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28/06/2004 | MALI | N°88

Mali | Mali, Cour suprême, Section judiciaire, 28 juin 2004, 88


Texte (pseudonymisé)
COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI
SECTION JUDICIAIRE Un Peuple - Un But - Une Foi
2EME CHAMBRE CIVILE -----------------
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POURVOI N°05 DU 29 JANVIER 2003
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ARRET N° 88 DU 28 JUIN 2004
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NATURE: Tierce opposition.

LA COUR SUPREME DU MALI

A, en son audience publique ordinaire du lundi vingt huit juin de l'an deux mille quatre, à laquelle siégeaient Messieurs :

Abdoulaye Issoufi TOURE, Présid

ent par intérim de la 2ème Chambre Civile, Président;
Sidi SINENTA, Conseiller à la Cour, Membre;
Fakar...

COUR SUPREME DU MALI REPUBLIQUE DU MALI
SECTION JUDICIAIRE Un Peuple - Un But - Une Foi
2EME CHAMBRE CIVILE -----------------
------------------

POURVOI N°05 DU 29 JANVIER 2003
---------------------------------------
ARRET N° 88 DU 28 JUIN 2004
----------------------------------

NATURE: Tierce opposition.

LA COUR SUPREME DU MALI

A, en son audience publique ordinaire du lundi vingt huit juin de l'an deux mille quatre, à laquelle siégeaient Messieurs :

Abdoulaye Issoufi TOURE, Président par intérim de la 2ème Chambre Civile, Président;
Sidi SINENTA, Conseiller à la Cour, Membre;
Fakary DEMBELE, Conseiller à la Cour, membre;

En présence de Monsieur Mahamadou BOUARE, Avocat Général près ladite Cour occupant le banc du Ministère Public;

Avec l'assistance de Maître TRAORE Adama SOW, Greffier;
Rendu l'arrêt dont la teneur suit:

SUR LE POURVOI de Maître Maliki Ibrahim, Avocat à la Cour agissant au nom et pour le compte de Aj B, d'une part ;

CONTRE: Pel Ac représenté par Ae, ayant pour conseil Maître Hamadoun DICKO, Avocat à la cour, défendeur, d'autre part;

Sur le rapport du Conseiller Fakary DEMBELE et les conclusions écrite et orale de l'avocat Général Mahamadou BOUARE ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi.

EN LA FORME:

Par acte n°05/G-CAM du 29 janvier 2003, Maître Maliki Ibahim agissant au nom et pour le compte de Aj B a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n°05 du 29 janvier 2003 de la Chambre Civile de la Cour d'Appel de Mopti dans une instance de tierce opposition l'opposant à Pel Ac;

Suivant certificat de dépôt n°207 du 24 septembre 2003, l'amende de consignation a été acquittée;

Par l'organe de son conseil, le demandeur a produit mémoire ampliatif auquel le défendeur a répliqué en concluant au rejet;

Pour avoir satisfait aux exigences de la loi, le pourvoi est recevable en la forme.

AU FOND:

Exposé des moyens:

Le mémorant sous la plume de son conseil Maître Maliki Ibrahim expose deux moyens de cassation:

- Premier moyen tiré du défaut de motifs pour absence de réponse aux conclusions:

En ce que les juges d'appel n'ont donné aucune réponse à ses conclusions en cause d'appel tendant à soumettre les parties au serment décisoire suivant les rites traditionnels; que l'arrêt recherché a pris pour fondées les déclarations du chef de village de Ab et de Mougui alors qu'il est prouvé que lesdits chefs de villages avaient sans ambages reconnu sa propriété sur les lieux litigieux devant le premier juge dans l'instance ayant opposé Aa C au chef de village de Temba; qu'il est constant par ailleurs que ce n'est que dans l'instance en tierce opposition qu'ils lui ont curieusement dénié sa qualité de propriétaire; que pour avoir fondé sa décision uniquement sur des témoignages contradictoires, fluctuants et versatiles, l'arrêt attaqué manque éloquemment de motifs et doit être annulé de ce chef;

- Deuxième moyen tiré de la violence de la loi:

En ce que l'arrêt entrepris fonde sa solution sur un motif unique ainsi libellé: « Considérant qu'il résulte du dossier et des débats surtout de la déposition des chefs de villages de Temba et de Mougui et des représentants de villages de Toubalou, Ae, AgA Ah, Tari et Af, la preuve que les terres du terroir villageois de Temba relèvent du domaine coutumier du village de Kori»; que cette motivation de l'arrêt constitue une inquiétante et surprenante dénaturation tant il est vérifiable qu'à l'occasion des débats en cause d'appel ni le chef de village de Mougui, ni celui de Temba n'ont été entendus et que les témoins qualifiés par l'arrêt de représentants des villages de Toubalou, Ae, Ag, Ah, Ai et Af n'ont à aucun moment pu prouver cette qualité par mandat des chefs desdits villages les autorisant à intervenir dans la présente instance au nom de leurs villages respectifs; que pour avoir donné aux témoins des qualités non fondées ou prouvées et rapporté des faits non avérés, l'arrêt querellé viole malencontreusement la loi par dénaturation et doit être annulé de ce chef; que par ailleurs un procès - verbal de constat d'Huissier a été produit par le mémorant et que les indications y contenues n'ont reçu aucune critique de l'arrêt attaqué alors même qu'un exploit d'Huissier est valable jusqu'à inscription de faux; que ceci constitue une nette violation de l'article 5 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale selon lequel le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé; qu'ainsi l'arrêt déféré a statué infra petita;

B - ANALYSE DES MOYENS:

- Premier moyen tiré du défaut de motifs pour absence de réponse aux conclusions:

Attendu que le mémorant reproché à l'arrêt querellé d'avoir pris pour fondée des témoignages contradictoires, fluctuants et versatiles et de n'avoir donné aucune réponse à ses conclusions en cause d'appel tendant à soumettre les parties au serment décisoire suivant les rites traditionnels communs aux parties;

Attendu que ce moyen, eu égard à sa formulation, peut être divisé en deux branches:

a) Première branche basée sur des témoignages contradictoires fluctuants et versatiles:

Attendu que le mémorant reproche à l'arrêt entrepris d'avoir pris pour fondée des témoignages contradictoires, fluctuants et versatiles;

Attendu que l'arrêt recherché motive: « Considérant qu'il résulte du dossier et des débats surtout de la déposition des chefs de villages Ab et Mougui et des représentants des villages de Toubalou, Toureh, Ag, Ah, Tari et Af, la preuve que les terres du terroir villageois de Temba relèvent du domaine coutumier du village de Kori que le fait pour l'appelant de soutenir qu'il a un contentieux avec les chefs des villages de Mougui et de Ab, raison pour laquelle ceux-ci ont témoigné contre lui ne saurait suffire à écarter les différents témoignages; que pour ces motifs et ceux développés par le premier juge, il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions»;

Attendu que l'appréciation par les juges du fond du dégré de crédibilité des témoignages est souveraine dès lors qu'elle ne repose sur aucun motif de droit (civ. 7 décembre 1955, Bull civ. II, N°562); qu'en présence de témoignages contradictoires, les juges du fond choisissent librement ceux qui leur paraissent les plus convaincants (civ. 17-12-1964, bull. civ. II, n°826) et peuvent retenir comme déterminant, soit un témoignage unique, soit un témoignage que les premiers juges avaient écarté; que le fait pour l'arrêt entrepris d'avoir bâti sa motivation sur les témoignages sus-indiqués parmi tant d'autres ne saurait constituer un moyen de cassation car procédant de l'appréciation de faits qui échappe au contrôle de la Cour Suprême; qu'il s'ensuit que cette branche du moyen ne peut prospérer et doit être écartée;
b) Deuxième branche tirée du défaut de réponse aux conclusions:

Attendu que le mémorant reproche à l'arrêt querellé de n'avoir donné aucune réponse à ses concluions en cause d'appel tendant à soumettre les parties au serment décisoire suivant les rites traditionnels à elles communs;

Attendu que le 25 septembre 2002, le mémorant, sous la plume de son conseil concluait devant la Cour d'Appel de Mopti en ces termes « qu'il est tellement certain de sa qualité de propriétaire qu'il a sollicité vainement du juge leur soumission lui et son protagoniste à la prestation de serment suivant les rites traditionnels communs aux deux villages; qu'il réitère cette demande au besoin de la Cour d'Appel de Mopti»;

Attendu que contrairement aux assertions contenues dans le moyen soulevé aucune précision n'a été donnée quant à la nature du serment à prêter qui peut être décisoire ou supplétoire; que le serment est décisoire quand il est déféré par l'une des parties à l'autre pour en faire dépendre la solution du procès; il est supplétoire quand il est déféré d'office par le juge à l'une des parties ou pour en faire dépendre la décision de la cause ou seulement pour déterminer le montant de la condamnation;

Attendu que la partie qui défère le serment doit énoncer les faits sur lesquels elle le défère et que le juge l'ordonne s'il est admissible et retient les faits pertinents sur lesquels il sera reçu;

Attendu que dans le cas d'espèce, aucune énonciation des faits ou de formule n'a été proposée aux juges du fond par le mémorant qui se borne à demander de les soumettre lui et son protagoniste au serment suivant les rites traditionnels communs aux deux villages;
Attendu que dans le Mali en général et dans le pays Ad, en particulier, les rites traditionnels sont nombreux et différents d'un village à l'autre; qu'ils ne sont pas codifiés et que les juges du fond sont censés les ignorer;
Attendu que si les juges du fond ont l'obligation de répondre aux conclusions motivées, claires et précises des parties, ils n'ont pas à répondre à des concluions trop vagues et imprécises (soc. 09 mai 1968, Bull. civ, n°234) où à une simple allusion (civ. 30 janvier 1962, ibid I, n°68); qu'en ne conférant pas à ses conclusions la précision et la clarté requises, le mémorant ne met pas les juges du fond dans l'obligation d'y répondre; d'où cette branche du moyen ne peut être accueillie;

Deuxième moyen tiré de la violation de la loi:

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt déféré d'avoir dénaturé l'objet du litige en fondant sa solution sur un motif unique donné aux témoins des qualités non fondées et violé l'article 5 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale notamment en ne réservant aucune suite au procès - verbal d'Huissier produit par le mémorant;
Attendu que l'arrêt entrepris motivé « considérant qu'il résulte du dossier et des débats surtout de la déposition des chefs des villages de Temba et de Mougui et des représentants des villages de Toubalou, Toureh, Ag, Ah, Tari et Af, la preuve que les terres du terroir villages de Temba relèvent du domaine coutumier du village de Kori»;
Attendu que les juges du fond choisissent librement les témoignages qui leur paraissent les plus convaincants et sont souverains pour apprécier la force probante des preuves et qu'ils sont même dispensés de préciser les raisons pour lesquelles il retiennent ou écartent un élément de preuve; qu'il ne saurait dès lors être reproché à l'arrêt déféré d'avoir donné des qualités non fondées à des témoins dans la mesure où ceux - ci ne sont pas frappés d'incapacité de témoigner en justice et qu'ils ont été entendus sous la foi du serment;
Attendu que par ailleurs il est fait grief à l'arrêt querellé d'avoir violé l'article 5 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale notamment en ne réservant aucune suite au procès verbal d'Huissier produit par le mémorant;
Attendu que l'article 5 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale dispose: « le juge doit se prononcer surtout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé»;
Attendu que la loi reconnaît aux juges du fond un pouvoir souverain pour apprécier la force probante des constats d'Huissier lorsque celui - ci agit comme mandataire de l'une des parties ou lorsqu'il a été commis par décision de justice; que les juges du fond n'ont même pas à s'expliquer dans leur décision sur les énonciations d'un constat dressé unilatéralement à la requête d'une des parties (civ. 3 juillet 1961, Bull civ I; n°362);
Attendu que le constat d'Huissier dont se prévaut le mémorant a été dressé à sa seule diligence; qu'il ne saurait être reproché à l'arrêt déféré de n'y avoir pas répondu; d'où ce moyen ne peut prospérer et doit être écarté»;
Attendu qu'il échet de rejeter le pourvoi;

PAR CES MOTIFS;

EN LA FORME: Reçoit le pourvoi;
AU FOND: Le déclare mal fondé; Le rejette;
Confisque l'amende de consignation;
Met les dépens à la charge du demandeur;

Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus./.

ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.
Suivent les signatures
Signé illisible
Enregistré à Bamako le 30 Octobre 2002
Vol 05 Fol 111 N°01 bordereau N°2458;
Reçu Gratis;
L'inspecteur de l'enregistrement
Signé illisible

«AU NOM DU PEUPLE DU MALI»

En conséquence, la République du mali mande et ordonne à tous Agents Administratifs sur ce requis de mettre à exécution ledit arrêt au procureur de la République et au Procureur Général près la Cour d'Appel et les Tribunaux de Première Instance d'y tenir la main, à tous Commandants et Officiers de la force Publique de prêter main forte lorsqu'ils en seront légalement requis.
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé, scellé et délivré par nous Boubou BOCOUM Greffier en Chef près la Cour Suprême pour servir de première Grosse;

Bamako, le 20 octobre 2004

LE GREFFIER EN CHEF


Synthèse
Formation : Section judiciaire
Numéro d'arrêt : 88
Date de la décision : 28/06/2004
2e chambre civile

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2004-06-28;88 ?
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