La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/04/2007 | MALI | N°77

Mali | Mali, Cour suprême, Section judiciaire, 10 avril 2007, 77


Texte (pseudonymisé)
2007041077
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE
2ème Chambre Civile
POURVOI N°222 DU 28 AOUT 2002 ARRET N°77 DU 10 AVRIL 2007
RÉALISATION DE GAGE -DROIT OHADA -INTERPRÉTATION DE L'ARTICLE 56 AL1 DE L'ACTE UNIFORME PORTANT ORGANISATION DES SÛRETÉS
L'article 56 al1 de l'Acte Uniforme portant organisation des sûretés stipule que « faute de paiement à l'échéance, le créancier gagiste muni d'un titre exécutoire peut faire procéder à la vente forcée de la chose gagée, huit jours après une sommation faite au débiteur et, s'il y a lieu, au tiers constituant d

u gage dans les conditions prévues par les dispositions organisant les voies d'exéc...

2007041077
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE
2ème Chambre Civile
POURVOI N°222 DU 28 AOUT 2002 ARRET N°77 DU 10 AVRIL 2007
RÉALISATION DE GAGE -DROIT OHADA -INTERPRÉTATION DE L'ARTICLE 56 AL1 DE L'ACTE UNIFORME PORTANT ORGANISATION DES SÛRETÉS
L'article 56 al1 de l'Acte Uniforme portant organisation des sûretés stipule que « faute de paiement à l'échéance, le créancier gagiste muni d'un titre exécutoire peut faire procéder à la vente forcée de la chose gagée, huit jours après une sommation faite au débiteur et, s'il y a lieu, au tiers constituant du gage dans les conditions prévues par les dispositions organisant les voies d'exécution.. ».
Il ressort de cet article que faute d'être payé par son débiteur ( le constituant de gage) à l'échéance, le créancier gagiste peur réaliser le gage de la façon suivante :
Si l'échéance de la créance donnée en gage est antérieure à celle de la créance garantie, le créancier gagiste est admis à en percevoir le montant en capital et intérêts, sauf clause contraire,
Si l'échéance de la créance garantie est antérieure à celle de la créance donnée en gage, le créancier gagiste est tenu d'attendre l'échéance de cette dernière pour percevoir le montant, ce qui revient à proroger le terme de sa propre créance,
Dans les deux cas, le créancier gagiste doit rendre compte à son propre débiteur du paiement de la créance transférée à titre pignoratif et répond en qualité de mandataire, du simple perçu en faveur du constituant du gage.
Pour la cour suprême, ces formalités dont l'inobservation est sanctionnée par la nullité, n'ayant pas été respecté par le créancier gagiste, les juges d'appel, en rejetant une fin de non recevoir et en ordonnant la réalisation du gage ont transgressé les dispositions de l'article 56 alinéa1 susvisé.
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi :
EN LA FORME :
Par acte n°222 en date du 28 août 2002 du greffe de la Cour d'Appel de Bamako, la SCP DOUMBIA - TOUNKARA, Avocat à la Cour, pour le compte de Ad Y X C a déclaré faire pourvoi contre l'arrêt n°331 du 28 août 2002 de la Chambre Civile de ladite cour dans une procédure de résiliation de gage qui oppose son client à Ab B. Le demandeur au pourvoi a versé l'amende de consignation et produit mémoire ampliatif par l'intermédiaire de son conseil Maître SOUMAORO ; Le pourvoi est donc recevable en la forme ;
PROCEDURE
AU FOND :
Le demandeur a présenté un mémoire basé sur la violation de la loi en 3 branches ;
1.Violation de l'article 56 al 1 acte uniforme de l'OHADA portant organisation des sûretés sur les conditions de réalisation de gage ;
En ce que le dispositif de l'arrêt querellé est ainsi conçu : reçoit la requête en réalisation au profit de Aa A ; Ordonne la réalisation au profit de Aa A du gage inscrit sur la concession objet de la parcelle n°Q/9 du lotissement de Ae Ac, attribuée par la lettre n°0645/87/DOM du 24 juillet 1997 du gouverneur du District de Bamako ; Dit partant, que conformément à la mention « dation en paiement » la concession sera donnée à Aa A subrogée dans les droits de Ab B initialement créancier ;gagiste de Ad Y X C.
En ce qu'il ressort clairement de la lettre d'un tel dispositif que le gage a été réalisé au moyen d'une dation en paiement ; Qu'une réalisation de gage, pour être régulière, se fait en suivant la procédure prévue par les dispositions de l'article 56 al 1 de l'acte Uniforme portant organisation des sûretés qui énonce :
« Faute de paiement à l'échéance, le créancier gagiste muni d'un titre exécutoire peut faire procéder à la vente forcée de la chose gagée, huit jours après une sommation faite au débiteur et, s'il y a lieu, au tiers constituant du gage dans les conditions prévues par les dispositions relatives à l'organisation des voies d'exécution. La juridiction compétente peut autoriser l'attribution du gage au créancier gagiste jusqu'à due concurrence et d'après estimation suivant les cours ou à dire d'expert ; Toute clause du contrat autorisant la vente ou l'attribution du gage sans les formalités ci-dessus est réputé non écrite » ; Qu'aux termes de cet article, le gage est réalisé soit aux enchères publiques, soit suivant une estimation par voie d'expert ; Que dans le cas d'espèce ces formalités font défaut ; Que ces dispositions sont d'ordre public auxquelles, ni les parties, ni le juge ne peuvent déroger ; Que l'arrêt mérite cassation ;
Deuxième Branche :
Violation des dispositions de l'article 77 du Régime Général des Obligations :
En ce que dans l'acte notarié en date du 13 octobre 1999 de Maître Alassane T. SANGARE, les parties se sont elles même aménagées certains modes d'extinction tel : « Le débiteur pourra se libérer en cédant au créancier la concession ci - dessus gagée à titre de dation » ; Qu'il ressort clairement de cette clause qu'à la survenance de l'échéance, la dation est une simple faculté pour le débiteur qui « pourra par ce moyen, éviter de subir la réalisation forcée de sa concession déjà donnée en gage ; Que le gage emporte nécessairement dessaisissement du débiteur au profit du créancier du bien donné en gage ;
Que les considérations ci-dessus démontrent que le gage se situe au moment de contracter le prêt et la dation, le cas échéant, à la survenance de l'échéance ;
PROCEDURE
Qu'autrement il y aurait un pacte commissoire sanctionné de nullité par la loi si le gage coïncide dans le temps avec la dation ;
Que l'arrêt querellé ne s'est point préoccupé de l'avis du débiteur, comme équivalant directement à une dation qui serait opérée par la remise du titre au créancier, remise dont il est connu qu'elle a été opérée en relation avec le gage consenti au moment du prêt et non avec quelque dation à laquelle le débiteur, qui en a l'initiative, n'a jamais consenti ; Que l'arrêt a violé la loi des parties par mauvaise interprétation ; Que les dispositions de l'article 77 énoncent : « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise, elles doivent être exécutées de bonne foi » ; Que le sieur Ab B a agi de bonne foi ;
Troisième Branche : violation de la formation du gage :
En ce que le sieur X C tient à rappeler à la cour que la lettre d'attribution a été donnée au sieur B au moment du prêt de la créance, d'où le gage ; Que l'arrêt en soutenant qu'au cas de non paiement à l'échéance, la dation en paiement opérée par la reprise du titre à B vaut paiement a confondu deux modes différents, l'un défini comme une garantie et l'autre, comme mode d'extinction d'une obligation. Le demandeur conclut à la cassation de l'arrêt n°331 du 28 août 2002 de la Cour d'Appel de Bamako ; Le mémoire a été communiqué au conseil du défendeur Maître Salifou COULIBALY qui a répliqué et sollicite le rejet pur et simple du pourvoi comme mal fondé ;
ANALYSE DES MOYENS :
Résumé des faits :
Par acte n°5482 passé à l'étude de Maître Alassane T. SANGARE, Notaire à Bamako les sieurs Ad Y X C commerçant à Bamako et Ab B commerçant à Bamako ont convenu de ce qui suit : « Le sieur Ad dit X B a reconnu devoir à Ab B la somme de dix huit millions huit cent mille FCFA (18.800.000) ; Il s'engage à payer la dite somme dans un délai de deux mois à partir du 15 juillet 1999 pour prendre fin le 15 septembre 1999 ;
Garantie avec dation en paiement :
Pour garantir le paiement à bonne date de la présente, Monsieur Ad Y X C consent au profit de Monsieur Ab B un gage sur un immeuble objet de la parcelle n°Q/9 du lotissement de Ae Ac attribuée par lettre n°0645/87/DOM (duplicata) délivrée par le Gouverneur du district de Bamako en date du 24 novembre 1987 ; Il est précisé que Monsieur Ad Y X C a acquis ladite parcelle par actes notariés établis par Maître Karamoko CAMARA, Notaire à la résidence de Bamako suivant quittance enregistrée le 07 juillet 1999 sous les mentions vol : 54 ; F : 135 ; n°01, Bord : 4489 ;
Conditions :
Il est expressément convenu comme condition essentielles des présentes :
PROCEDURE
Que le paiement de la créance ci -dessus aura lieu au domicile du créancier à Bamako ;
Que le débiteur a la faculté de se libérer de sa dette par anticipation et même par fraction ;
Que le débiteur pourra se libérer en cédant au créancier la concession ci-dessus gagée à titre de dation ;
Qu'en cas de décès du débiteur, ses héritiers et représentants seraient tous tenus, solidairement et individuellement du montant de la présente obligation en principal, intérêts, frais et accessoires divers » ;

C'est donc après l'échéance fixée dans ledit acte notarié que sieur Ab B, qui n'était pas rentré dans ses fonds cédait sa créance à Aa A par acte notarié du 13 octobre ; Par requête en date du 19 juillet 2001, adressée au Président du Tribunal de la Commune I ; Aa A sollicite une réalisation de gage contre Ad Y X C ; A l'issue de cette procédure la dame Aa A fut déclarée irrecevable pour défaut de qualité et l'acte de cession fut annulé Par acte au greffe en date du 24 décembre 2001 maître Salifou COULIBLAY, Avocat à la Cour déclare interjeter appel contre ledit jugement et par arrêt n°331 la Cour d'Appel de Bamako infirma cette décision et statuant à nouveau rejeta la fin de non recevoir et ordonna la réalisation du gage au profit de Aa A ; C'est donc cette décision qui a fait l'objet de pourvoi ;
Première Branche du moyen :
Attendu que le mémorant relève la violation de l'article 56 al 1 de l'acte uniforme portant organisation des sûretés qui stipule : « faute de paiement à l'échéance, le créancier gagiste muni d'un titre exécutoire peut faire procéder à la vente forcée de la chose gagée, huit jours après une sommation faite au débiteur et, s'il y a lieu, au tiers constituant du gage dans les conditions prévues par les dispositions organisant les voies d'exécution ; La juridiction compétente peut autoriser l'attribution du gage au créancier gagiste jusqu'à due concurrence et d'après estimation suivant les cours ou à dire d'expert ; Toute clause du contrat autorisant la vente ou l'attribution du gage sans les formalités ci-dessus est réputée non écrite » ; Le commentaire de cet article indique que faute d'être payé par son débiteur (le constituant du gage) à l'échéance, le créancier gagiste peut réaliser le gage de la façon suivante :
-Si l'échéance de la créance donnée en gage est antérieure à celle de la créance garantie, le créancier gagiste est admis à en percevoir le montant en capital et intérêt, sauf clause contraire ;
-Si l'échéance de la créance garantie est antérieure à celle de la créance donnée en gage, le gagiste est tenu d'attendre l'échéance de cette derrière pour en percevoir le montant, ce qui revient à proroger le terme de sa propre créance ;
Dans les deux cas, le créancier gagiste doit rendre compte à son propre débiteur du paiement de la créance transférée à titre pignoratif et répond en qualité de mandataire, du simple perçu en faveur du constituant du gage ;
Attendu que ces formalités dont l'inobservation est sanctionnée par la nullité n'ont pas été respectées par le sieur Ab B ; les juges d'appel comme ils l'ont décidé, ont transgressé les dispositions du texte sus-visé ; et exposent l'arrêt à la censure ; Deuxième branche tirée de la violation de l'article 77 du Régime Général des Obligation :
PROCEDURE
Attendu que les sieurs Ab B et Ad Y X C, ont établi un acte notarié à la suite d'un prêt consenti par Ab B à Ad Y X C ;
Attendu que ledit acte notarié bien que comportant la mention « garantie avec dation ou paiement » pose comme conditions essentielles :
Que le débiteur pourra se libérer en cédant au créancier la concession ci-dessus gagée à titre de dation ; Il ressort de cette clause qu'à l'échéance et en cas de non paiement la dation est une faculté donnée au débiteur pour se libérer et éviter une exécution forcée ;
Attendu que l'article 77 du Régime Général des Obligations : « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont fait ; Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise ; Elles doivent être exécutées de bonne foi »;
Attendu que le sieur Ab B à l'échéance de sa créance n'a pas offert cette possibilité au débiteur, ils doivent donc réaliser le gage conformément aux dispositions de l'article 77 du Régime Général et l'article 56 de l'acte uniforme portant organisation des sûretés ; L'arrêt n'ayant pas sanctionné ces violations s'expose donc à la censure ;
Troisième branche basée sur la violation de la formation de gage :
Attendu que le mémorant dans cette branche du moyen parle de la violation de la formation de gage ;
Mais attendu qu'il n'évoque aucun texte de loi dont la violation est constatée mais se borne plutôt à des commentaires sur la formation du gage ; cette branche du moyen, en raison de son imprécision ne peut être analysée et doit être écartée ;
Attendu que le mémorant sollicite la cassation sans renvoi en application de l'article 651 du code de procédure civile, commerciale et sociale qui dispose « la Cour Suprême peut casser sans renvoi lorsque la cassation n'implique pas qu'il soit statué sur le fond puis qu'il s'agit de se conformer aux dispositions de l'article 56 al1 de l'acte uniforme de l'OHADA relatif aux sûretés et d'application des conditions contenues dans l'acte notarié ; Il convient donc de dire qu'il n'y a pas lieu à renvoi.
PAR CES MOTIFS :
En la forme : reçoit le pourvoi ; Au fond : casse et annule l'arrêt déféré ; Dire n'y avoir lieu à renvoi ; Ordonne la restitution de consignation ; Met les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.


Synthèse
Formation : Section judiciaire
Numéro d'arrêt : 77
Date de la décision : 10/04/2007
2ème chambre civile

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2007-04-10;77 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award