La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/05/2006 | MALI | N°161

Mali | Mali, Cour suprême, Section judiciaire, 25 mai 2006, 161


Texte (pseudonymisé)
20060525161
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE
2ème Chambre Civile
POURVOI N°249 DU 16 JUILLET 2004 ARRET N° 161 DU 25 SEPTEMBRE 2006
DEMANDE D'INDEMNISATION-RESPONSABILITÉ DE L'ETAT EXCEPTION DE PRESCRIPTION-APPLICATION DE LA N°96-061 DU 4 NOVEMBRE 1996 PORTANT PRINCIPES FONDAMENTAUX DE LA COMPTABILITÉ PUBLIQUE APPLICATION DE LA LOI N°62-66/AN-RM DU 06 AOÛT 1962 PORTANT CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
L'article 29 de la loi du 4 novembre 1996 dispose : « sont prescrits au profit des organismes publics, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de

quatre ans à partir des premiers jours de l'année au cours de laquelle les dro...

20060525161
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE
2ème Chambre Civile
POURVOI N°249 DU 16 JUILLET 2004 ARRET N° 161 DU 25 SEPTEMBRE 2006
DEMANDE D'INDEMNISATION-RESPONSABILITÉ DE L'ETAT EXCEPTION DE PRESCRIPTION-APPLICATION DE LA N°96-061 DU 4 NOVEMBRE 1996 PORTANT PRINCIPES FONDAMENTAUX DE LA COMPTABILITÉ PUBLIQUE APPLICATION DE LA LOI N°62-66/AN-RM DU 06 AOÛT 1962 PORTANT CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
L'article 29 de la loi du 4 novembre 1996 dispose : « sont prescrits au profit des organismes publics, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir des premiers jours de l'année au cours de laquelle les droits sont acquis. Elle est aussi interrompue par toute demande de paiement ou toute réclamation adressée par le créancier à l'administration.. »
Attendu qu'en l'espèce le procès en réclamation ou en indemnisation se poursuit par l'exercice normal des voies de recours (pourvoi) l'exception de prescription évoquée par les demandeurs est infondée et devra être écartée.
Attendu que contrairement à l'argumentation du pourvoi l'action civile se prescrit selon les règles du code civil. Toutefois, cette action ne peut être engagée devant la juridiction répressive après l'expiration du délai de prescription de l'action publique (art 10 du c pp).
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi :
EN LA FORME:
Par acte n°249 du greffe de la Cour d'Appel de Bamako en date du 16 juillet 2004 la Directrice Générale du contentieux de l'Etat agissant au nom et pour le compte de la Commune de N'Gabakoro et l'Etat du Mali a formé pourvoi contre l'arrêt n°363 rendu le 14 juillet 2004 par la Chambre Civile de la Cour d'Appel dans une instance en indemnisation opposant ces derniers à M. Ab A. Les demandeurs au pourvoi ont déposé un mémoire ampliatif daté du 12 janvier 2005 et enregistré sous le n°132 du 03 janvier 2005 et enregistré sous le n° 0089 du 17 janvier 2006 ; Communiqué au défendeur, celui-ci a répondu par un mémoire réponsif daté du 29 janvier 2006 enregistré sous le n°132 ........ ; En conséquence le pourvoi ayant satisfait aux prescriptions de l'article 632 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale, sera déclaré recevable en la forme.
AU FOND :
Présentation des moyens de cassation :
Les demandeurs représentés par la Direction Générale du Contentieux de l'Etat invoque au soutien de leur pourvoi deux moyens de cassation tirés de la violation de la loi (1) de la violation de la loi par fausse interprétation de la loi (2) ;
1. Du premier moyen tiré de la violation de la loi : Le premier moyen de cassation peut être subdivisé en deux branches d'abord, de la violation de l'article 29 de la loi n°96-061 du 04 novembre 1996 portant principes fondamentaux de la comptabilité publique (première branche) et ensuite de la violation de l'article 10 de la loi n°62-66/ AN - RM du 6 août 1962 portant code de procédure pénale (2e branche)
Sur la 1ère branche tirée de la violation de l'article 29 de la loi du 04 novembre 1996 portant principes fondamentaux de la comptabilité publique : Par cette branche du moyen, le pourvoi fait grief à l'arrêt querellé d'avoir rejeté l'exception de prescription et d'avoir retenu la prescription trentenaire ; Le pourvoi fait valoir qu'en vertu des dispositions de l'article 29 de la loi du 04 novembre 1996 évoqué les actions en responsabilité dirigées contre les personnes morales de droit public se prescrivent par quatre ans ; Que dans le cas particulier, la créance de Ab A a été appréciée dans toute son étendue à compter des évènements de mars 1991 ; que Ab A a affirmé que dès cette date tous ses biens ont été saccagés ;
2ème Branche du moyen pris de la violation de l'article 10 du code de Procédure Pénale :
Par cette branche le pourvoi soutient que de l'application des dispositions de l'article 10 du code de procédure pénale l'action de Ab A n'est pas recevable pour cause de prescription de l'action pénale ; Que l'action civile ne peut être engagée après l'expiration de l'action publique qui est de trois ans pour les délits et dix ans pour les crimes ; qu'en conséquence l'arrêt mérite encore la cassation ;
2.Du deuxième moyen de cassation basé sur la violation de la loi par fausse interprétation de l'article 16 de la loi 93-008 AN RM du 15 février 1993 portant administration des collectivités territoriales ; de l'article 31 du code de procédure pénale et de l'article 116 de la loi du 29 août 1987 fixant le Régime Général des Obligations :
Ce moyen fait grief à l'arrêt déféré d'avoir à tort sur le fondement de l'article 16 de la loi de 1993 portant administration des collectivités territoriales, condamné l'Etat comme responsable des dommages causés aux biens de Ab A ; qu'il aurait selon la jurisprudence et la doctrine françaises pour tenir la responsabilité des collectivités et de l'Etat que trois conditions doivent être réunies : D'abord que les dommages en cause doivent avoir été commis par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés ; Qu'il faut ensuite que les manifestants se soient rendus coupables de crimes ou délits commis : « à force ouverte » c'est-à-dire sans résistance ou par violence ; ce qui conduit le juge à faire application des textes de droit pénal ; Et enfin, les dommages doivent être en relation directe avec le comportement des manifestants ;
Le pourvoi soutient qu'aucune de ces trois conditions n'est remplie ; qu'il sollicite en conséquence la cassation sans renvoi de l'arrêt déféré ; Le défendeur au pourvoi a sollicité le rejet du pourvoi comme mal fondé ;
Sur ce :
ANALYSE DES MOYENS POURVOI :
1. Du premier moyen basé sur la violation de la loi : Attendu que l'article 29 de la loi du 04 novembre 1996 visée au moyen dispose : « Sont prescrites au profit des organismes publics, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir des premiers jours de l'année au cours de laquelle les droits sont acquis [.] elle est aussi interrompue par toute demande de paiement ou toute réclamation adressée par le créancier à l'administration [.] » ;
Attendu qu'il est acquis que la créance est définie par la doctrine comme « le droit que l'on a d'exiger quelque chose de quelqu'un ; un titre qui établit ce droit » ; Que par ailleurs une créance pour être valable doit être certaine, liquide et exigible ; certaine signifie non contestée, liquide donc avoir été évaluée en numéraire ; exigible se rapporte à la date certaine entre les parties pour le paiement par le débiteur au créancier de la somme d'argent ;
Attendu qu'en l'espèce le procès en réclamation ou en indemnisation se poursuit par l'exercice normal des voies de recours (pourvoi) l'exception de prescription évoquée par les demandeurs est infondée et devra être écartée ;
En sa deuxième branche basée sur la violation de l'article 10 du Code de Procédure Pénale :
Attendu que contrairement à l'argumentation du pourvoi, l'action civile se prescrit selon les règles du code civil. Toutefois, cette action ne peut plus être engagée devant la juridiction répressive après l'expiration du délai de prescription de l'action publique article 10 du code de procédure pénale et du code de procédure pénale français ; En conséquence, dans le cas d'espèce l'action qui n'est pas portée devant le juge pénal mais bien devant le juge civil est donc bel et bien recevable en la forme ; ce moyen sera donc écarté des débats comme mal fondé.
2. Du deuxième moyen basé sur la violation de la loi par fausse interprétation : De l'article 16 de la loi du 15 février 1993 portant administration des collectivités territoriales :
Attendu qu'il est constant que le conseil d'Etat avait déjà eu à connaître de la responsabilité des collectivités publiques à l'occasion de rassemblement ou d'attroupement, en application des règles normales de compétence ;
Attendu qu'en conséquence le conseil d'Etat applique les principes de la responsabilité administrative pour faute ou sans faute, du fait des décisions ou opérations de police interdisant ou dispersant les attroupements, ou du refus de prendre les mesures nécessaires pour les empêcher ou les faire cesser, (M. Ac -P. Weil - G. Aa Ad Ae b ; Genevois « les grands arrêts de la jurisprudence administrative, 11e Edition », 1996, Ed Dalloz ; P. 757) ; Attendu qu'en outre selon la doctrine, l'Etat est « responsable des dégâts et dommages des attroupements ou rassemblements. » Ibid. pp 757 et 758 ;
Attendu que selon la même jurisprudence du tribunal des conflits et des juridictions de l'ordre judiciaire, la notion de rassemblement ou d'attroupement reste inchangée et exclut les comportements individuels comme les attentats perpétrés dans le cadre d'une action ouverte. (Ibid) ;
Attendu qu'en l'espèce il résulte des énonciations de l'arrêt déféré : « que dans le cas d'espèce, il a été établi que la ferme de M. Ab A a fait l'objet d'attaque et de saccage, lors des évènements du 26 Mars 1991 (attroupements et rassemblements non contrôlés) ; que dès lors il y a lieu de retenir la responsabilité civile de la commune de N'Gabakoro et de l'Etat du Mali » ;
Attendu qu'en conséquence de ces éléments d'appréciation livrés par les juges du fond, il appert que la responsabilité civile des demandeurs au pourvoi est établie pour les dommages et dégâts causés aux biens du défendeur à l'occasion de rassemblements non individuels ; Qu'il échet de dire que le moyen soulevé est donc inopérant et devra être écarté ;
PAR CES MOTIFS :
En la forme : reçoit le pourvoi ; Au fond : Rejette ; Met les dépens à la charge du Trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.


Synthèse
Formation : Section judiciaire
Numéro d'arrêt : 161
Date de la décision : 25/05/2006
2ème chambre civile

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2006-05-25;161 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award