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11/02/1997 | MONACO | N°26475

Monaco | Cour d'appel, 11 février 1997, État de Monaco c/ F.


Abstract

Référé

Mesure d'expertise - Urgence - Appréciation souveraine des juges du fond - Absence de préjudice au principal - Mesure d'information

Résumé

En premier lieu, le fait que les nuisances alléguées par un commerçant remonteraient à plusieurs années, n'est pas exclusif de l'urgence, dès lors qu'il résulte des éléments de la cause, qu'elles persistent encore actuellement et que ledit commerçant avait intérêt à les faire constater, par une mesure d'instruction ordonnée par le juge des référés, sauf à en tirer ultérieurement devant le

juge du fond, telle conséquence qu'il appartiendrait.

En second lieu, l'expertise ordonnée, n'a...

Abstract

Référé

Mesure d'expertise - Urgence - Appréciation souveraine des juges du fond - Absence de préjudice au principal - Mesure d'information

Résumé

En premier lieu, le fait que les nuisances alléguées par un commerçant remonteraient à plusieurs années, n'est pas exclusif de l'urgence, dès lors qu'il résulte des éléments de la cause, qu'elles persistent encore actuellement et que ledit commerçant avait intérêt à les faire constater, par une mesure d'instruction ordonnée par le juge des référés, sauf à en tirer ultérieurement devant le juge du fond, telle conséquence qu'il appartiendrait.

En second lieu, l'expertise ordonnée, n'ayant nullement pour but de rechercher les responsabilités encourues par le maître de l'ouvrage, mais de déterminer l'origine et la nature des travaux incriminés et de décrire les troubles qui en étaient résultés pour le demandeur, tout en précisant leur éventuelle relation de causalité avec les préjudices invoqués, c'est à bon droit que le juge des référés a relevé qu'en ordonnant cette mesure, qui constituait un simple moyen d'information, réservant les droits des parties, dont les juges du fond auraient éventuellement à apprécier les résultats, il ne pouvait préjudicier au principal du fait du caractère provisoire de cette disposition.

Motifs

La Cour

La Cour statue sur l'appel interjeté le 17 janvier 1996 par l'État de Monaco d'une ordonnance de référé en date du 3 janvier 1996 rendue dans un différend l'opposant à B. F.

Les faits, la procédure, les prétentions et moyens des parties peuvent être relatés comme suit, référence étant faite pour le surplus à l'ordonnance déférée et aux conclusions échangées en appel :

B. F., propriétaire exploitant le fonds de commerce de restaurant, à l'enseigne « L. T. A. », qui impute la baisse importante de son activité commerciale et les pertes financières en résultant aux travaux exécutés à compter du mois d'avril 1991 sur le chantier du Lycée Saint-Charles situé à proximité de son établissement, a, suivant exploit du 23 novembre 1995, fait assigner l'État de Monaco, maître de l'ouvrage, devant le Président du Tribunal statuant en matière de référé, aux fins d'obtenir la désignation d'un expert ayant pour mission de déterminer l'existence, les causes et les conséquences dommageables des nuisances créées par ce chantier concernant l'exploitation de son fonds de commerce.

Par l'ordonnance attaquée, ce magistrat a fait droit à la demande de B. F., après avoir relevé que, par son caractère urgent et conservatoire, l'expertise sollicitée entrait dans le champ de sa compétence, telle que prévue par l'article 414 du Code de procédure civile.

Au soutien de son appel, l'État de Monaco fait valoir, pour l'essentiel :

* en premier lieu, que la décision querellée préjudicierait au principal, dès lors que l'admission de la demande de B. F. impliquait nécessairement la reconnaissance de la responsabilité de l'État de Monaco, ce qu'il conteste.

* en second lieu, que la mesure d'expertise sollicitée ne peut être justifiée par l'urgence, dès lors que les nuisances dont fait état B. F. avaient commencé en 1992 et qu'il n'a agi en référé qu'à la fin de l'année 1995.

En définitive, l'État de Monaco demande à la Cour d'infirmer l'ordonnance de référé entreprise et de renvoyer B. F. à saisir le juge du fond.

B. F. a conclu à la confirmation de l'ordonnance querellée, tout en sollicitant, par voie reconventionnelle, la condamnation de l'État de Monaco au paiement de la somme de 20 000 francs, à titre de dommages-intérêts, pour appel abusif.

Il expose, à cet effet, pour l'essentiel, tout d'abord que la mesure d'expertise qu'il a demandée ne préjudicie en aucune manière le fond, du seul fait qu'elle ne tend pas à faire trancher la responsabilité de l'État mais seulement à faire constater les troubles qu'il a subis dans l'exercice de son commerce du fait des travaux entrepris sur un chantier voisin ainsi que le préjudice qui en est résulté.

Sur ce,

Considérant qu'aux termes de l'article 414 du Code de procédure civile, « en cas d'urgence et en toute matière, le Président du Tribunal de Première Instance peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne préjudicient pas au principal » ;

Qu'à cet égard, l'État de Monaco excipant du défaut d'urgence et de l'existence d'un préjudice au principal qui interdisaient au juge des référés d'ordonner l'expertise sollicitée par le demandeur, il convient de vérifier le bien-fondé de la saisine du premier juge ;

Considérant, en premier lieu, que le fait que les nuisances alléguées par B. F. remonteraient à plusieurs années, n'est pas exclusif de l'urgence, dès lors qu'il résulte des éléments de la cause, qu'elles persistent encore actuellement et que ce dernier avait intérêt à les faire constater, sauf à en tirer ultérieurement devant le juge du fond, telle conséquence qu'il appartiendrait ;

Que de la sorte, c'est à juste titre que le premier juge a constaté l'urgence de la mesure qui lui était demandée ;

Considérant, en second lieu, que l'expertise ordonnée par le premier juge n'avait nullement pour but de rechercher les responsabilités encourues par l'État de Monaco, en sa qualité de maître de l'ouvrage, mais consistait, ainsi que cela résulte de la mission confiée à l'expert, à déterminer l'origine et la nature des travaux incriminés ainsi qu'à décrire les troubles qui en étaient résultés pour le demandeur tout en précisant leur éventuelle relation de causalité avec les préjudices invoqués par ce dernier ;

Que s'agissant, en l'espèce, d'une mesure d'instruction - constituant un simple moyen d'information - qui réservait les droits des parties en conflit et dont les juges appelés éventuellement à connaître du fond du litige auraient à apprécier les résultats, c'est à bon droit que le premier juge a relevé, qu'en ordonnant l'expertise sollicitée, il ne pouvait préjudicier au principal du fait du caractère provisoire de cette disposition ;

Considérant qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer l'ordonnance de référé entreprise, en toutes ses dispositions ;

Considérant, par ailleurs, que l'État de Monaco n'ayant pu se méprendre sur la portée de ses droits, son appel a revêtu, par là même, un caractère abusif, et a causé à B. F., en le contraignant à ester en justice devant les juges du second degré, un préjudice certain dont l'indemnisation doit être fixée à la somme de 10 000 francs, eu égard aux éléments d'appréciation dont la Cour dispose, dès lors qu'il appartient à toute juridiction de statuer sur le comportement abusif de l'une des parties dans le développement procédural dont elle a eu à connaître ;

Considérant qu'enfin les dépens d'appel devront être supportés par l'État de Monaco qui a succombé dans ses prétentions ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

* Déboute l'État de Monaco des fins de son appel.

* Confirme l'ordonnance de référé en date du 3 janvier 1996, en toutes ses dispositions.

* Condamne l'État de Monaco à payer à B. F. la somme de dix mille francs, à titre de dommages-intérêts.

* Condamne l'État de Monaco aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'assistance judiciaire.

Composition

MM. Sacotte Prem. Prés. ; Serdet Prem. Subst. Proc. Gén. ; Bardy, Gref. en chef-adj. ; Mes Blot av. déf. ; Licari av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26475
Date de la décision : 11/02/1997

Analyses

Procédure civile ; Droit des obligations - Responsabilité civile délictuelle et quasi-délictuelle


Parties
Demandeurs : État de Monaco
Défendeurs : F.

Références :

article 414 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;1997-02-11;26475 ?

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