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29/04/1996 | MONACO | N°26496

Monaco | Cour d'appel, 29 avril 1996, Banque régionale d'escompte et de dépôts, Société de banque et d'expansion c/ T., en présence du Ministère public


Abstract

Appel pénal

Partie civile : seule à interjeter appel, à l'exclusion du Ministère public - Effet dévolutif de son appel à l'égard d'un jugement de relaxé - Autorité de la chose jugée (relaxe) quant à l'action publique - Appréciation des faits et du préjudice par les juges d'appel quant à la responsabilité civile du relaxé

Corruption passive

Éléments du délit - Existence d'un pacte entre corrupteur et corrompu

Résumé

Le Ministère public n'ayant pas relevé appel d'une décision de relaxe rendue par le Tribunal correctionnel

, le seul appel de la partie civile ne saurait remettre en cause la chose jugée sur l'action publique.

Cep...

Abstract

Appel pénal

Partie civile : seule à interjeter appel, à l'exclusion du Ministère public - Effet dévolutif de son appel à l'égard d'un jugement de relaxé - Autorité de la chose jugée (relaxe) quant à l'action publique - Appréciation des faits et du préjudice par les juges d'appel quant à la responsabilité civile du relaxé

Corruption passive

Éléments du délit - Existence d'un pacte entre corrupteur et corrompu

Résumé

Le Ministère public n'ayant pas relevé appel d'une décision de relaxe rendue par le Tribunal correctionnel, le seul appel de la partie civile ne saurait remettre en cause la chose jugée sur l'action publique.

Cependant la partie civile est recevable à contester la décision rendue sur l'action publique, lorsqu'elle conditionne le fondement de son action civile ; dans ce cas les juges d'appel sont tenus d'apprécier les faits, de les qualifier et de condamner, s'il y a lieu, le prévenu relaxé à des dommages-intérêts envers la partie civile.

Le délit de corruption passive prévu par l'article 115 du Code pénal suppose l'existence d'un pacte entre corrupteur et corrompu ; en l'absence de la preuve de celui-ci le délit n'est point établi, alors qu'il n'est point démontré que le prétendu corrupteur ait voulu rechercher un avantage particulier.

Motifs

La Cour

La Cour statue sur l'appel relevé le 23 novembre 1995 par la Banque régionale d'escompte et de dépôts et par sa filiale la Société de banque et d'expansion, parties civiles d'un jugement du tribunal correctionnel en date du 14 novembre 1995 qui a relaxé P. T., prévenu de corruption et a débouté les parties civiles de leurs demandes.

Considérant que les faits, objet de la poursuite peuvent être relatés comme suit :

Par lettre du 12 juillet 1993 adressée au procureur général, les représentants des deux banques précitées ont déposé plainte à l'encontre de leur ancien employé P. T., cadre d'exploitation commerciale à la succursale à Monaco de la Société de banque et d'expansion.

Ils exposaient que le directeur de l'agence de Monaco, D. H., avait reçu au mois de janvier 1992 une réclamation de la part d'un client E. H., bénéficiaire d'un prêt pour l'achat d'un manège forain, qui protestait contre une demande de la banque en paiement d'une somme de 2 400 francs pour frais de dossier alors qu'il avait déjà versé pour ce même motif au mois de juin 1991, 8 000 francs en espèces à P. P. négociant en matériel forain qui s'était proposé de s'occuper du dossier du prêt.

Dans le cadre de l'information qui était ouverte, P. P. reconnaissait avoir reçu d'E. H. une enveloppe qu'il avait remise quelques jours plus tard à P. T., à la demande de H., pour frais de dossier.

P. T. confirmait avoir reçu de P. pour le compte de H. une enveloppe contenant 8 000 francs en espèces mais déclarait l'avoir déposée sur le compte de H. à la Société de banque et d'expansion.

Il situait cette remise au cours de l'année 1992 et précisait qu'à cette occasion P. P. l'avait mis en possession de plusieurs autres enveloppes correspondant à des remboursements de prêts de la part de divers emprunteurs.

Le bordereau de dépôt à la banque de la somme de 8 000 francs sur le compte de H. est daté du 27 novembre 1991. Il porte la signature de P. que T. reconnaît avoir imitée en expliquant qu'il avait l'habitude pour les versements en espèces de signer du nom du client concerné.

E. H. n'a pu être entendu.

Considérant que P. T. confirme à l'audience ses déclarations antérieures.

Considérant que les parties civiles, appelantes, demandent à la Cour de qualifier pénalement les faits dont elle est saisie, la culpabilité de P. T. étant selon elles, établie par ces faits et justifiant la demande en paiement de dommages-intérêts formée par la Société de banque et d'expansion, employeur de P. T., en réparation du préjudice consécutif à l'infraction ;

Considérant que le Ministère public demande acte à la Cour de ce qu'il n'a pas relevé appel de la décision ;

Considérant que P. T. fait plaider que l'appel des parties civiles est irrecevable en l'absence d'un appel du Ministère public ; qu'il estime en outre cet appel infondé ;

Qu'il sollicite la condamnation des appelantes au paiement d'une somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et de 50 000 francs par application de l'article 700 du Code de procédure civile français ;

Sur ce,

Considérant que si l'appel de la partie civile ne remet pas en cause la chose jugée sur l'action publique, cette partie civile est toutefois recevable à contester la décision rendue sur l'action publique lorsqu'elle conditionne le fondement de son action civile ;

Considérant que dans ce cas les juges d'appel sont tenus d'apprécier les faits, de les qualifier et de condamner, s'il y a lieu, le prévenu relaxé à des dommages-intérêts envers la partie civile ;

Considérant sur le délit de corruption passive reproché à P. T. par la prévention qu'un tel délit suppose l'existence d'un pacte entre corrupteur et corrompu ;

Considérant qu'il est constant qu'E. H. a fait remettre à P. T. - par l'intermédiaire de P. P. - une somme de 8 000 francs à titre de frais de dossier, selon les dires de H., et que ce dernier n'a jamais entendu en obtenir un avantage particulier ;

Que bien au contraire il est à l'origine de la révélation des faits à la suite de sa protestation auprès de la banque ;

Considérant qu'en l'absence de la preuve de l'existence d'un pacte entre H. et T., le délit de corruption n'est pas établi ;

Considérant sur l'escroquerie et l'abus de confiance allégués par les parties civiles dans leur plainte, qu'il ressort des faits ci-dessus relatés que la banque n'a jamais eu vocation à recevoir la somme de 8 000 francs et qu'il n'y a donc pas eu détournement de cette somme à son préjudice ;

Considérant dès lors que les parties civiles n'ont pas qualité pour agir et qu'elles doivent être déboutées de leur appel ;

Considérant que P. T. qui n'établit pas la preuve d'un préjudice doit être débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts ;

Considérant qu'il doit être également débouté de sa demande en paiement fondée sur une disposition législative française ;

Considérant qu'il y a lieu de condamner les appelantes aux frais ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

Statuant en matière correctionnelle,

Déboute la Société de banque régionale d'escompte et de dépôts et la Société de banque et d'expansion, de leur appel.

Déboute P. T. de ses demandes en paiement de dommages-intérêts.

Condamne les appelantes aux frais.

Composition

MM. Sacotte, prem. prés. ; Serdet prem. subst. proc. gén. Mes Pasquier-Ciulla, av. ; French, av. bar. de Paris ; Dumas-Lairolle, av. bar. de Grasse.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26496
Date de la décision : 29/04/1996

Analyses

Pénal - Général ; Infractions contre les personnes


Parties
Demandeurs : Banque régionale d'escompte et de dépôts, Société de banque et d'expansion
Défendeurs : T., en présence du Ministère public

Références :

article 115 du Code pénal


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;1996-04-29;26496 ?

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