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24/01/1972 | MONACO | N°25022

Monaco | Cour d'appel, 24 janvier 1972, Mutuelle Générale Française Accidents c/ L.


Abstract

Accident du travail

Capacité résiduelle de gain de la victime - Révision - Commission chargée d'apprécier la capacité résiduelle de gain - Saisine - Conditions.

Résumé

Le recours, laissé à la libre appréciation des juges, à la Commission chargée d'apprécier la capacité résiduelle de gain de la victime d'un accident du travail en vue de la révision de sa rente, ne saurait constituer une voie de recours contre une décision devenue définitive ; il ne peut être mis en œuvre que si l'accidenté établit qu'un changement des éléments serva

nt à apprécier sa capacité résiduelle de gain est intervenu depuis, par suite des conséquences de...

Abstract

Accident du travail

Capacité résiduelle de gain de la victime - Révision - Commission chargée d'apprécier la capacité résiduelle de gain - Saisine - Conditions.

Résumé

Le recours, laissé à la libre appréciation des juges, à la Commission chargée d'apprécier la capacité résiduelle de gain de la victime d'un accident du travail en vue de la révision de sa rente, ne saurait constituer une voie de recours contre une décision devenue définitive ; il ne peut être mis en œuvre que si l'accidenté établit qu'un changement des éléments servant à apprécier sa capacité résiduelle de gain est intervenu depuis, par suite des conséquences de l'accident.

Motifs

La Cour,

Statuant sur l'appel régulièrement interjeté en la forme par la Mutuelle Générale Française Accidents, d'un jugement rendu le onze février mil neuf cent soixante et onze, par le Tribunal de Première Instance, lequel a renvoyé L. devant la Commission Spéciale prévue par l'article 23 bis de la loi n° 636 du onze janvier 1958, modifiée par la loi n° 790 du 18 août 1965, pour faire apprécier sa capacité résiduelle de gain consécutive aux séquelles de l'accident dont il a été victime le 21 mars mil neuf cent soixante-six et a sursis à statuer sur la demande de la Mutuelle Générale Française Accidents en homologation du rapport du médecin expert Orecchia, réduisant de douze à six pour cent le taux d'invalidité de L. ;

Considérant que L. a, les vingt-et-un mars mil neuf cent soixante-six et quatorze octobre mil neuf cent soixante-six, été victime d'accidents du travail, alors qu'il était au service de la Société de Travaux Publics et Maritimes du Midi (en abrégé S.A.T.P.M.M.) en qualité de maçon ;

Que ces deux accidents qui ont affecté le même membre : la jambe gauche, ont occasionné : le premier, une fracture de la malléole externe, le deuxième, une fracture du plateau tibial interne et entraîné, chacun, une incapacité permanente partielle de douze pour cent ;

Que, par ordonnances de conciliation des vingt-deux août mil neuf cent soixante-huit et vingt-trois janvier mil neuf cent soixante-neuf, il a été alloué à L., une rente annuelle et viagère de sept cent cinquante francs, trente et un centimes, pour le premier accident et de six cent quarante-cinq francs, 4 centimes pour le deuxième, à compter des quatre août mil neuf cent soixante-six et vingt-deux mars mil neuf cent soixante-sept ;

Que, sur demandes en révision de la Mutuelle Générale Française Accidents du quinze mai mil neuf cent soixante-dix, le médecin expert Marchisio, commis pour le deuxième accident, a évalué à dix pour cent le nouveau taux d'incapacité permanente partielle et a estimé nécessaire de faire apprécier la capacité résiduelle de gain de L. ; que celle-ci ayant été évaluée à quatre-vingt-huit pour cent, une ordonnance de conciliation du quatre février mil neuf cent soixante-dix, a fixé le taux d'invalidité à douze pour cent et maintenu la rente de six cent quarante-cinq francs, quatre centimes ;

Que sur la demande concernant le premier accident, le médecin expert Orecchia, constatant une amélioration de l'état de L., a conclu le vingt-cinq juin mil neuf cent soixante-dix, à une réduction de douze à six pour cent du taux d'invalidité ; que sur ordonnance de non conciliation du dix-huit septembre mil neuf cent soixante-dix, le Tribunal de Première Instance a, par jugement du onze février mil neuf cent soixante et onze, ordonné le renvoi de L. devant la Commission Spéciale de l'article 23 bis de la loi n° 636 sus visée et a sursis à statuer sur l'homologation du rapport de l'expert Orecchia ;

Considérant que l'appelante fait grief audit jugement d'avoir ordonné le renvoi devant la Commission Spéciale aux motifs ; que L. a, le vingt-deux août mil neuf cent soixante-huit, accepté le taux de douze pour cent proposé par l'expert et a renoncé, ainsi, à faire apprécier sa capacité résiduelle de gain ; que sa blessure n'a pas modifié sa situation professionnelle, seul, le deuxième accident, qui l'a contraint à changer de métier, pouvant faire l'objet d'une majoration de rente pour incapacité de gain, que l'amélioration de l'état de L. n'est pas de nature à entraîner une telle modification ; que, concluant, en conséquence, à l'infirmation du jugement entrepris, elle demande 1° de dire L. irrecevable en ses demandes de renvoi devant la Commission Spéciale et de sursis à statuer, 2° l'homologation du rapport de l'expert Orecchia, en date du douze juin mil neuf cent soixante-dix ;

Considérant que L. oppose qu'il résulte d'un certificat que lui a délivré son médecin traitant le vingt octobre mil neuf cent soixante-dix, que c'est par suite des deux accidents dont il a été victime, qu'il a dû changer d'emploi ; qu'en conséquence, le taux d'incapacité permanente partielle et la capacité résiduelle de gain doivent être appréciés, séparément, pour chaque accident ; que, dans ces conditions sa rente ne pouvant être déterminée par le seul taux de six pour cent auquel l'expert fixe la diminution de sa capacité de travail résultant des séquelles de l'accident du vingt-et-un mars mil neuf cent soixante-six, il conclut à la confirmation du jugement déféré ;

Sur la saisine de la commission spéciale et le sursis à statuer :

Considérant que le taux de la rente accident du travail est déterminé par le degré de réduction de la capacité de travail et l'incapacité de gain fondée sur des possibilités plus ou moins grandes de réintégration dans la vie active ou sur la portion résiduelle de capacité de gain de l'accidenté ;

Considérant que, d'après l'article 25 de la loi n° 636 sus visée, toute variation des éléments ayant servi à apprécier la capacité résiduelle de gain de la victime de l'accident, peut donner lieu, à tout moment, à une nouvelle fixation des réparations ;

Que toutefois, la révision - ne pouvant être une voie de recours contre une décision devenue définitive sous prétexte que la rente, fixée sans tenir compte de la capacité résiduelle de gain, est insuffisante - n'est susceptible d'être demandée que si une modification de ladite capacité s'est produite postérieurement à la décision intervenue ;

Qu'il ne saurait y avoir, par conséquent, recours à la Commission Spéciale, que l'article 23 bis de la loi n° 636 laisse à la libre appréciation des juges, que si l'accidenté établit qu'un changement des éléments servant à apprécier ladite capacité est intervenu, depuis, par suite des conséquences de l'accident ;

Considérant, sur la capacité de gain que L. ne précise ni à quelle date, ni en suite de quelles circonstances il a dû changer son métier de maçon pour celui de rodeur sur verre, non plus que la réduction de salaire qui aurait été la conséquence de ce changement ; qu'il se borne à produire trois bulletins de salaire des mois de mars mil neuf cent soixante-cinq, décembre mil neuf cent soixante-sept et août mil neuf cent soixante-huit de la S.A.T.P.M. et un bulletin de paye de la Société Méditerranéenne Equipement Médical (M.E.M.) pour la période du trois au treize novembre mil neuf cent soixante-dix ; que ces pièces établissent d'une part, qu'ayant repris son travail à la S.A.T.P.M.M. le premier septembre mil neuf cent soixante-six, il y travaillait encore, comme maçon en août mil neuf cent soixante-huit et, qu'en novembre mil neuf cent soixante-dix, il occupait un emploi de rodeur sur verre à la M.E.M. ; que, d'autre part, son salaire horaire est passé de quatre francs en mil neuf cent soixante-cinq avant l'accident, à quatre francs vingt-cinq en mil neuf cent soixante-huit et à cinq francs trente en mil neuf cent soixante-dix ; qu'il n'est pas établi que les derniers taux horaires aient été inférieurs à ceux d'un ouvrier normal et à ceux que L. aurait perçu comme maçon et que ce dernier ait, par suite, éprouvé un dommage, au point de vue de son salaire, en suite de l'accident du vingt-et-un mars mil neuf cent soixante-six ;

Considérant sur les séquelles des deux accidents, qu'en ce qui concerne celui du vingt-et-un mars mil neuf cent soixante-six, le médecin expert Orecchia a constaté le vingt-cinq juin mil neuf cent soixante-dix, une amélioration de l'état de L. qui ne présentait plus qu'une légère diminution de la flexion dorso-plantaire et a réduit en conséquence, le taux de son invalidité de douze à six pour cent ;

Qu'en ce qui concerne l'accident du quatorze octobre mil neuf cent soixante-six, au contraire, le médecin expert Marchisio a constaté le quatre juin mil neuf cent soixante-dix, que L., qui avait dû abandonner son métier, présentait des douleurs avec fatigabilité au genou gauche, surtout une mayotrophie majeure persistante, qui ne présentait aucune amélioration avec le temps ; qu'il a évalué, en conséquence, la nouvelle incapacité à dix pour cent et a conclu, contrairement au docteur Orecchia, qui n'a pas estimé utile un tel recours, au renvoi devant la Commission Spéciale afin de faire apprécier la capacité résiduelle de gain de L. ;

Considérant qu'il résulte ainsi des constatations et conclusions des médecins experts, du faible taux d'incapacité qui subsiste des séquelles de l'accident du vingt-et-un mars mil neuf cent soixante-six, du fait que le Docteur Orecchia n'a pas proposé le renvoi de L. devant la Commission Spéciale et que ce dernier a accepté sa rente, le vingt-deux août mil neuf cent soixante-huit sans demander ce renvoi que la réduction de gain qu'a pu subir L., du fait de son changement de métier, postérieurement au vingt-deux août mil neuf cent soixante-huit, ne peut être rattaché à l'accident du vingt-et-un mars mil neuf cent soixante-six, que c'est à tort dans ces conditions, que le renvoi devant la Commission Spéciale et le sursis à statuer ont été ordonnés ;

Sur l'homologation du rapport d'expertise du vingt-cinq juin mil neuf cent soixante-dix :

Considérant que L. ayant accepté dans des conclusions prises au fond tant en première instance qu'en appel, le taux de six pour cent fixé par l'expert Orecchia, taux conforme à celui retenu par son médecin traitant, le Docteur Fratacci, dans son certificat médical du vingt octobre mil neuf cent soixante-dix, la cause est en état de recevoir jugement sur le fond ;

Considérant que l'expert Orecchia a fait une saine et juste appréciation des faits de la cause et des droits des parties, qu'il convient, en conséquence, d'homologuer son rapport ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

Reçoit la Mutuelle Générale Française Accidents en son appel régulier en la forme ;

Au fond,

Infirme le jugement attaqué ;

Dit n'y avoir lieu à appréciation de la capacité résiduelle de gain par la Commission Spéciale prévue par l'article 23 bis de la loi n° 636 du onze janvier mil neuf cent cinquante-huit, modifiée par la loi n° 790 du 18 août 1965 et à sursise statuer ;

Evoquant :

Homologue le rapport de l'expert Orecchia fixant à six pour cent le nouveau taux d'invalidité de L. ;

Rejette, en tant que de besoin comme inutiles ou mal fondés tous autres moyens, fins ou conclusions plus amples ou contraires des parties ;

Composition

MM. Cannat, prés., François, prem. subst. proc. gén. ; MMe Marquet et Sanita, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25022
Date de la décision : 24/01/1972

Analyses

Sécurité au travail


Parties
Demandeurs : Mutuelle Générale Française Accidents
Défendeurs : L.

Références :

loi n° 790 du 18 août 1965


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;cour.appel;arret;1972-01-24;25022 ?

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