes dérogeant aux articles 141 et 150 du dernier de ces codes dont ils excluaient l'application, en la cause, dès lors qu'ils ne concernaient pas le domicile réel de la société Vernal Establishment ;

Considérant que c'est à bon droit, que les juges du premier degré ont estimé que le commandement et le procès-verbal de saisie avaient été régulièrement signifiés au domicile élu par les parties ;

Considérant, quant au dernier moyen tiré du sursis à l'adjudication, qu'ainsi l'ont relevé, à bon droit, les premiers juges, il ne leur appartenait pas, à l'audience de règlement prévue par l'article 601 du Code de procédure civile, de statuer sur la demande de report de l'adjudication sollicitée par la société Mercedes Benz ;

Qu'en effet, cette demande a été formulée de manière prématurée à ce stade de la procédure de saisie immobilière, dès lors que l'action oblique dont a fait état ladite société n'entrait pas dans le champ d'application de l'article 602 du Code de procédure civile, en sorte que le sursis à l'adjudication ne pouvait être sollicité, conformément aux dispositions de l'article 609 du même code, que lors de l'audience d'adjudication ;

Considérant, dès lors, qu'il y a lieu de confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement querellé, à l'exception de la date de l'audience d'adjudication qu'il échet de reporter au mercredi 14 mai 1997 à 11 heures ;

Considérant que les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de vente ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Et ceux non contraires des premiers juges,

Prononce la jonction des instances portant les numéros 59 et 60 de 1996.

Déboute la société de droit liechtensteinois dénommée Vernal Establishment et la société de droit allemand dénommée Mercedes Benz AG des fins de leur appel.

Confirme le jugement du Tribunal de première instance du 5 octobre 1995, en toutes ses dispositions, à l'exception de la date d'audience d'adjudication.

Fixe l'audience d'adjudication au mercredi 14 mai 1997 à 11 heures.

Composition

MM. Sacotte Prem. Prés. ; Serdet Prem. Subst. Proc. Gén. ; Montecucco Greffier en chef ; Mes Sbarrato, Brugnetti, Escaut, Pasquier-Ciulla, Léandri av. déf. ; Fridmanis av. bar. de Paris

Note

Cet arrêt confirme le jugement du 22 février 1996.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26485
Date de la décision : 25/03/1997

Analyses

Vente d'immeuble ; Contrat de prêt


Parties
Demandeurs : Banque Nagelmackers
Défendeurs : Société Vernal Establishment et tous autres

Références :

article 601 du Code de procédure civile
articles 578 et 580 du Code de procédure civile
article 578-1er du Code de procédure civile
article 150 du Code de procédure civile
articles 603 et 606 du Code de procédure civile
Code de procédure civile
article 152 du Code de procédure civile
articles 2037 du Code civil
article 602 du Code de procédure civile
articles 82 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;1997-03-25;26485 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award