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12/05/1992 | MONACO | N°26152

Monaco | Cour d'appel, 12 mai 1992, L. c/ D. S.


Abstract

Taxe à la valeur ajoutée

Paiement à l'Administration, sans influence ou l'établissement d'un compte, sur la base de devis hors taxes

Résumé

Dès lors qu'un expert judiciaire dans sa mission d'établissement d'un compte entre le maître de l'ouvrage et le locataire, prenant en considération, en les compensant, d'une part le coût des travaux réalisés, d'autre part, le montant des dommages inhérents à leur exécution, a analysé les devis chiffrés hors taxes par l'entrepreneur, l'absence prétendue de paiement de la TVA par celui-ci, ne saurait en

toute hypothèse, influer de quelque manière que ce soit, sur les obligations réciproques ...

Abstract

Taxe à la valeur ajoutée

Paiement à l'Administration, sans influence ou l'établissement d'un compte, sur la base de devis hors taxes

Résumé

Dès lors qu'un expert judiciaire dans sa mission d'établissement d'un compte entre le maître de l'ouvrage et le locataire, prenant en considération, en les compensant, d'une part le coût des travaux réalisés, d'autre part, le montant des dommages inhérents à leur exécution, a analysé les devis chiffrés hors taxes par l'entrepreneur, l'absence prétendue de paiement de la TVA par celui-ci, ne saurait en toute hypothèse, influer de quelque manière que ce soit, sur les obligations réciproques des parties

Motifs

La Cour,

La Cour statue sur l'appel relevé parte in qua par M. L. du jugement rendu par le Tribunal de première instance de Monaco le 21 mars 1991 dans le litige l'opposant à F. D. S., propriétaire exploitant de l'entreprise F. D. S. ;

Les faits, la procédure, les moyens et les prétentions des parties peuvent être relatés comme suit, étant fait référence pour le surplus à la décision déférée et aux écritures échangées en appel ;

M. L. a confié à F. D. S., entrepreneur de maçonnerie des travaux d'aménagement et de transformation de son appartement qui ont fait l'objet d'un devis initial non daté d'un montant de 782 000 F hors taxes repris et complété par un second devis en date du 20 octobre 1987 d'un montant de 1 240 000 F hors taxes ;

Alléguant des malfaçons, inachèvements et retards affectant les travaux, M. L. saisissait le juge des référés qui par ordonnance du 30 mai 1988 prescrivait une expertise dont le rapport était déposé au greffe le 14 juillet 1989 ;

Faisant état que sa facture du 14 avril 1988 d'un montant de 645 144,80 F au titre du solde de travaux était demeurée impayée, F. D. S. assignait le 3 septembre 1990, M. L. en paiement, avec exécution provisoire de la somme de 645 144,80 F avec intérêts de droit à compter du 14 avril 1988 outre celle de 50 000 F de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

M. L. concluait au débouté de D. S. et formait une demande reconventionnelle en paiement de la somme de 504 765,83 F montant de la reprise des malfaçons, de divers frais exposés à la suite de celles-ci et de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Par le jugement déféré le Tribunal statuant au vu du rapport de l'expert Henry Gremeret a :

* déclaré F. D. S. entièrement responsable des conséquences dommageables tant des désordres affectant les travaux d'aménagement de l'appartement de M. L. que de leur retard de livraison,

* déclaré M. L. redevable envers F. D. S. de la somme de 472 631 F à titre de solde de travaux,

* déclaré F. D. S. redevable envers M. L. de la somme de 94 048,10 F à titre de dommages-intérêts,

* condamné, après compensation, M. L. à payer à F. D. S. la somme de 378 582,90 F avec intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 1990,

* débouté D. S. et L. de leurs demandes réciproques en paiement de dommages-intérêts pour procédure et résistance abusives,

* ordonné l'exécution provisoire ;

Pour en décider ainsi le Tribunal a estimé :

* Quant au montant des travaux : que l'expert, en l'absence de devis acceptés par le maître de l'ouvrage, avait procédé à la vérification, au contradictoire des parties, des devis et mémoires de travaux produits par D. S. en fonction de la consistance quantitative et qualitative des ouvrages effectivement réalisés dont le montant total s'élevait à la somme non contestée de 1 175 104 F hors taxes ;

* Quant aux malfaçons, inachèvements et retards des travaux : que l'expert avait évalué le coût des travaux de reprise à la somme de 134 966 F hors taxes et qu'il avait relevé que F. D. S. avait commis une faute dans l'exécution du marché le liant au maître de l'ouvrage engageant sa responsabilité contractuelle tant en qualité d'entrepreneur qu'en celle de maître d'œuvre ; qu'il fixait le préjudice de M. L. à la somme globale de 94 048,10 F ;

* Quant à l'apurement des comptes : que déduction faite des frais de reprise des malfaçons qui étaient imputables à D. S., la valeur des ouvrages réalisés par lui s'établissait à la somme de 1 233 603 F (TTC) dont il convenait de déduire le montant non contesté des acomptes versés par L., qu'ainsi la créance de D. S. s'élevait à la somme de 472 631 F ;

Qu'après compensation entre les créances, M. L. demeurait débitrice envers D. S. d'un solde de travaux de 378 582,90 F, somme portant intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 1990 date de l'assignation valant mise en demeure en raison de la nature contractuelle de la créance ;

* Quant aux demandes accessoires : que le refus de paiement du solde des travaux par L. étant justifié par l'importance des désordres et le retard d'exécution imputables à D. S. celui-ci n'établissait pas le caractère abusif de la résistance ; que M. L. ayant partiellement succombé en ses prétentions dès lors qu'elle était redevable d'un solde de travaux, devait être déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

M. L. a relevé appel parte in qua de cette décision ;

À l'appui de son appel et dans le dernier état de ses écritures M. L. expose :

* Qu'il est demandé à la Cour de lui donner acte de ce qu'elle limite son appel au seul problème de savoir si les travaux réalisés par D. S. et arrêtés par l'expert à la somme de 1 175 104 F doivent s'entendre hors TVA ou TTC ;

* Qu'elle considère que tant les documents contractuels que l'absence de justification par D. S. du paiement par lui de la TVA sur les factures présentées, payées et encaissées témoignent qu'il n'y a pas lieu de faire supporter à l'appelante la charge d'une TVA sur les travaux retenus par l'expert ;

* Qu'en effet, sur la somme 760 972 F réglée par elle 640 000 F l'ont été en espèces et seul le règlement du 2 décembre 1987 effectué par chèque comporte une référence à la TVA ;

* Qu'en conséquence le document du 20 octobre 1987 portant une somme totale de 1 240 000 F ne constitue pas un devis et ne fait pas référence à la TVA dont D. S. doit justifier en avoir effectué le règlement, ce qu'il ne fait pas ;

* Que la situation des parties, même à supposer correct le compte de l'expert, doit s'apprécier en regard des travaux effectués pour la somme de 1 175 104 F TTC et non HT ce qui compte tenu de la compensation donne un solde en faveur de D. S. de 160 014,23 F sans considération de la demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de l'intimé pour sanctionner son comportement abusif ;

* Qu'il est de principe que lorsque des professionnels redevables de la TVA facturent à d'autres redevables, ils doivent nécessairement indiquer sur leurs factures outre le prix unitaire hors TVA les mentions suivantes : prix total hors TVA des biens ou services livrés, le taux légal de TVA et le montant de la TVA ;

Elle demande en conséquence à la Cour :

* de réformer parte in qua la décision entreprise,

* de dire et juger, reprenant les chiffres des premiers juges et après compensation, que c'est au total une somme de 160 069 F et non 378 582,90 F dont elle est redevable envers D. S. ;

* de condamner D. S. à lui payer une somme de 30 000 F à titre de dommages-intérêts ;

F. D. S. pour sa part après avoir rappelé les faits et analysé les différents documents et conclusions de l'expert fait essentiellement valoir :

* En premier lieu que M. L., à l'exception d'une seule motivation fondée sur le fait que les chiffres figurant au document du 20 octobre 1987 et la somme de 1 175 104 F retenue par l'expert doivent s'entendre TTC, ne développe aucun autre moyen ; que cette seule motivation équivaut à une absence d'exposé des griefs et motifs et est donc contraire aux exigences des articles 427 et 429 du Code de procédure civile ;

* En deuxième lieu que l'expert Gremeret, après avoir relevé que les deux devis de D. S. étaient libellés hors taxes, a chiffré le montant des travaux réalisés à la somme de 1 175 104 F hors taxes, chiffre non contesté lors des opérations expertales ;

* En troisième lieu que le point de départ des intérêts au taux légal doit être fixé au 25 mars 1988 date de l'ordonnance de référé ayant désigné l'expert ;

* En quatrième lieu que L. doit être condamnée à lui payer la somme de 30 000 F à titre de dommages-intérêts en réparation des divers préjudices subis du fait de cet appel manifestement abusif ;

Il demande en conséquence à la Cour :

* de déclarer M. L. irrecevable et en tous les cas infondée en son appel,

* de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné L. au paiement de la somme de 378 583,60 F avec intérêt au taux légal à compter du 25 mars 1988,

* de condamner M. L. au paiement de la somme de 30 000 F à titre de dommages-intérêts ;

SUR CE,

I. - Sur la validité de l'appel :

Considérant que l'acte d'appel du 20 juin 1991 comporte diverses critiques des conclusions de l'expert et des chiffres retenus par les premiers juges ; qu'ainsi les moyens de l'appelante se trouvent clairement exposés ;

Considérant que l'acte contesté a été, en outre, complété par deux jeux de conclusions déposées les 17 décembre 1991 et 18 février 1992 auxquelles l'intimé n'a pas jugé opportun de répondre ;

Considérant en conséquence qu'il y a lieu d'écarter l'exception soulevée par D. S. ;

II. - Sur le fond,

Considérant que l'appel formé parte in qua par M. L. n'a pour objet que de faire dire et juger que le coût des travaux effectués par D. S. notamment ceux chiffrés dans le document du 20 octobre 1987 et le montant desdits travaux arrêté par l'expert doivent s'entendre TTC et qu'en conséquence la somme due par elle doit être ramenée à celle de 160 069 F ;

Considérant cependant qu'il ne peut être sérieusement soutenu en cause d'appel par L. que les sommes retenues par l'expert, désigné à sa demande pour chiffrer les travaux faits par D. S., seraient TTC ;

Considérant en effet que l'expert énonce clairement après avoir justement analysé les documents fournis par les parties que le second devis du 20 octobre 1987 pour un montant de 1 240 000 F qui reprend et complète les postes déjà énoncés dans un estimatif préalable non daté qui s'élevait à la somme de 782 000 F « hors taxes » doit s'entendre également « hors taxes » ;

Considérant que cette affirmation de l'expert reprise par les premiers juges pour déterminer le compte des parties, ne paraît avoir été contredite par M. L. ni au cours des opérations d'expertise ni devant les premiers juges ;

Considérant que l'absence prétendue de paiement de la TVA par D. S. à l'Administration fiscale ne saurait, en toute hypothèse, influer en quoi que ce soit sur les obligations réciproques des parties ;

Considérant que c'est donc à bon droit et par des motifs que la Cour adopte et fait siens que les premiers juges, sur la base des calculs effectués par l'expert, ont fixé à la somme de 378 582,90 F, après compensation, le montant de la condamnation de M. L. envers F. D. S. ;

Considérant que c'est à juste titre que le tribunal a fixé au 3 septembre 1990, date de l'assignation valant mise en demeure le point de départ des intérêts au taux légal ;

Considérant qu'il y a lieu donc de confirmer le jugement entrepris ;

Considérant que l'appelante qui succombe ne justifie d'aucun préjudice et doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;

Considérant que l'action de M. L. n'apparaît pas manifestement abusive, malicieuse ou dilatoire en l'état de l'exécution provisoire ordonnée par les premiers juges ;

Que D. S. qui ne justifie d'aucun préjudice de ce chef doit être débouté de sa demande de dommages-intérêts ;

Considérant que M. L. qui succombe doit être condamnée aux dépens ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Et ceux non contraires des premiers juges,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco,

statuant dans les limites de l'appel,

Déclare valable l'exploit d'appel du 20 juin 1991 ;

Confirme le jugement du 21 mars 1991 en toutes ses dispositions ;

Déboute M. L. de ses demandes, fins et conclusions ;

Déboute F. D. S. de ses demandes ;

Composition

MM. Sacotte, prem. prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén. ; Mes Blot et Escaut, av. déf. ; Edel, av. barr. de Nice.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26152
Date de la décision : 12/05/1992

Analyses

Fiscal - Général ; TVA


Parties
Demandeurs : L.
Défendeurs : D. S.

Références :

articles 427 et 429 du Code de procédure civile
ordonnance du 30 mai 1988


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;1992-05-12;26152 ?

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