La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/05/1994 | MONACO | N°26289

Monaco | Cour d'appel, 31 mai 1994, Sté Entreprise Alberti c/ L'Union des Assurances de Paris, Sté MI Prestations de services, Cie d'Assurances « Via », P.


Abstract

Procédure civile

Défaut de constitution d'un avocat défenseur - Comparution de la partie seule lors de l'appel des causes en connaissance de la citation - Décision réputée contradictoire à l'égard de toutes les parties

Résumé

Dès lors qu'un intimé s'est présenté en personne au premier appel de la cause, mais n'a pas cru devoir constituer avocat-défenseur pour la suite de la procédure devant la cour, il est établi qu'il a eu connaissance de la citation et que, dès lors, la décision à intervenir doit être rendue par un arrêt réputé con

tradictoire à l'égard de toutes les parties en cause.

Motifs

La Cour,

La cour statue sur l'a...

Abstract

Procédure civile

Défaut de constitution d'un avocat défenseur - Comparution de la partie seule lors de l'appel des causes en connaissance de la citation - Décision réputée contradictoire à l'égard de toutes les parties

Résumé

Dès lors qu'un intimé s'est présenté en personne au premier appel de la cause, mais n'a pas cru devoir constituer avocat-défenseur pour la suite de la procédure devant la cour, il est établi qu'il a eu connaissance de la citation et que, dès lors, la décision à intervenir doit être rendue par un arrêt réputé contradictoire à l'égard de toutes les parties en cause.

Motifs

La Cour,

La cour statue sur l'appel relevé par la SAM dénommée Entreprise Alberti d'un jugement du tribunal de première instance en date du 8 juillet 1993.

Les faits, la procédure, les moyens et les prétentions des parties peuvent être exposés comme suit, étant fait référence pour le surplus à la décision déférée et aux écritures échangées en appel.

Le 12 juin 1986, O. B., veuve B. qui circulait sur le trottoir du Boulevard des Moulins à hauteur de l'entrée du chantier de l'immeuble Monte-Carlo Palace a été victime d'un accident mortel occasionné par un tracteur semi-remorque appartenant à F. S. et conduit par son employé M. C. qui, guidé dans sa manœuvre par T. P., un employé de J.-C. M., prestataire de services sous l'enseigne « MI » qui l'avait mis à la disposition de la SAM Entreprise Alberti chargée du terrassement, entrait sur le chantier en empruntant le trottoir.

Saisi par la compagnie UAP, assureur de S., subrogée dans les droits de ce dernier d'une action en responsabilité dirigée à l'encontre de T. P. sur le fondement de l'article 1229 du Code civil et en paiement de dommages-intérêts à l'encontre de T. P., de l'entreprise « MI » et de la SAM Entreprise Alberti, le tribunal a reçu en leur intervention volontaire respective la compagnie d'assurances Via et J.-C. M., a mis ce dernier hors de cause, a déclaré T. P. entièrement responsable de l'accident, l'a condamné solidairement avec la SAM Entreprise Alberti à payer à la compagnie UAP la somme de 96 030,83 F avec intérêt au taux légal à compter du 17 mars 1989, a débouté la compagnie UAP de ses demandes dirigées à l'encontre de la SAM d'interventions en abrégé « MI » et de la compagnie Via.

Il estimait pour en décider ainsi que la compagnie UAP, subrogée de plein droit dans les droits et actions de son assuré F. S., responsable de l'accident en qualité de gardien du véhicule instrument du dommage était recevable sur le fondement de l'article 1106, 3° du Code civil à exercer son action récursoire contre les co-responsables de son assuré et que T. P. dont la faute était la cause originaire de l'accident, devait en supporter seul l'entière responsabilité et devait être condamné solidairement avec la SAM Entreprise Alberti sous l'autorité momentanée de laquelle il se trouvait ;

l'appui de son appel, la SAM Entreprise Alberti fait valoir que :

- deux actions en garantie qu'elle a engagées à l'encontre de son assureur sont pendantes devant le tribunal de première instance,

- la compagnie UAP a reconnu la faute de son assurée,

- cette compagnie n'a pas payé la dette d'autrui mais la sienne, née du contrat d'assurance,

- à supposer la subrogation possible, la compagnie subrogée dans les droits de son assuré responsable ne pouvait réclamer au co-responsable qu'une quote part de l'indemnité,

- la compagnie serait irrecevable à fonder son action récursoire sur l'article 1231 du Code civil édictée au profit des seules victimes,

- le co-obligé fautif serait sans recours contre le responsable tenu sur la base d'une responsabilité sans faute,

- la faute personnelle de la SAM Entreprise Alberti ne serait pas établie non plus que le lien de causalité entre cette faute prétendue et l'accident,

- le tribunal n'a pu sans se contredire reconnaître la responsabilité du gardien du véhicule concurremment avec la faute de T. P. pour ne retenir en définitive que celle de ce dernier alors que les circonstances de la cause ne l'établissent pas,

- le tribunal se serait encore contredit en désignant comme commettant de P. à la fois l'appelante et la société MI,

- la compagnie UAP s'est privée de tout recours en omettant d'informer les autres parties du paiement effectué ;

L'appelante sollicite en conséquence qu'il soit sursis à statuer jusqu'à l'issue des actions en garantie engagées devant le tribunal et à titre nécessairement subsidiaire la réformation du jugement entrepris et le déboutement de la compagnie UAP ;

En réponse, la compagnie UAP s'oppose à la demande de sursis à statuer, nouvelle en appel et qui de surcroît retarderait selon elle la solution du litige ;

Au fond, elle sollicite la confirmation du jugement entrepris et fait plaider que :

- son assuré F. S. n'a pas commis de faute et qu'il n'a été reconnu responsable qu'en sa qualité de gardien du véhicule sur le fondement de l'article 1231 alinéa 1er du Code civil,

- en revanche T. P., préposé momentané de la SAM Entreprise Alberti dont la faute est à l'origine directe de l'accident a été déclaré par le tribunal seul responsable de l'accident sur le fondement de l'article 1229 du Code civil,

- même en l'absence d'une faute de son préposé, la SAM Entreprise Alberti serait encore responsable à titre personnel sur le fondement de l'article 1229 du Code civil de la faute qu'elle a commise en confiant à une seule personne plusieurs tâches complexes qu'il ne pouvait assurer seul,

- le tribunal a appliqué justement le principe selon lequel un assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui ont par leur fait causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur ;

Formant un appel incident, la compagnie UAP sollicite la condamnation de la SAM Entreprise Alberti au paiement d'une somme de 5 000 F à titre de dommages-intérêts pour appel abusif ;

La société MI Prestations de services et sa compagnie d'assurances Via concluent à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté la compagnie UAP de ses demandes dirigées envers elles ;

Formant un appel incident, ces deux sociétés sollicitent ensemble la condamnation de la SAM Entreprise Alberti au paiement d'une somme de 50 000 F à titre de dommages-intérêts pour appel abusif et à celle de 11 860 F au titre des frais irrépétibles ;

Enfin par conclusions du 8 mars 1994, la SAM Entreprise Alberti a déclaré renoncer à toute demande de condamnation à l'encontre de T. P. ;

Sur ce,

Sur le sursis à statuer,

Considérant que les actions en intervention formées par la SAM Entreprise Alberti par exploits des 18 décembre 1992 et 8 octobre 1993 à l'encontre de son assureur sont pendantes devant le tribunal de première instance et ne sont pas en état d'être jugées ainsi qu'elle ne le conteste pas ;

Considérant dès lors qu'il n'est pas sérieux de solliciter de la cour un sursis à statuer car ces instances en garantie sont de nature à faire subir un trop long retard au jugement de la cause principale dont la cour est présentement saisie ;

Considérant qu'il y a lieu de rejeter cette demande par application des dispositions de l'article 388 du Code de procédure civile ;

Au fond,

Considérant en premier lieu que l'appelante ne conteste plus en cause d'appel sa qualité de commettant de T. P. même si elle relève, sans en tirer de parti juridique à l'encontre des sociétés intéressées, une apparente contradiction dans la motivation du jugement s'y rapportant laquelle est à l'évidence le résultat d'une erreur matérielle, le tribunal ayant déclaré par ailleurs sans ambiguïté que T. P. se trouvait au moment des faits placé sous l'autorité de la SAM Entreprise Alberti qui disposait du pouvoir de lui donner des ordres et des instructions pour l'accomplissement de son travail et a débouté la compagnie UAP de ses demandes dirigées à l'encontre de la société MI Prestations de services et son assureur la compagnie Via ;

Considérant en second lieu que l'appelante a déclaré par conclusions ne formuler aucune demande à l'encontre de T. P. ;

Considérant que celui-ci s'est présenté en personne au premier appel de la cause mais n'a pas cru devoir constituer avocat-défenseur pour la suite de la procédure devant la cour ;

Considérant qu'ainsi, il est établi qu'il a eu connaissance de la citation et que dès lors la décision à intervenir doit être rendue par un arrêt réputé contradictoire à l'égard de toutes les parties en cause ;

Considérant en troisième lieu sur le recours de l'UAP, qu'en indemnisant les ayants droit de la victime, cette compagnie a nécessairement reconnu le principe de la responsabilité de son assuré S., gardien du camion, dans la réalisation du dommage, car la compagnie UAP n'aurait pas exécuté son contrat d'assurance de responsabilité civile si la responsabilité de son assuré n'avait pas été engagée ;

Considérant que par l'effet de la subrogation de plein droit qui découle du paiement des indemnités, la compagnie UAP subrogée dans les droits et actions de son assuré responsable est recevable à exercer contre les autres co-auteurs responsables un recours dont elle ne saurait être privée au motif qu'elle n'aurait pas informé les autres parties du paiement dès lors qu'elle a effectué ce paiement en vertu de son contrat d'assurance, mais qu'ayant reconnu par ce paiement que le camion dont son assuré avait la garde a joué un rôle causal dans l'accident, ce recours ne peut qu'être partiel, et que la décision du tribunal doit être réformée de ce chef ;

Considérant que le fait pour la SAM Entreprise Alberti d'avoir confié à une seule personne la charge d'assurer les manœuvres des camions à l'entrée du chantier n'est pas de nature à lui seul à caractériser une faute de sa part alors que ce système de pilotage mis en place depuis un an n'avait jusqu'alors donné lieu à aucun incident ;

Considérant qu'en revanche, il ressort des élément du dossier que T. P. chargé du pilotage n'a pas apporté une attention suffisante à la présence du piéton et a autorisé le camion appartenant à S. à s'engager sur le trottoir au moment où ce piéton arrivait devant l'entrée du chantier ;

Considérant que cette faute a concouru à la réalisation du dommage dans la proportion des deux tiers, le tiers restant devant être mis à la charge de S. en sa qualité de gardien du camion ;

Considérant que la compagnie UAP qui a versé aux ayants droit de la victime la somme non contestée dans son montant de 96 030,83 F est fondée à obtenir de T. P. et de son commettant la SAM Entreprise Alberti le remboursement de la somme de 64 020 F correspondant aux deux tiers de ce paiement ;

Considérant qu'il y a donc lieu de condamner solidairement par application de l'article 1234 du Code civil T. P. et la SAM Entreprise Alberti son commettant à payer à la compagnie UAP la somme de 64 020 F avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 1989 date de l'assignation valant mise en demeure ;

Considérant qu'ainsi que la demande la SAM MI Prestations de services et la compagnie Via Assurances il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la compagnie UAP de ses demandes en paiement qu'elle avait originairement dirigées également à l'encontre de ces parties ;

Sur les demandes en paiement de dommages-intérêts,

Considérant que l'appel formé par la SAM Entreprise Alberti n'est pas abusif à l'égard de la compagnie UAP dès lors qu'il y a été fait droit partiellement ; que cette compagnie doit donc être déboutée de sa demande en paiement de dommages-intérêts ;

Considérant en revanche que la SAM MI Prestations de services et la compagnie Via Assurances ont eu à supporter une procédure d'appel alors qu'aucune demande n'a été formulée à leur encontre par la SAM Entreprise Alberti qui n'a pas contesté sa qualité de commettant devant la cour ;

Considérant que l'appel injustifié à leur égard les a mises dans la nécessité de se défendre et leur ont occasionné un préjudice certain qu'elles ont réclamé ensemble ; que la cour a les éléments d'appréciations suffisants pour évaluer ce préjudice à la somme de 10 000 F au paiement de laquelle il y a lieu de condamner l'appelante ;

Considérant que les dépens doivent être partagés dans la proportion des deux tiers à la charge de T. P. et de la SAM Entreprise Alberti qui supporteront cette part solidairement en application de l'article 235 alinéa 2 du Code de procédure civile et de un tiers à la charge de la compagnie UAP ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS, et ceux non contraires des premiers juges,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

Statuant par arrêt réputé contradictoire,

* Dit n'y avoir lieu à sursis à statuer,

* Confirme le jugement du tribunal de première instance en date du 8 juillet 1993 en ce qu'il a débouté la compagnie UAP à l'égard de la SAM MI Prestations de services et de la compagnie Via Assurances,

* le réformant pour le surplus,

* Déclare T. P. responsable dans la proportion des deux tiers des conséquences dommageables de l'accident de la circulation dont a été victime O. B. veuve B. le 12 juin 1986 à Monaco,

* Condamne solidairement T. P. et la SAM Entreprise Alberti commettant à payer à la Compagnie UAP la somme de 64 020 F avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 1989 ;

* Déboute la compagnie UAP du surplus de ses demandes,

* Condamne la SAM Alberti à payer à la SAM MI Prestations de services et à la compagnie Via Assurances ensemble la somme de 10 000 F à titre de dommages-intérêts,

Composition

MM. Sacotte prem. prés. ; Carrasco proc. gén. ; Mme Blot et Leandri, av. déf. ; Bastiani, av. bar de Nice.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26289
Date de la décision : 31/05/1994

Analyses

Procédure civile


Parties
Demandeurs : Sté Entreprise Alberti
Défendeurs : L'Union des Assurances de Paris, Sté MI Prestations de services, Cie d'Assurances « Via », P.

Références :

article 1106, 3° du Code civil
article 1229 du Code civil
Code civil
article 388 du Code de procédure civile
article 235 alinéa 2 du Code de procédure civile
article 1234 du Code civil
article 1231 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;1994-05-31;26289 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award